Le rapport Barkhane est-il écrit à l’avance ?

Le rapport Barkhane est-il écrit à l’avance ?


Par Jean-Marc Tanguy – Le mamouth -publié le 7 novembre 2020

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Il faut « rester autrement » (…) « dans un format moins lourd » et « poursuivre des actions ponctuelles avec Sabre ». La déclaration ne vient pas d’une des colombes de l’assemblée, ou d’un ancien commando des forces spéciales, mais de… Thomas Gassilloud, député, un des piliers du groupe Agir, ancien rapporteur du budget de l’armée de terre et ancien réserviste (1). 

Ancien LREM, il peut désormais, dans son groupe Agir (qui reste dans la majorité présidentielle), affirmer certaines spécificités de vues. Jusqu’alors, les réserves sur Barkhane (et non l’engagement des soldats, les opposants font bien à chaque fois la distinction) étaient plutôt à droite, ou à LFI. Mais Gassilloud paie comptant son autonomie : Agir se retrouve marginalisé dans le choix des rapports de la commission de la défense (Jean-Charles Larsonneur n’a reçu, par exemple, qu’une chaise dans le rapport sur les personnels civils), et ne sera donc pas, par exemple, dans le futur rapport Barkhane, à rendre début 2021. 
Un gros morceau, confié à une bosseuse (LREM), Sereine Mauborgne, qui a succédé à Gassilloud sur le rapport forces terrestres. Et d’autant plus facilement qu’elle était en double commande depuis 2017. Une députée, infirmière de formation, qui s’est taillée une réputation de franc-parler et d’expertise, parfois pointue sur certains sujets (MCO, aéromobilité), n’hésitant pas, dans son dernier rapport, à écorner quelques images d’Epinal et enseignes. 
Peut-être de quoi justifier l’auto-inscription de la présidente de la commission de la défense, pour veiller à un travail qui ne s’éloigne pas trop des chemins balisés par l’exécutif. Elle est certes déjà allée sur place, néanmoins, plusieurs députés, sans détours, lui prêtent l’intention claire d’éteindre dans l’oeuf toute velléité de sortir de la vision gouvernementale de Barkhane. 
Une troisième femme avait été désignée avec Mauborgne : Nathalie Serre vient d’être élue députée, et se retrouve donc déjà, sans expérience préalable, bombardée à la tête d’un rapport qui nécessite pourtant l’auto-mobilisation de la présidence « vue l’épaisseur du sujet » (il n’y a rien de sexiste à l’écrire, j’aurais écrit pareil pour un homme). Là où de fins observateurs attendaient plutôt Jean-Louis Thiériot, un des hommes qui monte chez les LR, sur la défense.
Le choix d’une novice est donc plus qu’inhabituel à l’assemblée, où une logique forme de cursus honorum existe bel et bien. Drôle de choix, chez les LR, pour permettre à une députée de faire ses preuves. Une crédibilité qu’il faudra donc, plus que jamais dans ce type d’exercice, consolider avec une ouverture des travaux parlementaires, avec, par exemple, des auditions ouvertes, mais aussi et pourquoi pas, un éclairage du travail parlementaire sur place. 
Mes infops et photos sur le twitter @defense137, infos défense et AJD sur @ajdpresse.
 
(1) Face à l’association des journalistes de défense, mercredi, il a reconnu que « la situation sur place n’est pas bonne, il faut l’assumer. La question n’est pas de rester ou de partir, mais de rester autrement (…). On a été interpellés par la libération de 200 djihadistes au Mali, est-ce qu’on partage une stratégie cohérente avec les Maliens. Le CEMAT dit que l’armée de terre peut tout faire mais, elle ne ne peut pas tout faire à la fois. L’investissement lourd sur Barkhane fait que nos armées s’entraînent de plus en plus à la guerre asymétrique dans le désert avec la supériorité aérienne, mais ne couvre pas l’ensemble du spectre auquel on peut être confronté. On devrait réfléchir à un format moins lourd, plus souple, ne priorisant l’aide que vers les pays qui améliorent leur gouvernance. Dans l’approche de Pau. Il faut aussi continuer des actions ponctuelles avec Sabre qui fait ses preuves et l’a encore fait récemment. Je ne suis pas chef militaire, je peux difficilement me prononcer sur le niveau (…) mais se pose déjà la question du maintien de ce surge-la, et au-delà des moyens, la question est bien celle de notre stratégie globale ».