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Les menaces

Lida, base avancée des forces nucléaires russes en Biélorussie

admin Informations 29 mai 202329 mai 2023Dissuasion nucléaire, Guerre, Les menaces 0 commentaire

Lida, base avancée des forces nucléaires russes en Biélorussie

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par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 29 mai 2023

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


Selon le président de Biélorussie Alexandre Loukachenko, Vladimir Poutine aurait signé, le 24 mai, le décret permettant le transfert d’armes nucléaires de la Russie vers son pays. Moscou disposerait de 300 armes nucléaires tactiques larguables par avion. Et quelques-unes seraient destinées à être déployées chez l’allié du président russe.

Ce dernier avait annoncé le 25 mars que Moscou entendait déployer des armes nucléaires « tactiques » sur le territoire biélorusse, exacerbant les craintes d’une d’escalade du conflit en Ukraine.

Le 3 avril, la Russie avait indiqué avoir commencé à former les militaires biélorusses à l’utilisation d’armes nucléaires “tactiques”. Elle avait aussi précisé que dix avions de combat biélorusses avaient déjà été équipés pour l’emport de telles armes et qu’un entrepôt spécial serait terminé d’ici au 1er juillet.

Ces appareils, des Su-25, sont déployés sur la base aérienne de Lida, à une quarantaine de kilomètres de la frontière avec la Lituanie et à 120 km de la Pologne. Une vidéo diffusée le 14 avril par le ministère biélorusse de la Défense confirmait tant le stationnement sur cette base d’un escadron de Su-25 de la 116e unité de l’aviation d’assaut, que la fin de la phase d’entraînement des pilotes.

Pendant la Guerre froide, cette base avait abrité la 49e division de la Garde équipée de missiles balistiques. Elle  disposait d’un entrepôt pour le stockage et d’une aire de tir. Même si le site a été en partie abandonné depuis 1997, c’est bien que là que les Russes pourraient construire “l’entrepôt spécial” mentionné. Une construction qui pourrait prendre du temps.

Ensuite, ce sera certainement la 12e GUMO (Glavnoye Upravleniye Ministerstvo Oborony), unité spécialisée dans le transport des munitions nucléaires, qui interviendra pour préparer l’arrivée éventuelle d’armes nucléaires tactiques.

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Vladivostok : le commencement d’une nouvelle ère dans la coopération sino-russe 

admin Informations 29 mai 202329 mai 2023Actualités internationales, Les menaces, Stratégie 0 commentaire

Vladivostok : le commencement d’une nouvelle ère dans la coopération sino-russe 

Photo : Port franc de Vladivostok. Wiki Commons

par Alex Wang – Revue Conflits – publié le 29 mai 2023

https://www.revueconflits.com/vladivostok-le-commencement-dune-nouvelle-ere-dans-la-cooperation-sino-russe/

L’ouverture de Vladivostok comme port de transit a de multiples impacts, tant économiques que géopolitiques. Elle pourrait rouvrir également, dans une certaine mesure, un dossier historique entre la Chine et la Russie.

Une nouvelle à forte portée géostratégique est passée presque inaperçue en France. Pourtant l’ouverture de Vladivostok comme port de transit pour la Chine mérite bien une analyse approfondie.

Port franc de Vladivostok

La suite naturelle d’un plan

L’Administration générale des douanes chinoise a annoncé le 4 mai sans grande fanfare que la Chine expédiera, à partir du 1er juin, des produits de base de la province de Jilin vers ses villes côtières du sud via Vladivostok.

Étant donné que ces marchandises se dirigeront vers Zhoushan et Jiaxing dans le Zhejiang, leur importation temporaire ne sera pas soumise aux tarifs russes. La Chine et la Russie bénéficieront de l’arrangement. 1

Pour certains, cette nouvelle est une surprise. En réalité, cet événement fait partie d’un plan démarré il y a déjà quelques années. Vladivostok n’est pas le seul port étranger à être utilisé comme port de transit pour le commerce intérieur en Chine. Depuis 2007, elle participe à l’opération pilote de « transport transfrontalier de marchandises nationales » avec le port de Vostochny et le port de Nakhodka. Par la suite, la Chine a également effectué des transits par le port de Rajin en Corée du Nord et le port de Zarubino en Russie. Le rôle accru joué par le port de Vladivostok en tant que plus grand port de Russie port en Extrême-Orient est un développement naturel.2

Ce petit événement est lourd de conséquences compte tenu de la place géostratégique et historique de ce port en eau profonde.

Vladivostok s’appelait Hǎishēnwǎi il y a 163 ans

Il y a 163 ans, Vladivostok s’appelait Hǎishēnwǎi. Ce port et les terres voisines appartenaient à la Chine à l’époque de la dynastie Qing. Les traités de Tianjin et de Pékin en ont fait une terre / un port russe. Ayant perdu cette sortie sur la mer du Japon, le transport des produits et des matières premières de Chine se faisait ensuite obligatoirement via la route terrestre.

Vladivostok (en russe : Владивосток [vlədʲɪvɐˈstok], littéralement « Qui domine l’Est/l’Orient ») est une ville portuaire du Sud-Est de la Russie et la capitale administrative du kraï du Primorié et du district fédéral extrême-oriental. Située à proximité des frontières avec la Chine et la Corée du Nord et baignée par la mer du Japon, Vladivostok constitue le port le plus important de la côte pacifique et de l’Extrême-Orient russe. Elle abrite notamment la majeure partie des troupes de la Flotte du Pacifique. En outre, la ville est plus proche de Séoul (744 km), Tokyo (1 067 km) ou Pékin (1 339 km) que de Moscou (6 434 km)3 .

C’est le plus grand port russe d’Extrême-Orient avec 2 300 travailleurs, 15 quais et 45 grues. Il accueille 2 000 navires par an et a traité plus de 13 millions de tonnes de fret l’année dernière4.

La signification de ce nouveau développement

La signification de ce développement est multiple, aussi bien économique que géopolitique.

L’amélioration du supply chain

L’ouverture de Vladivostok permet à la Chine d’utiliser une sortie supplémentaire sur la mer pour ses deux provinces du Nord-Est Jilin et Heilongjiang. Cette route alternative par rapport à celle vers Dalian peut contribuer à dynamiser davantage le développement économique de cette région qui est en retard comparé à d’autres régions de la Chine. Cela représente un pas en avant dans les relations de coopération économique entre la Chine et la Russie, qui s’inquiétait, dans le passé, des mouvements de la Chine dans cette région.

Le commerce bilatéral entre la Chine et la Russie s’est élevé à 73,15 milliards de dollars au cours des quatre premiers mois de 2023, en hausse de 41,3% en glissement annuel.

Jusqu’à présent, le volume de fret routier en 2023 a augmenté d’environ 1,5 fois en glissement annuel, avec plus de 75.000 véhicules passant par les points de contrôle routiers à travers la frontière sino-russe depuis le 1er janvier, selon le Service fédéral des douanes russe.

L’énorme augmentation du commerce causait de longues files de camions attendant d’entrer en Chine depuis la Russie. Ce processus d’expédition « nécessitait du temps et des dépenses supplémentaires ». Avec la possibilité de transférer des marchandises via Vladivostok, la distance de transport terrestre sera considérablement raccourcie dans les années à venir.

La distance réduite réduira à son tour les coûts pour les fabricants et les fournisseurs de produits de base du nord-est de la Chine.

Les entreprises du Jilin et du Heilongjiang n’auront pas nécessairement à utiliser le port de Dalian, qui se trouve à plus de 1 000 kilomètres de certaines villes de ces deux provinces.

En revanche, le port de Vladivostok est situé à moins de 100 kilomètres de la frontière chinoise et à environ 500 kilomètres des capitales provinciales du Jilin et du Heilongjiang, respectivement.

L’établissement du nouveau port de transit à Vladivostok servira également de catalyseur pour attirer des opportunités d’investissement et d’affaires dans le nord-est de la Chine au cours de la prochaine étape.

En ouvrant le port de Vladivostok, la Chine et la Russie peuvent collaborer davantage à la construction du port et au développement logistique, stimulant ainsi le dynamisme économique du nord-est de la Chine et la croissance de l’Extrême-Orient russe.

Le développement des nouvelles frontières russes

L’Est de la Sibérie orientale est très éloigné par rapport à Moscou (dal’nyi vostok : Orient éloigné en russe). « Cette région présente aujourd’hui pour la Russie un intérêt stratégique particulier. Ces dernières années elle s’est vidée de sa population alors qu’elle regorge de richesses naturelles, et se trouve maintenant dans une région du monde en forte croissance, avec un voisin dont le trop-plein démographique est de plus en plus attiré par le vide sibérien »5. La différence démographique de part et d’autre de la frontière est colossale : 1 habitant au km² côté russe contre 100 habitants côté chinois. Les gouvernements russes se sont penchés avec une attention toute particulière sur ce dossier, notamment Boris Eltsine et Vladimir Poutine réalisant le besoin vital de développer cette région.

L’utilisation de ce port va renforcer le flux de porte-containers entre la partie sud-est de la Chine et Vladivostok pour l’alimenter plus facilement, avec les produits dont la Russie a besoin pour les régions extrême-orientales. Cela augmentera aussi la capacité de sortie pour le flux de retour. Avec l’ouverture du port de Vladivostok, la Chine et la Russie peuvent s’engager dans une plus grande coopération dans la construction et la logistique portuaires à l’instar du port automatisé de Qingdao, renforçant encore la vitalité économique du nord-est de la Chine et le développement dans l’Extrême-Orient russe6 .

La coopération actuelle entre la Chine et la Russie en Extrême-Orient est encore sous-estimée et a un grand potentiel à libérer. À cet égard, certains obstacles spécifiques à la coopération bilatérale en matière de commerce frontalier peuvent encore être levés, tels que la faible efficacité du dédouanement de la partie russe et la mise en œuvre inadéquate des politiques de développement de l’Extrême-Orient, qui ont dans une certaine mesure eu un impact sur la volonté d’investissement des entreprises chinoises dans le passé. L’ouverture de ce port va donner un nouveau souffle au développement et au décollage économique de cette région.

Le projet de route du pôle Nord

Un autre point qui mérite d’être mentionné : compte tenu de sa position géostratégique, la Chine pourrait utiliser cette facilité à l’avenir pour jouer un certain rôle dans le projet de route du pôle Nord proposé par la Russie.

Les implications géopolitiques dans l’Asie Nord – Est

Le développement rapide de cette région va donner plus de poids et un plus fort degré d’intégration à la coopération sino-russe dans cette partie du monde et, au-delà, dans l’Eurasie comme cela a été analysé par Zbigniew Brezenski dans Le Grand Echiquier7. Cette personnalité pressentait que « Un scénario présente un grand danger potentiel : la naissance d’une grande coalition entre la Chine, la Russie et peut-être l’Iran,, coalition « anti-hégémonique » (…) Similaire par son envergure et sa portée au bloc sino-soviétique, elle serait cette fois dirigée par la Chine. Afin d’éviter cette éventualité, aujourd’hui peu probable, les Etats Unis devront déployer toute leur habilité géostratégique sur une bonne partie de l’Eurasie, et au moins, à l’Ouest, à l’Est et au sud ». Quelle perspicacité et à la fois quelle erreur de jugement sur le timing !

Dans cette logique, certains analystes s’inquiètent des conséquences géopolitiques de cette ouverture. Ils considèrent que si les forces chinoises ont accès à Vladivostok, cela élargit les options opérationnelles de l’APL (Armée populaire de libération) et donne également aux forces japonaises et sud-coréennes ainsi qu’américaines des soucis supplémentaires les obligeant à y consacrer beaucoup plus de ressources8.

En guise de conclusion : des réactions « patriotiques » à venir ?

Outre les commentaires sur les retombés économiques et géopolitiques, cette nouvelle a suscité des réactions émotionnelles parmi des internautes chinois. Certains pensent que le nouvel arrangement est un grand pas en avant pour que la Chine récupère un jour la ville, perdue il y a 163 ans. Leur regard ne s’arrêterait peut-être pas au niveau de Vladivostok, il s’aventurerait même sur l’immense étendue au-delà.

Cela provoquerait peut-être des réactions de même nature côté russe. Si mal géré, ce point délicat pourrait devenir un « casse-tête chinois ».

Bien que ce soit déjà de l’histoire ancienne, on n’est jamais sûr que, avec le décollage économique de cette région, le spectre de la République d’Extrême Orient, qui a brièvement existé entre 1920 – 19229 , ne revienne pas hanter cette terre en cours de transformation radicale.

1 Jeff Pao, China’s Jilin to ship goods via Vladivostok, Asia Times, May 17, 2023

2 Global Times, China-Russia cooperation space in Far East extends far beyond Vladivostok, May 16, 2023

3 Cf. Vladivostok, Wikipedia (https://fr.wikipedia.org/wiki/Vladivostok)

4 Cf. le site Web du port (Pixabay).

5 Héléna Perroud, Un Russe nommé Poutine, pp 116 et subséquentes, Editions du Rocher, 2018.

6 Global Times, China-Russia cooperation space in Far East extends far beyond Vladivostok, May 16, 2023

7 Zbigniew Brezenski, Le Grand Echiquier, Pages 84 et sub, Pluriel, 1997 pour la traduction française.

8 Seth Robson, Russia welcomes Chinese shipping to Far East port for first time, Stars and Stripes, May 17, 2023

9 Héléna Perroud, Un Russe nommé Poutine, pp 116 et subséquentes, Editions du Rocher, 2018.


Alex Wang
Titulaire de deux doctorats (philosophie et ingénierie) et familier des domaines clés de la NTIC, Alex Wang est ancien cadre dirigeant d’une entreprise high tech du CAC 40. Il est également un observateur attentif des évolutions géopolitiques et écologiques.
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Un porte-avions et des navires chinois ont traversé le détroit de Taïwan

admin Informations 28 mai 202328 mai 2023Actualités internationales, Les menaces 0 commentaire

Un porte-avions et des navires chinois ont traversé le détroit de Taïwan

Par l’Opinion – publié le 27 mai 2023
https://www.lopinion.fr/international/un-porte-avions-et-des-navires-chinois-ont-traverse-le-detroit-de-taiwan

Huit avions de chasse chinois auraient également franchi la ligne médiane du détroit au cours des dernières 24 heures, selon Taipei

 

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Le porte-avions chinois Shandong.
EPN/Newscom/SIPA

La tension reste latente entre Pékin et Taipei. Le porte-avions chinois Shandong et deux autres navires ont traversé, samedi 27 mai, le détroit de Taïwan, a annoncé le ministère taïwanais de la Défense. Les navires ont ensuite navigué en direction du nord, vers midi, heure locale, le long de la ligne médiane qui sépare Taïwan et la Chine continentale

Dans un communiqué, le ministère de la Défense a indiqué que l’armée taïwanaise, qui a surveillé ce déplacement de près avec ses propres navires et avions, a « réagi de manière appropriée ». Le ministère chinois de la Défense n’a pas répondu à une demande de commentaire et les forces armées du pays n’ont fait aucune mention de ce déplacement sur leurs réseaux sociaux officiels.

Manœuvres militaires. En août dernier, la Chine avait déployé un grand nombre d’avions et effectué des tirs de missiles près de Taïwan, dans ce qui constitue ses plus importantes manœuvres militaires jamais menées dans le détroit de Taïwan, après la visite de l’ancienne « speaker » démocrate Nancy Pelosi à Taipei.

Le ministère taïwanais de la Défense a également indiqué samedi que huit avions de chasse chinois avaient franchi la ligne médiane du détroit au cours des dernières 24 heures, une opération devenue régulière depuis août 2022. Taïwan revendique son indépendance face à la Chine qui considère pour sa part qu’elle fait partie de son territoire et menace de la réintégrer dans son giron par la force. Le dossier empoisonne les relations sino-américaines, alors que Washington se pose en garant de l’indépendance de Taipei et maintient une ambiguïté stratégique.

(Avec Reuters)

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Edouard Elias, photoreporter et parrain de l’expo photos sur les 40 ans du deuxième REI à Nîmes : “La Légion a aidé à ma reconstruction”

admin Informations 24 mai 202324 mai 2023Légion étrangère, Les menaces, Otages 0 commentaire

Edouard Elias, photoreporter et parrain de l’expo photos sur les 40 ans du deuxième REI à Nîmes : “La Légion a aidé à ma reconstruction”

 

Jusqu’au vendredi 2 juin, Edouard Elias entre autres, expose près d’une dizaine de clichés dans la cour de l’hôtel de ville de Nîmes. D.R. – HELENE PAMBRUN

par Camille Salvador – Midi Libre – publié le 22 mai 2023
https://www.midilibre.fr/2023/05/22/edouard-elias-photoreporter-et-parrain-de-lexpo-photos-sur-les-40-ans-du-deuxieme-rei-a-nimes-la-legion-a-aide-a-ma-reconstruction-11211590.php

Le photoreporter Édouard Elias, ex-otage en Syrie originaire du Gard,
​parcourt le monde pour témoigner par l’image des situations de crise. Né à Nîmes, celui qui a grandi à Uzès est le parrain de l’exposition sur les 40 ans du deuxième REI à Nîmes. Une exposition d’une quarantaine de clichés qui s’ouvre ce mardi 23 mai dans la cour d’honneur de l’hôtel de ville.

Edouard Elias, vous parrainez à Nîmes une exposition sur la Légion étrangère où seront exposés quelques-uns de vos clichés ? Que vont pouvoir admirer les visiteurs ?

Le 2e REI célèbre cette année ses 40 ans de présence dans la ville qui m’a vu naître. A côté du travail d’autres photographes et de l’ECPAD (Etablissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense), les visiteurs vont pouvoir découvrir près d’une dizaine de photographies issues de mon premier reportage avec la Légion étrangère.

C’était en 2014, en République Centrafricaine lors de l’opération SANGARIS et précisément aux côtés des légionnaires du 2e REI de Nîmes !

Comment s’est passée cette expérience immersive aux côtés des militaires? A-t-elle été renouvelée par la suite ?

Ce mois quasi complet passé avec les légionnaires nîmois en opération extérieure a constitué ma toute première expérience en immersion avec l’armée française. Jouissant d’une immense liberté dans mon travail (par comparaison avec les reportages que je peux réaliser dans l’armée aujourd’hui), j’y ai découvert la ”vraie” vie du soldat français en guerre : au combat et dans son quotidien, sans fard. Je n’ai donc pas hésité à les dévoiler sous tous les aspects. Parfois fatigués, usés ou même en pleurs lors de situations de très haute intensité. Avec pour seule limite, que je m’étais moi-même fixée : le respect de leur dignité d’être humain.

Concluante, cette expérience a été réitérée l’année suivante à Nîmes. Où, là aussi, durant un mois, pour le Nouvel Observateur, j’ai pu suivre les légionnaires du 2e REI cette fois-ci en entraînement, au régiment et au camp des garrigues.

Qu’avez-vous retenu de ces expériences successives en immersion dans la Légion étrangère ? 

Je suis la pire chose pour un militaire : je suis journaliste ! (rires). Et malgré ça, j’ai été intégré de suite au sein de ce corps soudé, uni et mû par des valeurs fortes dont la camaraderie. En tant qu’orphelin, cette solidarité indéfectible entre frères d’armes me touche énormément. Et ce d’autant plus que je me trouvais en immersion avec la Légion, lorsque j’ai appris l’exécution de mon ami le journaliste américain James Foley à Raqqa en Syrie par l’Etat Islamique (le 19 août 2014).

Être réconforté par des hommes qui vivent au quotidien avec le risque de mort et le deuil de leurs compagnons d’armes, a vraiment aidé à ma reconstruction. Aujourd’hui, la Légion étrangère est donc naturellement une institution à laquelle je porte à la fois beaucoup de respect et d’affection.

Comment expliquez-vous votre appétence pour la couverture des situations de crises, et plus particulièrement pour les conflits armés ?

Disons plus tôt que je souhaite être là où se passe l’histoire. Y participer en tant que témoin et observateur c’est déjà très fort ! Surtout lorsque votre métier vous permet de montrer au monde les visages – anonymes ou non – de ceux qui la construisent cette “grande” histoire.

De mi 2013 au printemps 2014, vous avez passé 10 mois en captivité à Alep après avoir été pris en otage avec votre confrère Didier François. Comment se remet-on d’une telle expérience ?

En le décidant ! Dès mon retour en France, j’ai repris mon appareil et continué à faire mon travail, notamment en allant sur les terrains de guerre. D’abord par envie, mais aussi par choix. Je ne voulais pas me dire que l’Etat islamique avait gagné et m’avait retiré cette passion immodérée que je voue à mon travail.

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Loi de programmation militaire : la « grande illusion » des 413 milliards d’euros (2/2)

admin Informations 23 mai 202323 mai 2023Budget, Les menaces, Libres-propos, LPM 0 commentaire

Loi de programmation militaire : la « grande illusion » des 413 milliards d’euros (2/2)

Le groupe Vauban livre une analyse très critique du projet de loi de programmation militaire en cours d’examen à l’Assemblée nationale. Un projet qui propose pourtant une enveloppe budgétaire de 400 milliards d’euros en faveur des armées. Dans ce second volet, le groupe Vauban décortique la mécanique financière de ce projet de loi, qui va impacter, selon lui, tout aussi bien les capacités des armées que celles des industriels. Par le groupe Vauban*.

Le groupe Vauban* – La Tribune – publié le 23 Mai 2023
 https://www.latribune.fr/opinions/loi-de-programmation-militaire-la-grande-escroquerie-2-2-963142.html

Les armées resteront échantillonnaires avec un mélange déséquilibré de matériels de nouvelle génération et de vieilles plateformes à la revalorisation lente ou réduite, sans atteindre l'épaisseur nécessaire, le tout avec des réductions temporaires de capacités et des obsolescences de plus en plus marquées dans des domaines critiques.
Les armées resteront échantillonnaires avec un mélange déséquilibré de matériels de nouvelle génération et de vieilles plateformes à la revalorisation lente ou réduite, sans atteindre l’épaisseur nécessaire, le tout avec des réductions temporaires de capacités et des obsolescences de plus en plus marquées dans des domaines critiques. (Crédits : Reuters)

 

Une analyse minutieuse démontre que non seulement le chiffre est démesurément gonflé mais qu’en plus il n’intègre pas une série de risques, qui, pris isolément, ne sont pas scandaleux en soi (on ne saurait tout prévoir) mais pris ensemble, rendent insincère cette LPM. De 413 à 75,9 milliards d’euros. Désormais appelé « l’homme qui vaut 400 milliards d’euros » – titre flagorneur de l’article d’Henri Gibier du 4 avril dans les Echos -, M. Lecornu n’est en réalité, et au final, que « l’homme qui vaut 75,9 milliards d’euros ».

  • Un « hiatus de 13,3 milliards d’euros » et des ressources extra-budgétaires optimistes

Le ministre intègre d’emblée 13 milliards d’euros de ressources extra-budgétaires sur lesquelles il estime que la moitié (5,9 milliards d’euros) est documentée et reconnue comme telle par le Haut Conseil des Finances Publiques (HCFP). Les ressources extra-budgétaires du ministère des Armées (immobilier, soulte venant d’un industriel, actes médicaux du SSA, etc) sont considérées comme « très optimistes » par les initiés. Quoiqu’il en soit, il manque de toute façon plus de 7 milliards d’euros à l’appel ; or, selon le HCFP, l’empilement des lois de programmation (militaire, intérieur, recherche, etc) imposera une réduction généralisée des autres dépenses de l’État : « l’effet conjugué de ce projet de loi de programmation militaire, de la loi de programmation de la recherche et de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur va contraindre fortement les autres dépenses du budget de l’État. Les crédits couverts par ces trois textes vont augmenter plus rapidement que le total de la dépense de l’État, ce qui impose une baisse en volume des autres dépenses pour atteindre les objectifs fixés dans le projet de loi de programmation des finances publiques » : comment espérer un effort supplémentaire de 7 milliards de la part des autres ministères et que faire si les autres dépenses de l’État augmentent de manière exponentielle sous le coup de nouvelles priorités ou de nouvelles crises sociales ou sanitaires ? [1]

Comme le dit pudiquement M. Moscovici, « il y a un hiatus de 13,3 milliards d’euros ». De 413,3 milliards d’euros, on descend déjà à 400 milliards ou à 405,9 milliards d’euros si l’on fait grâce au ministre de son optimisme sur les ressources extra-budgétaires de son ministère. Nulle surprise donc si certains amendements de l’opposition visent à remplacer les ressources extra-budgétaires par des crédits budgétaires si celles-là n’étaient pas au rendez-vous…

La descente aux enfers budgétaires n’est cependant pas terminée.

  • 300 milliards d’euros de programmes déjà engagés

Le socle des programmes et des dépenses de fonctionnement incompressibles se situe autour de 300 milliards d’euros, ce qui fait que l’effort de Défense ne porte en réalité pas sur 400 milliards d’euros mais uniquement sur 100 milliards d’euros de ressources nouvelles (ou 105,9 milliards € si l’on considère « sincères » les 5,9 milliards d’euros de ressources extra-budgétaires du ministère). Faire du neuf avec du vieux est une vieille astuce politicienne de recyclage, mais le débat eût gagné en honnêteté intellectuelle si ces données avaient été portées au public.

  • 30 milliards d’euros d’inflation, vraiment ?

Redescendue à 100 ou 105,9 milliards d’euros, la marge de manœuvre du ministère se réduit encore avec l’inflation : le ministre estime qu’elle assèchera la LPM de 30 milliards d’euros. Ce chiffre n’est nulle part documenté, comme l’a fait remarquer benoîtement M. Cambon : « De même, le rapport annexé n’apporte aucune précision quant aux effets de l’inflation, qui pourraient être de l’ordre de 30 milliards d’euros. »[2]. Loin de l’expliquer, le ministre s’est attaché à minimiser cet impact par le report de charges, la solidarité interministérielle sur le carburant, etc. Le problème est que le niveau même de l’inflation a été fixé de manière optimiste : 3% en 2024 et 1,75% à partir de 2026, soit un niveau trop optimiste par rapport aux données et projections actuelles. M. Moscovici le dira avec d’autres termes : « (…) la prévision d’inflation du Gouvernement pour 2023 est désormais légèrement optimiste. Selon le consensus des économistes du Haut Conseil, l’inflation pour 2023 devrait atteindre en effet 4,9 %, contre 4,2 % anticipés par le Gouvernement. Par ailleurs, dans son avis relatif au projet de loi de programmation des finances publiques, le Haut Conseil relevait des incertitudes à partir de 2026. Plusieurs dirigeants d’organisations internationales ont également alerté sur une résistance de l’inflation, qui doit nous faire réfléchir. Il est donc possible[3] que les prévisions à partir desquelles a été construite la loi de programmation militaire aient été sous-évaluées. ».

  • De 413,3 à 75,9 milliards d’euros seulement

Au bilan, avec le « hiatus de 13,3 milliards d’euros », le socle des programmes déjà engagés, l’optimisme sur l’inflation, la marge réelle du ministre n’est pas de 413,3, de 405,9 ou de 400 milliards d’euros, mais seulement de 75,9 milliards d’euros :

Annonce :                                                                             413,3 milliards d’euros
Projet de loi :                                                                        400 milliards d’euros
Ressources extra-budgétaires :                                          13,3 milliards d’euros
« Ressources extra-budgétaires documentées » :             5,9 milliards d’euros
Ressources non documentées :                                           7,4 milliards d’euros
Socle des programmes & dépenses incompressibles : 300 milliards d’euros
Effet de l’inflation :                                                               30 milliards d’euros

Solde net de la marge de manœuvre :                              75,9 milliards d’euros

Des paris et des impasses

Si la montagne de l’optimisme ministériel de 413,3 milliards d’euros a, au final, accouché d’une modeste souris de 75,9 milliards d’euros de marges réelles nouvelles, la LPM fait pire : elle minimise nombre de charges futures. En effet :

  • Si elle les couvre, c’est insuffisant. Ainsi en va-t-il des OPEX avec ce montant très bas de 750 millions d’euros. De deux choses l’une : ou le ministre est convaincu que la France doit affronter la haute intensité, et alors il doit provisionner des crédits pour la préparation opérationnelle de haute intensité à un niveau équivalent à Barkhane, ou alors il ne l’est pas et il minimise les provisions nécessaires. La contradiction entre la présentation d’un contexte dramatisé et la réalité des provisions d’OPEX surprend. Ainsi en va-t-il également des données macro-économiques majeures (hors inflation), comme le cours du Brent ou l’évolution $/€, post-2026 ; ainsi en va-t-il des prix de l’énergie que le ministère voit baisser après 2026… Plus grave : le taux de couverture des risques sur les « programmes à effet majeur » a été ramené de 6,4% à 3,8%…
  • Si elle ne les couvre pas, c’est inquiétant : les risques non couverts sur les programmes à effet majeur frôlent un niveau énorme (que l’on tait ici par confidentialité) comme d’ailleurs les besoins de financements de l’OTAN non programmés mais auxquels la France devra faire face comme membre. Même le soutien à l’Ukraine dont le ministre se rengorge d’avoir réussi à l’exclure de la LPM, nécessitera cependant un abondement chaque année du montant des contributions afin d’éviter un effet d’éviction sur la LPM et l’effet déjà constaté dans les pays de l’OTAN : le soutien à l’Ukraine désarme les contributeurs qui mettront des années à compenser ces cessions urgentes et désordonnées. Ce conflit étant sans fin appréciable, la spirale de la surenchère est enclenchée sans cran d’arrêt.

Le pari risqué des coopérations et des exportations. Dans la liste des paris financiers « audacieux » de cette LPM, il faut inclure les risques liés aux coopérations européennes et aux exportations. Notre groupe a souvent dénoncé, faits et chiffres à l’appui, la gabegie financière (et opérationnelle) des programmes en coopération européenne, à l’exception de quelques domaines dont la missilerie. Panacées pour l’énorme majorité des acteurs de la défense, ces coopérations sont pourtant un cauchemar financier. La LPM 2024-2030 fait le pari que les coopérations européennes ou internationales sur des programmes majeurs (que l’on ne détaillera pas ici par confidentialité) seront bel et bien réalisées. Or, le montant des risques liés à la non-réalisation de ces coopérations est extrêmement conséquent et donc potentiellement déstabilisateur pour la planification financière de ces programmes et, in fine, pour les capacités des armées. Deux capacités sont particulièrement déstabilisantes : l’Eurodrone, qui vire actuellement à la catastrophe industrielle (mais qui est accélérée !) et le MGCS, qui est encore dans les limbes, pris dans une guerre germano-germanique largement prévisible dès lors que Rheinmetall s’arrogeait le tiers du programme tout en construisant un programme concurrent (le KF-51 Panther) !

De même, le ministre s’avance énormément sur l’exportation, en listant deux produits compliqués à commercialiser sur le marché mondial : l’A400M (qui n’a que quelques clients export : Malaisie, Kazakhstan et Indonésie, à chaque fois pour un nombre d’unités très faible) et la frégate FDI (le prospect cité, bien connu des initiés, est un très gros pari compte tenu de la relation bilatérale en dents de scie et de la concurrence européenne très forte sur ce segment déjà occupé par un concurrent européen). Décaler l’acquisition de 15 A400M et faire pression sur Airbus pour qu’il trouve des clients de substitution, décaler deux FDI en espérant les vendre à un client capricieux, ce n’est pas une transformation, mais bel et bien une escroquerie, c’est-à-dire dans notre définition, une mauvaise affaire qui trahit une bonne foi.

Au bilan, les paris sont tels que les hypothèses en tout genre sont toutes de très sérieuses hypothèques : si M. Moscovici n’a pas voulu parler d’insincérité à propos de la LPM, ce gros mot est, lui, bel et bien chuchoté dans d’autres enceintes.

Le modèle d’armée de 2030…en 2035

Pompeusement baptisée loi de transformation et comparée même à l’effort gaullien de constitution de la force de frappe, cette LPM repose sur un paradoxe excellemment mis en exergue par Olivier Marleix le 5 avril dernier : « Le grand paradoxe de cette LPM est l’annonce d’un investissement record, mais de reports de livraison ou de baisses de cibles d’acquisition par rapport à la LPM 2019, malgré le retour de la guerre en Europe. Alors que la précédente LPM affichait une cible de 185 Rafale en 2020, vous fixez l’objectif à 137. De même, alors que 5 FDI étaient prévues, la LPM n’en propose plus que 3 ; et la cible de 50 avions de transport A400M a été réduite à 35. En découle le sentiment que cette LPM souffre d’arbitrages négatifs pour 2024 et 2025 – liés à l’état de nos finances publiques – alors qu’il aurait fallu concentrer les moyens pour répondre à la menace ».

Mais à part cette actualisation, le ministre assume la non-comparaison des rapports annexes des deux LPM (19-25 et 24-30) : « car j’ai souhaité que l’on raisonne, non plus en termes de commandes ou d’ambition, mais de parcs, c’est-à-dire de matériel livré. Au regard de l’effort que nous allons demander à la Nation et aux contribuables, j’estime en effet qu’il faut être précis » ; le sénateur Cédric Perrin (Sénat, 3 mai) a, heureusement, remis les pendules à l’heure par une très sèche remarque : « Quant à votre affirmation que la LPM proposée porterait sur des livraisons là où la LPM actuelle ne porterait que sur des commandes, c’est faux. C’est regrettable. On aurait par exemple aimé avoir un point de passage à 2025 pour pouvoir juger de l’avancement des programmes par rapport aux cibles figurant dans la LPM actuelle. Dans la précédente loi de programmation militaire figuraient les ambitions de livraison, mais aussi les parcs d’équipements à différentes dates ; il ne reste plus que ces derniers, tandis que les matériels diffèrent et qu’il y a parfois des regroupements, comme pour le Serval »…

Outre son imprécision, ce rapport annexé oublie nombre de programmes ; le sénateur Cédric Perrin les a listés : « le VBAE, qui doit succéder au VBL, ou encore à l’engin du génie de combat. Je pense aussi au remplacement des poids lourds de l’armée de terre. La précédente LPM mentionnait un successeur pour les véhicules 4-6 tonnes, qui a ici disparu. Or la question de la logistique est fondamentale. Quant au Tigre Mark 3, il n’est pas mentionné non plus. Il est fait état de 67 hélicoptères, mais combien seront rénovés ? Quels seront les caractéristiques de ce Tigre Mk3 ou Mk2+ ? Nous aurions besoin de précisions à ce sujet, de même que sur l’armement de ce nouveau Tigre. ».

Sur la forme, donc l’opposition elle-même constate le tour de passe-passe de fond qui se dessine : la LPM n’est pas une loi de transformation, mais de stagnation où l’ensemble des armées poursuivra ses missions sur des matériels déjà anciens et fera l’impasse sur certaines capacités qui auront disparues temporairement (sous le délicieux terme de « réductions temporaires de capacités » ou RTC). Les experts de tout bord ont soigneusement listé les stagnations à venir : les 940 amendements déposés par les députés en tracent d’ailleurs largement le contour, des frégates aux chars de combat en passant par les patrouilleurs, les capacités outre-mer de débarquement, les chasseurs de mines, les hélicoptères de manœuvre et de combat, les équipements de cohérence, etc : l’article de Vincent Lamigeon dans Challenges du 10 mai (« Rafale, chars Leclerc… Les idées des députés pour améliorer la LPM ») en donne une idée assez précise.

Loin de transformer les armées, cette LPM fait glisser leur modèle 2030 à 2035, soit cinq années potentiellement perdues si la barre n’est pas redressée en 2027.

Au bilan, l’ensemble des armées y perd : la fameuse « révision de cadencement » des commandes et des livraisons est un doux euphémisme pour cacher deux réalités : renoncement et éparpillement. Renoncement à des commandes, éparpillement des investissements avec, à chaque fois des conséquences opérationnelles : les fameuses RTC. La hausse même du budget relatif aux munitions complexes ne garantit nullement que les unités enfin dotées pourront en tirer régulièrement en entraînement comme cela devrait être déjà le cas et ce qui ne l’est toujours pas si l’on en croit les remontées en provenance des armées.

Si les chefs d’état-major n’ont pas d’autre choix que d’assumer publiquement des choix qui n’étaient pas toujours les leurs à l’origine (les armes le cèdent à la toge selon l’adage romain), il revient aux acteurs parlementaires et observateurs extérieurs de le faire à leur place.

La pression sur les industriels

La dramatisation du contexte et sa théâtralisation au plus haut sommet de l’État ont donné naissance au concept incongru d’économie de guerre. Outre le fait que la France ne se trouve nullement dans les conditions d’une guerre comme en 1914 ni même à en préparer une annoncée (1939), du fait de son éloignement des conflits et de sa force de frappe voire de ses alliés, la LPM ne permet nullement d’atteindre cet objectif.

Quelle visibilité des commandes ? En ne détaillant pas l’agrégat équipement par année, contrairement à la précédente, la LPM ne garantit pas la visibilité des commandes, indispensables aux industriels : le flou n’est jamais de bon augure. Cette visibilité des commandes est pourtant LA condition essentielle pour que les industriels soient aux rendez-vous opérationnels de manière compétitive, c’est-à-dire investissent dans les stocks, les outils de production. Si l’industrie embauche actuellement, c’est moins en raison de la LPM qu’en conséquence de ses brillantes exportations…

La visibilité est également simplification : si le gouvernement veut réellement faire avancer les problèmes industriels, il devrait commencer par simplifier : alléger les exigences de SST et d’environnement, simplifier les procédures, alléger les exigences documentaires, etc. L’énorme chantier est en réalité dans la bureaucratisation des processus d’acquisition, à tous les niveaux.

Que répond la LPM face à cette exigence industrielle ? Par une insincérité politique (les hausses majeures sont prévues au-delà de l’horizon politique de ceux qui la font voter) et financière (la somme des paris macro-économiques, l’insuffisance de couverture des risques, l’impasse sur les risques prévisibles) sans s’attaquer réellement aux problèmes, identifiées pourtant depuis longtemps par l’industrie.

La conclusion s’impose d’elle-même : rien dans la LPM ne permet la création d’une économie de guerre pour un industriel sensé. La hausse de chiffres d’affaires que les sociétés nationales seront censées connaître et que le ministre a longuement listées dans son audition du 3 mai au Sénat, est ainsi pour une large part totalement virtuelle au moment où les marchés export peuvent se retourner.

Quelle visibilité du MCO ? Point important pour l’industrie comme pour les armées, l’entretien programmé des matériels (EPM) n’est, comme l’a fait remarquer judicieusement la sénatrice Michelle Gréaume, pas annualisé : « nous nous inquiétons de l’imprécision des informations qui nous sont présentées : les chiffres de progression de l’entretien programmé du matériel (EPM) sont globaux, et l’augmentation de 14 milliards d’euros qui est proposée n’est assortie d’aucune annuité. Quel en sera le rythme de réalisation ? Avec quels objectifs et quelles priorités ? Le Parlement ne devrait-il pas en être informé et en débattre ? »…(3 mai).

Les renégociations de contrats. Estimant que la LPM offre une visibilité sur les commandes futures, le ministère fait l’hypothèse interne de gains importants sur la renégociation des contrats, soit en estimant de manière très basse les coûts des futurs programmes (sans appliquer les conséquences de l’inflation), soit en économisant sur divers postes (documentation, etc). C’est une illusion que de croire que l’État peut exiger sans rien donner et en omettant chez les industriels la pression sociale sur les salaires.

Les banques, grandes absentes du débat sur l’économique de guerre. Dans le débat sur l’économie de guerre, un acteur a été très absent : les banques. M. Gomart aura été l’un des seuls à le faire remarquer dans son audition du 8 mars au Sénat : « Ma deuxième critique porte sur la notion d’ « économie de guerre ». Elle ne correspond pas à la manière dont les choses sont ressenties à la fois par les industriels et par nos concitoyens. La LPM insiste sur la nécessité de « mettre sous tension la base industrielle et technologique de défense (BITD) » pour l’encourager à produire plus et moins cher. Cette mise sous tension est à certains égards très compréhensible mais elle n’a de sens que si elle s’accompagne d’une mise sous tension du secteur bancaire censé la financer. On ne peut pas penser l’un sans l’autre. ». C’est pourtant bien ce qui est prévu.

De fait, ce sont les industriels qui feront la banque, notamment dans le cas sensible (et pour cette raison non développée ici) du porte-avions… sans avoir pleinement la certitude d’un lancement du PANG en 2028… !

Le renversement de la charge de la preuve ou l’étalement des commandes en partie justifiée par les capacités de l’industrie ! Il a été dit en audition que l’écoulement des commandes était adapté aux capacités des industriels, qui n’auraient pas pu produire plus ou plus vite : l’argument est recevable pour certaines catégories de « composants situés sur le chemin critique » (audition du général Gaudillière, 13 avril), conséquence d’un laisser-aller politique de plusieurs décennies sur ces sujets, mais est infondé pour d’autres matériels que le ministère décale alors que ne se pose ni la question de la maturité technologique, ni le débat de production des sites industriels concernés (FDI, patrouilleurs, véhicules Scorpion, revalorisation des Leclerc, Rafale…).

Au bilan, le sénateur Cédric Perrin a pleinement raison de dire que « des renoncements se traduisent par des étalements de programmes dans le temps. L’économie de guerre semble être encore davantage un concept qu’une réalité. » (3 mai).

Conclusion

Au lieu de poursuivre l’actuelle LPM jusqu’à son terme, en la corrigeant des effets des indicateurs macro-économiques, et de proposer ensuite deux lois de finances de transition (2026 et 2027), ce qui eût à la fois l’expression d’une sagesse stratégique et d’une honnêteté politique, le pouvoir a préféré lancer les travaux d’une nouvelle LPM. C’était certes son choix, mais le résultat n’est nullement convaincant tant dans les domaines doctrinaux que pratiques. Si les militaires n’ont pas pu le dire, d’emblée les groupes parlementaires, de tout bord ou presque, les observateurs attentifs des débats de défense, en ont flairé les ambiguïtés, les impasses et les risques financiers, opérationnels et industriels. Paradoxe entre affichage budgétaire et renoncements majeurs, cette loi de programmation militaire en sortira de toute façon abîmée dans l’esprit de la plupart des acteurs et observateurs.

Sur le plan stratégique d’abord, cette LPM est LA LPM de la confusion : la liste à la Prévert qu’a fournie la RNS ne forme pas une doctrine opérationnelle ni même un concept d’emploi des forces ; la LPM accentue une stratégie à base de « patchs » : le renseignement, le cyber, l’espace, les fonds sous-marins, l’Indo-Pacifique, etc, sont des domaines à la mode mais pour quel effet et pour quelle vision globale ? Comment ces domaines de lutte s’articulent-ils entre eux et avec l’élément central du système de défense national qu’est la dissuasion ? Si la LPM avait voulu faire œuvre de transformation stratégique, elle aurait eu à cœur de s’attaquer à cette articulation décisive entre dissuasion et nouveaux domaines arsenalisés. Il est dangereux d’appliquer la stratégie du « en même temps » aux armées qui ont besoin d’une hiérarchisation claire des priorités et non d’un essaimage thématique confus au gré des modes conceptuelles.

Sur le plan opérationnel, cette LPM est LA LPM de la dispersion. Faute d’avoir fixé un cap clair sur le plan doctrinal, elle crée de nouvelles branches capacitaires qui vampirisent les autres sans leur permettre pour autant de se développer vraiment. D’où cet incroyable paradoxe d’une LPM ambitieuse sur le papier mais qui accumule les renoncements et les étalements.

Sur le plan politique, cette LPM est La LPM de l’illusion. Elle crée une ambition dont le pouvoir actuel s’enorgueillit mais dont l’exécution – d’ailleurs imprécise (comme l’atteste le rapport annexé) – sera à la charge de la future majorité de 2027. L’opposition n’est pas tombée dans le piège : ses amendements visant à placer les hausses budgétaires dès 2024 et jusqu’en 2027, démontrent que la ficelle politicienne était trop grosse pour passer inaperçue.

Sur le plan budgétaire, cette LPM est également LA LPM de l’insincérité, puisqu’elle repose sur des ressources extra-budgétaires et des prévisions bien trop optimistes non seulement au vu du contexte macro-économique mais également de la situation de dérive incontrôlée des finances publiques (11,6% de dette publique avec des taux d’intérêt en hausse). Elle multiplie les paris (sur les OPEX, les renégociations de contrats, les programmes en coopération et l’exportation). La combinaison de cet optimisme immodéré et de ces risques non couverts ou insuffisamment couverts est telle que la LPM est frappée d’insincérité.

Sur le plan capacitaire, cette LPM est LA LPM de la stagnation : les armées feront du neuf avec du vieux, en traversant la décennie à venir sans le sursaut d’un réarmement énergique et d’un rééquilibrage de formats intégralement garantis mais avec de vrais déserts capacitaires. Les armées resteront échantillonnaires avec un mélange déséquilibré de matériels de nouvelle génération et de vieilles plateformes à la revalorisation lente ou réduite, sans atteindre l’épaisseur nécessaire, le tout avec des réductions temporaires de capacités et des obsolescences de plus en plus marquées dans des domaines critiques. Comme l’a si bien dit M. Marleix, « le grand paradoxe de cette LPM est l’annonce d’un investissement record, mais de reports de livraison ou de baisses de cibles d’acquisition par rapport à la LPM 2019, malgré le retour de la guerre en Europe ». Pire : la LPM aura réussi le tour de force de disperser les capacités épuisées des armées dans de nombreux domaines nouveaux largement confus.

Sur le plan industriel, enfin, cette LPM est LA LPM du miroir aux alouettes : elle enterre elle-même sa créature, l’économie de guerre, puisque la visibilité financière ne sera pas au rendez-vous compte tenu du calendrier de ses marches budgétaires.

Au bilan, si la LPM a transformé quelque chose, c’est bien l’or des intentions et des ambitions en plomb budgétaire et politique.

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[1] M. Moscovici donne un chiffre précieux : « dans la mesure où environ 20 % des dépenses de l’État sont désormais couvertes par les lois de programmation sectorielles, qui autorisent des augmentations importantes de moyens, les dépenses restantes, qui représentent 80 % des dépenses de l’État, nécessitent faire l’objet d’une maîtrise encore plus stricte pour permettre le respect de la trajectoire visée par le projet de LPFP. ». C’est nous qui soulignons.

[2] Remarques introductives de M. Cambon, Sénat, 3 mai 2023.

[3] Ce « il est donc possible » devrait être en soi une source d’inquiétude, non ?

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[*] Le groupe Vauban regroupe une vingtaine de spécialistes des questions de défense.

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Ukraine : l’affrontement à venir, un instant de vérité ?

admin Informations 20 mai 202320 mai 2023Actualités internationales, Guerre, Les menaces, Libres-propos, OTAN 0 commentaire

Ukraine : l’affrontement à venir, un instant de vérité ?

par Général (2S) François Chauvancy – Theatrum belli – publié le 20 mai 2023
https://theatrum-belli.com/ukraine-laffrontement-a-venir-un-instant-de-verite/

Avion F16

 

D’abord quelques liens permettant l’accès aux replays de mes interventions :

  • LCI Midi Week-end du dimanche 14 mai, 13h00 à 15h00 (https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-lci-midi-week-end-du-dimanche-14-mai-2023-2257116.html),
  • LCI Midi du mardi 16 mai, 14h00 à 15h00 (https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-lci-midi-du-mardi-16-mai-2023-2257326.html)
  • LCI Midi du mercredi 17 mai, 14h00 à 15h00 (https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-lci-midi-du-mercredi-17-mai-2023-2257448.html),
  • LCI Le Club du mercredi 17 mai, 15h00 à 17h00 (https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-le-club-le-chatelier-du-17-mai-2023-2257463.html)
  • LCI Le Club du vendredi 18 mai, 16h40 à 18h00 (https://www.tf1info.fr/replay-lci/video-le-club-info-du-19-mai-2023-2257667.html)

L’affrontement militaire de grande ampleur, instant de vérité, se précise en Ukraine. Le « façonnage » (« shaping ») du champ de bataille se poursuit : désinformation, opérations de déception, guerre électronique, frappes dans la profondeur par les deux belligérants, sabotages ou attaques ciblées non revendiqués en Russie, combats aussi sur le terrain pour tester le dispositif adverse, accumulations d’équipements. Le doute persiste sur l’attaque ukrainienne mais peut-on croire qu’elle n’aura pas lieu bientôt quand les conditions seront globalement favorables et avant l’automne ? Elle est nécessaire quoi qu’il en coûtera, à la fois pour des raisons géopolitiques, militaires sinon de politique intérieure ukrainienne.

En effet, le créneau pour une offensive généralisée est court et se raccourcit pour les forces ukrainiennes. Or, cette période de fin mai à juin est historiquement favorable à l’affrontement militaire. Napoléon lançait sa Grande Armée le 23 juin 1812 en franchissant le Niémen. L’opération nazie Barbarossa débutait le 22 juin 1941. La bataille de chars à Koursk, 220 km au NE de Kharkiv à laquelle s’est référée V. Poutine dans son discours du 9 mai 2023, mettait aux prises Allemands et Soviétiques du 5 juillet 1943 au 23 août 1943. Une force soviétique de 2 millions d’hommes répondait à l’offensive de 800 000 allemands, avec 3 300 chars contre 2 900, 31 400 canons contre 7 600, 3 000 avions contre 650. Cette bataille certes titanesque montre d’ailleurs en terme de préparation quelques similitudes aujourd’hui du côté russe face à l’offensive ukrainienne (Cf. https://www.histoire-pour-tous.fr/batailles/2961-la-bataille-de-koursk-juillet-aout-1943.html).

Deux facteurs priment aujourd’hui dans cet affrontement entre peut-être un million d’Ukrainiens à peut-être 300 000 Russes sur plus de 800 km de front, les conditions « météo » et le calendrier. Une offensive réussie, c’est-à-dire avec un résultat tangible sur le terrain conduisant à la défaite russe, doit pouvoir se prolonger dans le temps. Elle doit intégrer l’exploitation des succès tactiques par des forces en deuxième échelon, capables de relever celles du premier échelon, c’est-à-dire en première ligne, avec la logistique nécessaire (carburant, munitions, maintenance, service de santé…), et cela avant la mauvaise saison (Cf. Le Monde en date du 20 mai, « Comment l’Ukraine a préparé sa contre-offensive »).

Sur les moyens, le débat sur la livraison d’avions à l’Ukraine se clôt montrant une élévation inexorable du seuil d’engagement des occidentaux dans ce conflit avec le déploiement d’armements de plus en nombreux et performants. Restant dans l’attente de demandes formelles, les États-Unis autorisent la livraison des F16 des Etats européens concernés (Belgique, Pays-Bas, Danemark, Norvège), soit une estimation de 50 appareils dont l’utilité dépendra aussi du nombre de pilotes disponibles. Encore faut-il que ces avions stockés soient remis en état, que leur maintenance soit organisée, les munitions livrées, les pilotes formés. Malgré les affirmations américaines, on peut douter que même un pilote ukrainien « brillant » puisse être formé en quatre mois au lieu de 18. Il est vrai que cela dépend aussi des missions. Cependant l’appui aérien reste nécessaire pour une attaque terrestre d’envergure soit pour appuyer les blindés, soit pour interdire le ciel ukrainien aux avions russes au nombre variant entre 500 et 800. Sauf surprise, il apparaît peu vraisemblable que d’ici l’automne cette force aérienne ukrainienne soit opérationnelle. Cela conduit à deux hypothèses : la contre-offensive réussit amenant une victoire et ces avions assureront la sûreté de l’Ukraine à terme. La contre-offensive échoue et ces avions seront prêts pour la reprise des combats en 2024.

Par ailleurs, les principaux Etats susceptibles de fournir les F16 comme ceux qui vont contribuer à la formation des pilotes (France, Etats-Unis) sont membres de l’OTAN qui affirme de plus en plus clairement son engagement dans ce conflit. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a participé ce 17 mai à la première conférence conjointe des commandants de composante. Organisée au QG du Commandement allié pour les opérations de l’OTAN à Mons, elle a réuni l’ensemble des commandants subordonnés à l’OTAN et au Commandement des forces des États-Unis pour l’Europe (USEUCOM) pour un débat stratégique sur les prochaines étapes de la mise en œuvre du dispositif de dissuasion et de défense collective de l’OTAN. « Si tu veux la paix, prépare la guerre » vise au minimum à dissuader d’une manière crédible tout agresseur mais on ne peut écarter l’hypothèse d’un engagement plus agressif en Ukraine en cas d’incident militaire, aujourd’hui situation restant cependant sous contrôle. En déplacement au Portugal ce 18 mai, M. Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN, a précisé que les Alliés enverront au sommet de l’OTAN à Vilnius en juillet prochain « un signal fort de soutien à l’Ukraine par le biais d’un programme d’assistance stratégique pluriannuel permettant à l’Ukraine de passer de l’ère soviétique aux doctrines, équipements et formations de l’OTAN et de parvenir à l’interopérabilité avec l’Alliance ».

De fait, l’Ukraine prend sa place dans l’OTAN comme cela était annoncé dans le communiqué officiel du 3 avril 2008 suite au sommet de Bucarest. « L’OTAN se félicite des aspirations euro-atlantiques de l’Ukraine et de la Géorgie, qui souhaitent adhérer à l’Alliance. Aujourd’hui, nous avons décidé que ces pays deviendraient membres de l’OTAN. Ils ont l’un et l’autre apporté de précieuses contributions aux opérations de l’Alliance. Nous nous félicitons des réformes démocratiques menées en Ukraine et en Géorgie, et nous attendons avec intérêt la tenue, en mai, d’élections législatives libres et régulières en Géorgie » (Cf. https://www.nato.int/docu/pr/2008/p08-049f.html). Le renforcement de l’armée russe a été engagé par V. Poutine à compter de 2008 et la Géorgie attaquée par la Russie en août 2008.

En ce mois de mai 2023, alors que la ligne de front est aussi testée, le président Zelenski donne cependant l’impression que l’offensive n’est pas prête et multiplie les déplacements à l’étranger à la différence de ces quinze derniers mois : visites en Allemagne, en France, au Royaume-Uni, au Royaume-Uni, au G7 et, suprême audace, à la Ligue arabe invité par MBS, le prince héritier d’Arabie saoudite. Défendant les tatars de Crimée, musulmans turcophones, un président « juif » bien que non pratiquant, s’exprime devant les 22 membres de la ligue. Malgré les accords d’Abraham, je doute que le président d’Israël ou son Premier ministre auraient pu avoir le même accueil. Bref, est-ce que ces multiples voyages loin du front ukrainien sont un leurre ? Je formule cette hypothèse dans l’article du Figaro du 13 mai écrit par Jeanne Sénéchal, auquel j’ai contribué et que je publie ci-après.

« Guerre en Ukraine : la contre-offensive a-t-elle commencé à Bakhmout ou n’est-ce qu’un leurre ? » le Figaro du 13 mai 2023

Par Jeanne Sénéchal

DÉCRYPTAGE – Jeudi, Zelensky a affirmé que l’armée ukrainienne n’était pas encore prête à lancer sa contre-offensive. Le chef de Wagner, lui, a affirmé que les forces russes fuyaient Bakhmout. Que se passe-t-il réellement à Bakhmout ?

L’ombre de la contre-offensive ukrainienne «de printemps» continue de planer sur Bakhmout, sans savoir quand le couperet pourrait tomber sur les troupes du Kremlin. Fin avril, le ministre ukrainien de la Défense assurait que les préparatifs touchaient à leur fin, et que les grandes manœuvres étaient imminentes. Mais jeudi 11 mai, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rétropédalé et assuré que son armée avait encore besoin de temps pour se préparer. Le lendemain pourtant, la vice-ministre ukrainienne de la Défense a annoncé que les forces de Kiev avaient avancé de deux kilomètres autour de la ville et que les forces russes avaient reculé sur certaines zones proches de la ville à la suite des contre-attaques des forces de Kiev. Que se passe-t-il réellement à Bakhmout ? La contre-offensive a-t-elle commencé, ou l’Ukraine mène-t-elle une opération d’intox, jeu auquel elle excelle ?

Les dernières informations font effectivement état d’une avancée ukrainienne à Bakhmout. Sur Telegram, le commandant des troupes terrestres ukrainiennes explique que «l’opération défensive» en direction de la ville «se poursuit». «Nos soldats avancent dans certaines zones du front et l’ennemi perd de l’équipement et des troupes». Vendredi, le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evgueni Prigojine, a accusé les troupes régulières russes de «fuir» leurs positions près de la ville. Il faut toutefois rester prudent avec ce type de déclarations: «Dans des phases cruciales comme celle-ci, les informations ne sont pas très fiables», commente Stéphane Audrand, consultant en risques internationaux.

Avec les informations dont nous disposons aujourd’hui, «nous ne pouvons pas parler de contre-offensive», tranche le consultant. «Cela ressemble plus à une contre-attaque, au sens où tous les jours, il y a des actions sur le front, qui ne sont pas toujours planifiées. Ce sont souvent des opportunités». Pour le moment, les Ukrainiens ne semblent pas vouloir faire de grandes percées, se contentant de faire reculer les lignes russes. Le ministre ukrainien de la Défense utilise notamment le terme «d’opération défensive». Les Ukrainiens testent également le dispositif russe «pour voir si celui-ci est solide, ils tentent d’amasser des forces pour exploiter leur vulnérabilité», commente à son tour le général (2S) François Chauvancy, consultant en géopolitique, docteur en sciences de l’information et de communication. Lorsque l’Ukraine affirme avoir gagné deux kilomètres de terrain, outre l’aspect militaire, «il y a un discours politique qui montre que les forces continuent à avancer», ajoute-t-il.

L’hypothèse d’un «leurre»

De leur côté, les Russes réfutent la percée des Ukrainiens. Alors que le chef de Wagner, Prigojine, affirme que ses camarades russes fuient leurs positions près de Bakhmout. Qui a raison ? Qui ment ? Pour le général Chauvancy, Prigojine est sur le terrain. «Il y a sûrement des vérités, mais cela peut être une opération de déception (les moyens destinés à tromper l’adversaire, ndlr)». «On est dans un aspect très militaire, est-ce que ce n’est pas une communication destinée à Kiev pour leur faire croire qu’ils peuvent y aller ? La réponse sera donnée dans les heures ou jours à venir, si les Ukrainiens qui ont pénétré Bakhmout sur deux kilomètres se font démolir par des Russes qui les attendaient. Cela démontrera également qu’indirectement Prigojine n’est pas un électron libre, mais qu’il est au service du Kremlin.»

Du côté de Zelensky, «curieusement, on ne l’a jamais autant vu à l’étranger en période de guerre , comme si tout allait bien, en démentant la contre-offensive». «Cela pourrait être un leurre», suppose le général. «Zelensky est peut-être en train de détourner l’attention des Russes. Je pense que la contre-offensive ne devrait pas tarder. Les combats qui se déroulent depuis deux trois jours auront montré les faiblesses côté russe. Il faudra alors que Kiev soit en mesure de déployer des forces suffisantes à l’endroit identifié. Et cela ne se fait pas du jour au lendemain», ajoute-t-il. Mais pourquoi avoir évoqué, deux semaines plus tôt, une contre-offensive imminente ? «Cela pouvait être une opération de déception, mais il semble surtout que cela soit un discours de politique intérieure», explique encore le général Chauvancy. «Les Ukrainiens perdaient beaucoup d’hommes à Bakhmout. Il fallait les rassurer, leur dire que leur mort n’était pas vaine».

Pour l’instant, les Ukrainiens poussent quelques kilomètres autour de Bakhmout. «Cela est bon pour le moral, c’est l’occasion de détruire les forces de Wagner et les forces armées russes qui sont fatiguées». Des petites actions entre Donetsk et Zaporijia sont aussi observées ; les Ukrainiens reprennent peu à peu du terrain ces derniers jours. «Cela peut être une diversion, ou ils peuvent préparer de grandes offensives dans ces zones-là. Mais pour être prêt, il faut qu’ils arrivent à prendre quelques points clés». «Nous sommes encore dans une zone de modelage qui peut durer deux à trois semaines», assure de son côté Stéphane Audrand. «Une offensive lancée trop tôt est une catastrophe. Il ne faut pas céder à la panique», prévient le consultant.

«Toute la force de Zaloujny est un pistolet à un coup»

Une contre-offensive est longue à préparer. Stéphane Audrand détaille sa phase préparatoire. La première est celle qui va générer les forces : «On va définir les objectifs politiques et la traduction en opération. Ici, l’objectif général est le territoire national. Pour l’atteindre, il va falloir X opérations. Et pour chacune d’entre elles, il faut générer une force humaine, matérielle et logistique.» «Les Ukrainiens n’ont pas de problème sur le plan humain, sur les effectifs en nombre. Cela commence toutefois à devenir tendu sur certaines spécialités et certains grades». Par ailleurs, cette force est très longue à générer d’autant qu’ils ne sont pas habitués à travailler sur des matériels hétérogènes : «Ils ont toujours travaillé sur des matériels soviétiques, ce n’est pas les mêmes unités de mesure, les mêmes performances ni les mêmes modes d’emploi». Il faut générer les flux logistiques, prépositionner les commandements, les dépôts, les relais, les transports, etc.

Ensuite, vient la phase dite de «modelage» : plusieurs frappes vont être effectuées pour affaiblir des points logistiques et compliquer les renforts ennemis, «afin de mieux préparer le théâtre lorsque le moment de la contre-offensive sera venu». Ce moment sera décidé également en fonction de la météo. «Là on est au printemps et le temps est changeant. Il faut que les sols soient porteurs et que l’aviation puisse voler ou non. Peut-être qu’ils attendent d’avoir un peu de couvertures nuageuses basses pour être tranquille au niveau de l’aviation russe. Cela dépend des fenêtres qu’ils se sont fixées», concède Stéphane Audran. Enfin, il y a la phase d’entrée dans l’offensive : «l’objectif est de pilonner certains points clé, d’écraser les lignes ennemies, de frapper les nœuds de communication et de détection pour désorganiser les renforts ennemis. Il y aura plusieurs phases d’assaut puis une phase de stabilisation, ou les Ukrainiens essaieront de consolider ce qu’ils ont pris pour ne pas se le faire reprendre lors d’une contre-attaque».

«Toute la force du général Zaloujny (le commandant en chef de l’armée ukrainienne, NDLR) est un pistolet à un coup», conclut Stéphane Audrand. «Les forces ukrainiennes ne pourront pas remplacer beaucoup de pertes, il faudra tenir les frontières et pendant plusieurs années. Il vaut mieux avoir un petit succès et ne pas perdre trop de monde, que d’avoir un gros succès et tout perdre».

Général (2S) François Chauvancy

Saint-cyrien, breveté de l’École de guerre, docteur en sciences de l’information et de la communication (CELSA), titulaire d’un troisième cycle en relations internationales de la faculté de droit de Sceaux, le général (2S) François Chauvancy a servi dans l’armée de Terre au sein des unités blindées des troupes de marine. Il a quitté le service actif en 2014. Il est expert des questions de doctrine sur l’emploi des forces, sur les fonctions ayant trait à la formation des armées étrangères, à la contre-insurrection et aux opérations sur l’information. A ce titre, il a été responsable national de la France auprès de l’OTAN dans les groupes de travail sur la communication stratégique, les opérations sur l’information et les opérations psychologiques de 2005 à 2012. Il a servi au Kosovo, en Albanie, en ex-Yougoslavie, au Kosovo, aux Émirats arabes unis, au Liban et à plusieurs reprises en République de Côte d’Ivoire où, sous l’uniforme ivoirien, il a notamment formé pendant deux ans dans ce cadre une partie des officiers de l’Afrique de l’ouest francophone. Il est chargé de cours sur les questions de défense et sur la stratégie d’influence et de propagande dans plusieurs universités. Il est l’auteur depuis 1988 de nombreux articles sur l’influence, la politique de défense, la stratégie, le militaire et la société civile. Coauteur ou auteur de différents ouvrages de stratégie et géopolitique., son dernier ouvrage traduit en anglais et en arabe a été publié en septembre 2018 sous le titre : « Blocus du Qatar : l’offensive manquée. Guerre de l’information, jeux d’influence, affrontement économique ». Il a reçu le Prix 2010 de la fondation Maréchal Leclerc pour l’ensemble des articles réalisés à cette époque. Il est consultant régulier depuis 2016 sur les questions militaires au Moyen-Orient auprès de Radio Méditerranée Internationale. Depuis mars 2022, il est consultant en géopolitique sur LCI notamment sur la guerre en Ukraine. Animateur du blog « Défense et Sécurité » sur le site du Monde depuis août 2011, il a rejoint depuis mai 2019 l’équipe de Theatrum Belli.
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Le cimetière des postes de commandement. Ce que la bataille de Chornobaivka nous apprend sur l’importance du commandement

admin Informations 18 mai 202318 mai 2023Guerre, Les menaces, Stratégie 0 commentaire

Le cimetière des postes de commandement. Ce que la bataille de Chornobaivka nous apprend sur l’importance du commandement

par Revue Conflits – publié le 18 mai 2023

https://www.revueconflits.com/le-cimetiere-des-postes-de-commandement-ce-que-la-bataille-de-chornobaivka-nous-apprend-sur-limportance-du-commandement/

En Ukraine, le village de Chornobaivka a été l’objet d’une remarquable victoire de l’armée ukrainienne. La tactique utilisée, les armes mobilisées, les dégâts infligés à l’armée russe sont une grande source d’enseignement pour l’armée américaine. Cette bataille apporte du neuf à la réflexion tactique.

Par le Lieutenant-général Milford « Beags » Beagle, armée américaine, le Général de brigade Jason C. Slider, armée américaine et le Lieutenant-colonel Matthew R. Arrol, armée américaine.

Article paru en mai 2023 dans Military review. Traduction de Conflits. Les intertitres sont de la rédaction.

En Ukraine, le village de Chornobaivka est légendaire1. Des chansons sont écrites à son sujet2. Tout au long de l’année 2022, la petite ville et son aérodrome, situés à la périphérie de Kherson, ont été un véritable hachoir à viande pour les forces russes. De son occupation initiale en février à sa libération en novembre, les frappes ukrainiennes ont pu repousser les Russes, avec une précision et une létalité rarement vue en temps de guerre, et ont permis à un défenseur courageux de venir à bout d’un Léviathan régional3.

Attaquer le commandement

L’enthousiasme patriotique mis à part, un examen plus approfondi de cette victoire durement acquise révèle que sous les décombres des ambitions russes dans l’oblast de Kherson se cache un avertissement sur la vulnérabilité des postes de commandement que les États-Unis et leurs alliés feraient bien de prendre en compte. L’histoire de Chornobaivka est celle d’un assaut incessant contre le commandement et le contrôle, caractérisé par une attaque systématique des postes de commandement russes à grande échelle et à tous les échelons tactiques4. En l’espace de huit mois, le complexe de feux ukrainien a attaqué avec succès les quartiers généraux de la 8e armée russe, de la 49e armée, du 22e corps d’armée, de la 76e division d’assaut aérien de la Garde, du 247e régiment d’assaut aérien de la Garde et de leurs éléments subordonnés5. Ces attaques ont considérablement dégradé la capacité des Russes à planifier et à mener des opérations coordonnées sur la rive occidentale du Dniepr. La perte d’un commandement et d’un contrôle efficaces a sapé l’élan russe et empêché la consolidation des gains, ce qui a finalement conduit à leur expulsion. Au cours de ce processus, l’Ukraine a frappé des dirigeants russes de haut niveau, tuant le lieutenant-général Yakov Resantsev, commandant de la 49e armée d’armes combinées, et blessant grièvement le lieutenant-général Andrey Mordichev, commandant de la 8e armée d’armes combinées6.

Au-delà de Kherson, ce schéma a été similaire, bien que moins concentré. Les attaques ukrainiennes contre les postes de commandement dans tout le pays ont entraîné une attrition stupéfiante parmi les hauts responsables militaires russes7. Cela reflète une approche programmatique visant à frapper la capacité et la volonté des forces russes en supprimant leur source d’objectif, de motivation et de direction. Le succès des Ukrainiens est impressionnant à tous points de vue. Plus de 1 500 officiers ont été tués dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine, dont dix officiers généraux et 152 colonels et lieutenants-colonels8.

Certains suggèrent que l’expérience russe à Chornobaivka et ailleurs peut s’expliquer par l’incapacité des Russes à surmonter les défis en matière de professionnalisme, de formation et de communication, ainsi que par une approche philosophique fondamentalement différente du commandement et du contrôle9. Mettre les malheurs russes uniquement sur le compte de l’inaptitude, bien que cela soit vrai dans une certaine mesure, minimise l’effet que les Ukrainiens ont sur le démantèlement systématique du système de commandement et de contrôle de leur ennemi grâce à un ciblage multidomaine. Limiter ce problème aux défaillances du commandement militaire russe revient à ignorer le fait qu’il existe aujourd’hui des technologies et des capacités capables de permettre et de produire des effets dévastateurs sur le commandement et le contrôle.

Viser les postes de commandement

Des adversaires potentiels, dont la Chine, ont fait de l’attaque de nos systèmes de commandement et de contrôle un objectif déclaré11. Plus précisément, les postes de commandement sont visés parce qu’ils sont devenus facilement ciblables. Les postes de commandement contemporains sous tente – avec leurs antennes émettant des fréquences radio, leurs dizaines de générateurs et de véhicules et leurs besoins importants en matière de soutien – sont faciles à cibler, même pour un œil non averti. Au cours d’opérations de combat de grande envergure, ces postes de commandement peuvent être facilement repérés par un nombre toujours croissant de capteurs et tout aussi facilement frappés par des effets complémentaires dans toute la profondeur et l’étendue du champ de bataille. Pour tout ce qui est aussi ostentatoire qu’un poste de commandement moderne, il n’existe pas de véritable sanctuaire12. Bien que nous soyons prompts à pointer du doigt les Russes, les postes de commandement occidentaux sont confrontés à d’importants défis en matière de survivabilité. Même lorsque des efforts ont été déployés pour améliorer la mobilité des postes de commandement, notre incapacité à dissimuler les signatures multispectrales de ces structures massives, associée à une surveillance persistante du champ de bataille et à des armes de précision, annule tout avantage obtenu et rend probablement une seconde frappe inutile13.

Repenser les postes de commandement

La bataille de Chornobaivka met en lumière une théorie de la guerre, introduite pendant la guerre du Haut-Karabakh de 2020, qui met à nu la létalité et la transparence du champ de bataille moderne grâce à l’emploi concerté d’effets multidomaines sur la fonction de commandement et de contrôle de la guerre15. Elle révèle qu’il est impératif de repenser les postes de commandement en fonction de cette nouvelle ère de la guerre. Face à cette menace immédiate, l’armée américaine doit transformer le commandement et le contrôle afin d’intégrer les principes des opérations multidomaines (MDO) lors de la transition vers ce nouveau concept opérationnel dans toutes les fonctions de combat. Pour combattre et gagner sur le champ de bataille moderne dans le cadre d’opérations de combat à grande échelle, les postes de commandement de l’armée de terre peuvent et doivent devenir plus souples, plus agiles et plus résistants, sans pour autant sacrifier l’efficacité. Dans le cas contraire, nos postes de commandement seront un lieu où nos dirigeants iront mourir.

Plan suivi

Pour comprendre comment nos postes de commandement doivent évoluer, il faut d’abord apprécier le rôle que jouent les postes de commandement dans notre armée. Après avoir défini leur fonction et leur forme actuelle, il sera possible d’illustrer en quoi cette forme n’est pas adaptée à son objectif et va à l’encontre des principes de la MDO. Cela permettra de discuter d’une meilleure approche pour faciliter le commandement et le contrôle multidomaines, avec des objectifs à court terme et un état final optimisé pour les opérations de combat à grande échelle.

1/ Le rôle des postes de commandement

La publication des techniques de l’armée, Organisation et opérations des postes de commandement, définit globalement un poste de commandement comme « un quartier général d’unité où le commandant et l’état-major exercent leurs activités » et précise que « le commandant exerce seul le commandement dans un PC [poste de commandement] ou ailleurs16. » Cette déclaration renforce l’objectif d’un poste de commandement : « assister les commandants dans l’exercice du commandement de mission17. » Pour ceux qui ne connaissent pas ce terme, le « commandement de mission » est un concept philosophique de l’armée américaine qui représente une approche de la gestion des crises. Si tous les pays et tous les services n’ont pas la même conception du commandement et du contrôle, la plupart d’entre eux considèrent l’objectif du poste de commandement comme un outil permettant au commandant de comprendre, de visualiser, de décrire, de diriger, de conduire et d’évaluer les opérations. Toute forme appropriée et acceptable de poste de commandement doit répondre à ces critères.

2/ Fonction et forme actuelle des postes de commandement

Au fond, le dilemme actuel en matière de commandement et de contrôle reflète un déséquilibre dans les exigences fonctionnelles requises pour que les postes de commandement soient à la fois efficaces et capables de survivre. Tout au long de l’histoire, l’organisation, la composition et la prolifération des postes de commandement ont suivi l’évolution de la complexité et de l’ampleur de la guerre. Les commandants et leurs états-majors ont adapté ces structures afin de disposer des meilleurs moyens de contrôler les formations dans le chaos de la guerre, de prendre de bonnes décisions plus rapidement que l’ennemi et d’accroître l’efficacité en tirant parti de l’expérience et de l’esprit d’initiative du commandant. Au XIXe siècle, la guerre au niveau industriel a donné naissance à des modèles industriels pour les postes de commandement ainsi qu’à la bureaucratie nécessaire pour les gérer19. À bien des égards, cette approche persiste même deux cents ans plus tard, comme le montre le modèle d’état-major napoléonien, qui reste le modèle organisationnel prédominant20. Au début du XXe siècle, l’essor de la puissance aérienne a considérablement amélioré l’efficacité des armées, mais a compliqué le contrôle et créé un besoin de synchronisation d’un troisième domaine qui serait ensuite rejoint par deux autres au XXIe siècle. Le besoin de contrôle et de connaissance du commandant dans tous ces domaines a créé une demande d’outils humains et techniques d’aide à la décision. Si cette demande s’est d’abord manifestée sous la forme d’un personnel dédié à des fonctions de plus en plus nombreuses, elle se manifeste aujourd’hui également sous la forme de serveurs informatiques et d’applications numériques nécessaires au traitement et au discernement du sens de la mer de données dans laquelle nos opérations sont désormais noyées21.

Cette demande insatiable d’informations de qualité décisionnelle permettant la compréhension et la visualisation par le commandant n’a fait qu’augmenter au fil du temps. Dans leur forme actuelle, ces outils et cet état-major pèsent sur l’agilité du système de commandement et de contrôle et augmentent sa vulnérabilité de plusieurs ordres de grandeur.

Pour accroître leur capacité de survie, les commandants ont cherché à protéger leurs postes de commandement en réduisant leur taille, en les renforçant, en les divisant, en les camouflant, en augmentant leur mobilité et en les défendant activement contre toutes sortes de menaces, y compris les attaques aériennes, cybernétiques et électroniques22. Les progrès technologiques ont joué un rôle dans les deux sens de ce dilemme. Elle a fourni des technologies de communication, d’automatisation et d’information permettant de comprimer la structure des postes de commandement et de les rendre plus productifs. Toutefois, la technologie a également ouvert la voie à d’autres fonctionnalités et capacités qui ont augmenté la taille et la structure au détriment de la capacité de survie. En règle générale, ce flux et reflux de l’efficacité et de la capacité de survie a été progressif, les actions et les réactions reflétées dans la doctrine, le matériel et la conception étant plus évolutives que révolutionnaires.

Parfois, l’évolution comprend des mutations qui, si elles ne sont pas contrôlées, peuvent se métastaser en une vulnérabilité dont la correction nécessite une révolution. C’est le cas des postes de commandement américains au cours des vingt dernières années, qui ont été rendus inaptes à remplir leur mission compte tenu de la rapidité, de la complexité et de la létalité des opérations de combat à grande échelle. Depuis 2001, l’absence de menace observable et agressive a permis à nos postes de commandement de muter progressivement au cours de la guerre mondiale contre le terrorisme.

Au cours des treize années qui ont suivi l’invasion de l’Afghanistan, les postes de commandement se sont progressivement éloignés d’un modèle adapté aux opérations de combat à grande échelle. Dans le même temps, leur organisation et leurs systèmes ont permis aux commandants de disposer de niveaux de contrôle et de connaissance de la situation sans précédent23. Cela a parfois menacé la philosophie même du commandement de l’armée, à savoir le commandement de mission, en permettant une microgestion par des postes de commandement surpeuplés, surtraités, surrésolus et sous-contraints24. Au sein de l’armée américaine, l’une des principales raisons pour lesquelles ce fossé s’est creusé est que l’ensemble de notre doctrine, de notre organisation, de notre formation, de notre matériel, de notre leadership, de notre personnel et de nos installations était axé sur les échelons tactiques inférieurs afin de fournir les forces et les capacités requises pour les opérations de contre-insurrection.

Par exemple, dans le cadre du programme de formation de l’armée américaine, les centres de formation au combat ont évalué les postes de commandement des équipes de combat de brigade pendant près de vingt ans à l’aide d’une grille d’évaluation qui favorisait une approche globale et axée sur les processus du ciblage, qui n’existait auparavant qu’au niveau de la division ou à un niveau supérieur. Cela a incité les commandants à développer une infrastructure lourde pour soutenir les capacités d’intégration d’opérations complexes sans les punir de manière adéquate pour la perte de flexibilité, d’agilité et de capacité de survie qui en résulte25. Ces « leçons » des centres d’entraînement au combat, aussi appropriées soient-elles pour l’époque et la mission, ont inculqué à toute une génération de dirigeants un sentiment d’invulnérabilité incompatible avec une guerre hautement dynamique, mobile et létale contre un ennemi capable.

Les États-Unis n’ont pas été la seule nation à adopter cette approche ; nos alliés de l’OTAN qui ont participé consciencieusement à des opérations de lutte contre le terrorisme et l’insurrection dans le monde entier ont fait de même26. Même nos adversaires, espérant reproduire les succès de l’opération Liberté pour l’Irak et préoccupés par leurs propres enchevêtrements régionaux expéditionnaires, ont augmenté la taille de leurs quartiers généraux aux échelons tactiques27. Ironiquement, l’expérience, les connaissances et l’intuition des commandants sont aujourd’hui étayées par un système sans précédent d’experts fonctionnels et d’outils techniques qui réduisent considérablement le risque de décision, mais augmentent de manière exponentielle le risque pour la mission et leur sécurité personnelle. Bien qu’il ne soit pas possible d’examiner ici toutes les implications de cette période pour le commandement et le contrôle, chaque composante du DOTMLPF doit être évaluée indépendamment afin d’apprécier notre expérience depuis 2001 et ses effets sur le système de commandement et de contrôle et sur nos postes de commandement. Aujourd’hui, nos postes de commandement n’ont plus rien à voir avec les machines à tuer maigres et méchantes dont nous avons besoin, mais sont plutôt gros et lourds.

3/ Mettre le bon outil entre les mains des commandants

Le changement s’annonce. La publication de la doctrine de base de l’armée américaine, le Field Manual 3-0, Operations, en octobre 2022, codifie un changement significatif pour toutes les fonctions de combat par rapport aux fondements existants et vise à conduire l’armée à une domination durable du domaine terrestre (tout en opérant dans de multiples domaines) au XXIe siècle28.

Reconnaissant les défis de l’environnement actuel, les MDO soulignent que les postes de commandement, en tant qu’élément du système de commandement et de contrôle, doivent adhérer aux principes d’agilité, de convergence, d’endurance et de profondeur. Pour optimiser nos postes de commandement, nous devons réduire notre dépendance à l’égard de la dimension physique (le matériel), accroître notre utilisation de la dimension informationnelle (les données) et maximiser notre relation avec la dimension humaine (nos dirigeants). Ces trois mandats constituent le cadre d’une nouvelle grille d’évaluation des postes de commandement dans l’ensemble des programmes de formation de l’armée de terre. Afin d’élaborer une nouvelle base pour le commandement et le contrôle, l’examen de chacun des principes de la MDO permettra de distinguer ce qui constitue véritablement une conception de poste de commandement acceptable, appropriée et complète, qui soit à la fois efficace et capable de survivre dans le cadre d’opérations de combat à grande échelle contre un ennemi compétent.

Agilité. Selon la définition de l’agilité donnée par l’armée de terre, à savoir « la capacité de déplacer des forces et d’adapter leurs dispositions et leurs activités plus rapidement que l’ennemi », nos postes de commandement actuels ne nous procurent aucun avantage démontrable29. L’agilité est synonyme de rapidité et de capacité à changer rapidement. À l’heure actuelle, nos postes de commandement sont enfermés dans un cycle sans fin de travaux nécessaires à l’établissement, à la désinstallation, au déplacement et à la réinstallation pour rester en mesure de survivre et de suivre le rythme des opérations. Cela suffit à perturber le rythme des opérations et à réduire l’avantage décisionnel, même en l’absence d’interférence de l’ennemi. L’accroissement de la mobilité par le retrait des tentes et la transition vers des systèmes montés sur véhicule contribuera à résoudre ce problème, mais ne l’éliminera pas. L’augmentation de la mobilité ne changera rien au fait que lorsque nos postes de commandement arriveront à leur nouvel emplacement, ils ne seront pas plus nombreux qu’auparavant.

Par exemple, un poste de commandement de brigade ne peut pas devenir rapidement un poste de commandement de division, même si un poste de commandement de brigade peut avoir à assumer ces rôles et fonctions avec une capacité moindre si le poste de commandement de division est détruit. Si nous organisons nos postes de commandement autour de ce qui est vraiment important, les processus du commandant, alors nous pouvons être indifférents à ce qui fournit ces processus. Si nous envisageons nos postes de commandement moins comme un lieu ou une chose et davantage comme un service, il peut être possible d’accroître considérablement notre agilité. Que se passerait-il si un commandant de corps, de division ou de brigade arrivait, prenait le contrôle de n’importe quel poste de commandement et recevait la capacité de l’échelon approprié en appuyant sur un bouton ? Que se passerait-il si les postes de commandement des échelons tactiques supérieurs étaient réellement fongibles en fonction de la connectivité et de l’accessibilité des données ? Et si, au lieu de tentes et de douzaines de véhicules et de générateurs, la capacité du poste de commandement pouvait être fournie dans un espace de la taille d’un détachement de sécurité personnel (trois à quatre véhicules)30 ? Cette approche de l’agilité pourrait changer la donne et renforcer les avantages du commandant dans un environnement hyperactif. L’emploi agile des capacités interarmées et de l’armée de terre crée les conditions de la convergence.

Convergence. Introduit récemment dans le Field Manual 3-0, le principe de convergence est « un résultat créé par l’emploi concerté de capacités provenant de domaines et d’échelons multiples contre des combinaisons de points décisifs dans n’importe quel domaine pour créer des effets contre un système, une formation, un décideur ou dans une zone géographique spécifique31. » La convergence est en partie obtenue par un commandement et un contrôle interarmées combinés tous domaines confondus et doit donc être un facteur déterminant dans la composition des futurs postes de commandement.

La convergence nous rappelle que, loin de renoncer à des capacités à l’échelon pour simplifier nos activités, toute conception acceptable de poste de commandement doit permettre d’atteindre une efficacité encore plus grande grâce à une intégration et une interopérabilité plus robuste. Les postes de commandement qui connectent les capteurs, les tireurs et les décideurs grâce à l’apprentissage automatique et à l’intelligence artificielle transformeront l’ancienne chaîne d’exécution en un réseau d’exécution afin de créer des « opportunités exploitables qui permettent la liberté d’action et l’accomplissement de la mission32. » Ce mandat d’intégration des données place les données de qualité décisionnelle qui permettent les processus du commandant (par exemple, la compréhension, la visualisation) au cœur du poste de commandement moderne.

Pour conserver leur agilité et permettre le flux constant des bonnes données vers les bons dirigeants, les postes de commandement ne peuvent plus compter sur les anciens systèmes cloisonnés, les serveurs sur site et les mécanismes de soutien qui les accompagnent comme principaux moyens d’appui à la prise de décision. Au lieu de cela, nous devons migrer vers le cloud et exploiter les concepts de maillage et de tissu de données pour garantir que les données sont sécurisées, organisées et disponibles d’une manière utilisable par les commandants et leurs états-majors.

Pour ceux qui ne sont pas familiers avec ces concepts, les maillages de données et les tissus de données sont des approches complémentaires de la gestion des données qui permettent la connectivité et l’accessibilité. Un maillage de données est une architecture de données décentralisée qui fédère la production, la gestion et le partage de données dans et entre les domaines33. Un tissu de données est un domaine au sein du maillage de données qui automatise l’intégration des données et permet la connectivité et l’accès pour trouver, créer et partager largement des produits de données dans toute l’étendue et la profondeur de l’espace de combat, y compris avec les forces interarmées, alliées et partenaires.

Ces concepts de gestion des données dans le secteur civil permettent à nos postes de commandement de faire preuve d’endurance et d’agilité, en réduisant la dépendance à l’égard de plates-formes ou de référentiels uniques susceptibles d’être piégés et isolés en raison du déplacement des postes de commandement ou des effets des actions ennemies. Nous commençons ici à nous éloigner de la dimension physique pour nous rapprocher de la dimension informationnelle, qui nécessite des approches et des compétences sensiblement différentes pour faciliter les opérations.

Dans les postes de commandement centrés sur les données, les commandants peuvent s’appuyer sur des ingénieurs en développement de données, en sécurité et en opérations qui peuvent accélérer le développement et l’intégration sécurisée de nouvelles applications dans des délais opérationnels et au moment où le besoin s’en fait sentir34. Ces professionnels des données remplaceront les sergents d’opérations chargés de configurer et d’organiser les postes de commandement centrés sur le réseau que nous connaissons aujourd’hui. Pour conserver notre capacité de survie, nous devons également débarrasser les postes de commandement de la collocation physique de tout ce qui est fourni « en tant que service » (aaS). Cela comprend les communications (CaaS), les radios (Raas) et, surtout, les connaissances (KaaS). Pour ceux qui ne connaissent pas le modèle « as-a-service », il s’agit d’une approche commerciale perturbatrice qui externalise le fardeau du soutien fondé sur la propriété, qui nécessite l’expertise fonctionnelle et l’infrastructure pour fonctionner et assurer la maintenance.

Ces anciennes pratiques renforcent la dépendance à l’égard des systèmes et des compétences existants, ce qui stagne l’innovation35. L’approche aaS permet l’adoption rapide des technologies émergentes et de la mobilité, et ouvre la voie à la concurrence entre les fournisseurs, ce qui garantit que nos soldats disposent de la meilleure capacité disponible.

Prenons l’exemple de l’Ukraine qui utilise les capacités de Starlink de manière unique et créative sans posséder les satellites, les compétences associées et l’infrastructure de soutien. Toutefois, la diminution de la dépendance des commandants à l’égard de la dimension physique au profit de la dimension informationnelle augmentera la capacité de survie en réduisant la signature globale du poste de commandement et la nécessité de regrouper les états-majors en un seul lieu. Pour exploiter pleinement le potentiel de la convergence, les postes de commandement devront s’adapter à un point tel qu’ils seront méconnaissables pour la génération de dirigeants qui a combattu en Irak et en Afghanistan.

Endurance. L’endurance, définie comme « la capacité à persévérer dans le temps à travers la profondeur d’un environnement opérationnel », est le prochain principe essentiel de la MDO36. Si des postes de commandement plus compétents et plus agiles offrent des avantages apparents en termes d’endurance, la préservation de cette capacité de commandement et de contrôle dans le temps se fera dans les conditions les plus dures et les plus meurtrières imaginables. Les postes de commandement doivent faire preuve de résilience et de persistance dans un isolement temporaire et dans des conditions austères. Cela implique également que même les postes de commandement très mobiles doivent être protégés d’une manière que nos camionnettes extensibles et nos tentes actuelles ne le sont pas. Ils doivent être blindés et nous devons mettre au point des solutions permettant d’offrir une capacité évolutive aux unités pour lesquelles il sera difficile de durcir les postes de commandement, y compris nos forces aéroportées et nos forces expéditionnaires légères. À cette fin, nous devrions rechercher des capacités de poste de commandement multimodales, avec des capacités montées sur véhicule qui peuvent être rapidement et facilement démontées pour occuper des structures durcies et se fondre dans un terrain urbain dense. Les postes de commandement doivent également être capables de masquer leur signature afin de compliquer le ciblage de l’adversaire en dissimulant leurs signatures visuelle, thermique, électronique, acoustique et, bientôt, quantique37.

En fin de compte, si nous parvenons à réduire la taille et la structure des postes de commandement à tous les échelons à quelques véhicules tactiques blindés, la signature extraordinaire de nos postes de commandement tactiques et opérationnels de haut niveau s’estompera dans le spectre électromagnétique normalisé et dans le fouillis d’un champ de bataille où les véhicules blindés sont omniprésents. De cette manière, nous pouvons priver l’ennemi de la capacité de discerner les cibles prioritaires et de grande valeur, une compétence précieuse dans un environnement qui peut parfois se caractériser par une pénurie de munitions de précision. Cette approche renforce le dicton de Sun Tzu selon lequel « toute guerre est fondée sur la tromperie » et l’applique à nos postes de commandement, donnant ainsi le ton que nous espérons voir se refléter dans les opérations qu’ils dirigent38.

Nous ne devons pas non plus oublier que la capacité de survie, qu’elle soit physique, informationnelle ou humaine, n’est qu’un des aspects de l’endurance. Dans le passé, cela pouvait impliquer une montagne de logistique et de personnel pour soutenir les cycles travail-repos-maintenance. À l’avenir, ce problème pourra être résolu en transférant simplement le commandement de la mission à l’un des nombreux nœuds de commandement et de contrôle distribués au sein d’une constellation de nœuds distribués, de la même manière que l’industrie gère les flux de travail globaux.

Profondeur. Enfin, en évaluant les futurs postes de commandement par rapport au dernier principe opérationnel, la profondeur, nous pouvons mesurer la capacité des postes de commandement à « étendre nos opérations dans le temps, l’espace ou l’objectif (cognitif) »39. Dans le cadre opérationnel multidomaine élargi, cela suggère un nœud de commandement et de contrôle qui optimise son efficacité pour exploiter ou créer des opportunités d’une manière qui contrebalance la nature hyperactive des opérations de combat à grande échelle afin de donner au commandant un avantage comparatif. Cet avantage est également obtenu par l’intégration de partenaires interarmées combinés dans tous les domaines, tant sur le plan offensif que défensif. Il permet de produire des effets dans les trois dimensions – humaine, physique et informationnelle – et dans l’ensemble du cadre opérationnel, tout en protégeant sa propre puissance de combat. Ces efforts complémentaires permettent aux forces amies d’appliquer leur puissance de combat contre les capacités ennemies afin d’obtenir des avantages dans le temps et dans l’espace. Les résultats peuvent également perturber la profondeur cognitive de l’ennemi, en interrompant ou en prolongeant son cycle de décision, ce qui crée des conditions avantageuses pour le commandant ami. Les effets combinés des aspects temporels, spatiaux et cognitifs de la profondeur, étendent la portée opérationnelle des forces amies.

4/ La dimension humaine

La guerre, aujourd’hui et à l’avenir, est et restera une entreprise humaine. Le fait que les postes de commandement existent témoigne des limites de la capacité humaine de compréhension et de prise de décision du commandant, ainsi que de la nécessité d’amplifier l’efficacité de son leadership au-delà de son rayon d’action physique. On ne saurait donc trop insister sur l’importance de la dimension humaine et de la psychologie dans le commandement et le contrôle lors d’opérations de combat à grande échelle. Lors de l’examen de la valeur de tout modèle de poste de commandement actuel ou futur, la proximité des chefs est importante – d’autant plus si l’on utilise la philosophie de commandement et de contrôle de l’armée américaine, le commandement de mission, qui accorde une grande importance à la confiance, à la compréhension partagée, à l’intention et à l’initiative des subordonnés40. Pendant les opérations de combat à grande échelle, les commandants doivent avoir la capacité d’être physiquement présents pour assurer le leadership, mais aussi de se déplacer rapidement là où l’on a besoin d’eux pour mieux comprendre. Du point de vue du moral et de la motivation, les chefs, en particulier dans le domaine terrestre, doivent être perçus comme partageant les difficultés et les dangers de ceux qu’ils dirigent. La confiance et la cohésion nécessaires au commandement d’une mission découlent de l’intérêt personnel du commandant et de son implication dans la conduite des opérations. Actuellement, cela se fait physiquement par la « circulation sur le champ de bataille » et la présence sur les lieux de l’unité, ce qui prend du temps et peut être très risqué. Le commandant peut également relever virtuellement le défi de la proximité grâce aux communications vocales, mais cette approche offre un contexte limité et ne répond pas toujours aux besoins psychologiques des subordonnés en situation de stress.

À Chornobaivka, l’insuffisance des communications a été l’une des raisons pour lesquelles les hauts responsables russes ont été déployés si loin en avant, même pour les opérations les plus simples. Dans ces conditions, un poste de commandement doit disposer de communications assurées et redondantes permettant de créer un sentiment de proximité entre les commandants et l’état-major, ainsi qu’entre les dirigeants et les dirigés. Compte tenu de ces défis et de ces caractéristiques souhaitables, il est difficile, mais pas impossible, d’imaginer un futur poste de commandement.

5/ Conception organisationnelle et emploi d’un poste de commandement objectif

Pour éviter notre propre Chornobaivka et fournir un commandement et un contrôle qui possèdent les caractéristiques d’agilité, de convergence, d’endurance et de profondeur, un poste de commandement efficace et capable de survivre doit exister dans une construction non physique.

Nous devons regrouper et intégrer des fonctions, des processus et des capacités, mais pas les personnes, les équipements et les objets qui ont toujours été associés à leur mise en œuvre. Bien que cela puisse sembler contraire aux critères de faisabilité de l’élaboration d’un plan d’action, une analyse plus approfondie révèle que la technologie existe actuellement et que le monde des jeux en ligne nous montre la voie à suivre. Pour répondre aux principes de la MDO, nous devons nous appuyer fortement sur la réalité augmentée et la réalité virtuelle. L’armée expérimente déjà ces deux technologies, mais n’a pas encore pleinement exploité leur utilité dans l’espace de commandement et de contrôle41. Dans un monde virtuel, les commandants pourraient reproduire, étendre, traverser et interagir selon les besoins avec l’ensemble de leur poste de commandement physique, sans jamais avoir à quitter la pièce ou le véhicule dans lequel ils se trouvent. Ils pourraient passer d’un poste de commandement à l’autre en toute transparence et être présents partout et à tout moment. Une vision des futurs postes de commandement de l’armée de terre pourrait être une prolifération de petits nœuds de commandement et de contrôle de trois à quatre véhicules blindés, représentant ce qui était auparavant une « tente d’état-major fonctionnel » dans l’ancienne structure. Ces nœuds seraient largement répartis et mobiles sur le champ de bataille. Soutenus par des ingénieurs en logiciels et en données, les commandants et les états-majors seraient en mesure d’organiser ces nœuds autour d’une variété de tâches, d’horizons temporels ou de domaines interfonctionnels. Ces nœuds de commandement et de contrôle distribués seraient connectés et capables de mener des opérations dans l’environnement physique. Grâce à la réalité augmentée, les commandants et les états-majors pourraient également accéder à un espace virtuel immersif et à l’échelon de commandement et de contrôle dont ils ont besoin. Les commandants pourraient ainsi initialiser, configurer et se connecter à une constellation de postes de commandement et conserver l’accès à toutes les données, connaissances et outils d’aide à la décision au sein du maillage de données.

En inondant la zone d’opérations d’une constellation de nœuds de commandement et de contrôle dispersés sur de vastes zones et en utilisant des techniques de masquage pour réduire leurs signatures sur le champ de bataille, l’efficacité des processus de ciblage de l’ennemi le plus performant serait réduite au minimum. Si les nœuds de commandement et de contrôle opéraient aux côtés d’éléments de manœuvre tactique de conception similaire, le dilemme de l’ennemi en matière de ciblage s’en trouverait encore plus exacerbé. Malheureusement, les communications assurées seraient encore plus cruciales dans cette approche et nécessiteraient une bande passante importante. Les solutions quantiques pourraient également nous permettre d’abandonner notre dépendance à l’égard des anciennes antennes et les risques associés aux signatures électromagnétiques sur le champ de bataille moderne.

Outre les communications, cette approche nécessitera un travail considérable de la part des développeurs et de la communauté de l’entraînement synthétique pour atteindre un niveau de réalité virtuelle « Avatar » où les commandants et le personnel oublient qu’ils interagissent dans un monde virtuel43. L’avantage d’un commandant capable de projeter sa présence n’importe où sur le champ de bataille sans avoir à être physiquement présent serait révolutionnaire. La voie qui mène à l’état final objectif décrit ici exige des ressources considérables et nécessitera des conseils ciblés et dirigés de la part des hauts responsables de l’armée, un partenariat avec l’industrie et l’adhésion des milieux politiques. Mais cela peut et doit être fait.

6/ Voir grand, commencer petit, aller vite et institutionnaliser : Une démonstration pratique

L’ampleur du changement suggéré ci-dessus suscitera inévitablement des critiques et de l’opposition et nécessitera des « victoires » précoces pour obtenir un soutien et un élan. Pour réussir à introduire cette idée dans notre système de commandement et de contrôle, il faudra commencer modestement et en démontrer l’utilité par l’expérimentation. Un bon test pour un poste de commandement multidomaine et capable de mener des opérations, reposant sur la réalité virtuelle et augmentée, consisterait à expérimenter avec une organisation constamment mise au défi de maintenir l’intégration physique et fonctionnelle dans un environnement opérationnel dynamique, le centre d’intégration air-sol interarmées de la division (JAGIC). Ce petit nœud de commandement et de contrôle de trente personnes est composé de personnel de l’armée de terre et de l’armée de l’air et d’éléments de liaison exécutant diverses fonctions. Actuellement, ils doivent s’unir pour gérer l’emploi des effets interarmées de manière efficace et efficiente dans le combat rapproché. Malgré leur valeur, le problème inhérent à ces organisations est qu’elles n’existent pas en garnison. Lorsqu’ils sont nécessaires pour l’entraînement et les opérations, les JAGIC sont formés à partir des états-majors des divisions et des escadrons d’opérations de soutien aérien. Il est donc très difficile de les former, de les entraîner et de les maintenir à un haut niveau de compétence, et encore moins d’expertise, compte tenu des exigences des cycles de dotation et des activités de garnison qui leur sont opposées. Dans ce cas, un JAGIC virtuel pourrait servir de microcosme pour un poste de commandement complet. Ainsi, l’expérience permettrait à la fois de relever un défi réel et persistant en matière de préparation et de tracer la voie vers l’amélioration des capacités des postes de commandement pour l’ensemble de l’armée de terre.

Conclusion : Un sifflement au-delà de Chornobaivka ?

J’ai souvent vu dans la cour d’une église isolée, la nuit,

un aperçu de la lueur de la lune qui se faufile entre les arbres,

un écolier, son cartable à la main,

Sifflant à haute voix pour se donner du courage…

Poète écossais Robert Blair, 1745-44

Tout visiteur occasionnel du Centre national d’entraînement de l’armée ces jours-ci, qui suit de près la guerre en Ukraine à travers son fil Twitter, peut attester que les postes de commandement de l’armée américaine vont avoir du mal à s’adapter à cet environnement. Si l’armée n’est peut-être pas en mesure de mettre en place du jour au lendemain une nouvelle structure de poste de commandement révolutionnaire optimisée pour les opérations de combat à grande échelle, elle n’est pas non plus démunie face à la perspective imminente d’une guerre, même contre un adversaire potentiel aussi capable que la Chine. Chaque jour, les commandants peuvent commencer à se préparer à cet environnement, en évaluant leurs postes de commandement du point de vue de la conduite d’une MDO au cours d’opérations de combat à grande échelle et avec une appréciation réaliste de la menace. Les chefs au niveau de la division et au-dessus peuvent aider en effectuant une plus grande partie du travail d’intégration interarmées, de ciblage et d’autres processus d’habilitation pour ceux qui se trouvent à l’extrémité tactique.

Dans le même temps, l’armée doit rester concentrée sur l’avenir. La technologie est là, ou à l’horizon, pour rendre possible tout ce qui est discuté dans cet article. Compte tenu de l’état de la sécurité dans le monde, il est peu probable que nous ayons le temps de relever les défis de nos postes de commandement par des changements progressifs. L’armée américaine et l’Occident doivent répondre aux leçons de Chornobaivka avec un sentiment d’urgence, de leadership et d’unité d’objectif sur la modernisation de notre système de commandement et de contrôle et de nos postes de commandement.

Nous remercions tout particulièrement le colonel (retraité) John Antal pour son leadership et son soutien continus à notre armée.

Notes :

1. « Зеленський : Чорнобаївка увійде в історію. Інформаційне агентство » [Zelenskyy : Chornobayivka entrera dans l’histoire], Agence ukrainienne d’information indépendante, 20 mars 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.unian.ua/war/zelenskiy-chornobajivka-uviyde-v-istoriyu-novini-vtorgnennya-rosiji-v-ukrajinu-11751448.html.

2. Фольклорний гурт « Святовид » (ЗСУ) – Чорнобаївка/Chornobaivka (with English subs), vidéo YouTube, postée par « ListenPlay&Enjoy », 3 mai 2022, consultée le 14 mars 2023, https://www. youtube.com/watch?v=cVg8iKwc25I ; ЧОРНОБАЇВКА (Chornobaivka), vidéo YouTube, postée par « Анімаційні історії, » 12 avril 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www. youtube.com/watch?v=X6Itg1km3cg ; Alcohol Ukulele – Чорнобаївка [Alcohol ukulele – Chornobaivka], vidéo YouTube, postée par  » Alcohol Ukulele « , 31 mars 2022, consultée le 15 mars 2023, https://www.youtube.com/watch?v=SK2mIKNcWNY.

3. Zhanna Bezpiatchuk,  » Ukraine War : Chornobaivka Airbase, Symbol of Russian Defeat « , BBC News, 29 novembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.bbc.com/news/world-europe-63754797.

4. David Axe,  » In Southern Ukraine, Kyiv’s Artillery Drops Bridges and Isolates a Whole Russian Army « , Forbes (site web), 29 juillet 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.forbes.com/sites/davidaxe/2022/07/29/in-southern-ukraine-kyivs-artillery-drops-bridges-and-isolates-a-whole-russian-army/?sh=4e11426d1e1a.

5. « Чорнобаївка, де ЗСУ 6 разів знищили окупантів, увійде в історію воєн, – зеленський » [Chornobayivka, où les forces armées de l’Ukraine ont détruit 6 fois les occupants, entrera dans l’histoire des guerres, – Zelenskyy], РУДАНА, 20 mars 2022, consulté le 14 mars 2023, https : //rudana. com.ua/news/chornobayivka-de-zsu-6-raziv-znyshchyly-okupantiv-uviyde-v-istoriyu-voyen-zelenskyy ; Julie Coleman,  » Ukraine Says It’s Killed one of Russia’s Top Generals in Ukraine « , Business Insider, 25 mars 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www. businessinsider.com/ukraine-claims-its-killed-one-of-russias-top-generals-in-ukraine-2022-3 ; Jay Beecher, « Update : Ukrainian Rocket Strike Killed Twelve Russian Officers near Kherson », Kyiv Post (site web), 13 juillet 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.kyivpost. com/post/2295 ; « Пекло для рашистів на півдні України : вражаюча кількість знищених об’єктів та техніки армії РФ за одну добу » [Enfer pour les soldats russes dans le sud de l’Ukraine : Un nombre impressionnant d’objets et d’équipements de l’armée russe détruits en une journée], Defense Express, 6 août 2022, consulté le 14 mars 2023, https://defence-ua.com/news/peklo_dlja_rashistiv_na_pivdni_ukrajini_vrazhajucha_kilkist_znischenih_objektiv_ta_tehniki_armiji_rf_za_odnu_dobu-8452. html ; « Ворожий склад з боєприпасами та командний пункт 247 десантно-штурмового полку знищено в Чорнобаївці, – ОК ‘Південь’ ». [L’entrepôt ennemi contenant des munitions et le poste de commandement du 247e régiment d’assaut aéroporté ont été détruits à Chornobayivka, – OK  » Pivden « ], Censor.net, 23 août 2022, consulté le 14 mars 2023, https://censor.net/ua/news/3362604/vorojyyi_sklad_z_boyeprypasamy_ta_komandnyyi_punkt_247_desantnoshturmovogo_polku_znyscheno_v_chornobayivtsi.

6. Olena Roshchina, « Another General : Commander of Russia’s 49th Army Killed by Ukrainian Armed Forces, Says Arestovych « , Ukrayinska Pravda, 25 mars 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.pravda.com.ua/eng/news/2022/03/25/7334482/ ; Ben Tobias,  » Russian General Yakov Rezantsev Killed in Ukraine « , BBC News, 26 mars 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.bbc.com/news/world-europe-60807538.

7. Phelan Chatterjee et Sam Hancock,  » Ukraine War : Exiled Governor Reports Strike on ‘Wagner HQ’ « , BBC News, 12 décembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.bbc.com/news/world-europe-63933132 ; David Axe,  » The Ukrainians Keep Blowing Up Russian Command Posts and Killing Generals « , Forbes (site web), 23 avril 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.forbes. com/sites/davidaxe/2022/04/23/the-ukrainians-keep-blowing-up-russian-command-posts-and-killing-generals/?sh=5f78a6f9a350 ; John Varga, Tom Watling et Katherine McPhillips, « Zelensky Launches Christmas Revenge Attack on Russian HQ before Jet Explodes », Express, 27 décembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.express.co.uk/news/world/1713889/ukraine-live-war-zelensky-russian-hq-hit-kherson-region-putin-belarus-mig-31-fire.

8. William Booth, Robyn Dixon et David L. Stern, « Russian Generals Are Getting Killed at an Extraordinary Rate », Washington Post (site web), 26 mars 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.washingtonpost.com/world/2022/03/26/ukraine-russan-generals-dead/ ; Will Stewart et David Averre, « Putin ‘Has Lost 160 Generals and Colonels among 1,500 Officers’, Ukrainian Military Official Claims », Daily Mail Online, 28 novembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.dailymail.co.uk/news/article-11477163/Putin-lost-160-generals-colonels-1-500-officers-Ukrainian-military-official-claims.html.

9. Tom Nagorski et Joshua Keating, « Ukraine Mystery : Why Have So Many Russian Generals Been Killed ? », Grid News, 7 avril 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.grid.news/story/global/2022/04/08/ukraine-mystery-why-have-so-many-russian-generals-been-killed/ ; Austin Wright, « Why Russia Keeps Losing Generals », Foreign Policy (site web), 20 juillet 2022, consulté le 14 mars 2023, https://foreignpolicy.com/2022/07/20/why-russia-keeps-losing-generals-ukraine/.

10. Sébastian Seibt,  » Devastating Strike on Russian Military Base in Ukraine Exposes ‘Gross Criminal Incompetence’ « , France 24, 4 janvier 2023, consulté le 14 mars 2023, https://www.france24.com/en/europe/20230104-devastating-strike-on-russian-military-base-in-ukraine-exposes-gross-criminal-incompetence.

11. Jeffrey Engstrom, Systems Confrontation and System Destruction Warfare : How the Chinese People’s Liberation Army Seeks to Wage Modern Warfare (Santa Monica, CA : RAND Corporation, 2018), consulté le 14 mars 2023, https://www.rand.org/pubs/research_reports/RR1708.html.

12. Mykhaylo Zabrodskyi et al, « Preliminary Lessons in Conventional Warfighting from Russia’s Invasion of Ukraine : February-July 2022 « , Royal United Services Institute, 30 novembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://rusi.org/explore-our-research/publications/special-resources/preliminary-lessons-conventional-warfighting-russias-invasion-ukraine-february-july-2022.

13. Samuel Northrup,  » New Army Vehicles Being Developed to Counter Modern Threats « , Army.mil, 3 avril 2019, consulté le 14 mars 2023, https://www.army.mil/article/219567/new_army_vehicles_being_developed_to_counter_modern_threats.

14. Michael Greenberg, « It’s Time to Fix the Command Post : Optimizing Headquarters’ Mobility, Survivability, and Interoperability for the Future Fight », Modern War Institute at West Point, 19 août 2020, consulté le 14 mars 2023, https://mwi.usma.edu/its-time-to-fix-the-command-post-optimizing-headquarters-mobility-survivability-and-interoperability-for-the-future-fight/.

15. John F. Antal, 7 Seconds to Die : A Military Analysis of the Second Nagorno-Karabakh War and the Future of Warfighting (Philadelphie : Casemate, 2022).

16. Army Techniques Publication 6-0.5, Command Post Organization and Operations Army (Washington, DC : U.S. Government Publishing Office [GPO], 1er mars 2017), 1-1, consulté le 14 mars 2023, https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/pdf/web/ATP%206-0_5%20(final).pdf.

17. Ibid.

18. Field Manual (FM) 6-0, Commander and Staff Organization and Operations (Washington, DC : U.S. GPO, 16 mai 2022), 1-3, consulté le 14 mars 2023, https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/ARN35404-FM_6-0-000-WEB-1.pdf.

19. Frederick Winslow Taylor, The Principles of Scientific Management (New York : Harper & Brothers, 1911).

20. John F. Price Jr, « Napoleon’s Shadow : Facing Organizational Design Challenges in the U.S. Military « , Joint Force Quarterly 68 (1er trimestre 2013) : 48-52, consulté le 14 mars 2023, https://ndupress.ndu.edu/Portals/68/Documents/jfq/jfq-68/JFQ-68_48-52_Price.pdf.

21. Jaspreet Gill, « At Project Convergence, Data Management Is Army’s Biggest Challenge », Breaking Defense, 15 novembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://breakingdefense.com/2022/11/at-project-convergence-data-management-is-armys-biggest-challenge/.

22. Stew Magnuson, « Army Scrambles to Make Command Posts Survivable », National Defense (site web), 1er décembre 2017, consulté le 14 mars 2023, https://www.nationaldefensemagazine.org/articles/2017/12/1/army-scrambles-to-make-command-posts-survivable.

23. Jeremy Horton et Ted Thomas, « Adapt or Die : Command Posts – Surviving the Future Fight », Army.mil, 27 mai 2020, consulté le 14 mars 2023, https://www.army.mil/article/235968/adapt_or_die_command_posts_surviving_the_future_fight.

24. Justin T. DeLeon et Paolo G. Tripodi, « Eliminating Micromanagement and Embracing Mission Command », Military Review 102, no. 5 (septembre-octobre 2022) : 88-98, consulté le 14 mars 2023, https://www.armyupress.army.mil/Journals/Military-Review/English-Edition-Archives/September-October-2022/DeLeon-Tripodi/.

25. U.S. Army Center for Army Lessons Learned (CALL), National Training Center Operations Group Fire Support Handbook (Fort Leavenworth, KS : CALL, novembre 2020), consulté le 14 mars 2023, https://usacac.army.mil/sites/default/files/publications/21558.pdf.

26. Federico Clemente Clemente, Jan Willem Streefkerk et Marcel Scherrenburg, The Future of the Command Post, part 1 (Utrecht, NL : NATOC2COE, janvier 2019), consulté le 14 mars 2023, https://c2coe.org/download/the-future-of-the-command-post-part-1/.

27. Nick, Mordowanec, « Intelligence Report Reveals 3 Intrinsic Russian Tactical Unit ‘Weaknesses’ », Newsweek (site web), 29 novembre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.newsweek.com/intelligence-report-reveals-3-intrinsic-russian-tactical-unit-weaknesses-1763215.

28. FM 3-0, Operations (Washington, DC : U.S. GPO, 1er octobre 2022), 1-3, consulté le 14 mars 2023, https://armypubs.army.mil/epubs/DR_pubs/DR_a/ARN36290-FM_3-0-000-WEB-2.pdf.

29. Ibid, Glossaire-3.

30. John Antal, « Sooner Than We Think : Command Post Survivability and Future Threats », 4 août 2022, dans The Convergence : An Army Mad Scientist Podcast, épisode 62, 44:13, consulté le 14 mars 2023, https://theconvergence.castos.com/episodes/62-sooner-than-we-think-command-post-survivability-and-future-threats-with-col-ret-john-antal.

31. FM 3-0, Opérations, Glossaire-5.

32. Christian Brose, The Kill Chain : Defending America in the Future of High-Tech Warfare (New York : Hachette Books, 21 avril 2020) ; FM 3-0, Operations, 3-3.

33. « What Is a Data Mesh », IBM, consulté le 14 mars 2023, https://www.ibm.com/topics/data-mesh.

34. « What is DevSecOps ? », IBM, consulté le 14 mars 2023, https://www.ibm.com/topics/devsecops.

35. Daniel Newman,  » Why the ‘As-A-Service’ Model Works so Well for Digital Transformation « , Forbes (site web), 27 juin 2017, consulté le 14 mars 2023, https://www.forbes.com/sites/danielnewman/2017/06/27/why-the-as-a-service-model-works-so-well-for-digital-transformation/?sh=7ed867b86490.

36. FM 3-0, Opérations, glossaire-6.

37. Michiel van Amerongen, « Quantum Technologies in Defence & Security », Revue de l’OTAN, 3 juin 2021, consulté le 14 mars 2023, https://www.nato.int/docu/review/articles/2021/06/03/quantum-technologies-in-defence-security/index.html.

38. Sun Tzu, L’art de la guerre, avec une introduction de B. H. Liddell Hart, trad. Samuel B. Griffith (Oxford : Oxford University Press, 1971), 66.

39. FM 3-0, Opérations, Glossaire-6.

40. Scott Schroeder (Command Sergeant Major, retraité, U.S. Army Forces Command), lors d’une discussion sur le commandement et le contrôle avec l’auteur Matthew Arrol, 6 décembre 2022.

41. Lisa Daigle,  » Army Goes Deep into VR/AR for Training and Combat « , Military Embedded Systems, 17 octobre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://militaryembedded.com/radar-ew/sensors/army-goes-deep-into-vrar-for-training-and-combat.

42.  » NIST-Led Research Shows Advantages of Quantum-Enabled Communications for Internet « , National Institute of Standards and Technology, 28 octobre 2022, consulté le 14 mars 2023, https://www.nist.gov/news-events/news/2022/08/nist-led-research-shows-advantages-quantum-enabled-communications-internet.

43. Avatar, réalisé par James Cameron (Los Angeles : 20th Century Studios, 2009).

44. Robert Blair, « The Grave », All Poetry, consulté le 14 mars 2023, https://allpoetry.com/The-Grave-.


Le lieutenant-général Milford « Beags » Beagle Jr. est le commandant général du centre des armes combinées de l’armée américaine à Fort Leavenworth, au Kansas, Il a occupé de multiples fonctions de direction, du niveau de la section à celui de la division, et ses déploiements professionnels ont eu lieu dans le monde entier, d’Hawaï à la République de Corée. Il a précédemment occupé le poste de commandant général de la 10e division de montagne (légère). Il est titulaire d’une licence de l’université d’État de Caroline du Sud, d’une maîtrise de l’université d’État du Kansas, d’une maîtrise de l’École des hautes études militaires et d’une maîtrise de l’École supérieure de guerre de l’armée.

Le général de brigade Jason C. Slider, est le directeur du centre d’excellence du commandement de mission de l’armée américaine. Il est titulaire d’une maîtrise en études stratégiques de l’Air War College et d’une licence en anthropologie de l’université de Louisville. Ses déploiements opérationnels comprennent plusieurs missions dans la Corne de l’Afrique, aux Philippines et en Afghanistan.

Le lieutenant-colonel Matthew Arrol, est le commandant de l’équipe de soutien interarmées de l’armée américaine à Hurlburt Field, en Floride. Il est membre du groupe de capacités intégrées de l’OTAN sur les tirs indirects. Il est diplômé du Command and General Staff College, et sa formation civile comprend une licence en histoire et en sciences politiques de l’université de l’État du Michigan et un MBA de l’université du Michigan oriental. Sa dernière affectation opérationnelle a été celle de commandant adjoint du 19e détachement de coordination du champ de bataille à Ramstein, en Allemagne, où il a servi de 2016 à 2020.

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Septentrion. Réflexion sur l’engagement de la France au Mali (2013-2022)

admin Informations 17 mai 202317 mai 2023Guerre, Les menaces, Libres-propos, Opex 0 commentaire

Septentrion. Réflexion sur l’engagement de la France au Mali (2013-2022)

 

 

par Ana Pouvreau – Revue Conflits – publié le 17 mai 2023

https://www.revueconflits.com/septentrion-reflexion-sur-lengagement-de-la-france-au-mali-2013-2022/

Après le retrait précipité de la force Barkhane du Mali en novembre 2022, la perte de 58 soldats français sur ce théâtre d’opération continue de hanter les mémoires. Dans son ouvrage intitulé Septentrion, le colonel François-Régis Dabas tente de dissiper les doutes, l’amertume et le chagrin en plongeant le lecteur dans un récit de guerre intense et en recontextualisant l’engagement français au Mali. 

De l’intervention française au Mali, les Français se souviennent que dès 2013, des troupes avaient été déployées dans le cadre de l’opération Serval, puis de l’opération Barkhane, un an plus tard, pour lutter contre les groupes armés salafistes djihadistes au Sahel et au Sahara, et ce, à la demande du gouvernement malien. Au cours de la dernière décennie, l’armée française perdit 58 soldats sur ce théâtre d’opération. Les cérémonies funèbres se succédèrent dans la cour d’Honneur de l’Hôtel national des Invalides à Paris en hommage à ces valeureux combattants tombés au combat, avec en point d’orgue la mort de treize soldats français, le 25 novembre 2019.

Hommages aux morts

Le 4 janvier 2021, alors que trois soldats français venaient de perdre la vie au Mali, la sergent Yvonne Huynh, 33 ans, mère d’un garçon de 12 ans, fut la première femme tuée au combat depuis le début de l’intervention française au Sahel. Cette mère de famille est décédée dans l’explosion de son véhicule blindé, tout comme son jeune camarade, le brigadier Loïc Risser âgé de 24 ans, provoquant un choc dans l’opinion publique.

En France, l’année 2021 fut par conséquent celle du doute et de la peur de l’enlisement, d’autant que l’on apprit que les nouvelles autorités maliennes parvenues au pouvoir après le coup d’Etat du mois d’août 2020, s’appuyaient désormais, aux dépens des Français, sur les mercenaires de la société militaire privée russe Wagner pour combattre les rebelles djihadistes du Nord-Mali. Le 9 novembre 2022, Emmanuel Macron annonça soudain  la fin de l’opération Barkhane1. La France allait retirer ses troupes. Une question surgit : à quoi avait donc servi la mort de tous ces soldats français au fil de ces années si éprouvantes pour les familles de ces militaires ?

Dans son ouvrage intitulé Septentrion2, le colonel de l’armée de terre, François-Régis Dabas, tente de dissiper les doutes, l’amertume et le chagrin en plongeant le lecteur dans un récit de guerre intense et en recontextualisant l’engagement français au Mali. Lui, reste convaincu que, « peu importe finalement l’engrenage qui mène à la fin d’Illion, ce sont les exploits des Achéens et des Atrides qui nous intéressent, pour goûter leurs vertus héroïques et faire grandir notre humanité ! ».

Au sein du Groupement tactique « Désert ardent » (GTD Ardent), l’unité de combat qu’il commanda au Nord du Mali, le colonel Dabas a participé, entre septembre 2016 et février 2017, à une phase décisive de l’opération Barkhane. Il a mené un combat direct contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) sur un terrain-clé, l’Adrar des Ifoghas, en plein cœur de l’Azawad, l’un des principaux massifs montagneux du Sahara. « Dans les périphéries du Sud algérien et du Nord malien, c’est le territoire des Touaregs qu’aucun des deux Etats concernés ne contrôle véritablement » écrit-il3. A la suite de la guerre civile algérienne (1991-2002) et de la guerre en Libye en 2011, l’Azawad est devenu un repaire de groupes salafistes djihadistes alimenté par un afflux de combattants. C’est sur ce territoire que la guerre au Mali avait éclaté en 2012 après que les rebelles touarègues en eurent proclamé l’indépendance. La France y a agi en partenariat avec la Mauritanie, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad et elle y a augmenté ses effectifs déployés dans le cadre de Barkhane de 3000 soldats au début de l’opération, jusqu’à plus de 5000 en février 2020.

Stopper les islamistes

Tandis que l’opération Serval avait pour objectif de stopper la progression des islamistes vers Bamako depuis le Nord-Mali l’opération Barkhane, à compter de l’été 2014, a été régionalisée sur une zone grande comme dix fois l’Hexagone. En France, après les attentats islamistes meurtriers de 2015 et 2016, le doute n’était plus permis : il fallait agir. Comme le rappelle l’auteur : « Pour les hommes et les femmes du GTD Ardent et pour moi-même, la mission est sacrée : nous partons combattre et anéantir le serpent islamiste en terre africaine pour protéger nos compatriotes sur le territoire national »4. Le gouvernement français met alors en exergue le rôle bénéfique de Barkhane au profit des populations locales qu’elle entend protéger des groupes terroristes5.

Dans l’Adrar des Ifoghas, le GTD Ardent du colonel Dabas, fort de 800 combattants, s’est notamment retrouvé aux prises avec le groupe touareg Ansar Edin soutenu par l’AQMI. Sa mission était d’en neutraliser le potentiel de combat, dans le cadre d’une phase d’effort du plan de campagne stratégique, la phase « Septentrion »6. S’en sont suivis, pour les forces françaises, des combats acharnés dans un environnement désertique particulièrement hostile à toute présence humaine, où la température avoisinait souvent les 50°C.

Combats féroces

Quelques années plus tard, l’enthousiasme du début de l’opération s’est progressivement estompé en raison de la férocité des combats et des pertes humaines qui en ont résulté. La presse française s’est alors mise à évoquer les difficultés pour la France d’évoluer au Mali dans « un environnement local gangrené par la corruption et les contentieux entre les chefs traditionnels, les trafiquants d’armes, de migrants et de drogue, sur fond de corruption du pouvoir central »7 selon le journal Le Monde du 14 janvier 2020. Le piège menaçait alors de se refermer sur le gouvernement désormais confronté au dilemme suivant : poursuivre le combat en accroissant inévitablement le risque d’enlisement et de compromission avec des armées locales prédatrices ou se retirer. Ce qui aurait eu pour conséquence de « livrer les pays du Sahel et leurs populations au chaos et à l’emprise d’une dictature religieuse ». 

Puis, on annonça qu’une junte militaire, hostile à la France, avait pris le pouvoir à Bamako, le 19 août 2020, à la suite d’un coup d’Etat. Les autorités françaises annoncèrent une réduction prochaine des effectifs de la force Barkhane et se dirent ouvertes « à des négociations avec des groupes sahéliens, à l’exception des directions d’Al-Qaïda et du groupe Etat islamique »8. Ce positionnement a marqué le début de la fin de l’engagement de la France au Mali.

Erreurs religieuses

Comment expliquer cet échec ? Peut-être aurait-il fallu aborder la guerre au Mali sous un angle différent. Pour l’éminent spécialiste de l’Afrique Bernard Lugan9, la grande erreur qui a été faite par les décideurs politiques français, « c’est de croire que le problème c’est la question religieuse ». « L’islamisme au Sahel », analyse-t-il, « n’est que la surinfection de plaies ethniques millénaires », ajoutant que même si demain les groupes djihadistes étaient tous détruits, les problèmes entre les peuples du Nord – des peuples guerriers nomades qui cultivent la vertu de la minorité et de la guerre – et les peuples du Sud, majoritaires et sédentaires, persisteraient. L’islam, dans ces régions, date de quelques siècles. En revanche, l’opposition entre Sudistes et Nordistes date du Néolithique. Après la disparition de l’immense Afrique occidentale française (AOF), de nouvelles frontières sont apparues et les rapports de force entre des peuples multimillénaires ont été bouleversés, mais on assisterait aujourd’hui à un retour à l’ordre ancien dans la zone sahélienne10. En ce qui concerne l’avenir proche, alors que la France a récemment rapatrié au Niger ses moyens qui étaient au Mali et au Burkina Faso, on peut s’interroger sur la pérennité de cette stratégie, attendu que l’Etat nigérien est lui-même en guerre sur quatre fronts.

La poursuite de cette réflexion sur les conséquences pour la France de son engagement au Mali demeure nécessaire. En effet, alors que l’exercice militaire de grande ampleur « Orion », le plus vaste depuis 30 ans, vient de se dérouler sur fond de guerre en Ukraine, en vue de préparer les armées françaises à un conflit de haute intensité en durcissant leur entraînement, il faut affronter l’idée angoissante d’un engagement potentiel de nos forces dans « la guerre de demain ». C’est de cette réflexion que naîtra, il faut l’espérer, l’idée qu’il faut par tous les moyens, œuvrer en faveur de la paix et refuser de se laisser entraîner dans un conflit sanglant.


1 Barkhane avait succédé aux opérations Serval au Mali (11 janvier 2013 – 1er août 2014) et Epervier au Tchad (13 février 1986 -1er août 2014).

2 François-Régis DABAS : Septentrion, Paris, Mareuil Editions, 2023.

3 Septentrion, p. 205.

4 Septentrion, p. 29.

5 Septentrion, p.109.

6 https://www.dailymotion.com/video/x8j5hmc

7 https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/01/14/paris-face-aux-nouveaux-defis-du-djihad-sahelien_6025820_3232.html

8 https://www.lefigaro.fr/actualite-france/deux-soldats-francais-tues-samedi-au-mali-20210102

9 https://www.youtube.com/watch?v=VVPww3GUT-A

10 Bernard Lugan : Histoire du Sahel des origines à nos jours, Paris, Editions du Rocher, 2023.

Ana Pouvreau

Spécialiste des mondes russe et turc, docteure ès lettres de l’université de Paris IV-Sorbonne et diplômée de Boston University en relations internationales et études stratégiques. Éditorialiste à l’Institut FMES (Toulon). Auteure de plusieurs ouvrages de géostratégie. Auditrice de l’IHEDN.
 
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Enlèvement d’Olivier Dubois : une enquête pointe des défaillances de l’armée française

admin Informations 17 mai 202317 mai 2023Forces armées, Les menaces, Opex 0 commentaire

Enlèvement d’Olivier Dubois : une enquête pointe des défaillances de l’armée française

Les militaires français de l’opération Barkhane, au Sahel, auraient tenté d’utiliser le journaliste français pour localiser un chef djihadiste.

 

Par M.P. avec AFP – Le Point – publié le 16 mai 2023

https://www.lepoint.fr/monde/enlevement-d-olivier-dubois-une-enquete-pointe-des-defaillances-de-l-armee-francaise-16-05-2023-2520451_24.php

La force francaise Barkhane etait informee du projet du journaliste francais de rencontrer dans le Nord-Mali un dirigeant djihadiste affilie a Al-Qaida, via un fixeur servant d'indicateur aux armees. Les militaires ont envisage d'utiliser cette prise de rendez-vous pour localiser cet emir avant de renoncer en raison des risques encourus.
La force française Barkhane était informée du projet du journaliste français de rencontrer dans le Nord-Mali un dirigeant djihadiste affilié à Al-Qaïda, via un fixeur servant d’indicateur aux armées. Les militaires ont envisagé d’utiliser cette prise de rendez-vous pour localiser cet émir avant de renoncer en raison des risques encourus. © YVES HERMAN / POOL / AFP

Les militaires de l’opération antidjihadiste au Sahel Barkhane auraient tenté d’utiliser le journaliste français Olivier Dubois à son insu pour localiser un chef djihadiste, sans empêcher son enlèvement au Mali en 2021, affirme une enquête menée par plusieurs médias français.

La force française Barkhane était informée du projet du journaliste français de rencontrer dans le Nord-Mali un dirigeant djihadiste affilié à Al-Qaïda, via un fixeur servant d’indicateur aux armées. Les militaires ont envisagé d’utiliser cette prise de rendez-vous pour localiser cet émir avant de renoncer en raison des risques encourus, d’après Le Monde, qui a mené l’enquête avec Libération, RFI et TV5Monde.

Aucun commentaire du ministère des Affaires étrangères

Libéré en mars dernier, Olivier Dubois avait été kidnappé le 8 avril 2021 à Gao, dans le nord du Mali, par le GSIM, principale alliance djihadiste au Sahel liée à Al-Qaïda. Il collaborait notamment avec le quotidien Libération et le magazine Le Point et vivait au Mali depuis 2015. D’après les médias français ayant eu accès à des documents judiciaires français et maliens relatifs à l’affaire, les militaires de Barkhane auraient renoncé in extremis à l’opération, mais n’auraient pas déployé les moyens adaptés pour empêcher l’enlèvement d’Olivier Dubois à Gao, où il devait rencontrer Abdallah Ag Albakaye.

Chargée d’enquêter en interne sur cette affaire, l’inspection générale des armées (IGA) a conclu fin 2021 qu’il n’y avait « pas eu de faute personnelle au sein de la force Barkhane », mais que « la sensibilité du sujet n’a pas fait l’objet d’une prise en compte à un niveau suffisant permettant de conduire […] une action dissuasive à l’encontre du journaliste ».

Contacté par l’AFP, le ministère français des Affaires étrangères a refusé tout commentaire « en raison de l’instruction judiciaire » en cours. L’état-major n’a quant à lui pas souhaité faire de commentaires. De source diplomatique, on rappelle qu’une « lettre rouge » – pour fortement déconseillée – avait été envoyée à Olivier Dubois la veille de son rapt pour le dissuader de faire ce voyage. Le journal Libération avait de son côté refusé le projet d’interview d’Olivier Dubois en raison des risques encourus.

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Les cinq technologies militaires sur lesquelles l’armée française devrait miser

admin Informations 16 mai 202316 mai 2023Armements & équipements, Cyberdéfense, Drones, Guerre, Les menaces, LPM 0 commentaire

Les cinq technologies militaires sur lesquelles l’armée française devrait miser

par Phénix — Slate.fr – publié le 15 mai 2023

https://www.slate.fr/story/246008/tribune-technologies-militaires-futur-armee-lutte-antidrones-hypersoniques-defense


 

[TRIBUNE] L’analyse des conflits en Ukraine et dans le Haut-Karabakh permet de mieux cerner ce que la défense devrait faire de son budget inédit.

En janvier dernier, Alex Karp, le PDG d’un éditeur de logiciels, expliquait devant l’audience de Davos que sa société est «responsable de la majorité des tirs ciblés en Ukraine». Alex Karp est le patron de Palantir Technologies, une entreprise de Big Data qui, au même titre que Starlink, Planet Labs, Maxar, SunCalc ou GIS Arta, est devenue incontournable dans les milieux de la défense depuis le début de «l’opération militaire spéciale» en Ukraine.

Basé à Denver dans le Colorado, Palantir intègre, agrège et traite des données non structurées telles que des images satellitaires et de radars à synthèse d’ouverture, des images thermiques, des feeds de réseaux sociaux, des vidéos, puis «superpose» l’information traitée à des cartes numériques du champ de bataille, avant de faire des recommandations de cibles qui sont remontées à l’opérateur. Dans un échange avec le journaliste David Ignatius, Alex Karp renchérit: «La puissance des logiciels militaires algorithmiques est maintenant si grande qu’on pourrait la comparer à la possession d’armes nucléaires tactiques face à un adversaire disposant seulement d’armes conventionnelles.»

Aucun doute, nous sommes entrés dans une ère nouvelle, ce que les Américains appellent «algorithmic warfare». Une ère qui place la technologie au cœur de l’écosystème de la guerre de haute intensité. Pour la France, puissance moyenne avec des ambitions globales, il s’agit au plus vite de rattraper le retard.

Le grand bond en avant de la loi de programmation militaire

Dans un contexte lourd d’accélération des dépenses militaires partout dans le monde, la loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 prévoit d’allouer 413 milliards d’euros à la «transformation des armées», dont 10 milliards à l’innovation de la défense, répartis entre quatre niveaux principaux.

D’abord, le spatial: création d’un centre de commandement C4 (computerized command, control, communications) des opérations spatiales développé dans le cadre du programme «Action et résilience spatiales» (ARES), la programmation des satellites patrouilleurs-guetteurs, de lasers en orbite et de la conduite d’opérations spatiales militaires. Ensuite, l’exploitation des technologies de robotique sous-marine jusqu’à 6.000 mètres (drones sous-marins, robots, lutte antimines marines). Puis, un gros coup d’accélérateur en matière de cyberdéfense, autant en cybersécurité qu’en action numérique, et enfin, investissement renforcé dans le champ informationnel.

Toutefois, les projets semblent encore très nombreux pour des moyens limités. Ainsi, dans le document de référence de l’Agence de l’innovation de défense, on trouve pas moins de quatorze «thèmes d’intérêt», allant de la sécurité de la donnée jusqu’à la capacité amphibie du futur, en passant par le renforcement de la chaîne de commandement des opérations interarmées (C2 IA) et de l’interopérabilité avec les alliés, tandis que, dans la LPM, les contours des budgets alloués aux «technologies de rupture»telles que l’hypervélocité ou le quantique restent flous.

Souci de confidentialité ou manque de définition des projets? Ou dilemme classique des armées, écartelées entre des ambitions multiples (dissuasion, modernisation des trois armées, espace et cyber, projection globale, etc.) et ses budgets structurellement insuffisants? Tirant les leçons des conflits en Ukraine et du Haut-Karabakh, nous allons examiner les cinq chantiers qui nous paraissent essentiels à l’horizon 2030.

L’hypervélocité

Les armes hypersoniques combinent les avantages des missiles balistiques (vitesse) et des missiles de croisière (précision). Il en existe deux types, les missiles de croisière hypersoniques, qui peuvent être lancés de sous-marins, de navires de guerre ou de tout autre vecteur, et les planeurs hypersoniques, qui doivent être libérés dans l’espace avant de rentrer dans l’atmosphère. Extrêmement rapides et manœuvrables, les armes hypervéloces adoptent aussi une trajectoire alambiquée qui les rend beaucoup plus difficiles à détecter et à intercepter, posant un problème majeur aux défenses antiaériennes.

Dans ce domaine, la Chine, avec les planeurs hypersoniques Dongfeng-17 et Xingkong 2, et la Russie avec le Kinjal, le Zircon, ou l’Avangard, lancé depuis l’espace à une vitesse époustouflante de Mach 27, disposent d’une avance notable sur les États-Unis et sur l’Europe. Afin de contrer la menace, les Américains ont développé une constellation de satellites de surveillance en orbite basse, avec des capteurs susceptibles de détecter une attaque, et leur armée vient de lancer la production de vingt-quatre missiles hypersoniques. La France n’est pas en reste avec son projet d’ASN4G, futur missile de la composante aéroportée de la dissuasion.

En résumé, avec leur vitesse extrême et leur manœuvrabilité, les armes hypervéloces peuvent atteindre des objectifs dans la profondeur adverse ou en mer (un commandant de porte-avions aurait au mieux quelques secondes pour réagir); elles remettent en question l’idée d’une frappe nucléaire préemptive de l’adversaire sur les lanceurs de missiles balistiques; et, surtout, devenues des «marqueurs» stratégiques, elles se situent aux premières loges de la guerre psychologique que se mènent États-Unis, Chine et Russie.

Les essaims de drones et la lutte antidrones

L’Ukraine et, avant ça, le Haut-Karabakh ont été le théâtre d’une utilisation massive de drones armés qui frappent par leur disparité dans l’usage, la taille et le système de guidage. En l’absence d’une solution de lutte antidrones (LAD) universelle, les options pour contrer la menace sont: le brouillage des télécommandes ou des signaux GNSS, détection de l’émetteur du télépilote, capteurs thermiques ou systèmes radars adaptés pour contrer les drones kamikazes tels que les Shahed 136.

Mais l’autre sujet qui intéresse toutes les armées modernes, ce sont les drones en essaim, aériens, marins ou même sous-marins, capables de se déplacer de façon coordonnée, voire autonome grâce à l’intelligence artificielle, afin de réaliser des missions de reconnaissance, de brouillage ou d’attaque, en saturant et en leurrant l’adversaire.

Dans le cadre de leurs tests, Northrop Grumman et Raytheon ont déjà réussi à manœuvrer entre 100 et 200 drones de façon simultanée vers une cible donnée. En France, il y a le projet Icare de LAD et Dronisos, de Naval Group, avec les kits Icarus Swarms, essaims de minidrones dédiés à des missions précises telles que brouillage. Là encore, la prochaine LPM sera l’occasion de rattraper le temps perdu.

Les armes à énergie dirigée

Il s’agit des armes non cinétiques, de type laser ou micro-ondes par exemple. Leur usage est surtout envisagé dans la défense sol-air ou surface-air, notamment dans le cadre de la lutte antidrones ou de la protection de zone. Plus explicitement, la LPM devrait financer des recherches sur les armes laser, permettre d’étudier la faisabilité d’armes à faisceaux de particules et de développer des canons électromagnétiques (projets Pegasus et Rafira).

Le principe consiste à créer un champ électromagnétique entre deux rails conducteurs, soumettant un projectile à une forte accélération pour le lancer à très grande vitesse sur une cible parfois distante de 200 kilomètres. Ces nouvelles armes pourraient équiper des navires de surface, dans le cadre de la lutte antiaérienne.

Le combat collaboratif

Inspiré du Network-centric warfare américain, le combat collaboratif est un vecteur essentiel de la modernisation de l’armée française. Numérisation et circulation des informations en temps réel sur le champ de bataille, synchronisation des armes, utilisation de l’intelligence artificielle… Le combat collaboratif est le futur de la guerre de haute intensité, comme le démontre le conflit ukrainien.

L’idée, c’est que la supériorité opérationnelle future passera par la capacité d’échanger des volumes massifs de données en temps réel, de les traiter à grande vitesse afin de parvenir à la bonne décision avant l’adversaire (identification de la cible et sélection de la pièce d’artillerie, par exemple), et tout cela dans un cadre interarmées, donc multimilieux/multichamps, c’est-à-dire terrestre, maritime, aérien, exo-atmosphérique, cyber, électromagnétique et informationnel.

Bien qu’en avance sur ce sujet central de la guerre moderne (cf. le rapport de l’institut Rand, «Learning from the French Army’s Experience with Networked Warfare»), notamment avec le système d’information du combat Scorpion expérimenté lors de l’opération Barkhane, la France reste en retard par rapport aux États-Unis, qui sont en train de mettre en place une constellation de satellites en orbite basse afin de permettre une communication instantanée avec les soldats au sol.

Les modèles prédictifs appliqués à la défense

La transformation du champ de bataille par le Big Data, l’interconnectivité et les supercalculateurs n’en est encore qu’à ses débuts. Il y a déjà l’utilisation massive du renseignement en sources ouvertes (OSINT); la prochaine frontière serait la capacité de prévoir les conflits.

Échaudés par l’insurrection du 6 janvier 2021, des centres de recherche américains tels que CoupCast, Armed conflict location & event data project (Acled) ou PeaceTech Lab travaillent sur des programmes de prévision de troubles et de menaces à la sécurité intérieure, notamment par l’utilisation du «gradient boosting» (méthode utilisée pour construire des modèles prédictifs) et les «neural networks» (utilisés pour le deep learning).

L’autre exemple, c’est GIDE, pour Global information dominance experiment –rien à voir avec André. Mis en place il y a deux ans par le département américain de la Défense, GIDE récupère les données de capteurs positionnés un peu partout dans le monde –satellites, radars, sources ouvertes, etc. Le tout, traité par des supercalculateurs et assisté par l’intelligence artificielle, génère des modèles censés prévoir les intentions de l’ennemi, de façon à annihiler tout effet de surprise et à préparer une riposte adaptée avant que l’adversaire n’ait frappé. À quand un Minority Report de la guerre?

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