Pékin menace les États-Unis d’un « prix insupportable » s’ils encouragent l’indépendance de Taïwan
À peine venait-il d’être élu à la Maison Blanche que le président Trump donna la sentiment de prendre ses distances avec le principe de « Chine unique », adopté par les États-Unis au moment de leur reconnaissance officielle de la République populaire de Chine [RPC].
Et, durant son mandat, Washington apporta un soutien notable à Taïwan, via des visites de responsables américains à Taipeh, des passages de navires de l’US Navy dans le détroit de Formose, au nom de la liberté de navigation, des ventes d’armes assez conséquentes [F-16 Viper, missiles anti-navires, systèmes d’artillerie HIMARS, drones, chars Abrams, etc] et un soutien au programme taïwanais de sous-marins. De quoi régulièrement susciter l’ire de Pékin, où l’île est vue comme une province rebelle qui devra réintégrer, tôt ou tard, son giron.
Son successeur, Joe Biden, s’inscrit dans la même logique. Quitte à commettre un impair, comme en octobre dernier, quand il laissa entendre que les États-Unis seraient prêts à intervenir militairement pour défendre Taïwan. Cela étant, il rectifiera le tir trois semaines plus tard on assurant que Washington s’en tiendrait au « Taïwan Act », c’est à dire la loi qui régit ses rapports avec Taipeh depuis 1979 tout en ne remettant pas en cause le principe de Chine unique.
« Nous n’encourageons pas l’indépendance. Nous les encourageons à faire exactement ce que prévoit le Taïwan Act », avait en effet dit M. Biden, le 15 novembre dernier, alors même que Taipeh venait de confirmer la présence d’instructeurs militaires américains aux côtés de ses propres troupes… Finalement, le locataire de la Maison Blanche s’en tint à une position plus « consensuelle », en disant s’opposer « fermement » à toute tentative « unilatérale de changer le statu quo ou de porter atteinte à la paix et à la stabilité dans le détroit de Taïwan », ce qui pouvait s’adresser aussi bien aux dirigeants chinois que taïwanais, bien que Pékin ait encore accentué, cette année, sa pression militaire sur Taipeh.
Quoi qu’il en soit, peu avant, lors d’une vidéo-conférence, le président chinois, Xi Jinping, avait mis en garde son homologue américain au sujet de Taïwan.
« Les autorités taïwanaises ont tenté à plusieurs reprises de s’appuyer sur les États-Unis pour l’indépendance et certains aux États-Unis tentent d’utiliser Taïwan pour contrôler la Chine », avait ainsi relevé M. Xi. Et d’ajouter : « C’est une tendance très dangereuse qui revient à jouer avec le feu ».
Si les propos du président chinois pouvaient sembler mesurés, ceux que vient de tenir son ministre des Affaires étrangères, Wang Yi, le sont nettement moins.
En effet, dans un entretien diffusé par l’agence Chine nouvelle, ce 30 décembre, le chef de la diplomatie chinoise a d’abord accusé les États-Unis d’encourager « l’indépendance » de Taïwan, avant de lancer un sérieux avertissement. « Cela va non seulement placer Taïwan dans une situation extrêmement dangereuse mais aussi mettre les États-Unis devant un prix insupportable », a-t-il affirmé, sans livrer plus de détails.
En outre, M. Wang a accusé implicitement les États-Unis d’utiliser les « droits de l’Homme et la démocratie pour calomnier et encercler la Chine et de nombreux pays en développement » et de « provoquer constamment de nouveaux incidents afin de heurter les relations entre les deux pays ».
Par ailleurs, et alors que Moscou exige de Washington des garanties « juridiques » sur sa sécurité, le ministre chinois a loué la coopération de son pays avec la Russie. « Nous nous sommes opposés ensemble aux ingérences dans les affaires intérieures d’autrui, aux sanctions unilatérales et aux pratiques d’extraterritorialité, devenant des piliers dans la mise en œuvre du véritable multilatéralisme et la préservation de l’équité et de la justice internationales et montrant au monde le sens des responsabilités digne d’un grand pays », a-t-il affirmé.
Et de conclure en se disant « convaincu que l’ordre international ne saurait jamais être saboté, la justice internationale ne saurait jamais s’écrouler et l’hégémonisme ne saurait jamais triompher » tant que « la Chine et la Russie se tiennent côte à côte et approfondissent leur coordination main dans la main ».