Défiler pour la première fois avec le Jaguar, un moment unique pour le 1er RCA
À chaque défilé militaire du 14 juillet ses matériels « stars ». Du côté des troupes motorisées, ce sera le Jaguar, un engin du programme Scorpion que le 1er régiment de chasseurs d’Afrique (1er RCA) de Canjuers aura l’honneur de faire descendre les Champs-Élysées pour la première fois.
Des montagnes varoises aux pavés parisiens
Ce moment, le 1er RCA l’attend depuis près de 20 ans. Il faut remonter à 2017 pour sa dernière apparition au sein d’un carré « COME2CIA », à 2003 pour le voir défiler avec son propre carré régimentaire au sein des troupes à pieds. Ce rendez-vous est donc « un moment unique, car c’est l’occasion pour une unité de se présenter devant la nation et ses plus hautes autorités », souligne le lieutenant-colonel Mickaël Tesson, à la tête du 1er RCA depuis le 1er juillet.
C’est aussi une forme de reconnaissance pour des chasseurs d’Afrique qui, depuis trois ans, constituent un rouage essentiel de la mécanique Scorpion, d’abord avec le Griffon puis, plus récemment, avec le Jaguar.« Nous avons la chance de pouvoir présenter le Jaguar pour la première fois depuis son arrivée dans l’armée de Terre. À travers cela, nous allons pouvoir montrer le rôle central du régiment au sein de la transformation Scorpion », ajoute le lieutenant-colonel Tesson.
La fierté est palpable parmi les équipages des quatre Jaguar présents. « Nous sommes toujours fiers de notre métier. Nous le sommes encore plus lorsqu’il s’agit de défiler devant la population avec le régiment et avec nos nouveaux engins », nous explique l’adjudant Sylvain, référent Jaguar et l’un des rares chasseurs « primo-formés » par l’industriel au cours de l’automne 2021.
Même son de cloche pour le brigadier Thibaut. Ancien aide-moniteur sur AMX-10RC, il descendra les Champs-Élysées pour la première fois aux commandes d’un Jaguar. « Derrière la bonne pression, c’est une très grande fierté », nous explique-t-il.
Premières impressions
Entre autres missions, le 1er RCA est « le régiment qui reçoit le premier les engins Griffon et Jaguar, car nous détenons une réelle expertise dans le domaine de la transformation des unités ». En coulisses, le 4ème escadron du 1er RCA, notamment responsable de former les équipages de Griffon et Jaguar, ne chôme pas. Pour le premier véhicule, la dynamique est « bien avancée ». Pour le second, « nous démarrons ».
Le peloton Jaguar du 4ème escadron vient d’achever une session initiale de trois semaines avec 16 pilotes du 1er régiment étranger de cavalerie (1er REC). Le premier ressenti est « très bon » estime l’adjudant Sylvain. Ces pilotes ont maintenant une vingtaine d’heures de conduite à leur actif, sur plusieurs types de terrains et de jour comme de nuit. « Nous formerons un escadron par régiment de cavalerie dans un premier temps, au rythme de trois escadrons par an en vitesse de croisière ».
Passé par le char Leclerc et l’AMX-10RC, l’adjudant Sylvain est « agréablement surpris par les capacités de l’engin », qui représente « un bond technologique d’une trentaine d’années ». En terme de mobilité, ses six roues motrices et les 500 ch du moteur Volvo garantissent « une accélération assez énergique qui permet de prendre un poste rapidement ». Le Jaguar apporte aussi un surplus de confort et de sécurité, pointe le brigadier Thibaut.
Les moyens d’observation, enfin, « sont vraiment révolutionnaires ». La précision et la distance de détection sont grandement améliorées grâce aux caméras proximales, à la qualité des optiques et à l’ajout d’une voie thermique. La boucle décisionnelle est quant à elle réduite grâce à quatre épiscopes en « réalité augmentée », trois pour le chef d’engin et un pour le pilote, qui peut désormais lui aussi faire de l’observation. Certaines données récoltées par les capteurs et valorisées par le système d’information du combat Scorpion (SICS) sont ainsi projetées directement sur l’épiscope, permettant à l’équipage de conserver un temps d’avance dans sa compréhension de la situation tactique et d’accélérer le séquençage d’une action.
Jaguar, la suite
Les pilotes du 1er REC reviendront en septembre à Canjuers pour participer à l’instruction des tireurs et chefs d’engin. Pour le tireur, le point d’orgue sera la phase finale de tirs, qui validera l’ensemble du cursus. Soit, en fonction du chef d’engin ou du tireur, entre une dizaine et une vingtaine d’obus d’entraînement. L’équipage aura alors atteint un seuil minimum d’apprentissage qu’il complétera en régiment.
Puis le cycle recommencera pour un nouvel escadron en provenance d’un autre régiment de cavalerie. Début 2023, ce sera au tour du régiment d’infanterie chars de marine (RICM) de Poitiers. Il sera suivi des 3ème régiment de hussards, 1er régiment de spahis, 4ème régiment de chasseurs et 1er régiment de hussards parachutistes.
Derrière l’apprentissage sur Jaguar, certains chasseurs poursuivent ponctuellement les formations sur AMX-10RC. D’autres sont chargés d’effectuer les vérifications de bon fonctionnement (VBF) des nouveaux véhicules. Une étape qui s’avère plus complexe pour le Jaguar, les vérificateurs étant cette fois confrontés à véritable un système d’arme. L’armée de Terre en a reçu 24 exemplaires jusqu’à aujourd’hui, dont 16 passeront par la case VBF cette année. Une dizaine d’entre eux permettront au 1er RCA de mener les formations prévues en septembre. D’ici peu, le 1er RCA recevra également deux Jaguar « gueusés », des véhicules écoles dépourvus de tourelle et dont les commandes ont été dédoublées pour soutenir le volet conduite.
Cette dynamique prendra bientôt une tournure internationale grâce ai partenariat franco-belge Capacité Motorisée (CaMo). D’ici à 2030, la Composante Terre belge disposera de 382 Griffon et 60 Jaguar, une bascule pour laquelle l’expertise du 1er RCA s’avérera précieuse. Après de premiers contacts et la visite en mai d’une délégation belge, celui-ci accueillera un caporal-chef et un adjudant de la Composante Terre dès cet été.
Ces éléments précurseurs « seront formés pour devenir primo-formateurs sur Griffon dans un premier temps, avec la perspective d’accueillir l’année prochaine deux militaires belges sur le segment Jaguar », annonce le lieutenant-colonel Tesson. L’objectif est très clair selon lui : il s’agit de « préparer, d’anticiper la transformation de l’armée belge, qui suivra le même mouvement que l’armée de Terre avec un décalage de quelques années ».