Pourquoi un sous-marin Barracuda français a-t-il fait surface au Canada ?

Pourquoi un sous-marin Barracuda français a-t-il fait surface au Canada ?

La présence du sous-marin français FS Tourville au Canada intrigue. Test stratégique ou démonstration de force ? Décryptage des enjeux derrière cette apparition.

par Jean-Baptiste Leroux – armees.com -publié le

Un sous-marin Barracuda a effectué sa première traversée transatlantique. Defense.gouv
Un sous-marin Barracuda a effectué sa première traversée transatlantique. Defense.gouv | Armees.com

L’apparition d’un sous-marin d’attaque français Barracuda dans un port canadien a suscité de nombreuses interrogations. Alors que les tensions géopolitiques s’intensifient, certains y voient un signal politique fort. Mais la vérité se trouve ailleurs : cette opération s’inscrit dans une démarche purement technique et industrielle.

Un test grandeur nature pour le FS Tourville

La présence du FS Tourville à Halifax, en Nouvelle-Écosse a suscité de vives réactions dans le contexte international actuel. Pourtant, elle répond à un objectif clair : démontrer les capacités des sous-marins français. Ce navire de la classe Barracuda, conçu par le groupe français Naval Group, a effectué sa première traversée de l’Atlantique pour tester ses performances en conditions réelles.

Le Canada prévoit en effet de moderniser sa flotte sous-marine avec l’acquisition de six à douze nouveaux sous-marins d’ici 2035. En février dernier, Ottawa a sollicité plusieurs constructeurs, dont Naval Group, pour obtenir des informations sur leurs modèles. Face à cette opportunité commerciale majeure, estimée à 40 milliards d’euros, la France a donc décidé de mettre en avant son expertise.

Le Barracuda, Un atout technologique pour le Canada

Les exigences canadiennes sont particulièrement élevées. Le pays, qui possède le plus long littoral du monde, recherche des sous-marins capables de naviguer sous la banquise arctique et d’opérer dans des conditions extrêmes.

Le Barracuda présente plusieurs atouts qui pourraient convaincre la Marine royale canadienne. Doté d’un système de propulsion avancé et d’une autonomie prolongée, il est conçu pour des missions de longue durée. De plus, sa furtivité et ses capacités en matière de renseignement en font un outil stratégique de premier plan.

Une compétition internationale acharnée

La France n’est pas seule dans cette course. D’autres acteurs européens et asiatiques sont en lice pour répondre à l’appel d’offres canadien. En octobre dernier, le ministre de la Défense canadien, Bill Blair, a confirmé que plusieurs pays étaient sollicités pour ce projet.

Naval Group peut cependant s’appuyer sur un succès récent : la vente de quatre sous-marins Barracuda aux Pays-Bas pour près de 5 milliards d’euros. Un précédent qui pourrait jouer en faveur de la France et renforcer ses chances d’emporter le contrat canadien.

Une opération sous haute surveillance

L’épreuve de test du FS Tourville ne s’arrête pas à Halifax. Le sous-marin doit encore effectuer des exercices en conditions réelles dans les eaux froides du Grand Nord. Des essais d’endurance et de navigation sous la glace sont prévus pour prouver la capacité du Barracuda à répondre aux exigences canadiennes.

Réarmement européen : une industrie de défense sur une ligne de crête

Réarmement européen : une industrie de défense sur une ligne de crête

par Hélène Masson – Fondation pour la recherche stratégique – publié le 7 mars 2025

https://www.frstrategie.org/publications/recherches-et-documents/rearmement-europeen-une-industrie-defense-sur-une-ligne-crete-2025


Introduction 

L’Europe se réarme. Engagé par les pays de l’Est dès 2014, ce réarmement s’accélère et s’étend à l’ensemble du Vieux Continent depuis l’invasion russe de l’Ukraine. Véritable choc, cette guerre a sonné comme un sévère rappel à l’ordre pour les États européens les plus inconséquents en matière de défense. 

Resserrement du lien transatlantique, multiplication des coopérations intergouvernementales, montée en puissance de la Commission européenne dans le domaine de l’armement, la scène européenne est entrée en mouvement sur la période 2022-2024. Mais l’année 2025 s’ouvre sur une Europe déstabilisée par les nouvelles orientations de politique extérieure décrétées par le président américain nouvellement élu, Donald Trump, entre guerre commerciale et désengagement militaire.

Dans cet environnement instable, les États européens sont contraints de repenser certains fondamentaux, à commencer par la relation transatlantique, et de réévaluer les moyens consacrés à leur défense. Les stratégies d’acquisition et de coopération engagées au niveau national et européen seront également déterminantes eu égard aux défis technologiques et industriels à relever. L’objectif de ce travail est ainsi de mieux appréhender les contours de cette « Europe de l’armement » en pleine transformation, sous l’angle des politiques publiques et des stratégies industrielles.

[…]

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La défense française en 2025

La défense française en 2025

par Alain RODIER – CF2R – Tribune libre N°175 / mars 2025

https://cf2r.org/tribune/la-defense-francaise-en-2025/


 

 

Un ancien haut diplomate qui a été ambassadeur de France, en Israël puis aux États-Unis, écrit sur X : « L’Europe assiégée[1] ». Le ton catastrophique adopté provoque la question suivante : par qui ?[2]

Dans son intervention télévisée du 5 mars, le président Emmanuel Macron s’est fait plus précis : «La menace russe est là, et touche les pays d’Europe. La Russie a fait du conflit ukrainien un conflit mondialen violant les frontières, manipulant l’information, les opinions (…)  Qui peut croire que la Russie d’aujourd’hui s’arrêtera à l’Ukraine ? Elle est devenue une menace pour la France et pour l’Europe. »

Certes la situation mondiale est chaotique et les évolutions à venir sont imprévisibles – les analystes n’ayant jamais rien prévu de correct -, mais à priori personne ne veut aujourd’hui envahir l’Europe.

Qu’en est-il de la menace russe ?

Il est vrai que Moscou lorgne sur les pays baltes qui commandent l’accès à l’enclave de Kaliningrad considérée comme vitale par le Kremlin, un peu comme le port de Sébastopol en mer Noire. Enfin, toujours traumatisée par l’Histoire de la Seconde Guerre mondiale et 45 années de servitude, la Pologne continue à fantasmer le danger que la Russie ferait peser sur elle. Il y a également le problème de la Transnistrie qui souhaite son détachement de la Moldavie pour rejoindre la Russie.

Bien logiquement les dirigeants de ces pays en appellent à la solidarité de l’OTAN (les États baltes et la Pologne en sont membres et peuvent bénéficier de l’article 5) et de l’Europe car ils savent que la Russie – malgré les grandes déficiences de son armée constatées lors de l’« opération militaire spéciale » menée en Ukraine – peut les agresser et qu’il leur sera impossible d’y répondre seuls – d’autant que les pays baltes ont des armées lilliputiennes.

Si Moscou décide de passer à l’action, cela risque plus de ressembler à la conquête de la Crimée par les « petits hommes verts » en 2014 qu’à une offensive généralisée de grande ampleur. En effet, la Russie peut compter sur les populations russophones et russophiles nombreuses dans ces États (sauf pour la Pologne) pour lui apporter leur soutien du type « cinquième colonne. »

Mais une fois énoncées ces problématiques, il n’en reste pas moins que l’armée russe n’a ni la puissance ni la volonté d’envahir l’Allemagne, la France, ni d’autres pays européens.). La Russie n’est pas l’URSS d’autrefois et, en dehors de sa puissance nucléaire, elle n’a pas les moyens humains et matériels pour constituer une menace classique pour la vieille Europe – ni d’ailleurs la volonté. Qu’est qu’elle ferait de ces pays et de leyr citoyens pour le moins « ingérables » ?.

Au demeurant, durant la Guerre froide, la puissance militaire de l’URSS et du Pacte de Varsovie avaient été volontairement surévaluées par les Américains pour des questions de présence en Europe de l’Ouest. Bien sûr, elles n’étaient pas négligeables mais la « fable » des chars russes atteignant les côtes atlantiques de l’Europe en trois jours a été de mise jusqu’à ce que les faiblesses de l’Armée rouge n’aient été dévoilées lors de la guerre en Afghanistan (1979-1989) : matériels rustiques mais dépassés, valeur combative de la troupe sujette à caution, encadrement insuffisant, corruption endémique, etc.

Toujours est-il que la situation globale est très instable et la menace peut venir de là où ne l’attend pas. Il faut donc consacrer plus de moyens à la défense mais en déterminant une priorité dans les menaces.

La menace intérieure

La menace est d’abord intérieure, provenant des nombreux activistes de toutes tendances – et plus particulièrement ceux qui se revendiquent du salafisme/djihadisme – qui n’attendent que l’occasion de passer à l’action.

Les forces de sécurité intérieures doivent être beaucoup plus nombreuses et bien formées et disposer d’un renseignement adapté. Leurs unités (gendarmerie mobile, CRS, groupes d’intervention spécialisés) doivent être bien réparties sur le territoire pour pouvoir intervenir le plus rapidement possible afin d’empêcher qu’une situation violente ne dégénère en insurrection.

Des mesures ont déjà été prises avec la « recréation » la montée en puissance des anciens RG (Direction nationale du renseignement territorial/DNRT), l’implantation des d’antennes du GIGN en région, etc. Il convient encore de renforcer les effectifs de la gendarmerie et de la police et de développer une réserve opérationnelle plus active.

La menace sur l’Europe

Il n’y a pas de corps blindé-mécanisé russe prêt à fondre sur les pays de l’Union européenne, ni de forces de quadrillage pouvant être déployées pour le contrôle des terrains conquis comme du temps du Pacte de Varsovie. S’il y a une menace conventionnelle, elle est surtout aérienne. La défense de l’espace aérien ne commence pas aux frontières de l’hexagone. Elle devrait être intégrée au niveau européen, ce qui est déjà grandement le cas.

En revanche, il existe des affrontements d’influence – en particulier grâce à la guerre cybernétique – où les amis d’hier peuvent être les adversaires du jour. S’il y a eu une prise de conscience des autorités l’insuffisance de moyens humains et techniques est toujours d’actualité.

La menace sur l’Europe est donc totalement hybride et peut alimenter les mouvements activistes intérieurs. D’où l’importance de renforcer la défense des points sensibles comme les centrales nucléaires contre des actions de type terroriste pouvant être menée par tout idéologue radicalisé.

Par ailleurs, la guerre est aussi économique et a besoin de renseignements. Il convient de développer donc les services d’acquisition du renseignement offensif et le contre-espionnage défensif, bien que beaucoup d’efforts dans ces domaines aient été consentis ces dernières années. 

Les menaces hors d’Europe

Hors d’Europe, la principale menace concerne les voies de circulation maritime par lesquelles passent nos approvisionnements et nos possessions ultramarines.

Là, ce sont les frégates multi-missions qui manquent ainsi que des moyens aériens projetés à l’extérieur (un nouveau porte-avions pourrait être utile.). Pour élargir le rayon d’action de la Marine, les drones aériens navalisés doivent être considérablement développés.

La Russie constitue un redoutable adversaire hors d’Europe – comme cela a été constaté sur le continent africain – et dans les territoires d’outre-mer, parfois via des pays tiers comme l’Azerbaïdjan. Mais les dangers à venir pourront venir d’autres acteurs comme la Chine en mal d’expansion. Il ne faut pas oublier non plus les États-Unis qui sont de redoutables prédateurs économique.

La dissuasion nucléaire

La dissuasion nucléaire reste l’ultime garde-fou qui assure l’indépendance de la France et garantit sa place de membre permanent au Conseil de Sécurité. Bien sûr, le flou doit être maintenu concernant les conditions d’emploi afin qu’un adversaire éventuel ne puisse penser les contourner.

Il convient aussi de conserver les deux composantes : l’une aéroportée, pouvant servir aussi pour une éventuelle frappe de « dernier avertissement » et l’autre sous-marine pour déclencher « ‘l’apocalypse. ». L’arme aéroportée (actuellement le missile de croisière air-sol moyenne portée amélioré ASMP-A) n’est en aucun cas une arme « tactique » destinée à emporter une décision sur un champ de bataille. Elle fait partie de la doctrine stratégique de la France[3].

En Europe, les Britanniques ne sont pas libres de mettre en œuvre les armes nucléaires stratégiques embarquées sur leurs SNLE sans l’autorisation de Washington. Par ailleurs, ils n’ont plus d’armes aéroportées. Les bombes nucléaires B-61 armant certaines forces de l’OTAN (Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Italie, Turquie[4]) ne sont destinées qu’à un emploi stratégique et le décideur final reste Washington. La question qui s’est toujours posée est : les États-Unis sont-ils prêts à sacrifier des villes américaines pour tenter de sauver l’Europe ? Le général de Gaulle était persuadé du contraire d’où sa décision de développer une force de frappe totalement indépendante.

Dans le domaine nucléaire, la menace est constituée par tous les pays qui la détiennent ou qui pourraient l’avoir. Il est donc essentiel de moderniser en permanence la force de dissuasion pour qu’elle reste « crédible. »  

Tout cela coûte cher. Les responsables politiques doivent donc faire des choix. Plus on dépense pour la défense (intérieure et extérieure), moins on en fait pour l’action sociale, ce qui risque de poser des problèmes sociétaux générateurs de désordres intérieurs, pouvant être exploités ou initiés par des adversaires étatiques étrangers. C’est le serpent de mer qui se mord la queue…


[1] https://x.com/GerardAraud

[2] Plus globalement, les discours des politiques et des groupes de pression divers et variés, amplifiés à souhait par les médias en mal d’audience, sont catastrophiques pour le moral des populations, en particulier pour la jeunesse. Ils promettent un réchauffement climatique qui va causer une sorte de fin de monde (grillé ou/et noyé), des épidémies dévastatrices de type Covid, des guerres meurtrières (aujourd’hui russe, demain chinoise), des mouvements de populations apocalyptiques, un chômage endémique et le rétablissement du service militaire obligatoire… Après, on se désole que la jeunesse n’ait pas le moral !

[3] Par contre, l’emploi d’armes nucléaires « tactiques » fait partie des doctrines américaine, russe et chinoise.

[4] Qui ne possède pas d’avions capables de les emporter.

Rafale : Dassault se prépare à augmenter la production

Rafale : Dassault se prépare à augmenter la production

Le groupe Dassault a annoncé être en mesure de pouvoir augmenter la production du Rafale pour honorer ses commandes et répondre au contexte international.

par Jean-Baptiste Leroux -armees.com – Publié le

Dassault se prépare à augmenter la cadence dans la production du Rafale. Wikipedia
Dassault se prépare à augmenter la cadence dans la production du Rafale. Wikipedia | Armees.com

Dassault Aviation prévoit d’augmenter la production du Rafale pour répondre à la demande nationale et internationale. Une hausse de cadence qui nécessite une organisation rigoureuse au sein du groupe français.

Une production en pleine montée en puissance

Au vu du contexte international et des dernières déclarations d’Emmanuel Macron, le constructeur du Rafale répond présent. Dassault Aviation planifie actuellement une augmentation significative de la production du chasseur multifonctions. Le constructeur français vise un rythme de cinq appareils par mois pour satisfaire la demande croissante, aussi bien de l’armée française que des clients internationaux. Cette décision s’inscrit dans un contexte de renforcement des capacités de défense et de contrats en expansion.

Actuellement, la production a déjà connu une nette progression. En seulement quatre ans, Dassault Aviation est passé d’un avion assemblé par mois à trois. Une performance remarquable, réalisée malgré les difficultés d’approvisionnement au sein de la chaîne de sous-traitance. Le constructeur mise sur une augmentation graduelle, ajoutant en moyenne un demi-point de cadence par an.

Une réponse à une demande internationale croissante

Outre les besoins de l’armée française, la demande étrangère pour le Rafale ne cesse de croître. L’Inde, déjà cliente avec une commande de 36 appareils en 2016, s’apprête à acquérir 26 Rafale Marine pour son porte-avions INS Vikrant. Ce n’est qu’une partie de son ambition, puisque l’Indian Air Force a exprimé un besoin de 400 nouveaux avions.

Pour honorer ces engagements, Dassault Aviation envisage la création d’une chaîne d’assemblage en Inde. Cette initiative s’inscrit dans la stratégie « Make in India » du gouvernement Modi et permettrait à l’entreprise de réduire ses coûts tout en augmentant sa capacité de production. L’expansion industrielle pourrait également inclure le recrutement et l’agrandissement des infrastructures en France.

Un carnet de commandes record

Fin 2024, Dassault Aviation disposait d’un carnet de commandes impressionnant : 164 Rafale à exporter et 56 pour la France, garantissant une activité continue pour les onze prochaines années. Le succès commercial de l’appareil, illustré par de nouveaux contrats avec la Serbie et l’Indonésie, a porté la valeur des commandes à un record de 43,2 milliards d’euros.

Ce dynamisme se traduit également par des performances financières en hausse. En 2024, Dassault Aviation a franchi le cap des 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, enregistrant une croissance de 30 % par rapport à l’année précédente. La rentabilité a également progressé, avec un résultat net dépassant pour la première fois le milliard d’euros.

Un enjeu stratégique pour l’avenir

Malgré ces succès, plusieurs incertitudes planent sur l’industrie aéronautique française. L’éventuelle augmentation des taxes américaines sur les produits européens pourrait impacter la compétitivité des avions d’affaires Falcon, un autre segment de Dassault. De plus, le contexte géopolitique incertain pousse les industriels à renforcer leur indépendance et leur capacité de production.

Dans cette dynamique, Dassault Aviation continue de s’affirmer comme un acteur majeur de la défense européenne. Si les ambitions de l’Union européenne en matière de défense se concrétisent, le Rafale pourrait bénéficier d’un soutien accru. En attendant, le constructeur anticipe et s’organise pour faire face à une demande toujours plus forte.

Défense européenne : effort de guerre, budgets… le plan européen à 800 milliards d’euros de l’Europe suffira-t-il face à la menace russe ?

Défense européenne : effort de guerre, budgets… le plan européen à 800 milliards d’euros de l’Europe suffira-t-il face à la menace russe ?

L’essentiel

En s’alignant sur Moscou pour régler la guerre en Ukraine, Donald Trump bouleverse les alliances. L’Europe est forcée de se réarmer mais son plan à 800 milliards d’euros suffira-t-il ? La France, qui envisage de continuer à muscler son budget de la Défense, doit réfléchir à l’évolution de son armée et se préparer aux choix douloureux qu’impose une économie de guerre.

Après la spectaculaire volte-face de Donald Trump qui se range désormais aux arguments de Moscou contre Kiev dans la guerre en Ukraine et, ce faisant, bouleverse les alliances entre les États-Unis et ses alliées forgées depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Europe est au pied du mur.

L’Union européenne et le Royaume-Uni doivent s’organiser urgemment pour poursuivre l’aide militaire à l’Ukraine et compenser – si c’est possible – celle des États-Unis mise sur pause par Donald Trump, et, surtout, bâtir cette Europe de la Défense pour laquelle Emmanuel Macron plaide depuis 2017, mais qui joue l’arlésienne depuis des décennies. Cette fois, les Européens n’ont plus le choix et vont devoir concrétiser en acte « l’économie de guerre » qu’ils appelaient de leurs vœux au moment de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Un plan européen « ReArm » à 800 milliards d’euros

Cela passe en premier lieu par une capacité à se réarmer et à financer ce réarmement. La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a ainsi dévoilé mardi un plan pour « réarmer l’Europe » qui doit lui permettre de mobiliser près de 800 milliards d’euros pour sa défensedont 150 milliards de prêts à disposition des 27 – et fournir une aide immédiate à l’Ukraine.

« Le moment est venu pour l’Europe. Et nous sommes prêts à nous renforcer », a dit Ursula Von der Leyen, ancienne ministre de la Défense allemande. Mais au-delà des prêts, le premier « pilier » de ce plan baptisé « ReArm » repose essentiellement sur les dépenses nationales dans chaque État membre, que la Commission européenne veut faciliter. Ainsi, la présidente de la Commission a confirmé sa volonté d’encourager les États à dépenser plus pour leur défense, sans être contraints par les règles budgétaires qui les obligent à limiter leur déficit public à 3 % de leur Produit intérieur brut (PIB).

Cette dérogation aux règles de Maastricht résonne agréablement aux oreilles de la France, qui doit maintenir sa dissuasion nucléaire – la seule de l’UE – et a rehaussé fortement son budget de la Défense ces dernières années.

La France doit-elle aller à 3 ou 3,5 % du PIB ?

Dans le dernier projet de loi de finances des Armées 2025, l’augmentation de l’effort de la Nation pour la Défense a acté une hausse de +3,3 milliards d’euros, portant la mission Défense à 50,5 milliards d’euros hors pensions. Le budget des armées augmente ainsi de 56 % sur la période entre 2017 et 2025. Les crédits votés dans la loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 se montent à 413 milliards d’euros.

Faut-il aller plus loin ? Presque tous les pays de l’OTAN ont augmenté leurs dépenses militaires en 2024, une majorité atteignant l’objectif fixé en 2014 d’accorder 2 % de leur PIB à la Défense, objectif qui n’était atteint que par 11 des 30 États de l’organisation en 2023. La France est à 2,06 % du PIB.

« Depuis trois ans, les Russes dépensent 10 % de leur PIB dans la défense. On doit donc préparer la suite, en fixant un objectif autour de 3, 3,5 % du PIB », a déclaré Emmanuel Macron au Figaro le 2 mars, rajoutant qu’il voulait remettre sur le métier la LPM. « On devra réviser à la hausse. La question, c’est : est-ce qu’on aura besoin de plus de financements nationaux ? Comment on mobilise mieux les financements européens ? »

 

Les dépenses militaires des pays de l’OTAN en fonction de leur proximité avec la Russie.
Les dépenses militaires des pays de l’OTAN en fonction de leur proximité avec la Russie. DDM

 

« Les Américains représentent 30 % de l’OTAN. Cela va nous prendre dix ans pour nous désensibiliser, en investissant massivement au niveau national et européen », analysait encore Emmanuel Macron.

Reste une question capitale : aller à 3 ou 3,5 % du PIB de dépenses militaires – soit 70 milliards d’euros par an – changerait-il réellement la donne ? Les équipements militaires possèdent des technologies toujours plus avancées et forcément très coûteuses ; la hausse du coût des équipements est donc plus rapide que les budgets, ce qui conduit à jouer sur les quantités.

L’autre écueil est que « l’industrie de défense française demeure dans une logique d’arsenal, très dépendante de l’État, et manque de souplesse », expliquait au Figaro Élie Tenenbaum, directeur du Centre des Études de Sécurité de l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI). Un investissement sûr et dans la durée est donc indispensable. Ce qui n’empêche pas la France d’avoir été le 2e pays exportateur d’armes majeures dans le monde derrière les États-Unis entre 2019 et 2023 et de voir certains de ses champions tricolores afficher de très bons résultats comme Dassault, concepteur du Rafale, qui a annoncé un chiffre d’affaires de 6,2 milliards d’euros en 2024 contre 4,8 milliards d’euros en 2023.

Des choix douloureux pour financer l’effort

Mais la question clé en cas de désengagement des États-Unis et même s’il y a plus d’argent consacré à la Défense est de savoir s’il faut changer le modèle d’organisation des Armées françaises : passer d’un modèle d’armée complète, multitâche, mais de taille réduite et limitée – certains parlent d’un corps expéditionnaire ou d’une armée « bonsaï » – à une armée plus spécialisée sur certaines menaces seulement alors que la guerre en Ukraine a mis en évidence le retour de la guerre à haute intensité et la guerre hybride avec une forte dimension cyber

Enfin, la hausse des budgets militaires imposera de faire des choix douloureux, des arbitrages politiquement sensibles et explosifs entre dépenses de défense et dépenses sociales pour être réellement en économie de guerre…

Un débat qui concerne tous les pays européens, le Danemark envisage de reculer l’âge de départ à la retraite de 67 à 70 ans pour, entre autres, financer la défense du pays. Une telle option serait volcanique en France, d’où d’autres idées pour trouver de l’argent comme mobiliser une partie de l’épargne des Français ou lancer un grand emprunt national.

Nouveau contretemps pour la fusée Ariane 6 et le satellite militaire français d’observation CSO-3

Nouveau contretemps pour la fusée Ariane 6 et le satellite militaire français d’observation CSO-3


L’opération BUBO 25, menée par l’armée de l’Air & de l’Espace avec trois Rafale, trois A400M et un avion ravitailleur A330 MRTT [avec le colonel de réserve et spationaute Thomas Pesquet parmi les membres de son équipage], va durer plus longtemps que prévu.

En effet, celle-ci vise à renforcer le dispositif interarmées TITAN, mis en place pour sécuriser le Centre spatial guyanais [CSG] à l’occasion du premier vol commercial de le fusée Ariane 6, laquelle doit mettre sur orbite CSO-3, le troisième et dernier satellite militaire français de la constellation « Composante Spatiale Optique ».

En janvier, Arianespace avait indiqué qu’Ariane 6, « en version Ariane 62 », allait être lancée « le 26 février, à 13 h 24 [heure locale] », depuis Kourou. Et cela alors qu’un lancement avait initialement été envisagé en décembre 2024.

Seulement, vingt-quatre heures avant cette échéance, la société a annoncé que ce premier vol commercial serait reporté « suite à des opérations additionnelles nécessaires sur le moyen au sol ». Et d’assurer que lanceur et le CSO-3 étaient « toujours maintenus dans des conditions stabilisées et en sécurité ».

Ce contretemps ne devait pas être préjudiciable puisque le vol VA263 d’Ariane 6 avait été reprogrammé au 3 mars, à 13 h 24 [17 h 24, heure de Paris]. Sauf qu’il n’a pas pu avoir lieu.

Pourtant, plus tôt, le directeur du transport spatial de l’Agence spatiale européenne [ESA], Toni Tolker-Nielsen, avait assuré que « tout se déroulait bien », malgré une « pluie fine tropicale ». Mais, trente minutes avant le décollage, l’opération a été suspendue à cause d’une « anomalie au sol ».

« La seule décision possible maintenant est de repousser le lancement » qui « n’aura pas lieu aujourd’hui », a en effet déclaré David Cavaillolès, le président exécutif d’Arianespace. « Je n’ai pas de doute que nous repartirons en vol prochainement », a-t-il ajouté. Reste donc à savoir quand…

Pour rappel, CSO-3 aurait dû rejoindre CSO-1 sur une orbite héliosynchrone phasée à 800 km d’altitude en 2021. Mais le retard pris dans le développement d’Ariane 6 avait contraint le ministère des Armées à solliciter un lanceur russe Soyouz pour un lancement prévu en 2022. Lancement qui fut annulé, la coopération avec Moscou ayant été suspendue après le début de la guerre en Ukraine.

Airbus va construire le réseau de communication de l’armée de l’air et de la marine française

Airbus va construire le réseau de communication de l’armée de l’air et de la marine française

Par Margot VENIER – L’Opinion Indépendante – Publié le 27/02/2025

Au total, plus de 80 navires seront équipés du réseau RIFAN. © Airbus
Au total, plus de 80 navires seront équipés du réseau RIFAN. © Airbus

Le 25 février dernier, Airbus a annoncé qu’il allait construire le réseau de communication de l’armée de l’air et de la marine française dans le cadre d’un contrat d’une valeur maximale de 480 millions d’euros et d’une durée maximale de dix ans.

Une étape supplémentaire. Le 25 février dernier, Airbus Defense and Space a annoncé qu’il avait été choisi par l’Armée française en vue de réaliser le nouveau réseau de communication de l’armée de l’air et de la marine française.

D’un montant maximal de 480 millions d’euros et d’une durée maximale de dix ans, le contrat porte sur les évolutions du réseau IP de la force aéronavale (RIFAN), son déploiement et son maintien en condition opérationnelle.

Augmenter la connectivité inter-navires

En pratique, les développements seront réalisés progressivement entre 2026 et 2030, puis déployés sur des navires entre 2028 et 2032. Au total, plus de 80 navires seront équipés du réseau RIFAN : porte-avions, porte-hélicoptères amphibies, navires de commandement, sous-marins…

Ce nouveau contrat RIFAN 3 vise notamment à augmenter la connectivité inter-navires pour répondre progressivement aux besoins de combat collaboratif, grâce à de nouveaux moyens de transmission à haut débit et à faible latence.

La résilience du réseau devrait également être renforcée par le développement de mécanismes de reconfiguration rapide pour s’adapter aux moyens de communication disponibles dans différents scénarios tactiques et opérationnels.

Face aux cybermenaces croissantes, « le réseau s’appuiera par ailleurs sur une cybersécurité renforcée pour préserver l’intégrité et la continuité des opérations », précise l’avionneur européen.

Pour rappel, le système RIFAN 2 a été mis en service par la marine nationale et Airbus Defence and Space et ses partenaires entre 2012 et 2016. Il rassemble et exploite l’ensemble des moyens de communication disponibles à bord et les ressources radio.

Il permet aux navires de communiquer sur un réseau IP garantissant un très haut niveau de sécurité, et d’échanger des données avec des niveaux de classification allant de « non protégé » à « secret ».


Margot VENIER
Écrit par Margot VENIER

Journaliste web et radio, Margot est notamment passée par La Dépêche du Midi et CFM Radio avant de rejoindre l’équipe de L’Opinion Indépendante.

Contact : margotvenier@lopinion.com

Comment le ministère des Armées veut faire décoller un drone MALE français en 2026

Comment le ministère des Armées veut faire décoller un drone MALE français en 2026

– Forces opérations Blog – publié le

Faire décoller un drone MALE bas du spectre dès l’an prochain, c’est le défi proposé à la filière française par le ministère des Armées. Un pan d’une méthode adoptée pour rattraper le retard et développer une offre française « solide » dans plusieurs segments, annonçait ce matin le cabinet ministériel en amont d’une visite de Sébastien Lecornu sur le site blésois de l’entreprise Turgis & Gaillard. 

Dialoguer, stimuler et simplifier : trois ingrédients d’une recette visant à favoriser l’émergence d’une filière drone nationale. Et, au passage, à s’assurer que les retards constatés au cours de la décennie précédente ne soient plus qu’un lointain souvenir. Ce tournant, le ministère des Armées assure l’avoir engagé dès 2022 et l’éclatement d’un conflit russo-ukrainien n’ayant fait que confirmer le rôle central des drones dans la guerre d’aujourd’hui et démontrer l’étendue des besoins pour les militaires français.

Depuis, les initiatives se sont multipliées. C’est ce Pacte Drones signé en juin dernier au cours du salon Eurosatory, un mécanisme initié par le GICAT pour développer les réflexions et échanges entre le ministère, les industriels et les opérationnels. Ce sont les 5 Md€ inscrits dans la loi de programmation militaire pour 2024-2030, une envelopper à laquelle plus de 500 M€ ont été ajoutés lors du dernier ajustement annuel de la programmation militaire (A2PM). De quoi notamment passer la seconde sur les munitions téléopérées (MTO) et enclencher la première sur le drone de moyenne altitude et longue endurance (MALE) du « bas du spectre », un objet qui pourrait intéresser les trois armées. 

Après des projets COLIBRI et LARINAE précurseurs, le ministère s’est à nouveau tourné vers la filière pour monter au plus vite en gamme sur le segment MALE. Une expression de besoin s’est matérialisée début 2024. Simplifiée, centrée sur quelques spécifications, la demande a su autant attirer quelques grands noms du secteur que des petits acteurs « prêts à prendre du risque », observe le cabinet ministériel. « Aucun de ces industriels ne disposent aujourd’hui d’un drone MALE sur étagère. Il faut donc véritablement développer et innover », continue-t-il. 

Hors de question, à ce stade, de s’engager sur une acquisition. La volonté reste bien de stimuler l’innovation en soutenant les idées les plus prometteuses. Seule une ligne de 10 M€ est d’ailleurs prévue cette année pour financer entre cinq et dix solutions, des crédits de paiements non prévus en LPM mais que le ministère a su récupérer grâce aux provisions sur les retards de certains grands programmes, dont celui de l’Eurodrone. Les premières conventions de subvention seront signées en juin prochain lors du salon du Bourget, annonce l’entourage du ministre. À charge ensuite des lauréats de « trouver le chemin » vers un vol de démonstration en 2026. 

« Ceux qui ne passent pas ce jalon seront considérés comme n’étant pas sélectionnés », relève le ministère. Pour le ou les autres, la feuille de route n’exclut pas de basculer sur une commande courant 2027. Trois ans auront alors suffi pour développer et adopter une ou plusieurs nouvelles plateformes complémentaires du MQ-9 Reaper déjà en service, de l’Eurodrone en cours de développement et du Patroller en cours d’adoption par l’armée de Terre. La multiplication des moyens amènera des défis en matière de formation et de maintenance, mais cette densification n’aura rien d’un luxe pour des opérationnels disposant au final de davantage d’options pour remplir leurs missions, pointe un intervenant. 

Objet de ce déplacement ministériel sur l’aérodrome de Blois-le-Breuil, « Turgis & Gaillard est un acteur particulièrement intéressant dans le cadre de cette démarche ». Remarquée pour son drone MALE AAROK dévoilé en 2023, l’entreprise a non seulement répondu à la demande d’information pour un drone bas du spectre, mais son agilité lui permet également de participer au troisième pilier, celui de la simplification normative. Un marché d’expérimentation lui a en effet été notifié avec pour enjeu de développer un drone « certifiable mais non certifié ». Autrement dit, de démontrer la capacité de ce drone à voler dans une zone confinée sans mener à son terme un processus de certification « toujours long et pénible ». 

Le déplacement ministériel d’aujourd’hui n’a donc rien d’anodin. « Acteur particulièrement pertinent dans cet écosystème », Turgis & Gaillard envisage d’implanter une « usine AAROK » à Blois, un projet qui contribuerait à créer 50 emplois sur un site dont l’effectif a déjà quadruplé depuis 2020. Derrière le segment MALE, Turgis & Gaillard se positionne également sur celui des munitions téléopérées longue portée. Les travaux portent en partie sur les problématiques de masse et de coût. L’inspiration pourrait venir d’une industrie civile habituée aux volumes désormais exigés par les armées. De la motorisation à la soudure et du collage aux matériaux, les synergies entre filières drone et automobile, par exemple, sont en effet envisageables et à l’étude. « Rien n’est encore formalisé », indique le ministère, mais le scénario a au moins cela d’intéressant d’illustrer à son tour l’effort de prise de masse engagé depuis deux ans. 

Crédits image : Turgis & Gaillard

Vers l’achat de 60 Robots d’Investigation (ROBIN) pour les unités du Génie

Vers l’achat de 60 Robots d’Investigation (ROBIN) pour les unités du Génie

Le Fardier MKII de Soframe

Un avis de marché du 21 février concerne l’acquisition de robots d’investigation (ROBIN) destinés aux missions de levée de doute ou d’investigation portant sur des objets suspects de type « engins explosifs improvisés » au profit des unités du Génie de l’armée de Terre française.

Selon la DGA, le système ROBIN se positionne sur le segment des robots lourds (supérieurs à 1500 kg).

Il se compose :
– d’une plateforme téléopérée à plusieurs centaines de mètres et équipée de moyens d’observation et de communication ;
– d’un bras d’investigation équipé d’un outil multifonctions ;
– d’éléments d’environnement (lot de bord, timon, accessoires fixés sur la plateforme…).

Le système ROBIN permettra, après la détection d’un objet suspect enterré, de retirer la couche de matériau dissimulant l’objet, d’observer et permettre ainsi une première analyse. Le cas échéant, l’objet sera déplacé pour l’extraire et l’éloigner de l’axe de progression. Sur longues distances, le ROBIN est transporté sur une remorque attelée à un véhicule de type Griffon (la remorque est hors du périmètre de la présente procédure). Le système ROBIN doit également pouvoir être tracté, attelé directement à un véhicule de type Griffon, sur des distances de l’ordre de plusieurs centaines de mètres parcourues à une vitesse de 30km/h. Le marché porte sur la fourniture d’un maximum d’environ 40 systèmes ROBIN et environ 20 systèmes ROBIN sans bras d’investigation (i.e. plateformes robotiques nues).

Soframe pourrait présenter son Fardier MKII.

Destiné à l’armée de Terre, le futur Engin du Génie de Combat vient de franchir un nouvelle étape

Destiné à l’armée de Terre, le futur Engin du Génie de Combat vient de franchir un nouvelle étape


Jusqu’à présent, le programme SCORPION [Synergie du Contact Renforcée par la polyvalence et l’infovalorisation] s’est concentré sur le remplacement des blindés médians de l’armée de Terre, avec la mise en service des Griffon, des Serval et autres Jaguar. Mais il vise également à renouveler les capacités des unités du Génie, via le projet EGC [Engin du Génie de Combat], appelé auparavant MAC [pour Moyen d’Appui au Contact].

Actuellement, les régiments du génie disposent de l’EBG [Engin Blindé du Génie] qui, mis en service en 1989, a été conçu à partir du châssis du char AMX-30B2. Depuis, il a fait l’objet de deux opérations de modernisation, la dernière ayant consisté à lui installer une climatisation et à remplacer le bras de levage par un autre modèle pour lui permettre d’effectuer des travaux de terrassement.

Le projet EGC vise à remplacer non seulement les EBG mais aussi les EGRAP [Engins du génie rapide de protection] et les EGAME [Engins du génie d’aménagement]. En outre, l’an passé, il a été rejoint par la Belgique, au titre du partenariat stratégique CaMo [Capacité Motorisée]. Il s’agira de permettre à la composante Terre de la Défense belge de remplacer ses véhicules Pionnier.

Selon la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30, l’armée de Terre devrait recevoir ses cinq premiers EGC avant 2030 [et 125 d’ici 2035]. Mais ce calendrier ne sera pas tenu, selon la consultation de marché que vient de publier l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement [OCCAr], chargée de suivre ce programme pour le compte de la France et de la Belgique.

En effet, les premières livraisons de l’EGC ne sont pas attendues avant 2031. Au total, 200 exemplaires devront être produits, pour un coût compris entre 800 millions et 1,2 milliard d’euros [somme qui tient compte du développement, de la production et du soutien initial].

« L’OCCAr a l’intention de négocier et d’attribuer un contrat par le biais d’un processus concurrentiel qui devrait démarrer en 2025. Celui-ci sera ouvert uniquement aux fournisseurs de l’OCCAr issus de ses États membres et de l’Union européenne », explique l’organisation.

Selon l’armée de Terre, l’EGC devra s’intégrer au réseau SCORPION, en ayant une « mobilité adaptée au rythme de la manœuvre tactique », ce qui passera par des « capacités élevées à organiser le terrain dans des délais contraints pour l’appui à la manœuvre offensive et défensive ». Aérotransportable, il offrira une « protection suffisante pour permettre de réaliser des travaux sous le feu ».

À ce jour, un seul candidat pour ce projet est connu : l’Auroch. Développé par CNIM Systèmes industriels, qui s’est associé à Texelis et KNDS France, il s’agit d’un véhicule de type 8×8 affichant une masse de 28 tonnes. Équipé de système optroniques pour surveiller son environnement et d’un tourelleau téléopéré de 7,62 mm, il serait en mesure de rouler à 80 km/h sur route, grâce à un moteur diesel de 600 chevaux.

Photo : Illustration / Auroch