Avec l’arrivée des véhicules SCORPION, le besoin en carburant des armées va augmenter significativement

Avec l’arrivée des véhicules SCORPION, le besoin en carburant des armées va augmenter significativement

 

Photo : Plein des véhicules pendant un raid blindé dans la Bande sahélo-saharienne (c) EMA

 

Le Véhicules de l’avant blindé [VAB], actuellement en service dans l’armée de Terre, est doté d’un moteur Diesel de 6 cylindres en ligne développant une puissance de 220 ch, ce qui permet de faire rouler ses 13 tonnes à la vitesse de 90 km/h. Avec un réservoir de 310 litres de gazole, son autonomie est d’environ 1.000 km.

Le Griffon, développé dans le cadre du programme SCORPION pour lui succéder, sera beaucoup plus lourd, avec une masse au combat de 25 tonnes. Ce qui suppose une motorisation plus musclée. D’où le choix d’un moteur diesel Renault-Volvo d’une puissance de 400 ch, consommant du carburant à la norme européenne antipollution Euro-3, couplé avec une transmission automatique, une suspension indépendante. Son autonomie, selon les chiffres disponibles, devrait être de 800 km.

Ce sera la même chose pour le Jaguar, appelé à remplacer l’AMX-10RC, le premier, doté d’un moteur diesel Volvo MD11 à 6 cylindres en ligne, devrait présenter une puissance massique 20 ch/t, contre 16,67 ch/tonne pour le second.

Et cela ne sera pas sans conséquences pour le Service des essences des Armées [SEA], comme l’a souligné son directeur, l’ingénieur général de 1ère classe Jean-Charles Ferré, lors d’une audition à l’Assemblée nationale.

« Les nouveaux matériels, notamment Scorpion, vont consommer beaucoup plus que nos anciens véhicules de l’avant blindés, sans climatisation, plus légers et plus rustiques. […] Ils sont plus lourds et nécessitent une logistique beaucoup plus importante », a commencé par souligner l’ingénieur général Ferré. De même, a-t-il fait remarquer, « lorsqu’on passe d’un avion de combat à un réacteur à un avion de combat à deux réacteurs, on augmente nécessairement la consommation de carburant. »

Aussi, a prévenu le directeur du SEA, « toutes ces évolutions nous conduisent à prévoir, pour les années à venir, une augmentation de l’ordre de 20 % des consommations, qui passeront d’environ 800.000 à un million de mètres cubes par an. »

Et de préciser : « Cette augmentation s’accompagnera de celle des taxes. Je rappelle que le SEA, comme toute organisation, paie la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et la TVA sur les produits pétroliers. » Ces dernières « s’appliquent sur le litre de gazole payé par un Français et sur le litre de gazole payé par le ministère des Armées. Il n’y a aucune différence », a-t-il insisté.

Par ailleurs, l’ingénieur général Ferré a aussi insisté sur un autre aspect que devra prendre en compte la « transition énergétique » pour répondre aux besoins des armées, dont « l’obsession est de pouvoir être mobiles sur l’ensemble des théâtres sur lesquels elles se déplacent. »

Dans le cadre des opérations extérieures, le SEA délivre plus de 120.000 mètres cubes de carburants aux forces engagées, « ce qui correspond à une livraison de plus de 260 tonnes quotidiennement sur l’ensemble des théâtres d’opérations », a indiqué l’ingénieur général Ferré.

Or, « les moteurs les plus récents de nos véhicules sont des moteurs Euro 6, dont les limitations en termes de qualité produit sont extrêmement drastiques. Le carburant avec lequel ils fonctionnent ne doit pas aller au-delà de quelques particules par million (ppm) de soufre, au risque de détruire la chaîne d’échappement », a expliqué le directeur du SEA. Et cela peut poser des problèmes, comme en Afrique, où « le gazole que l’on trouve dans les raffineries contient 5 000 ppm de soufre », ce qui fait qu’il « est donc inutilisable dans les moteurs Euro 6, sauf à provoquer immédiatement une panne. »

Cette question ne se pose pas pour le carburéacteur, qui bénéficie d’une norme internationale. À ce sujet, a indiqué l’ingénieur général Ferré, « les armées sont en mesure d’utiliser le carburéacteur à la place du gazole dans les véhicules terrestres », en y ajoutant un « additif particulier, qui est un améliorant en termes de lubrification et d’indice de cétane. »

« Cette possibilité simplifie considérablement la logistique pétrolière en évitant deux chaînes d’approvisionnement séparées. Nous pouvons ainsi utiliser un seul carburant pour tout ce qui roule, tout ce qui bouge et tout ce qui vole [à l’exception des navires, ndlr] », a continué le patron du SEA.

Et cela a un avantage : « Les taxes sur le carburéacteur sont beaucoup plus légères, puisque la TICPE ne s’applique pas. Le prix du carburéacteur est aujourd’hui autour de 60 centimes d’euro le litre alors qu’au mois d’octobre, celui du gazole délivré par le SEA était de 1,44 euro. Les prix sont mensuels et n’évoluent pas aussi vite que les prix à la pompe », a-t-il dit.