Comment Nexter compte remporter la bataille du MCO

Comment Nexter compte remporter la bataille du MCO


 

Activités de maintenance réalisées sur un char Leclerc, au sein des ateliers de Nexter, dans le respect des mesures sanitaires en vigueur (Crédits: Nexter)

Activités de maintenance réalisées sur un char Leclerc, au sein des ateliers de Nexter, dans le respect des mesures sanitaires en vigueur (Crédits: Nexter)


Élevé au rang de priorité absolue dans les premiers jours de la crise sanitaire, le soutien des matériels des Armées aura pu se maintenir sans discontinuer avec l’aide des équipes de Nexter. Un effort inédit rendu possible par la conjonction de compétences acquises de longue date et d’une évolution dans la réalisation des opérations de maintenance. Retour en détails sur la gestion du présent et la préparation de l’avenir avec Lilian Brayle, le « Monsieur MCO » du groupe versaillais. Diplômé de l’INSA de Lyon, celui-ci a fait ses armes au sein de Safran Helicopters Engines (ex-Turbomeca) et d’Airbus avant de prendre les rênes de la Direction des Services Clients (DSC) en juillet 2019.

 

Que représente l’activité de soutien au sein du groupe Nexter et comment s’opère le transfert de charge progressif entre les Armées et l’industriel ?

 

Le maintien en condition opérationnelle (MCO) n’est pas un sujet nouveau, qui serait abordé ce parce que c’est la tendance du moment. C’est un pilier au cœur de l’activité de Nexter depuis très longtemps, puisque nous concevons, produisons et soutenons des matériels et des systèmes dont la durée de vie est longue et qui comportent un niveau de complexité technologique important. Il appartient depuis longtemps à Nexter d’assurer le soutien opérationnel de ses produits pendant des décennies. Même si les périodes de développement peuvent paraître assez longues, c’est finalement très court par rapport au temps durant lequel Nexter doit assurer le MCO. Un MCO qui est donc dès l’origine dans l’ADN de la société et représente aujourd’hui environ 475 salariés pour la seule DSC. Cette activité représente environ 30% du chiffre d’affaires annuel du groupe. Une part qui est quelque peu diluée ces dernières années grâce aux contrats export majeurs gagnés par Nexter permettant une forte croissance du chiffre d’affaires du groupe.

 

Quand on regarde l’historique, on voit bien, notamment avec les grandes innovations dans le domaine du soutien forfaitaire, que Nexter est un acteur innovant. Il suffit de jeter un coup d’œil aux contrats liant Nexter et la SIMMT depuis une dizaine d’années pour se rendre compte du niveau de confiance élevé accordé à nos services. Pourquoi ce sujet devient-il de plus en plus d’actualité ? Cela est en grande partie dû au plan MCO-Terre 2025 lancé par le ministère des Armées et qui implique des partenariats plus importants entre l’armée de Terre et l’industrie. Cette politique se traduit par un transfert d’une partie des activités de maintenance industrielle depuis les forces, les régiments, la SIMMT ou encore le SMITer vers l’industrie. Pour Nexter, il s’agit d’un mouvement déjà engagé depuis longtemps, mais qui devient ici plus visible, plus médiatique.

 

L’un des temps forts a été la signature, à la fin de l’année 2019, de la charte de partenariat pour le MCO terrestre, qui entérine ces différents points et formalise l’état d’esprit nécessaire pour assurer cette symbiose entre l’État et l’industrie. C’est d’autant plus important que la mission de l’industrie se renforce pour assurer la continuité de l’activité opérationnelle des forces armées, dont dépend leur capacité d’intervention en OPEX. La notion de délégation, de confiance de l’État envers l’industrie, n’implique donc pas seulement des privilèges mais surtout des devoirs sur la valeur ajoutée, la transparence et la résilience dont on parle beaucoup ces dernières semaines.

 

À l’avenir, Nexter s’inscrit bien au-delà de la continuité puisque nous privilégions un très haut degré d’innovation, y compris dans le domaine du MCO. Celui-ci couvre en réalité des domaines d’activité très larges, ne se limitant pas seulement à la maintenance d’un véhicule. Désormais, les enjeux sont de plus en plus liés à l’anticipation et à la proactivité, c’est à dire utiliser tout notre savoir-faire et l’expérience acquise mais aussi des technologies nouvelles pour arriver à modéliser et anticiper les opérations de maintenance et celles impliquant la supply chain.

 

Le MCO ne s’arrêtant pas aux frontières nationales, des réflexions se poursuivent aussi sur la conduite des activités de soutien industriel au plus près des forces engagées en opération extérieure. Le message est, dans ce cas, toujours très clair : à chacun son métier. Pour un industriel, déployer des services à proximité du théâtre d’emploi de ses matériels n’est pas problématique jusqu’à un certain stade. Lorsque ce dernier est franchi, le militaire prend la place de l’industriel. Accompagner le soutien dans des zones d’intervention relève d’un autre métier. Nous déployons aujourd’hui des alternatives, des outils déportés capables de suppléer à l’envoi de personnels Nexter sur les terrains les plus à risques. Il s’agit de leviers tels que la télétransmission des données ou le télédiagnostic, qui existent déjà et qui permettent d’amener un niveau d’expertise très supérieur, au plus près des opérations. Sur le terrain, cela se manifeste également par l’apport de l’impression 3D. Nexter a ainsi participé en 2019 à une expérimentation menée par l’armée de Terre en mettant à disposition les fichiers nécessaires qui permettent de réaliser des pièces de certains matériels dans le cadre d’une opération extérieure. C’est une expérience qui se poursuit actuellement.

 

Comment se traduit votre action courante sur le terrain dans ce contexte particulier de crise sanitaire ?

 

Très concrètement, il ne s’agit pas d’une rupture pour Nexter car nous sommes restés très engagés dans tous les domaines du MCO auprès du SMITer, de la SIMMT et des différents régiments. Nous avons des projets de collaboration qui continuent sur l’organisation des transferts, mais aussi sur les problématiques de supply chain et, plus globalement, sur la disponibilité technique des matériels. Grâce au partenariat établi, nous sommes en train d’aller bien plus loin que de la « simple » maintenance. Tout dépend aussi de la maturité de la relation entre chaque industriel et les services de l’État. Pour Nexter, une relation très mature est déjà en place, de même qu’une activité industrielle historique. Nous nous dirigeons maintenant vers des partenariats visant une valeur ajoutée beaucoup plus complexe à obtenir, qui passera par l’anticipation susceptible d’apporter de la flexibilité et de valoriser davantage la disponibilité. S’y ajoute un travail de transparence de plus en plus exigeant pour permettre, en partageant toutes nos informations, de déterminer quels sont les leviers susceptibles d’aider à réaliser des gains de performance technique et économique. Nous communiquons beaucoup de RETEX concernant des pannes et des difficultés d’approvisionnement, de manière à pouvoir anticiper des décisions au meilleur prix.

 

Vous revenez plusieurs fois sur la notion de maintenance prédictive, un terme qui revient régulièrement sur le devant de la scène. Quelles solutions techniques Nexter développe-t-il à ce sujet ?

 

C’est effectivement un sujet dont on parle beaucoup, et depuis déjà un moment. Derrière le discours, nous constatons assez peu de réalisations concrètes en général. Là-dessus, Nexter fait des choses qui, à mon sens, sont très pragmatiques. Pour être précis, nous avons engagé il y a deux ans avec la SIMMT un projet baptisé ERMES qui consiste à équiper les véhicules blindés VBCI de boîtiers permettant le recueil de données qui sont retraitées a posteriori pour être capable, en fonction du RETEX, de travailler sur un plan de maintenance préventive. Donc, de comprendre l’impact de l’utilisation du véhicule sur sa fiabilité, par exemple. Cette logique s’inscrit à la fois au niveau du véhicule et au niveau d’un parc de véhicules. C’est à dire qu’au-delà de l’optimisation de la maintenance d’un véhicule, nous sommes aussi capables de gérer les opérations du parc. En fonction de la mission, on peut alors déterminer quels sont les véhicules les plus aptes à y participer. On franchit dès lors une étape supplémentaire en participant à l’optimisation de la mission.

 

Derrière ce projet ERMES conduit par Nexter, l’État poursuit un projet d’innovation ARTEMIS (Architecture de traitement et d’exploitation massive de l’information multi-source) impliquant d’autres industriels. C’est un projet pour lequel nous avons mis à disposition des jeux de données collectées dans le cadre d’ERMES et qui sont aujourd’hui en cours d’exploitation. Étendre notre projet à d’autres flottes de véhicules conçus par Nexter nous tient à cœur, mais ce n’est pas une décision qui revient à l’industriel seul. Le matériel ne nous appartient pas, nous ne sommes donc pas libres de l’immobiliser en partie pour une expérimentation. Toujours est-il qu’ERMES est parfaitement extrapolable sur d’autres véhicules actuels et futurs. Notre souhait est que la prise de maturité de ce système se fasse en coordination avec la DGA et la SIMMT pour pouvoir démontrer tout l’avantage de disposer d’un tel atout.

 

Continuité du MCO des moteurs d'engins blindés en contexte de crise Covid-19 (Crédits: Nexter)

Continuité du MCO des moteurs d’engins blindés en contexte de crise Covid-19 (Crédits: Nexter)


Ces nouvelles solutions innovantes ont-elles été d’emblée envisagées pour la maintenance des véhicules Scorpion ?

 

Les véhicules Scorpion ne sont pas nativement dotés d’un système tel que celui conçu dans le cadre du projet ERMES. Ces véhicules de dernière génération, le Jaguar en particulier, sont néanmoins capables de collecter une grande quantité de données. Celles-ci forment une base solide sur laquelle il sera aisé de venir connecter un système de maintenance prédictive dédié. La difficulté, en réalité, n’est pas de collecter les données mais plutôt de déterminer quelles sont les données pertinentes.

 

La multiplication exponentielle des données nécessite donc des compétences nouvelles au sein des équipes Nexter, notamment en big data…

 

Absolument, c’est une évolution entamée il y a plusieurs années. Quand on parle de MCO, on pense directement à la Direction des Services Clients puisque nous sommes en première ligne. Ce qu’il faut savoir, c’est que pour réaliser nos missions, nous avons besoin que les autres directions  du groupe Nexter soient aussi présentes sur cet axe stratégique. Toute avancée dans le domaine du MCO impactera notre bureau d’études, les fonctions programmes, les achats, etc. afin d’agir en cohérence auprès du client.

 

Reste-t-il des marchés de MCO à décrocher en France, notamment en rapport avec les flottes Scorpion ?

 

Rien n’est jamais acquis et aujourd’hui, même si Nexter bénéficie de contrats solides assurés par un parc important, l’état d’esprit reste de continuer à prouver notre valeur ajoutée pour s’assurer de la pérennité de cette activité. Il faut constamment remettre en question la performance vis-à-vis du client, c’est un message que nous transmettons au quotidien à nos collaborateurs et à nos partenaires. Les contrats initiaux dans le cadre de Scorpion, qui ont été conçus avec la DGA, prévoient une part de MCO. Le principe du soutien forfaitaire est donc déjà d’actualité. Ce qui n’est pas encore défini dans ces contrats, c’est plutôt l’activité dite de maintenance industrielle, qui recouvre cette fameuse répartition des activités industrielles entre l’État et l’industriel. Le contrat actuel permet de fournir un soutien qui perdurera pendant quelques années, l’heure n’est donc pas à l’urgence.

 

Il faut néanmoins rester pragmatique et  avoir à l’esprit que, lorsque l’armée de Terre voudra, par exemple, déployer des matériels en opération extérieure, il faudra prévoir de possibles opérations de régénération au-delà de la maintenance calendaire régulière. Ce premier déploiement représente donc l’horizon autour duquel un concept industriel devra être mis en place par l’État en collaboration avec l’industrie. S’il détient tous les contrats, le GME Scorpion n’est pas pour autant une entité opérationnelle. Chaque partenaire hérite donc d’une tâche très claire. Dans la pratique, aucun des trois partenaires qui composent ce GME ne peut réaliser un MCO efficient sans l’assistance des deux autres. Le modèle dans lequel cette relation en matière de soutien se fera reste à définir. D’autres programmes identiques ont déjà été établis avec succès, tel que le VBCI issu d’un GME Arquus-Nexter et pour lequel Nexter assure la maîtrise d’œuvre de la totalité du soutien. Nous travaillons cependant tout naturellement avec Arquus, qui fournit l’assistance technique et les matériels nécessaires.

 

La question du soutien se posera d’ici peu en Belgique pour les matériels acquis au travers du partenariat CaMo, c’est un marché pour lequel Nexter doit se positionner auprès d’acteurs industriels belges ?

 

Contrairement au programme Scorpion, Nexter est le maître d’œuvre unique du partenariat CaMo. La légitimité du groupe est donc différente vis-à-vis du client belge mais le partenariat industriel établi dans le cadre du GME Scorpion reste la base sur laquelle ce MCO viendra s’établir.

 

Des contacts préliminaires ont été établis avec l’industrie belge, mais aucun modèle n’a été défini pour l’instant. Pour livrer une solution de MCO efficace et pertinente dans le cadre de CaMo, il faudra deux choses : d’une part de fortes synergies avec le programme France de manière à optimiser les coûts à chaque fois que cela est possible et d’autre part, il faut une structure de service de proximité pour avoir un service efficace et pertinent tant en France qu’en Belgique. Il faudra donc créer des synergies grâce, par exemple, au partage d’une partie infrastructures et de l’agilité au travers d’une composante locale. Dans ce cadre-là, nous sommes naturellement en quête d’un partenaire local en Belgique pour nous aider à gérer cette mission de proximité.

 

L’épidémie de Covid-19 n’est pas encore dernière nous, quelles sont les activités de soutien maintenues dès les premiers jours de la crise, selon quelles priorités et avec quel dispositif de protection ?

 

C’est effectivement une situation inédite. Nous travaillons beaucoup à l’anticipation des différents scénarii de crise. Celui-ci n’était pas explicitement prévu. Cependant, nos différents plans de continuité des activités ont très bien fonctionné dès le 16 mars.

 

Globalement, Nexter a réussi à offrir un service continu et cela grâce à la mobilisation de tous les services du groupe. Tout le monde s’est mis en ordre de bataille dès le premier jour afin d’aider la DSC à remplir sa mission. Différentes cellules de crise ont été mises en place au niveau des établissements, mais aussi au niveau de la société avec un comité de décision ad-hoc. Ces décisions initiales ont été déterminantes pour s’assurer de la continuité des opérations essentielles et ceci, dans le respect de toutes les mesures sanitaires imposées au fur et à mesure du développement de la crise.

 

Sur le terrain, la première priorité fut la mise en place des mesures de protection du personnel, y compris le télétravail lorsque cela était possible. Concrètement, le travail à domicile aura concerné 100% des activités tertiaires. Pour les autres, le maintien en poste n’était possible qu’au travers de la distribution de kits de protection individuelle et de la mise en place de règles de distanciation physique. Cela passe par ailleurs par la nécessaire réorganisation de tous les postes de travail et par de nouveaux roulements d’équipe pour des activités de type plateforme logistique, par exemple. C’est un dispositif qui s’est avéré nécessaire afin de disposer d’un personnel de réserve au cas où la contamination touche l’une des équipes.

 

Protéger nos employés fut et reste un défi permanent, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement en équipements de protection qui, comme vous le savez, est très problématique. Dès le début de la crise, nous nous sommes, comme tous les industriels, lancés à la recherche de fournisseurs avant de passer des commandes massives de masques de manière à pouvoir subvenir durablement aux besoins. Le démarrage aura été compliqué, en raison de la difficulté de disposer d’un calendrier fiable, les quantités requises n’étant pas disponibles du jour au lendemain. Aujourd’hui, nous avons identifié un flux nécessaire et suffisant à la reprise de notre activité qui s’améliore chaque jour. Ce qui était considéré comme un risque majeur dans les premiers jours de la crise est devenu quelque chose que nous gérons avec attention. La pression baisse sur le sujet et, après avoir vécu une phase de distribution au compte-gouttes, nous commençons à voir arriver des quantités importantes de masques. Pour pallier ces difficultés, des échanges eu lieu au niveau de l’État et des différents groupements industriels comme le GICAT pour permettre à chacun de continuer à travailler.

 

Au-delà des mesures de protection des personnels, il a fallu déployer en même temps un éventail de moyens de sécurité informatique pour parer aux risques éventuels d’attaques cyber liés au déploiement massif du télétravail. Cet élément a finalement très peu ralenti les opérations puisque nous avons réussi à effectuer l’ensemble des missions. Au sein de notre centre opérationnel de Roanne par exemple, que l’on appelle le COSS et où arrive l’ensemble des demandes du client, nous avons mis en place un dispositif qui consiste à placer 75% des équipes en télétravail et à en conserver 25% sur site sur la base d’un roulement. Grâce à cette organisation, nous avons pu traiter 100% des demandes. Cette continuité concerne également la question de l’envoi des pièces dont l’activité n’a été suspendue que le temps de mettre en place les mesures de protection sanitaire et de réaménager les postes de travail. On peut également relever les difficultés que rencontrent nos collaborateurs pour se loger lorsqu’ils partent en déplacement dans les unités.

 

Tout cela concerne l’activité interne de l’entreprise, mais il a fallu aussi communiquer de manière proactive avec nos clients, à commencer par la SIMMT, et mettre en place un échange permanent pour s’assurer de répondre aux priorités.  Nous avons mis en place un dispositif miroir avec notre direction des achats pour être capables de partager la même information et conserver la maîtrise de notre chaîne d’approvisionnement. Enfin, des points de situation sont effectués régulièrement avec nos clients et nos fournisseurs pour les rassurer sur les mesures sanitaires appliquées par le groupe et pour leur donner un état des lieux de nos capacités logistiques.

 

Poursuite des activités de supply chain grâce à la mise en place des mesures barrières sur le site de Roanne (Crédits: Nexter)

Poursuite des activités de supply chain grâce à la mise en place des mesures barrières sur le site de Roanne (Crédits: Nexter)


Avec des difficultés vécues auprès de certains fournisseurs ?

 

Le flux de communication avec nos fournisseurs est une chose, l’apport continu en pièces en est une autre. L’avantage de notre dispositif est qu’il nous a permis de constater immédiatement et en temps réel quelle était la partie de la supply chain qui continuait à fonctionner, celle connaissant un ralentissement et quelles étaient les sociétés contraintes à l’arrêt temporaire ou prolongé, et, en conséquence, à quelle vitesse l’activité pouvait reprendre. En cas d’activité réduite, nous avons communiqué rapidement sur les priorités de nos clients de manière à leur permettre de concentrer leurs efforts sur les segments à forte valeur ajoutée. Nous avons eu des fournisseurs forcés de fermer temporairement et de chercher des solutions alternatives pour minimiser l’impact sur le client. Tout cela, bien entendu, en fonction des stocks disponibles. Les flux de la supply chain dans l’industrie de défense terrestre ne sont absolument pas tendus comme nous pourrions le voir dans l’industrie automobile par exemple. Il existe des stocks tampons qui permettent de se maintenir, mais pour une durée limitée. Il est inenvisageable d’espérer un niveau de service optimal sans disposer d’une supply chain en ordre de marche. Aujourd’hui, de gros efforts sont consentis et la chaîne d’approvisionnement se remet au travail. Nexter a pu assurer une bonne qualité de service malgré une baisse sensible de la capacité de production. C’est essentiel désormais d’accompagner la reprise du flux chez de nos sous-traitants. 

 

Hormis le cas particulier de la France, comment s’est organisé le soutien des clients exports ?

 

Effectivement, cette crise est à voir dans sa globalité. Les principes appliqués à la France ont donc été reproduits avec nos clients étrangers, c’est à dire un contact permanent avec les clients et fournisseurs étrangers et la continuité des opérations en suivant les règles locales. La complexité supplémentaire a été de prendre en compte des mesures différentes d’un pays à l’autre. L’appui de nos structures de soutien locales aura été primordial pour la prise en compte de mesures parfois extrêmement sévères par rapport à ce que nous avons connu en France.

 

Avec pour résultat un service assuré sans la moindre interruption depuis le début de la crise…

 

De fait, l’activité de soutien n’a souffert aucun jour de rupture. Je pense que cela représente une performance qui a été extrêmement visible et reconnue. En témoignent les messages d’encouragement de la ministre des Armées. Cela n’a été rendu possible que grâce à un engagement permanent de l’ensemble des personnels de Nexter. Dans le cadre de la charte de partenariat et du plan MCO-T 2025, Nexter a vraiment démontré sa capacité à être un partenaire fiable. Au tout début de cette crise,  la direction de la SIMMT a convoqué une conférence téléphonique de crise avec les principaux partenaires du MCO-T. Elle nous a rappelé que « jusqu’à présent, nous  étions dans la prévision et l’intention, mais qu’aujourd’hui c’était  l’heure de vérité.  Dans des moments comme celui-ci,  les armées voient les efforts accomplis et réalise si oui ou non la confiance est méritée ». Je pense que, en ce qui conerne Nexter, nous avons été au rendez-vous.

 

La France est officiellement entrée en déconfinement progressif le 11 mai, quelles sont les adaptations envisagées pour instaurer une nouvelle normalité au sein du groupe Nexter ?

 

Nous ne relâchons pas notre vigilance. Il n’est surtout pas envisagé de revenir à la normale dès maintenant. Pour nous, la protection de nos personnels est la priorité et le strict respect des règles nationales et internes restera de rigueur. La politique reste appliquée uniformément à l’échelle de l’entreprise, et c’est à cette échelle que nous évaluerons le moment venu un possible retour progressif à la normalité.

 

Dans la prochaine étape, il nous faudra gérer le retour au travail, lorsque c’est possible, de nos collaborateurs. Avec pour première priorité l’assurance de conditions sanitaires optimales pour tous nos employés. Il faudra ensuite revenir à un modus operandi capable de restaurer le niveau d’efficacité industrielle d’avant-crise, un niveau qui a forcément été affecté. Cette démarche  a déjà  commencé et se fera de manière progressive : elle prendra  des semaines, voire des mois.