La gestion de crise à l’aune des sciences cognitives : quelques pistes pour les opérationnels

La gestion de crise à l’aune des sciences cognitives : quelques pistes pour les opérationnels

Etudes et prospectiveSciences & technologies
Saut de ligne
Saut de lignepar Didier Bazalgette (agence innovation Défense), lieutenant-colonel Marc-Olivier Boisset (29e promotion de l’École de guerre), Jean Langlois-Berthelot (enseignant à Sciences Po, chercheur associé au CDEC). –

Cet article de synthèse propose de montrer dans quelle mesure les apports des sciences cognitives sont particulièrement pertinents pour la gestion de crise. En ce sens les officiers ainsi que toute personne ayant un rôle opérationnel en matière de gestion de crise sera à même d’y trouver des pistes de réflexion et d’action.

Introduction.

Depuis longtemps, les sciences cognitives se sont penchées sur les situations de crise, car elles sont le lieu naturel des études sur les prises de décisions collectives et la façon dont « l’intelligence collective » peut ou non se montrer supérieure à « l’intelligence individuelle », comme l’expliquent John Stewart et Véronique Avelange.

La recherche en cognition sociale s’est en particulier intéressée aux productions cognitives des membres d’une même équipe qui peuvent être étudiées afin d’identifier les objets de pensée et les croyances ; c’est-à-dire, pour utiliser le vocabulaire des sciences cognitives, « les représentations individuelles et collectives ». On le comprend bien, l’enjeu consiste à déterminer comment les aptitudes sociales et humaines rendent compte du développement d’une cognition collective complexe. L’étude des interactions sociales des agents, verbales ou non verbales, permet de déterminer comment des interactions positives, négatives ou ambivalentes déterminent directement la prise de décision collective et les processus interpersonnels de construction de la confiance inter-agents, élément indispensable à la performance collective.

Dans l’étude de prise de décision collective, la crise occupe une place irremplaçable. En effet, par le caractère incertain et dynamique de la crise, les logiques d’interactions inter-agents sont cristallisées et accélérées. La crise est le laboratoire par excellence des processus sociocognitifs. Dès lors, le prisme des sciences cognitives pour analyser la crise sera pour nous un outil indispensable afin d’appréhender avec le plus de précision possible les processus décisionnels complexes. De plus, méthodologiquement, la crise elle-même comme phénomène social et cognitif constitue un objet d’étude déterminant pour mettre en valeur les avancées et les applications formelles des sciences de la cognition pour le management des organisations.

Nous avons tenté de faire des ponts entre les dernières interrogations des opérationnels sur la gestion de crise et les outils et méthodes disponibles dans le champ des sciences cognitives – envisagé de manière large.

Pour ce faire, nous nous sommes appuyés dans notre réflexion sur le modèle développé par Jens Rasmussen : le « gabarit à double échelle ».

 

  1. Le « gabarit à double échelle » de Rasmussen.

Lorsque l’on envisage les modèles de prise de décision, celui développé par Rasmussen est l’un des fondamentaux. Ce modèle formalise les différentes étapes d’un diagnostic effectué dans une situation donnée avec les divers stades de la planification et de l’action. Rasmussen ne définit pas son modèle à « double échelle » comme un « modèle » mais comme un « gabarit ». Sa double échelle de décision est envisagée comme une vision simplifiée des activités du traitement de l’information, sans a priori sur la façon dont le traitement est réalisé.

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Lire et télécharger l’étude : CDEC-pep-la-gestion-de-crise-a-l-aune-des-sciences-cognitives 20220418