Exercice Yellow Guardian : construire l’interopérabilité entre unités de reconnaissance et de renseignement

Exercice Yellow Guardian : construire l’interopérabilité entre unités de reconnaissance et de renseignement

par – Forces opérations Blog – publié le

Environ 600 militaires et véhicules belges, français, luxembourgeois et néerlandais sont à pied d’oeuvre depuis ce lundi dans le sud-est de la Belgique. Le double objectif de cet exercice baptisé « Yellow Guardian » ? Réaliser une mission de reconnaissance au contact tout en renforçant l’interopérabilité et le partage de connaissances entre unités de renseignement alliées. 

Après un temps de préparation, l’essentiel de ce contingent conduit par les chasseurs à cheval belges a entamé sa progression au travers du massif ardennais. En trois jours, 350 à 400 spécialistes du renseignement auront parcouru une centaine de kilomètres pour parvenir au plus près de la première ligne ennemie. Leur mission principale ? Récolter de l’information sur la force adverse présente dans la zone et sur la praticabilité d’un terrain ardennais capricieux. Un travail essentiel d’observation pour permettre aux analystes du bataillon de générer un renseignement exploitable au profit, dans ce scénario, de la brigade. 

Exercice multinational, Yellow Guardian repose pour moitié sur des détachements en provenance de pays alliés. Ce sont tout d’abord des éléments français du 1er régiment de spahis, du 61e régiment d’artillerie, du 2e régiment de hussards et du 54e régiment de transmissions. Voisin et partenaire régulier, le Grand-Duché de Luxembourg a envoyé un escadron au complet. Un peloton du 42e escadron de reconnaissance de la 13 brigade légère est venu des Pays-Bas pour compléter le dispositif. Face à eux, un adversaire « intelligent, flexible et très mobile » simulé par un escadron belge. 

« C’est une première depuis longtemps », souligne le chef de corps du bataillon de Chasseurs à Cheval, le lieutenant-colonel BEM Jean-François Verheust. Traditionnellement proche du 1er RS, il l’a aussi été avec l’ex-commandement du renseignement (COM RENS). L’avènement de son successeur, le commandement des actions dans la profondeur et du renseignement (CAPR), permet d’étendre un lien centré sur l’analyse vers des capteurs inexistants dans l’arsenal belge. C’est le cas de systèmes de guerre électronique propres au 54e RT, par exemple, qui permettront de caractériser l’empreinte électromagnétique de la force amie, de relever les éventuels écueils et erreurs et de contribuer à disparaitre des radars. 

Crédits image : Jérémy Smolders – Bataillon de Chasseurs à Cheval

Organiser un exercice comme Yellow Guardian allait de soi, « parce que cela fait plusieurs années que nous n’avons plus eu l’occasion de nous entraîner ensemble dans un contexte qui a quelque peu changé ces dernières années », rappelle le LCL Verheust. De fait, les missions de maintien de la paix en théâtre sahélien ont laissé place aux opérations de réassurance sur flanc oriental de l’Europe, avec tout ce que la résurgence d’un adversaire à parité comporte comme menaces nouvelles ou à redécouvrir. 

Il devenait impératif pour ceux qui sont « vos yeux et vos oreilles sur le champ de bataille » de travailler les métiers spécifiques dans un environnement plus transparent donc moins permissif. Sans doute moins prégnante auparavant, la discrétion redevient la norme. « Avant, on disait souvent que, quand une force de reconnaissance tire, c’est qu’elle a raté son objectif principal », rappelle le LCL Verheust. Pour des troupes légères dotées d’armement tout aussi légers, se dissimuler est donc la meilleure option pour éviter tout contact direct avec un ennemi souvent plus « musclé » et le désengagement dare-dare qu’il nécessiterait. 

« Nous allons tester différents procédés tactiques. Les Français ne travaillent pas comme les Luxembourgeois et ne travaillent pas comme nous. Cela permettra de voir comme nous pouvons intégrer tout cela étant donné que, de plus en plus, nous travaillons dans un contexte multinational », observe le LCL Verheust. Les challenges ne manquent pas, des liaisons entre systèmes d’information nationaux aux différences entre capteurs et processus d’analyse de l’information. « Les senseurs que les Français amènent sont différents des nôtres, cela ajoute un peu de complexité ». Et le spectre s’étend à des sujets qui regagnent en substance, dont celui d’un volet logistique assuré par la Belgique. Le temps des retours d’expérience viendra, mais le commandant des chasseurs se veut confiant : « Nous verrons vers quoi cela évolue, mais je crois qu’il y a de belles choses à faire ensemble ». 

L’escadron Alpha du bataillon belge va progressivement « calquer » sa structure et ses méthodes sur celles appliquées côté français (Crédits image : Jérémy Smolders – Bataillon de Chasseurs à Cheval)

Yellow Guardian intervient sur fond de transformation pour les chasseurs à cheval. S’il n’est pas le premier concerné par le partenariat franco-belge « Capacité Motorisée » (CaMo), sa structure, son matériel et ses savoir-faire seront partiellement adaptés pour renforcer l’interopérabilité avec l’armée de Terre. Le rapprochement concerne l’ensemble du bataillon mais à des degrés variables afin de permettre au bataillon de continuer à oeuvrer tant en appui de la brigade motorisée que du régiment des opérations spéciales (SORegt). 

L’effort principal relève de la transformation de l’escadron Alpha en escadron de renseignement au contact (ERC). Une bascule dans laquelle les liens construits avec le 1er RS s’avèrent précieux « car ils ont des capacités que nous devons développer ici en Belgique ». Pour l’instant, il s’agit de faire comme les Spahis mais à partir d’équipements différents, à l’image des blindés légers Falcon perçus en remplacement des véhicules 6×6 Pandur. La perspective d’un contact plus « musclé » demande par ailleurs de revoir l’armement des pelotons, notamment par l’ajout d’une arme antichar débarquée. 

Demain, les chasseurs à cheval entreront eux aussi dans la bulle SCORPION par l’entremise du système d’information associé (SICS), mais pas uniquement. Véhicule de transition, le Falcon doit à terme s’effacer au profit d’un véhicule blindé d’aide à l’engagement (VBAE) développé en franco-belge. Les autres escadrons conserveront le Dingo et le Pandur rénové. Si rien n’est aujourd’hui prévu pour remplacer ce dernier, un virage vers le Serval ne serait pas exclu pour renouveler une partie du parc. De fait, plusieurs versions potentiellement utiles à cette unité spécialisée se profilent à l’horizon, à l’instar du Serval SA2R (surveillance, appui, renseignement et reconnaissance). Voire, si le budget le permet, sa variante de guerre électronique. 

Crédits image : Jérémy Smolders – Bataillon de Chasseurs à Cheval

Marine : le groupe aéronaval déployé en Indo-Pacifique

Marine : le groupe aéronaval déployé en Indo-Pacifique

Par Cédric Bonnefoy – armees.com – Publié le 12 novembre 2024

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Marine : le groupe aéronaval déployé en Indo-Pacifique – © Armees.com

Après plusieurs années de préparation intensive, le groupe aéronaval de la marine française va bientôt débuter une mission de plusieurs mois en Indo-Pacifique, une région stratégique pour l’état-major.

La marine française se déploie en Indo-Pacifique

Le déploiement renforcé de la marine française en Indo-Pacifique marque une étape cruciale dans la stratégie de défense française. Le groupe aéronaval (GAN), emmené par le porte-avions Charles de Gaulle, se prépare à quitter Toulon pour une mission de plusieurs mois dans cette région. Alors que les tensions y sont croissantes, la France, avec son réseau de territoires ultramarins, vise à affirmer sa souveraineté et ses engagements sécuritaires.

Confirmé lors du dernier point presse du ministère des Armées, le GAN se prépare à un déploiement de cinq mois dans le cadre de la mission Clemenceau 2025. Cette opération se déroulera sur un itinéraire stratégique englobant la mer Rouge, l’océan Indien et le Pacifique occidental. Ce parcours fait écho à une présence militaire accrue dans la région, rendue nécessaire par les enjeux de sécurité maritime et la lutte contre le terrorisme.

L’importance de l’Indo-Pacifique pour la France tient à ses territoires ultramarins, dont La Réunion, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française. Ces zones étendent la zone économique exclusive (ZEE) française, lui conférant la deuxième plus grande ZEE au monde. Par ce déploiement, la France entend non seulement protéger ses intérêts, mais également défendre les valeurs de liberté de navigation et de droit international.

Un défi logistique et politique pour la France

La mission Clemenceau 2025 s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu. L’Indo-Pacifique est devenu un point focal des rivalités entre grandes puissances, notamment entre la Chine et les États-Unis. Cette compétition influence également la France.

Sur le plan logistique, la mission requiert une organisation minutieuse. Le GAN, au cœur du dispositif, inclut le porte-avions Charles de Gaulle, accompagné de frégates, d’un sous-marin nucléaire d’attaque et d’un pétrolier ravitailleur. Ce convoi de navires constitue une force opérationnelle puissante, capable de répondre rapidement aux besoins des opérations. Outre les défis liés à l’entretien de cette force en haute mer, les escales dans des ports alliés en Indo-Pacifique permettront de resserrer les liens avec les nations partenaires et de réaliser plusieurs exercices militaires conjoints.


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Cédric Bonnefoy

Cédric Bonnefoy est journaliste en local à la radio. À côté, il collabore depuis 2022 avec Économie Matin.

D’exercices en expérimentations, comment l’ALAT intègre les drones dans l’aérocombat

D’exercices en expérimentations, comment l’ALAT intègre les drones dans l’aérocombat

–  Forces opérations Blog – publié le

L’heure à l’exploitation tous azimuts du potentiel des drones pour l’aviation légère de l’armée de Terre (ALAT). Mandats et expérimentations se multiplient parmi les régiments d’hélicoptères de combat pour construire la collaboration entre plateformes habitées et inhabitées et démultiplier les capacités de l’aérocombat. 

Fini l’hélicoptère, remplacé par un drone moins complexe, moins onéreux et dès lors mieux adapté pour répondre à l’attrition de la haute intensité ? Loin s’en faut, les deux outils ont davantage vocation à collaborer qu’à s’évincer. La dernière édition de l’exercice Baccarat, grand rendez-vous annuel de la 4e brigade d’aérocombat (4e BAC), l’aura encore démontré en intégrant plusieurs drones dans un même espace aérien, du micro-drone de surveillance aux SMDR du 61e régiment d’artillerie et Puma du 32e régiment royal d’artillerie britannique. 

Clôturé la semaine dernière, Baccarat était une nouvelle étape dans une dynamique globale visant à intégrer le drone dans la manœuvre tactique. Essentiellement exploratoire, la démarche amène un double enjeu selon le commandant de la 4e BAC, le général de brigade Jean-André Casanova. D’un côté, le défi de la coordination des acteurs de la troisième dimension, ou la capacité à faire voler davantage d’objets dans un espace restreint. De l’autre, le défi de la coopération entre drones et hélicoptères, ou comment tirer le meilleur parti de chacun des vecteurs pour maximiser les effets. 

Étape par étape, chaque régiment d’hélicoptères de combat monte en gamme sur la question. À l’instar du reste de l’armée de Terre, tous disposent désormais de leurs propres micro-drones, formation de télépilotes régimentaires à la clef. Ces équipements « du combattant » sont principalement mis à profit pour la surveillance de zone ou des approches d’un poste de commandement, une mission confiée durant Baccarat au système mobilisé par le 3e régiment d’hélicoptères de combat d’Étain. Demain, rien n’empêchera d’étendre le spectre à la protection, par exemple, d’un « Forward Arming and Refueling Point » (FARP), ces stations-service mobiles projetées vers l’avant pour l’avitaillement des machines. 

L’intégration volontaire ou non de nouveaux acteurs dans la bulle aéroterrestre nécessite de se pencher sur les problématiques de coordination. Un tel travail a déjà été réalisé à plusieurs reprises au Sahel par tous les régiments. Il s’agit désormais d’adapter les savoir-faire à la haute intensité et à un environnement allant au-delà de la ligne de contact, mission confiée au 3e RHC. Voilà un moment que ce dernier multiplie les expérimentations en lien direct avec le groupement aéromobilité de la section technique de l’armée de Terre (GAMSTAT). 

Pour l’adjudant Marina, contrôleuse aérienne au sein du 3e RHC, le drone « est un type de vecteur auquel il faut que l’on s’intéresse particulièrement, notamment en termes de déplacement, de liaison avec le télépilote et de réaction en cas de panne. C’est une gymnastique supplémentaire ». Deux enjeux s’imposent d’eux-même : celui de la communication avec un télépilote qui n’a pas nécessairement le visuel sur sa machine, et celui de l’anticipation des événements en gestion de trafic tout en respectant le cadre tactique.

« La doctrine française est bien faite pour admettre tout ce qui vole. Ce qui change, ce sont nos habitudes et les drones qui se multiplient, mais sinon les principes restent les mêmes », observe le capitaine Guillaume, officier 3D du 3e RHC durant Baccarat. « Nous devons davantage coopérer mais les outils existent déjà », explique-t-il en écho à l’ « Integrated Command and Control », ce logiciel de l’OTAN conçu pour la programmation et la conduite des opérations aériennes. En théorie réservé aux échelons de commandement supérieurs, l’ICC est depuis peu descendu à l’échelon régimentaire dans l’ALAT. Nécessaire pour une coordination optimale, l’atteinte de ce niveau de granularité se traduit in fine par un gain d’agilité et de réactivité pour le chef tactique, note le capitaine Guillaume. 

La collaboration, enfin, revient à définir « comment nous pouvons utiliser des drones qui existent déjà pour renforcer l’efficacité de nos appareils », résume le général Casanova. Hélicoptères et drones ont chacun leur utilité, leurs points faibles et points forts. Quand les premiers l’emportent en matière d’élongation et d’emport, les seconds représentent un « gain important dans le domaine tactique, car il est bien moins détectable qu’un hélicoptère et s’avère plus économique au vu du coût de l’heure de vol », rappelle l’adjudant Marina. Combiner l’un et l’autre devrait donc permettre de répondre à certains des challenges imposés par l’action dans la profondeur face à un ennemi à parité. 

Cette « dronisation » de l’aérocombat est « le sujet le plus complexe parce que nous sommes presque imbriqués, mais aussi le plus exaltant car il implique de nouvelles procédures et l’achat de nouveaux matériels. C’est un nouveau domaine que nous avons commencé à explorer », indique le COM4BAC. Entre la hauteur de la marche à franchir et l’accélération technologique, la question est d’emblée devenue prioritaire pour l’ALAT. 

Du leurrage à l’illumination, plusieurs applications sont simultanément à l’étude. Projeter des Tigre et des Caïman dans la profondeur du dispositif, c’est s’assurer de les exposer à un maillage de défense sol-air dense et potentiellement infranchissable. Plutôt que de s’y frotter, l’ALAT cherchera à créer une brèche à distance en misant sur le drone FPV, cette « bombe volante » pilotée à distance, abondamment utilisée en Ukraine et, surtout, susceptible de prolonger l’armement embarqué de l’hélicoptère. 

Autre piste, le drone-leurre agira pour attirer les radars et autres capteurs adverses vers d’autres objets que les hélicoptères. Cette manœuvre de déception, « nous la travaillons déjà tactiquement via la simulation », avec pour objectif de déterminer le drone capable de simuler la surface équivalente radar d’un hélicoptère en vol. Aux industriels d’ensuite prendre le relais pour proposer une contre-mesure active abordable car « jetable » et apte à être programmée pour réaliser des vols en patrouille. 

Si le 3e RHC est en pointe de l’effort mandaté par l’état-major de l’armée de Terre, il reviendra au 1er régiment d’hélicoptères de combat d’explorer une troisième voie, celle du « drone illuminateur ». Un « oeil déporté » chargé d’aller sur l’avant pour illuminer une cible et guider une frappe tout en permettant au Tigre de rester en retrait. Pour l’instant totalement exploratoire, l’idée aboutit déjà à une ébauche de solution et à de premiers liens avec des industriels du cru. 

L’approche se veut progressive. « Nous avons déjà franchi un certains nombres d’étapes que je fixe moi », poursuit le général Casanova. « Aujourd’hui, nous sommes capables de télépiloter un drone FPV depuis la soute ou la place arrière d’une Gazelle ». Il s’agira ensuite d’arriver à le larguer et à le prendre en compte immédiatement depuis la soute pour le piloter. Et, plus tard, d’imaginer comment poser la charge dessus sans menacer la sécurité de l’appareil. Le drone FPV préfigure en quelque sorte l’arrivée des munitions téléopérées, « ces MTO qui, demain, pourraient être mises en oeuvre depuis les paniers de roquettes d’un Tigre, par exemple ». Autant de succès initiaux d’où émergeront les briques qui viendront alimenter un projet d’ensemble : celui du drone d’aérocombat, une ambition cette fois portée en dehors de la 4e BAC. 

Crédits image : GAMSTAT

Face à la menace russe, l’armée de terre française muscle sa logistique

Face à la menace russe, l’armée de terre française muscle sa logistique

L’armée de terre va participer à plusieurs exercices d’envergure sur le flanc est de l’Europe. La France veut montrer à ses alliés ses capacités de projection.

Par Clément Machecourt – Le Point –

https://www.lepoint.fr/monde/face-a-la-menace-russe-l-armee-de-terre-francaise-muscle-sa-logistique-10-10-2024-2572354_24.php


 

Rentrée studieuse pour l’armée de terre française. Son chef d’état-major (Cemat), le général Pierre Schill, a dressé, vendredi 4 octobre à Lille, les grandes lignes du programme qui attend les quelque 130 000 soldats français dans les mois et les années à venir. Le lieu n’a pas été choisi au hasard. C’est dans la ville du Nord que se trouve le Commandement Terre Europe (CTE) et le Commandement de la Force et des opérations terrestres (CFOT). Deux états-majors qui regardent désormais en grande partie vers l’est de l’Europe.

Un engagement important de nos forces est devenu une hypothèse crédible, a prévenu le général Schill, avec une « menace russe présente pour les années à venir à l’est de notre continent ». L’armée française doit être prête à la fois à intervenir « ce soir » tout en préparant les engagements du futur. La LPM de 2024-2030 et ses 413 milliards d’euros pour les armées, permet d’envoyer un premier message de volonté aux alliés et pays compétiteurs de la France.

Une brigade déployée en dix jours

Expérience du combat, force morale présente, polyvalence… Le Cemat a listé les différents points forts de l’armée de terre, qui doit maintenant gagner en réactivité et passer à une autre échelle d’engagement et de projection de force. Dans le cadre de l’exercice Dacian Spring, c’est une brigade interarmes (7 000 à 8 000 soldats) « bonne de guerre », c’est-à-dire tout de suite apte au combat et capable de tenir dans la durée, qui sera déployée en 10 jours sur le sol roumain en avril 2025.

Cela représente un effort logistique conséquent, avec 1 500 conteneurs qui, mis bout à bout, forme un convoi ferroviaire long de neuf kilomètres. « Un jour de combat, c’est une consommation de 80 conteneurs, dont 20 rien que pour les munitions », détaille le Général Guillot, adjoint au CTE.

En 2022, sept jours seulement après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la France avait déployé le Sparhead Battalion de la force de réaction rapide de l’Otan en Roumanie, composée de 500 Français et 300 Belges. Une vingtaine de rotations d’Antonov 124, plus gros avion du monde, trois de KC130 et trois d’A330 MRTT avaient été nécessaires. Depuis, 2 500 militaires de la mission Aigle sont relevés tous les quatre mois, et 500 véhicules par an. Une année de logistique représente 36 vols pour transporter le personnel, 10 vols, 35 trains et 25 convois routiers pour le fret.

L’importance du fret ferroviaire

Un transport multimodal qui, malgré la menace russe, connaît encore quelques ratés. À l’image de contrôles douaniers tatillons de la part d’un pays voisin de la France, obligeant, pour une histoire de tampon mal placée, à faire descendre un char Leclerc de son wagon porte-char. L’Union européenne a investi 1,7 milliard d’euros dans la création d’un « Schengen militaire », pour permettre le déplacement rapide de troupes d’ouest en est sans les tracasseries administratives de chaque pays traversé.

En Roumanie, c’était un pont trop fragile qui imposait il y a peu encore les convois blindés français à faire un détour de plusieurs heures avant d’atteindre leur base. Signe de l’importance d’un bon réseau ferroviaire, la Finlande, arrivée dans l’Otan en 2023, songe à remplacer l’écartement russe de 1 520 mm d’une de ses voies de chemin de fer pour passer à un écartement standard de 1 453 mm.

Pikne, Diodore, Hedgehog, le cahier d’exercices chargé de l’armée française

Au-delà de l’échéance de Dacian Spring, d’autres exercices vont ponctuer le calendrier déjà chargé de l’armée française, afin de travailler l’interopérabilité avec ses alliés. Le nord de la mer Baltique sera, en décembre 2024, le théâtre de l’exercice Pikne mené au côté des forces britanniques et estoniennes. Des tirs interarmes, commandés depuis des PC en France, seront effectués sur terre, mais également depuis des frégates et des avions en appui air-sol.

Mars 2025, l’exercice Diodore devra démonter les capacités du Commandement des actions dans la profondeur et du renseignement (Capr). Créé en 2024, il vise à mener des actions dans la profondeur de l’ennemi au niveau corps d’armée ou division entre 30 et 500 km. En avril, l’exercice Hedgehog en Estonie enverra un autre bataillon français dans le cadre de la mission lynx. Enfin, en juin, Warfighter, entraînera la 1ʳᵉ division française au côté d’un corps d’armée américain. Mis bout à bout, ces exercices envoient des signaux stratégiques à la Russie, visant à la dissuader d’aller plus en avant contre l’est de l’Europe. Pour « gagner la guerre avant la guerre », l’armée française espère pouvoir déployer une division (environ 25 000 soldats) en 30 jours en Europe de l’Est dès 2027.

Avec ses AMX-10RC, le 4e Régiment de Chasseurs va s’entraîner au combat blindé de haute intensité en montagne

Avec ses AMX-10RC, le 4e Régiment de Chasseurs va s’entraîner au combat blindé de haute intensité en montagne

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Depuis 2022, au titre de la mission Aigle, la France est la nation-cadre d’un groupement tactique multinational déployé en Roumanie dans le cadre du renforcement de la posture défensive et dissuasive de l’Otan en Europe de l’Est. Or, ce pays est traversé par le massif des Carpates, lequel compte plusieurs sommets culminant à plus de 2500 mètres d’altitude.

Aussi, les forces françaises participent régulièrement à des exercices de combat en montagne avec leurs homologues roumaines, l’objectif étant d’améliorer leur interopérabilité et de partager leurs savoir-faire respectifs.

Cela étant, le combat en montagne n’est pas la seule affaire des fantassins. En effet, parmi ses unités, la 27e Brigade d’Infanterie de Montagne [BIM] compte le 4e Régiment de Chasseurs, dont la spécialité est le combat blindé en milieu montagneux. Et celui-ci s’apprête à mener un exercice « grandeur nature », appelé « Edelweiss 24 ».

Devant se dérouler en terrain libre, plus précisément sur les cols de la Bonette, de la Cayolle et d’Allos ainsi que dans les vallées de l’Ubaye et du Drac, entre les 13 et 18 octobre, cet exercice « inédit » de « combat blindé en montagne » sera l’occasion pour le 4e Chasseurs de « déployer l’ensemble de ses unités au profit d’un entraînement interarmes, interarmées et interalliés », explique l’armée de Terre.

Outre les « cavaliers des cimes », ces manœuvres mobiliseront d’autres unités de la 27e BIM ainsi qu’un détachement du Light Dragoons de la British Army.

Au total, 450 soldats y prendront part, avec plus d’une centaine de véhicules, dont des quads Polaris MV850 [le 4e Chasseurs en compte huit], des motos, des Véhicules blindés légers [VBL] et, évidemment, des AMX-10RC. Des drones seront aussi de la partie, l’un des objectifs étant de préparer le régiment aux « évolutions technologiques et tactiques », comme celles constatées en Ukraine.

« Cette manœuvre en terrain libre de cinq jours aura pour objectif d’entraîner le 4e Régiment de Chasseurs dans son milieu de prédilection à l’heure où les conflits en zones montagneuses se multiplient [Caucase, Liban, etc.] », résume l’armée de Terre.

À noter que la communauté de communes de Vallée de l’Ubaye Serre-Ponçon se félicite de la tenue de cet exercice sur son territoire, ce qui mérite d’être souligné. « Du 13 au 18 octobre , les forces militaires seront présentes dans le col de Restefond dans le cadre de l’exercice Edelweiss 24. […] Ce site, marqué par son histoire militaire, retrouve son rôle stratégique pour un entraînement de grande ampleur. […] Cette manœuvre rappelle le lien fort qui unit notre vallée à ses racines militaires et l’importance de l’entrainement des forces armées », rappelle-t-elle.

Photo : armée de Terre / sengager.fr

L’armée de Terre déploie le véhicule blindé Serval sur un théâtre extérieur pour la première fois

L’armée de Terre déploie le véhicule blindé Serval sur un théâtre extérieur pour la première fois


Contrairement au Véhicule blindé multi-rôles [VBMR] Griffon, l’Engin blindé de reconnaissance et de combat [EBRC] Jaguar et le VBMR Serval n’ont pas eu l’occcasion de connaître les rigueurs du climat sahélien pour leur premier engagement opérationnel étant donné que l’un et l’autre n’ont commencé à être livré à l’armée de Terre qu’au moment où la France s’apprêtait à mettre un terme à sa présence dans la bande sahélo-saharienne [BSS].

En revanche, en mai, le 1er Régiment Étranger de Cavalerie [REC] a déployé plusieurs de ses Jaguar en Estonie, dans le cadre de la mission Lynx. Il s’agissait du premier engagement de ce blindé issu du programme SCORPION sur un théâtre extérieur [et non première participation à une opération extérieure étant donné que les missions menées au titre de l’Otan en Europe de l’Est relèvent de la préparation opérationnelle].

En janvier, le colonel Patrick Ponzoni, alors à la tête du détachement français présent en Estonie, avait confié à ERR, c’est-à-dire la radio-télévision publique estonienne, que le Serval serait engagé dans la mission Lynx à partir du mois d’août.

Finalement, c’est à avec quelques jours de retard que les premiers Serval sont arrivés en Estonie.

« Premier déploiement opérationnel en Estonie pour le véhicule blindé multi-rôles Serval. L’armée de Terre engage ses matériels les plus modernes au service de la solidarité stratégique avec ses alliés », a affirme le général Pierre Schill, son chef d’état-major, via le réseau social X.

Les quatre premiers Serval avaient été livrés au Centre d’appui de préparation au combat interarmes – 51e régiment d’infanterie [CAPCIA-51e RI] de Mourmelon [Marne]. Un an plus tard, le 3e Régiment de Parachutistes d’Infanterie de Marine [RPIMa] devint la première unité opérationnelle de l’armée de Terre à en être dotée.

Pour rappel, devant équiper en priorité la force de réaction rapide de l’échelon national d’urgence, le Serval est un blindé 4×4 de 15 à 17 tonnes, produit par KNDS France [ex-Nexter] et Texelis. Partageant les mêmes équipements que les deux autres véhicules du programme SCORPION [vétronique et système d’information et de commandement, notamment], il est équipé d’un tourelleau téléopéré armé d’une mitrailleuse de 12,7 mm et de détecteurs de menaces. En plus de ses deux membres d’équipage, il peut transporter huit soldats équipés du système FELIN [Fantassin à équipements et liaisons intégrés].

Au-delà de ses capacités en matière de combat collaboratif, le Seval se distingue du Véhicule de l’avant blindé [VAB] qu’il remplace par « ses qualités de mobilités tactique et stratégique », d’après la Section technique de l’armée de Terre [STAT].

Photo : armée de Terre

L’armée de Terre va donner plus de réalisme aux exercices de tirs réels en généralisant la méthode « ESTOC »

L’armée de Terre va donner plus de réalisme aux exercices de tirs réels en généralisant la méthode « ESTOC »


Pour l’armée de Terre, l’ouverture du feu est l’acte « ultime » du soldat, qui doit, par conséquent, maîtriser parfaitement son armement individuel. D’où l’importance de l’Instruction sur le tir de combat [ISTC], instaurée en 2006 dans l’ensemble de ses régiments.

Cette ISTC, est-il rappelé dans le dernier numéro de Terre Mag, a « redonné l’autonomie au combattant en lui inculquant le savoir-vivre armé et la maîtrise parfaite de son arme, pour sa protection ou celle de tiers ». En outre, elle leur a apporté une « confiance individuelle et collective », a souligné le général Renaud Sénétaire, qui, alors qu’il était le chef de corps du 1er Régiment de chasseurs parachutistes, commanda le bataillon « Raptor », en Afghanistan, entre 2010 et 2011.

Mais pour prendre le dessus sur un adversaire, encore faut-il maîtriser également le tir « en équipage » et de combiner les « feux » [engins blindés, armes individuelles, drones, etc.]. En clair, il s’agit de faire manœuvrer différentes unités de façon à maximiser les effets. D’où la nécessité d’une préparation opérationnelle collective, qui doit être la plus réaliste possible. Or, comme l’a admis le colonel Merlin, du Commandement de l’entraînement et des écoles du combat interarmes [COM E2IA], des progrès sont à faire dans ce domaine.

« Le réalisme des manœuvres à balles réelles dans nos centres est limité. Les tireurs sont contraints de s’aligner sur des positions prédéterminées face à des cibles, toujours aux mêmes emplacements. Le chef tactique tient un rôle restreint », a-t-il expliqué dans les pages de Terre Mag.

D’où l’élaboration d’un nouveau concept, appelé ESTOC, pour « Expérimentation sur l’entraînement au tir opérationnel de combat ». Trois campagnes ont d’ores et déjà été réalisées, à Mourmelon et à Canjuers. Les deux premières ont impliqué le 152e Régiment d’Infanterie [RI] et des VBCI [Véhicules blindés de combat d’infanterie] tandis que la troisième a mobilisé le 21e Régiment d’Infanterie de Marine [RIMa] ainsi que des éléments du 1er Régiment Étranger du Génie [REG] et le 1er Régiment de Chasseurs d’Afrique.

Concrètement, rendue possible grâce à la géolocalisation et aux tirs décalés, ESTOC vise à faciliter la manœuvre à tirs réels tout en introduisant une part d’incertitude dans la mesure où les cibles sont désormais « imprévisibles », les directeurs d’exercice ayant la possibilité de les activer en fonction de la progression des unités participantes. Des superviseurs sont chargés de vérifier le « respect des écarts angulaires entre les tireurs » et des « marges de sécurité » afin d’empêcher tout incident.

Cette expérimentation doit permettre de « donner plus d’autonomie et de responsabilités au chef de la troupe, chargé de la progression tactique et de son unité », celui-ci pouvant adapter ses déplacements aux caractéristiques du terrain, des abris, en veillant à aligner en permanence les directions de tir de ses éléments », détaille Terre Mag.

Les trois campagnes réalisées ont a priori donné satisfaction. « Chacune des unités a appréhendé l’ESTOC de façon différente. Toutes sont unanimes sur la hausse du niveau rapide du commandement en situation de tir », a résumé un officier du COM E2IA. Une quatrième devrait être menée prochainement, avec un degré de difficulté supplémentaire puisqu’il s’agira de faire manœuvrer l’équivalent d’un sous-groupement tactique interarmes.

L’armée de Terre prévoit de généraliser l’ESTOC à partir de 2025. Il lui restera ensuite à s’adapter à « l’évolution des armes, rapide sous la pression des conflits et par les progrès technologiques : munitions téléopérées, lutte anti-drones, frappe à longue distance ».

Le déploiement Pégase toujours aussi rentable pour l’Armée de l’Air et de l’Espace

Le déploiement Pégase toujours aussi rentable pour l’Armée de l’Air et de l’Espace

 

par Jean-Marc Tanguy – Air & Cosmos – publié le 12 septembre 2024

https://air-cosmos.com/article/le-deploiement-pegase-toujours-aussi-rentable-pour-l-armee-de-l-air-et-de-l-espace-69345


L’Armée de l’Air et de l’Espace est allée encore plus loin et longtemps, avec l’édition 2024 de l’opération de projection Pégase. Retours d’expérience de son commandant tactique, le général de division Guillaume Thomas.


Un peu moins d’avions mais un programme encore plus ambitieux

Un peu moins d’avions -17 contre 19 en 2023, mais un programme encore plus ambitieux, comportant deux projections vers l’Indo-Pacifique et une nouvelle série de premières : l’Armée de l’Air et de l’Espace a voulu encore passer un cran dans Pégase 2024, étendu sur plus de sept semaines (six en 2023). La masse était la signature de l’édition 2023, avec 10 Rafale, 5 Phénix et 4 Atlas : un an plus tard, l’Armée de l’Air et de l’Espace a dû adapter la voilure pour prendre en compte aussi les besoins liés à la protection des JO en France, alors que la masse était, elle, apportée par les partenaires européens. 

Une marque européenne affirmée

Sept Rafale (trois de moins) ont finalement participé, avec cinq Phénix (inchangé) et cinq Atlas (un de plus). Ces derniers ont poursuivi dans leur versatilité et leur polyvalence, assurant des capacités de recherche et de sauvetage, notamment durant le transit le plus complexe entre l’Alaska et le Japon (sur la route vers l’Australie, étape suivante), mais aussi des aéro-largages, du ravitaillement en vol et des opérations depuis des terrains sommaires.

Terrain de jeu inhabituel en Alaska

Pégase 2024 avait une marque européenne affirmée, en emmenant aussi les deux autres pays du SCAF -Allemagne et Espagne- dans des cieux jusqu’alors non balayés par eux. Sur leur première étape, les appareils des trois pays ont pu bénéficier d’un terrain de jeu inhabituel en Alaska, permettant un meilleur niveau de réalisme. Même si seuls les Espagnols sont allés jusqu’à tirer des armes réelles. En douze jours, les Rafale ont généré 67 sorties avec deux raids où ils tenaient la position de chef de mission. Les Atlas ont assuré 11 sorties, et les Phénix, 10, alimentant 100 receveurs, dont des F-22 américains.

Les Britanniques ont pu de leur côté se projeter directement en Australie avec les Français, une façon d’illustrer le partenariat bilatéral de la common joint expeditionnary force (CJEF) pour lequel une capacité de commandement et de contrôle binationale avait été implantée au sein du centre air de planification et de contrôle des opérations (CAPCO) de Lyon. La formation comptait trois Rafale, 6 Typhoon, trois MRTT et quatre Atlas (deux types d’appareils en service dans les deux pays, et même en Australie pour le MRTT).

Raids de 80 aéronefs en Australie

L’Australie a offert aussi des étendues appréciables représentant les ¾ de la France pour dérouler des raids comportant jusqu’à 80 aéronefs. Les Européens ont aussi participé à l’exercice indien Tarang Shakti, amenant un niveau de participation internationale qui n’avait pas été généré depuis 1961.

L’emploi d’appareils communs a été une fois de plus porteur pour assurer des maintenances croisées, sur les A400M français, allemands et espagnols, mais aussi les ravitailleurs MRTT français et australiens. Un Rafale français en panne en Inde a aussi pu recevoir une pièce indienne, a signalé le général Thomas. Un des rares exemples de panne, et « aucune mission n’a été annulée pour raison technique » a assuré le commandant tactique de Pégase 2024. Un Phénix a aussi pour la première fois ravitaillé en vol un de ses cousins australiens.

Rafale, A400M et A330MRTT aux Philippines

Les Pégase comportent aussi une part évidente de diplomatie aérienne mêlée de soutien export (soutex). Pour la première fois, des Rafale avec un Phénix et un MRTT ont posé aux Philippines, un pays frontalement confronté aux ambitions chinoises, et qui cherche à s’équiper, à l’instar de ses voisins malais et indonésiens qui ont déjà opté pour des produits aériens et navals français. Plusieurs compétitions sont en cours dans la région et avec Pégase, l’armée de l’air et de l’espace aura aussi contribué à alimenter la manœuvre globale de l’équipe France.

Comme lors des précédents déploiements, l’outremer française n’a pas été oubliée, avec des escales à Saint-Pierre et Miquelon, en Nouvelle-Calédonie et à La Réunion.

Guerre en Ukraine : la Russie réalise un exercice militaire XXL avec la Chine

Guerre en Ukraine : la Russie réalise un exercice militaire XXL avec la Chine

Par Cédric Bonnefoy* – armees.com –  Publié le 11 septembre 2024

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Guerre en Ukraine : la Russie réalise un exercice militaire XXL avec la Chine – © Armees.com

 

Dans un contexte de guerre en Ukraine, la Russie montre les muscles. Moscou participe à un exercice militaire d’énorme envergure avec la Chine. L’opération se déroule dans le Pacifique et nécessite la participation de milliers d’hommes.

En pleine guerre en Ukraine, la Russie affiche sa puissance

Dans un contexte où la guerre en Ukraine s’intensifie, la Russie affiche une démonstration de force colossale. En effet, elle participe à des exercices militaires massifs. Ces derniers sont orchestrés en collaboration avec la Chine. La manœuvre, baptisée « Océan-2024 », mobilise plus de 90 000 soldats, 400 navires et 120 aéronefs. Il s’agit d’une manœuvre d’une ampleur sans précédent depuis « trois décennies » selon Vladimir Poutine. De plus, elle se déroule dans des zones stratégiques, telles que le Pacifique et l’Atlantique.

L’objectif est de tester les capacités militaires russes tout en renforçant les liens avec Pékin. L’exercice Océan-2024, s’étendant sur plusieurs océans et mers, permet également de tester l’efficacité des troupes à utiliser des armes de haute précision et à défendre les routes maritimes.

Depuis le début de l’invasion en Ukraine en février 2022, les relations sino-russes se sont considérablement resserrées. En effet, la Chine n’a jamais condamné cette offensive. De plus, elle renforce ses collaborations militaires avec Moscou. Ainsi, cet exercice militaire de grande ampleur reflète cette alliance stratégique. Le président Vladimir Poutine, lors de son discours d’ouverture, a dénoncé les « actions agressives » des États-Unis et de leurs alliés dans la région Asie-Pacifique. Ce dernier affirme que la Russie doit se préparer à toute éventualité, ce qui souligne l’importance de cet exercice pour affirmer leur puissance.

Une démonstration de force, un message à l’Occident

Avec la participation de la Chine, cet exercice militaire vise aussi à envoyer un message clair aux puissances occidentales. Selon Moscou, ces manœuvres témoignent de la montée en puissance de la coopération militaire sino-russe, un partenariat qui devient de plus en plus préoccupant pour les États-Unis et ses alliés. En effet, le Japon a récemment signalé la présence de navires chinois naviguant vers la Russie dans la mer du Japon, ce qui n’a fait qu’exacerber les tensions dans la région.

D’autre part, cette mobilisation militaire impressionnante survient dans un contexte où les pays occidentaux, menés par les États-Unis, augmentent leur présence dans la région Asie-Pacifique, ce qui est perçu comme une menace par Moscou et Pékin. Cette démonstration de force est donc un moyen pour ces deux nations de réaffirmer leur influence. Mais aussi, de rappeler leur capacité à agir en tandem pour défendre leurs intérêts communs surtout dans un contexte de guerre en Ukraine.

*Cédric Bonnefoy est journaliste en local à la radio. À côté, il collabore depuis 2022 avec Économie Matin.

Des légionnaires du 2e Régiment Étranger d’Infanterie vont participer à l’exercice Brunet-Takamori au Japon

Des légionnaires du 2e Régiment Étranger d’Infanterie vont participer à l’exercice Brunet-Takamori au Japon


Depuis que leurs relations ont été élevées au rang de « partenariat d’exception », en 2013, la France et le Japon n’ont de cesse de renforcer leur coopération militaire, notamment au niveau opérationnel, les initiatives en matière d’armement, malgré les ambitions affichées, ayant été plutôt timides jusqu’à présent.

Ainsi, en mai, les deux pays sont convenus d’aller plus loin encore en ouvrant des négociations sur un accord d’accès réciproque à leurs bases militaires afin de favoriser « l’interopérabilité » entre leurs forces armées respectives, via la tenue d’exercice conjoints et la participation à des opérations régionales.

À vrai dire, les liens militaires entre la France et le Japon sont très anciens puisqu’ils remontent à la mission du capitaine Jules Chanoine, qui avait été chargée de former l’armée du shogun Yoshinobu Tokugawa. En outre, Paris contribua à l’essor des forces aériennes japonaises dans les années 1920. Seulement, cette relation prit fin lors de la Seconde Guerre Mondiale, avec l’invasion de l’Indochine par les troupes nippones.

Quoi qu’il en soit, ces dernières années, les activités menées avec les forces d’autodéfense japonaises ont surtout concerné l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] et la Marine nationale.

Mais, depuis 2023, elles se sont élargies au combat terrestre, avec l’organisation de la première édition de l’exercice Brunet-Takamori [en référence au général Jules Brunet et à Saigō Takamori, le « dernier samouraï »] en Nouvelle-Calédonie, avec la participation du Régiment d’infanterie de marine du Pacifique de Nouvelle-Calédonie [RIMaP-NC] et de 5e Régiment d’infanterie de la Force terrestre d’autodéfense japonaise.

Pour sa seconde édition, l’exercice Brunet-Takamori se déroulera au Japon, plus précisément aux camps de manœuvre d’Ojyojibara et d’Iwateyama, situés dans la province d’Aomori. À cette occasion, l’armée de Terre y engagera une cinquantaine de légionnaires du 2e Régiment Étranger d’Infanterie [REI], qui relève de la 6e Brigade légère blindée. De son côté, la force terrestre d’autodéfense nippone mobilisera son 39e Régiment d’Infanterie [RI].

Devant avoir lieu du 8 au 21 septembre, l’exercice Brunet-Takamori « s’inscrit dans la montée en puissance du partenariat opérationnel des deux pays depuis 2022 », a précisé le ministère des Armées, via un communiqué. Il permettra « aux forces armées japonaises et françaises de s’entraîner dans les domaines de la lutte contre-guérilla et des opérations Commando » ainsi que dans celui de « l’appui drone au combat », a-t-il ajouté.

« La première édition de l’exercice, conduite en Nouvelle-Calédonie en septembre 2023, avait constitué une première étape essentielle dans le rapprochement opérationnel des forces terrestres des deux pays, en donnant l’opportunité de développer de manière concrète une stratégie convergente en faveur de la paix et de la stabilité dans la zone Indopacifique », a conclu le ministère.

Cela étant, ce ne sera pas la première fois que des légionnaires participeront à des manœuvres au Japon. En mai 2021, dans le cadre de la mission Jeanne d’Arc qui, cette année-là, avait mobilisé le porte-hélicoptères amphibie [PHA] « Tonnerre » et la frégate de type La Fayette « Surcouf », deux sections de la 13e Demi-brigade de Légion étrangère [DBLE] et du 1er Régiment Étranger de Génie [REG] avaient pris part à l’exercice ARC 21 aux côtés de l’infanterie de marine nippone et de l’US Marine Corps. Organisé sur l’île de Kyushu, il s’était concentré sur les opérations d’assaut amphibie.

Photo : Édition 2023 de l’exercice Brunet-Takamori – armée de Terre