Selon le commandant de la force d’action navale, un nouveau porte-avions coûterait au moins 5 milliards d’euros
En novembre 2016, il était estimé que la construction d’un nouveau porte-avions pour la Marine nationale allait coûter au moins 4 milliards d’euros. Mais ce montant avait été évalué au doigt mouillé, dans la mesure où ce montant dépend de plusieurs paramètres, comme, par exemple, les choix technologiques.
Pour y voir plus clair, la ministre des Armées, Florence Parly, a donné le coup d’envoi, en octobre, à une phase d’étude devant répondre à au moins trois questions : quelles menaces aura à affronter ce nouveau porte-avions? Quelles seront ses caractéristiques en fonction des technologies disponibles à l’horizon 2030? Et, enfin, quelles innovations qui en feront « une véritable base avancée de notre marine »?
« Nous devrons être réalistes mais ambitieux. Et grâce à ces études approfondies, imaginatives et rigoureuses, nous pourrons établir l’architecture de ce futur porte-avions et poser les bases de l’organisation industrielle nécessaire pour le bâtir en respectant les délais et les coûts », avait affirmé Mme Parly.
Justement, s’agissant des coûts, il n’est plus question de 4 milliards, comme il y a moins de trois ans… mais d’au minimum 5 milliards [soit +25%]. C’est en effet le chiffre qu’a lâché l’amiral Jean-Philippe Rolland, le commandant de la Force d’action navale [ALFAN], lors d’une audition à l’Assemblée nationale.
« Quant aux montants que représenterait l’acquisition d’un nouveau porte-avions, il est clair qu’on ne dispose que d’une très large fourchette d’évaluation », a commencé par dire l’amiral Rolland. Toutefois, a-t-il continué, « aujourd’hui, l’ordre de grandeur s’élève à plusieurs milliards d’euros, au bas mots cinq milliards sans doute – et même davantage si la propulsion nucléaire est retenue. »
Et comme l’état-major de la Marine nationale ne perd jamais l’occasion de souligner la nécessité de disposer de deux porte-avions, l’amiral Rolland n’a pas manqué de faire remarquer aux députés que « si on en achète plusieurs, on en amortit les coûts de développement. » Voire même ceux de construction.
S’agissant du mode de propulsion du futur porte-avions, il très fortement probable qu’elle sera nucléaire, au regard des avantages opérationnels qu’elle procure.
L’un de ces avantages est « celui de l’autonomie, car le carburant qui n’est pas utilisé pour pousser le bateau peut l’être pour faire voler les avions : vous avez donc la capacité de mettre en œuvre plus d’avions, plus longtemps », a fait valoir l’amiral Rolland. « De plus, l’absence de soutes à carburant laisse une place libre, qui peut être occupée par des soutes à munitions plus importantes. Cette capacité, conjuguée à la surface du pont d’envol, contribue à donner sa puissance à l’outil qu’est le porte-avions », a-t-il ajouté.
Au-delà des aspects opérationnels, il y a, selon l’amiral Rolland, « à l’échelle de la marine, des avantages à pouvoir disposer de deux chaufferies nucléaires sur un porte-avions – voire sur deux – en plus des réacteurs des sous-marins nucléaires » car cela permet « d’atteindre plus facilement une taille critique en termes d’acquisition de compétences » étant donné que les atomiciens sont rares. « cela implique que nous fassions appel à des bureaux d’études que nous contribuons ainsi à faire vivre, ce qui est plus cohérent pour la filière nucléaire », a-t-il ajouté.
Enfin, un autre argument qui plaide en faveur de la propulsion nucléaire est le développement, lui aussi très probable, de catapultes électromagnétiques, par nature très gourmandes en énergie. Ce type de dispositif ainsi que d’autres innovations permettront par ailleurs de réduire le coût de possession du futur navire. Notamment au niveau des ressources humaines puisqu’il faudra moins de marins.
Actuellement, le coût de possession du porte-avions Charles de Gaulle, hors groupe aérien embarqué, est d’environ 200 millions d’euros par an, a indiqué l’amiral Rolland. Ce montant inclut « aussi bien les rémunérations et les charges sociales (RCS) que l’entretien », a-t-il précisé.
« Le coût de possession du porte-avions se décompose comme suit : 120 millions d’euros pour l’entretien, 60 millions d’euros de RCS, 20 millions d’euros d’entretien des infrastructures associées. Ce n’est évidemment pas négligeable, mais c’est, à mon avis, soutenable », a affirmé ALFAN.