USS America : la marine américaine a coulé son propre porte-avions
Saviez-vous que l’USS America, un porte-avions emblématique, a été coulé lors d’un exercice controversé en 2005 ? Son sacrifice a façonné l’avenir des porte-avions américains et continue d’inspirer des générations. Découvrez son incroyable héritage.
L’USS America (CV-66), un porte-avions de la classe Kitty Hawk, a navigué avec honneur pendant 30 ans avant de tirer sa révérence en 1996. Ce navire iconique a laissé son empreinte sur l’histoire militaire américaine grâce à ses missions à travers le monde et son rôle dans l’évolution des futurs porte-avions. Sa fin, lors d’un exercice de tir réel en 2005 connu sous le nom de « SinkEx », a fait parler d’elle, entre admiration et débat.
Un passé qui force le respect
Au départ, l’USS America devait être un porte-avions nucléaire comme ceux de la classe Enterprise, mais pour des raisons de coût, il a finalement été reclassé en Kitty Hawk. Lancé en janvier 1965, il commence ses premières missions en Méditerranée dès septembre 1965. Son parcours est marqué par une implication active dans la guerre du Vietnam avec des déploiements marquants en 1968, 1970, et 1972.
Ce navire s’est distingué dans plusieurs opérations militaires notables, comme le coulage d’un patrouilleur libyen en 1986 et la première utilisation du missile antinavire Harpoon en combat. Pendant la guerre du Golfe, il effectue plus de 3 000 sorties sans perdre un seul avion face à l’ennemi. En 1994, sa dernière mission se déroule au large d’Haïti où il soutient les opérations américaines avec des hélicoptères.
Le choix surprenant du SinkEx
Le 9 août 1996 marque officiellement la fin de sa carrière, initialement prévue pour être prolongée mais annulée pour raisons budgétaires. L’US Navy décide alors d’utiliser l’USS America pour l’exercice SinkEx, conçu pour tester la robustesse des porte-avions modernes et améliorer leur conception future.
Cette décision ne plaît pas à tout le monde, surtout parmi les anciens marins qui espéraient voir ce symbole transformé en musée flottant. Malgré les critiques, la Marine maintient que ces tests sont indispensables. Comme l’a dit l’Amiral John Natham : « L’Amérique fera une contribution finale importante à notre défense nationale… Nous devons rendre ces navires aussi résistants que possible. »
Que nous apprend le SinkEx ?
L’exercice SinkEx met en lumière plusieurs aspects délicats concernant la résistance des porte-avions modernes face aux menaces actuelles. Des simulations d’attaques par sous-marins et torpilles ainsi que des bombardements sur le pont ont été réalisés. Des charges explosives ont également été placées à divers endroits stratégiques du navire.
Au final, l’USS America est coulé le 9 mai 2005, reposant désormais à environ 4 877 mètres sous l’océan Atlantique. Cet exercice montre qu’il n’est pas facile de couler un tel mastodonte, même vide de carburant ou munitions. Cela souligne notamment combien il est important d’avoir un équipement moderne pour lutter contre les incendies.
Un héritage qui perdure
Le sacrifice ultime de l’USS America va bien au-delà d’un simple test destructif ; il offre une base solide pour les générations futures de porte-avions américains. Comme le rappelle encore Admiral John Natham : « L’héritage de l’Amérique servira de base à la conception des futurs porte-avions — des navires qui protégeront nos enfants et petits-enfants ».
Ainsi, bien que controversée, cette dernière mission donne à l’USS America un rôle éternel dans la protection nationale américaine, tout en honorant son passé glorieux et les nombreux marins qui ont servi sur ses ponts légendaires. Le souvenir vibrant du CV-66 continue d’inspirer ceux qui travaillent dur pour maintenir une puissance maritime américaine sans égale dans le monde entier.
Après plusieurs années de préparation intensive, le groupe aéronaval de la marine française va bientôt débuter une mission de plusieurs mois en Indo-Pacifique, une région stratégique pour l’état-major.
La marine française se déploie en Indo-Pacifique
Le déploiement renforcé de la marine française en Indo-Pacifique marque une étape cruciale dans la stratégie de défense française. Le groupe aéronaval (GAN), emmené par le porte-avions Charles de Gaulle, se prépare à quitter Toulon pour une mission de plusieurs mois dans cette région. Alors que les tensions y sont croissantes, la France, avec son réseau de territoires ultramarins, vise à affirmer sa souveraineté et ses engagements sécuritaires.
Confirmé lors du dernier point presse du ministère des Armées, le GAN se prépare à un déploiement de cinq mois dans le cadre de la mission Clemenceau 2025. Cette opération se déroulera sur un itinéraire stratégique englobant la mer Rouge, l’océan Indien et le Pacifique occidental. Ce parcours fait écho à une présence militaire accrue dans la région, rendue nécessaire par les enjeux de sécurité maritime et la lutte contre le terrorisme.
L’importance de l’Indo-Pacifique pour la France tient à ses territoires ultramarins, dont La Réunion, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française. Ces zones étendent la zone économique exclusive (ZEE) française, lui conférant la deuxième plus grande ZEE au monde. Par ce déploiement, la France entend non seulement protéger ses intérêts, mais également défendre les valeurs de liberté de navigation et de droit international.
Un défi logistique et politique pour la France
La mission Clemenceau 2025 s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu. L’Indo-Pacifique est devenu un point focal des rivalités entre grandes puissances, notamment entre la Chine et les États-Unis. Cette compétition influence également la France.
Sur le plan logistique, la mission requiert une organisation minutieuse. Le GAN, au cœur du dispositif, inclut le porte-avions Charles de Gaulle, accompagné de frégates, d’un sous-marin nucléaire d’attaque et d’un pétrolier ravitailleur. Ce convoi de navires constitue une force opérationnelle puissante, capable de répondre rapidement aux besoins des opérations. Outre les défis liés à l’entretien de cette force en haute mer, les escales dans des ports alliés en Indo-Pacifique permettront de resserrer les liens avec les nations partenaires et de réaliser plusieurs exercices militaires conjoints.
Cédric Bonnefoy
Cédric Bonnefoy est journaliste en local à la radio. À côté, il collabore depuis 2022 avec Économie Matin.
Bien entendu, il ne s’agit que de visuels qui permettent de se faire une très bonne idée de ce à quoi ressemblera le successeur du Charles de Gaulle.
En 2038, le porte-avions nouvelle génération ou PANG devrait être livré à la Marine nationale. Le successeur de l’actuel Charles de Gaulle, conçu par Naval Group à qui on doit également la construction de nombreux sous-marins parmi les plus sophistiqués du monde, sera officiellement commandé en 2025. Dernièrement, le PANG s’est dévoilé dans quelques visuels qui seront peut-être susceptibles de changer entre aujourd’hui et 2038.
PANG, un futur géant des mers
Actuellement, le plus gros porte-avions du monde vogue sous pavillon américain, nom de code CVN-78, il est plus connu sous le nom de l’USS Gerald R. Ford. Ce mastodonte, propulsé à l’énergie nucléaire, est capable de transporter plus de 75 appareils (avions, hélicoptères, drones…).
Long de 332,5 mètres, il domine largement ces autres concurrents en mer. Et, il sera également plus imposant que le futur porte-avions français nouvelle génération dont le nom reste encore à être trouvé. En mer, le PANG, qui est son nom générique, sera long de 310 mètres et large de 85 mètres et pourra accueillir pas moins de 2000 membres d’équipage.
Le PANG sera donc plus petit que l’USS Gerald R. Ford, mais bien plus grand que son prédécesseur le Charles de Gaulle. En effet, le bâtiment militaire en service depuis 2001 mesure 261,5 mètres de long pour 64 mètres de large au maximum.
Cependant, le futur navire de la Marine nationale intègrera une caractéristique que l’on retrouve sur les deux autres bâtiments militaires : la propulsion nucléaire. Cela permet tout simplement d’avoir un rayon d’action illimitée puisqu’il n’est pas nécessaire de recharger les batteries.
Un bâtiment qui se dévoile petit à petit
Bientôt commandé en 2025, le PANG ne devrait pas être livré avant 2038, soit pas avant 14 ans. Cependant, rien n’empêche de se faire déjà une idée de ce à quoi ressemblera le futur fleuron de la Marine nationale. C’est ainsi que le 4 novembre 2024, à l’occasion du salon Euronaval, le média Mer et Marine a pu publier les derniers visuels en date du PANG, le porte-avions de nouvelle génération.
crédit photo : Naval Group / Chantiers de l’Atlantique / TechnicAtome
crédit photo : Naval Group / Chantiers de l’Atlantique / TechnicAtome
crédit photo : Naval Group / Chantiers de l’Atlantique / TechnicAtome
crédit photo : Naval Group / Chantiers de l’Atlantique / TechnicAtome
Les avions seront catapultés dans les airs
Pour qu’ils puissent prendre leur envol rapidement, les appareils à bord du PANG seront tout simplement catapultés dans les airs. S’il ne s’agit pas d’une nouvelle technique puisque celle-ci est utilisée sur la plupart des porte-avions dont l’USS Gerald R. Ford et le Charles de Gaulle, c’est la technologie qui est derrière qui va évoluer.
Jusqu’alors, sur le Charles de Gaulle, les avions étaient catapultés à 250 km/h dans les airs grâce à un système à vapeur. Sur le PANG, c’est un système de fabrication américaine qui sera mis à l’honneur avec l’utilisation d’un système EMALS ou Electromagnetic Aircraft Launch System, plus précis, mais plus demandeur en énergie.
Cependant, cette technologie n’est pas encore parfaitement au point. Le Point rapportait même, en janvier 2024, que le gouvernement américain avait statué qu’il fallait certainement attendre l’horizon 2030 pour que l’EMALS soit parfaitement opérationnel. Une chance pour le PANG qui pourra donc bénéficier d’une technologie en constante évolution et améliorée au plus haut point.
Dévoilé le 11 octobre, le projet de loi de finances pour l’exercice 2025 prévoit de porter le montant des crédits de la mission « Défense » à 50,54 milliards d’euros [soit + 3,3 milliards], conformément à la trajectoire financière définie par la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30. Et cela dans un contexte marqué par une dégradation significative des finances publiques, doublée par une situation politique incertaine, ce qui aura des incidences sur le débat budgétaire à l’Assemblée nationale.
Quoi qu’il en soit, le ministère des Armées est l’un des rares à échapper à la cure d’austérité qui s’annonce. Ce qui peut engendrer de l’incompréhension parmi une partie de l’opinion publique… Le ministre, Sébastien Lecornu, en est d’ailleurs conscient, en affirmant qu’il avait un « devoir vis-à-vis des contribuables, citoyens et électeurs » en faisant en sorte que cet argent « soit bien employé ».
Mais, ce 14 octobre, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, M. Lecornu a soutenu que le ministère des Armées avait déjà payé son écot au redressement des finances publiques.
« On a [eu] des dividendes de la paix qui ont été emmenés un peu loin dans les années 2000 et dont on voit bien que les effets ont été durables sur nos capacités militaires. […] On avait, globalement, pendant vingt ans, une richesse nationale qui avait augmenté de plus de 50 % et des dépenses militaires mondiales qui avaient augmenté de 18 % pendant que nos dépenses militaires nationales diminuaient de 17 % », ce qui s’est traduit par la suppression de 54 000 postes, d’un régiment de l’armée de Terre sur deux et de 11 bases aériennes. Et le ministre de relever également que la Marine nationale avait « 311 000 tonnes d’acier à la mer dans les années 1980 » contre 287’000 tonnes en 2019.
Pour le moment, le ministère des Armées n’a pas publié le détail des livraisons et des commandes prévues en 2025. Mais devant les députés de la commission de la Défense, M. Lecornu en a donné les grandes lignes.
Ainsi, sans entrer dans les détails, un effort plus important que prévu sera fait sur les munitions dites complexes, avec une enveloppe de 1,9 milliard d’euros [+ 27 %, soit 400 millions d’euros de plus par rapport à l’exercice 2024] et il est question de renforcer les capacités permettant d’éviter un « contournement par le bas de la dissuasion ». L’espace bénéficiera d’un investissement de 870 millions d’euros [soit + 15 %] tandis que le renseignement et le cyber verront encore leurs crédits progresser [environ 13 % de plus]. Enfin, il s’agira d’accélérer le développement d’armes à énergie dirigée ainsi que les moyens relatifs aux grands fonds marins.
Mais le « gros » morceau reste encore le porte-avions de nouvelle génération [PA NG] puisque, a annoncé M. Lecornu, le ministère des Armées notifiera sa commande aux industriels l’an prochain.
« L’année 2025 sera celle de la passation de commande du porte-avions de nouvelle génération », a simplement lâché M. Lecornu.
Jusqu’à présent, cette échéance était incertaine. Et probablement qu’elle suscitera quelques commentaires négatifs [le ministre en a eu un avant goût en commission…], d’autant plus que l’investissement prévu devrait s’élever à « une dizaine de milliards d’euros », selon le dernier numéro de Cols Bleus, le magazine de la Marine nationale.
En réalité, le programme de PA NG a en quelque sorte déjà commencé étant donné que, en avril, la commande des « prestations à longs délais d’approvisionnement » ont été notifiées à MO-Porte-avions [la coentreprise de Naval Group et des Chantiers de l’Atlantique] ainsi qu’à TechnicAtome.
« Les prestations concernent la propulsion nucléaire du navire, à savoir : les chaufferies, les enceintes de confinement et la conversion énergie vapeur », avait alors expliqué la Direction générale de l’armement [DGA].
Pour le moment, le programme PA NG est dans sa phase d’avant-projet détaillé, celle-ci devant s’achever avant la fin de l’année 2025. Ce n’est qu’une fois que le dossier de lancement et de réalisation sera prêt que les contrats de développement et de production pourront être notifiés.
Selon Cols Bleus, le PA NG sera « le plus grand navire militaire jamais construit en Europe ». Et pour cause : il affichera finalement un déplacement de 80 000 tonnes [soit 5 000 de plus par rapport à ce qui avait initialement été envisagé] pour une longueur de 310 mètres. De telles dimensions supposent de lancer un chantier colossal à la base navale de Toulon, l’objectif étant de gagner 10 à 15 hectares sur la rade pour y construire des quais et un bassin dédié à ce futur navire.
Trois Supercarriers se rencontrent dans l’Atlantique : une opération colossale
Dans l’Atlantique, trois supercarriers américains ont mené une opération logistique majeure, transférant une énorme quantité de munitions entre les navires. Découvrez les détails de cette manœuvre technique et stratégique unique.
Par Laurène Meghe – armees.com – publié le 2 septembre 2024
Le 22 août dernier, une rencontre exceptionnelle s’est déroulée en plein océan Atlantique. Trois supercarriers américains, l’USS Dwight D. Eisenhower, l’USS Harry S. Truman, et l’USS Gerald R. Ford, se sont rejoints pour une opération logistique de grande envergure : le transfert de 1 360 tonnes de munitions. Voici les détails techniques et stratégiques d’une manœuvre sans précédent qui a mobilisé des centaines de marins et des tonnes de matériel.
En bref :
Trois supercarriers américains, l’USS Dwight D. Eisenhower, l’USS Harry S. Truman et l’USS Gerald R. Ford, ont effectué une manœuvre logistique complexe en Atlantique.
1 360 tonnes de munitions ont été transférées grâce à 1 764 livraisons par hélicoptères MH-60S Seahawk, avec un accent particulier sur la sécurité.
L’opération a impliqué une coordination minutieuse entre les navires, soulignant la capacité de l’US Navy à gérer des opérations complexes en mer.
L’exercice a démontré la puissance de projection de la flotte américaine, renforçant la suprématie des supercarriers sur les océans.
Cette rencontre stratégique a permis de tester les limites de l’équipement et des équipages, avec un accent particulier sur la sécurité et l’efficacité opérationnelle.
Un ballet aérien précis et risqué
L’opération de transfert s’est étalée du 22 au 30 août et a nécessité l’utilisation intensive de hélicoptères MH-60S Seahawk pour effectuer pas moins de 1 764 livraisons de munitions entre les navires. Les escadrons impliqués incluaient les « Tridents » de HSC-9, les « Dragon-Slayers » de HSC-11, et les « Dusty Dogs » de HSC-7 pour le transfert des munitions du Dwight D. Eisenhower au USNS William McLean. Cette phase critique a mis l’accent sur la sécurité, avec des briefings réguliers pour garantir que chaque mouvement d’équipement lourd et d’explosifs se déroule sans accroc.
Le Maître principal aviation ordonnancier Jerome Ruffins, en charge du département des armements, a déclaré : « Nous déplaçons beaucoup de matériel lourd et d’explosifs, donc la sécurité est primordiale ». Les officiers, sous-officiers et premiers maîtres patrouillaient constamment sur le pont d’envol, dans le hangar et dans les magasins pour s’assurer que les protocoles de sécurité étaient respectés.
Une coordination militaire de haut niveau
Commander Kent Davis, responsable du département des armements sur l’USS Dwight D. Eisenhower et surnommé « Gun Boss », a salué l’effort collectif nécessaire pour mener à bien cette mission : « C’était un énorme effort pour toute l’équipe de se rassembler et de faire en sorte que cela se produise ». Les marins ont travaillé jour et nuit pour s’assurer que chaque transfert se déroule en toute sécurité, en renforçant les protocoles de sécurité et la formation des équipages.
L’opération a comporté deux types de ravitaillements : le « Vertical Replenishment » (VERTREP) et le « Connected Replenishment » (CONREP), permettant de mener à bien ces 1 764 transferts en toute sécurité et efficacité. L’importance de l’opération a été soulignée par le Chef aviation ordonnancier Alexis Armstrong, qui a comparé ces transferts à un événement sportif majeur : « Les déchargements et chargements, c’est comme notre Super Bowl ».
Un exercice stratégique en haute mer
Cette rencontre de supercarriers ne s’est pas limitée à une simple démonstration de force logistique ; elle a également servi de terrain d’entraînement stratégique pour l’US Navy. En pleine mer, loin des bases terrestres, les équipages ont dû faire preuve d’une excellente coordination et d’une adaptation rapide aux imprévus, démontrant ainsi leur capacité à opérer dans des environnements exigeants. Le succès de cette opération souligne non seulement la compétence des équipages, mais aussi la puissance de projection de la flotte américaine. Ces exercices sont essentiels pour maintenir l’efficacité opérationnelle et tester les limites des équipements et du personnel.
Ce rassemblement de supercarriers, appuyé par le navire de transport sec USNS William McLean, met en lumière la puissance maritime des États-Unis et leur capacité à mener des opérations à grande échelle. Une démonstration de force qui réaffirme la suprématie américaine sur les océans du globe.
Rédactrice spécialisée en économie et défense armées. Je couvre également les domaines des enjeux industriels et politique, y compris les relations entre les entreprises et leurs partenaires financiers.
À l’occasion de la Conférence navale de Paris, qui s’est tenue il y a quelques jours, le Chef d’état-major des Armées français, le général Thierry Burkhard, a défendu la pertinence et l’efficacité du porte-avions dans la guerre navale moderne.
Soutenant la décision de remplacer le Charles de Gaulle par le porte-avions nucléaire de nouvelle génération, ou PANG, en 2038, le CEMA a ainsi fait une liste non exhaustive des différentes capacités exclusives à ce navire, son groupe aérien embarqué, et son escorte, allant de la rupture d’un déni d’accès à la communication géopolitique, en passant par la transformation de la géométrie d’un espace de crise ou de conflit.
Le fait est, si le porte-avions fait toujours l’objet de nombreuses critiques, il est aussi doté de capacités opérationnelles, technologiques et politiques, qui en font un outil sans équivalent à disposition des états-majors et des autorités politiques, qui peuvent aisément justifier son existence, mais qui, dans le même temps, interrogent sur la nécessité d’un second navire pour assurer la permanence de ces mêmes capacités jugées uniques et indispensables…
Sommaire
Trop vulnérable, trop cher… La pertinence du porte-avions remise (à nouveau) en question
Ces dernières années, la pertinence du porte-avions a été fréquemment remise en cause, en France comme aux États-Unis, y compris au sein des armées. Pour ses détracteurs, le porte-avions est désormais un outil obsolète, trop vulnérable pour représenter un atout opérationnel. Cette perception a été accrue avec l’apparition des missiles balistiques antinavires, ou AShBM, comme le DF-21D et le DF-16 chinois, et surtout le missile hypersonique antinavires 3M22 Tzirkon russe.
Présentés comme imparables par certains, ces nouveaux missiles seraient, en effet, capables d’atteindre une cible majeure, comme un porte-avions ou un grand navire amphibie, à plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de kilomètres, sans qu’il soit possible de s’en protéger.
En outre, les investissements nécessaires pour concevoir, construire et mettre en œuvre un porte-avions moderne, son groupe aérien embarqué, et son escorte de frégates, destroyers, navires logistiques et sous-marins, pourraient, toujours selon ses détracteurs, être bien mieux employé dans d’autres domaines, également sous tension.
En revanche, la question de la prétendue vulnérabilité du porte-avions face aux nouvelles menaces, n’est pas un enjeu. Certes, de nouveaux missiles antinavires sont apparus. Toutefois, leurs performances ne constituent, dans les faits, qu’une évolution des performances qu’avaient certains missiles plus anciens, notamment les missiles antinavires supersoniques soviétiques, qui évoluaient au-delà de Mach 1 en transit, et Mach 3 ou 4 en attaque finale.
Comme ce fut le cas dans les années 70, avec la conception du système AEGIS et du couple F-14 Tomcat/ AIM-54 Phoenix, pour contrer la menace que représentaient ces nouveaux missiles soviétiques, de nouveaux missiles et systèmes défensifs sont en développement pour contrer ces missiles balistiques, hypersoniques ou non, antinavires.
À ce titre, les destroyers américains ont déjà pu employer, avec succès, le nouveau missile SM-6 pour intercepter les AShBM Houthis en mer Rouge, ce qui tend à indiquer qu’ils seront aussi capables d’intercepter les DF-21D et DF-16, les fameux Tueurs de Porte-Avions chinois, qui avait tant fait couler d’encre il y a quelques années. Il est probable qu’un missile comme l’Aster 30 soit, lui aussi, d’une telle interception. Et il en va de même de la menace hypersonique.
En d’autres termes, si, comme l’a reconnu le général Burkhard , il n’est plus possible, aujourd’hui, de revendiquer la supériorité technologique sur un espace de conflictualité, naval ou autre, le porte-avions n’est pas plus exposé ou vulnérable qu’il ne l’était auparavant, tout en conservant des capacités exceptionnelles.
La Groupe d’action naval, un outil d’une polyvalence inégalée
Ces atouts uniques sont au nombre de quatre. Le premier d’entre eux, repose sur la polyvalence sans équivalent, d’un porte-avions et de son Groupe d’Action Navale à la mer. Cette polyvalence a été démontrée, ces dernières semaines, par le déploiement de l’USS Eisenhower en Méditerranée et au Proche-Orient.
Initialement, la mission de Carrier Strike Group de l’Eisenhower, était d’effectuer une démonstration de forces au large des côtes israéliennes, suite à l’attaque du 7 octobre, pour contenir le conflit et empêcher son extension. Après quoi, il fut envoyé dans le golfe d’Aden, d’abord pour protéger les navires commerciaux des frappes Houthis, puis pour mener des frappes contre ces mêmes infrastructures Houthis desquelles les missiles étaient lancés.
De fait, au cours d’un même déploiement, le navire, son groupe aérien embarqué, et son escorte, ont effectué plusieurs missions de nature très différentes, aussi bien offensives que défensives, et même purement géopolitiques.
En effet, le groupe aérien du porte-avions, ses moyens propres et ceux de son escorte, confèrent au groupe d’action naval une polyvalence supérieure à celle de n’importe quelle unité navale, et même aérienne, susceptible non seulement de remplir un très vaste panel de missions, mais de les remplir simultanément ou successivement lors d’un même déploiement.
La capacité à durer d’un porte-avions au combat
Non seulement le porte-avions est-il d’une polyvalence inégalable, mais il dispose, en outre, d’un atout remarquable, sa capacité à durer au combat. En effet, contrairement à la plupart des navires militaires, le porte-avions a la possibilité de régénérer, voire de remplacer dynamiquement ses moyens offensifs et défensifs, au cours d’un même déploiement.
Ainsi, si l’Armée de l’Air et de l’Espace était parvenue à effectuer, avec l’ide de frégates de la Marine nationale, l’opération Hamilton contre les infrastructures chimiques syriennes, en avril 2018, celle-ci aurait été incapable de mener des frappes de même type dans la durée.
En effet, chaque mission ayant une durée de plus d’une dizaine d’heures, et mobilisant un grand nombre d’avions de soutien pour accompagner les Rafale et Mirage 2000-5 de la métropole jusqu’à la Méditerranée Orientale, l’Armée de l’Air serait rapidement arrivée à court de son potentiel au bout de quelques missions seulement.
À l’inverse, le porte-avions peut maintenir une posture opérationnelle, beaucoup plus proche des cibles visées, et donc mener des frappes quotidiennes, tout en économisant le potentiel de vol de ses aéronefs, pendant plusieurs mois. Ainsi, l’USS America, CVA-66, a été déployé en mission opérationnelle au large des côtes vietnamienne, durant 292 jours, de juin 1972 à mars 1973.
Faute de disposer d’un allié acceptant l’utilisation de ses bases, comme c’était le cas pour les frappes contre la Syrie, la base aérienne française de Jordanie ne pouvant être employée pour cette mission, le porte-avions est le seul à pouvoir maintenir une pression constante et soutenue, sur le dispositif adverse.
L’adaptabilité intrinsèque du porte-avions pour répondre aux évolutions
Système de systèmes par excellence, le porte-avions et son groupe naval, se caractérise également par une très importante évolutivité, lui conférant de nouvelles capacités qui ne s’imaginaient peut-être pas, lors de son entrée en service.
Ainsi, le groupe aérien de l’USS Nimitz, entré en service en 1975, se composait initialement de F-4 Phantom 2, A-6 Intruder et A-7 Corsair II, à la sortie de la guerre du Vietnam. Il se compose, dorénavant, de F/A-18 E/F Super Hornet et C Hornet, de EA-18G Growler et de E-2C Hawkeye, lui conférant des possibilités sans commune mesure avec son groupe aérien initial. Ses sisterships emportent, quant à eux, le nouveau F-35C, et certains pourraient même accueillir le futur NGAD.
Son escorte, quant à elle, est passée des croiseurs Longbeach ou California, destroyers Spruance, frégates Knox et sous-marins Los Angeles, aux destroyers Arleigh Burke et croiseurs Ticonderoga armés du système antiaérien et antibalistique AEGIS et de missiles de croisière Tomahawk, et sous-marins Virginia. En outre, par son volume et sa capacité énergétique, le porte-avions lui-même est une plate-forme nativement conçue pour être évolutive.
Ainsi, le Charles de Gaulle français s’est vu doté, au fil des années, de nombreuses capacités nouvelles, alors qu’à l’occasion de sa prochaine phase de modernisation, il recevra le nouveau radar AESA à face plane Sea Fire 500 de Thales, lui permettant de contrôler un espace aérien sur 350 km de rayon, étendues par les capacités de détection des nouvelles frégates FDI, elles aussi, équipées du même radar, et du nouvel avion radar E-2D Hawkeye.
Cette capacité à évoluer, et à intégrer de nouveaux moyens pour répondre à l’évolution de la menace sur les différents espaces de conflictualité, est, à ce titre, présentée comme l’un des enjeux clés du développement du nouveau porte-avions nucléaire PANG de la Marine nationale, par le CEMA lui-même.
La visibilité du porte-avions, un atout majeur dans la guerre de communication et la communication de guerre
Enfin, le porte-avions peut se parer d’une dernière vertu, que très peu de moyens militaires peuvent égaler, tout au moins dans le domaine conventionnel. En effet, au-delà de son potentiel offensif et défensif global, et de sa capacité à faire peser une menace constante sur l’adversaire, le porte-avions a un atout majeur dans la guerre moderne : il dispose d’une visibilité aussi importante que modulable.
Ainsi, l’envoi d’un porte-avions et de son escorte, à proximité d’un espace de crise, constitue aujourd’hui un message politique et diplomatique d’une immense portée, qui ne peut, objectivement, être dépassée que par le déploiement de missiles à capacités nucléaires, ou d’une force armée conventionnelle considérable.
Il s’agit, pour les pays qui disposent de cet outil, souvent du dernier avertissement précédant une frappe massive, qui d’ailleurs a fréquemment eu les effets escomptés, y compris contre des pays vindicatifs, comme l’Iran, la Syrie, la Libye, ou la Corée du Nord. Dans la même temps, par sa grande mobilité, le porte-avions sait aussi se faire discret, lorsque cela est nécessaire.
Conclusion
Bien que remis en cause par certains, le porte-avions demeure, aujourd’hui, un outil sans équivalent en matière de guerre navale, et ce, dans de nombreux domaines. Par sa polyvalence, sa capacité à durer, son évolutivité et sa visibilité, il confère aux pays qui en disposent, et à leur marine, un potentiel opérationnel et politique unique pour agir sur une crise, ou un conflit ayant une dimension navale.
Reste qu’il s’agit d’un outil onéreux, que l’on peut aisément comparer, à l’autre bout du spectre naval, avec les sous-marins à propulsion nucléaire, aussi discrets, invisibles et spécialisés que le porte-avions est ostentatoire, visible et polyvalent. Il est d’ailleurs intéressant de constater que ce sont les pays qui disposent, également, de ce type de sous-marins qui, par ailleurs, alignent les porte-avions les plus importants.
Reste qu’en France, si la question du remplacement du Charles de Gaulle par le PANG, ne semble plus se poser, celle de la construction d’un second navire, de même type, ou de dimensions plus réduites, et doté d’une propulsion conventionnelle, pour en optimiser les couts et le potentiel export, ne semblent pas, non plus, sérieusement considérée, alors qu’un unique navire ne permet d’en avoir la jouissance opérationnelle que 40 à 50% du temps, dans le meilleur des cas.
En outre, en dépit des surcouts engendrés par une telle décision, des solutions existent précisément pour en réduire les effets de captation sur les autres budgets des armées, comme la coopération internationale européenne, avec des pays comme la Belgique et les Pays-Bas, dont les frégates escortent fréquemment le Charles de Gaulle ces dernières années.
Il faudra donc, dans un avenir proche, mettre en cohérence les positions et les besoins opérationnels, avec les ambitions politiques, et surtout avec les moyens conférés aux armées, en particulier dans ce domaine.
Article du 2 février en version intégrale jusqu’au 21 aout 2024
En août 2022, alors qu’il se préparait à mettre le cap vers l’Amérique du Nord dans le cadre de la mission Westlant 22, le porte-avions britannique HMS Prince of Wales fut victime d’une grave avarie au niveau d’un accouplement SKF de sa ligne d’arbre tribord [qui relie les machines à l’hélice]. Remplacé au pied levé par son « jumeau », le HMS Queen Elizabeth, le navire fut remorqué vers le chantier naval de Rosyth [Écosse] pour y être mis en cale sèche.
Seulement, lors des réparations, il apparut que la ligne d’arbre babord présentait également des signes de faiblesse au niveau de ses accouplements SKF. Aussi, son immobilisation fut prolongée jusqu’en juillet 2023, alors que la Royal Navy espérait le voir reprendre son cycle opérationnel en mai.
Mais celle-ci ne fut pas au bout de ses peines. Début février, alors qu’il devait participer aux manœuvres « Steadfast Defender » organisées par l’Otan, le HMS Queen Elizabeth dut à son tour déclaré forfait… car il risquait de connaître la même avarie qui avait affecté le HMS Prince of Wales.
Initialement, il était question d’immobiliser le porte-avions de 65’000 tonnes pendant « quelques semaines » au chantier naval de Rosyth, étant donné que les réparations devaient se concentrer uniquement sur la ligne d’arbre tribord. Finalement, la Royal Navy décida de remplacer aussi celle de babord, par « précaution ».
Cela étant, après la déconvenue vécue par le HMS Prince of Wales, l’amirauté britannique avait prévu de remplacer les deux lignes d’arbre du HMS Queen Elizabeth lors d’un arrêt technique majeur [ATM] programmé en 2025. Les circonstances en auront donc voulu autrement. Mais d’un mal peut sortir un bien car cela permettra de raccourcir la prochaine période d’indisponibilité technique du porte-avions.
En outre, les réparations du HMS Queen Elizabeth ont été effectuées assez rapidement dans la mesure où le navire ne sera resté que quatre mois en cale sèche. Au total, son immobilisation aura duré six mois… soit trois de moins que celle du HMS Prince of Wales pour les mêmes raisons.
En effet, la Royal Navy a annoncé que le HMS Queen Elizabeth retrouverait la base navale de Portsmouth le 30 juillet, à l’issue d’une campagne d’essais menée peu après sa sortie du chantier naval écossais.
« Le navire est sorti des réparations plus tôt que prévu initialement et, après avoir navigué sous les ponts du Forth, il a passé les sept derniers jours en mer à être mis à l’épreuve afin de tester ses systèmes au maximum », a en effet indiqué la marine britannique, via un communiqué diffusé le 29 juillet.
« Un travail énorme a été réalisé au cours des derniers mois pour nous amener à ce point. C’était un projet de grande envergure […]. Il a fallu un effort d’équipe vraiment efficace de la part de nos ingénieurs, du Defence Equipment and Support [DE&S] et de nos partenaires industriels pour que le porte-avions puisse reprendre la mer », a commenté le commandant Alex Davies, chef du département de génie maritime de la Royal Navy.
Comme l’avait annoncé le ministre des Armées dans un récent post sur X (voir ci-dessus), Naval Group et TechnicAtome ont été notifiés, le 26 avril par la Direction générale de l’armement (DGA) et le CEA, du premier marché dit « pré-DLR » du porte-avions de nouvelle génération (PA-NG).
Ce marché permet d’engager les premiers travaux de réalisation des chaufferies nucléaires, qui se dérouleront de 2024 à 2029. Le marché dit de « pré-DLR » (DLR : décision de lancement en réalisation) démarre en parallèle des études d’avant-projet en cours, et concerne les développements et les fabrications à long délais des chaufferies nucléaires, en amont de la décision de lancement en réalisation du PA-NG.
Deux sites de Naval Group seront particulièrement concernés par ces activités : – Cherbourg pour la réalisation des enceintes de confinement, – Nantes-Indret pour la réalisation des capacités principales des chaufferies.
En parallèle, TechnicAtome accueillera sur le site de Cadarache les premiers prototypes d’équipements des deux chaufferies nucléaires K22. Les infrastructures industrielles et les moyens de production seront modernisés pour répondre aux enjeux industriels de ce programme.
Par ailleurs, les Chantiers de l’Atlantique (Saint-Nazaire) ont aussi été notifiés d’une commande pour les prestations à longs délais d’approvisionnements du PA-Ng. Cette commande permettra l’adaptation de l’outil industriel nazairien en vue de la phase de construction.
Selon le ministère des Armées, « cette commande de 600 millions d’euros mobilisera largement l’industrie nationale et irriguera un vaste tissu industriel de sous-traitants de la filière nucléaire. Les travaux d’Avant-projet détaillé (APD), lancés en avril 2023, se poursuivent et conduiront au lancement de la construction du porte-avions de nouvelle génération prévu entre fin 2025 et début 2026.«
Lancé en juin 2022, le CNS Fujian, troisième porte-avions de la composante navale de l’Armée populaire de libération [APL], a récemment quitté le chantier naval de Jiangnan, au nord de Shanghai, pour rejoindre l’embouchure du fleuve Yangtze, en étant accompagné de remorqueurs. Ce mouvement fait suite à des essais de son système de propulsion, le 21 avril.
Aussi, tout laisse à penser que la première campagne d’essais de ce nouveau navire est sur le point de commencer. Certainement que plusieurs seront nécessaires avant son admission au service actif, d’autant plus qu’il présente plusieurs nouveautés par rapport aux deux autres qui l’ont précédé, à savoir le CNS Liaoning [ex-Varyag] et le CNS Shandong.
Affichant un déplacement d’au moins 80’000 tonnes pour une longueur de 320 mètres, le CNS Fujian a été construit selon une configuration dite CATOBAR [Catapult Assisted Take-Off But Arrested Recovery], c’est à dire qu’il est doté de catapultes et de brins d’arrêt, comme les porte-avions français et américains. Pour l’aéronavale chinoise, ce changement est de taille puisque le pont d’envol des CNS Liaoning et CNS Shandong est muni d’un tremplin en lieu et place des catapultes.
La configuration CATOBAR permet plus de flexibilité et de souplesse dans les opérations aériennes. Le CNS Fujian pourra ainsi mettre en œuvre l’avion de guet aérien KJ-600 ainsi que le chasseur-bombardier J-35, dérivé du FC-31 « Gyrfalcon ». Des maquettes de ces deux types d’appareils ont d’ailleurs été récemment photographiées sur le pont du navire.
En outre, comme les porte-avions américains de la classe Gerald Ford, le CNS Fujian est doté d’au moins trois catapultes électromagnétiques [EMALS], comme l’ont confirmé les images des récents tests dont elles ont fait l’objet. Par rapport aux catapultes à vapeur, un tel dispositif présente plusieurs avantages, dont des contraintes mécaniques moindres sur les aéronefs, une maintenance plus facile et une fréquence plus élevée des lancements.
Pour rappel, le principe de l’EMALS, dont le développement a donné du fil à retordre à l’US Navy, repose sur un moteur linéaire à induction électromagnétique [LIM]… lequel consomme une importante quantité d’énergie en quelques secondes. D’où la nécessité de recourir à des volants d’inertie, pouvant emmagasiner jusqu’à 100 mégajoules et être rechargés en moins d’une minute. Sur le porte-avions Gerald Ford, l’énergie nécessaire est fournie par ses deux puissantes chaufferies nucléaires… Or, le CNS Fujian dispose d’une propulsion classique…
Premier porte-avions de construction entièrement chinoise, le CNS Shandong avait démarré ses essais à la mer en 2018. Mais ceux-ci donnèrent lieu à des « ajustements » et son admission au service actif fut officialisée en décembre 2019, avec quelques mois de retard [et trente-deux mois après son lancement]. Aussi, l’objectif d’engager le CNS Fujian en opération en 2025 paraît bien ambitieux.
Quoi qu’il en soit, en mars, le commissaire politique de la marine chinoise, l’amiral Yuan Huazhi, a confirmé qu’un quatrième porte-avions serait construit, sans préciser s’il disposera d’une propulsion nucléaire.
Sur les réseaux sociaux, des posts s’alarment d’une perte de souveraineté pour la France en matière de défense : le porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle passerait d’ici peu sous le contrôle de l’Alliance. C’est pourtant faux.
par Lili Pillot, journaliste – Les Surligneurs – publié le 17 avril 2024
La France va-t-elle perdre le Charles-de-Gaulle, son mythique porte-avions ? Dès l’annonce le 11 avril 2024 d’une nouvelle mission sous commandement de l’OTAN par le ministère des Armées, les réactions de certaines oppositions ont fusé : “Incroyable : soumission historique sous #Macron de la France à l’#OTAN et donc aux Américains !” s’est révolté l’ancien député européen Florian Philippot sur le réseau social X. Le président de l’Union populaire républicaine (UPR), le souverainiste François Asselineau y est également allé de son commentaire : “Macron pousse la soumission de la France jusqu’à l’humiliation.” À gauche, l’ancien candidat à l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon, a tweeté le lendemain matin, peiné :“Tristesse. Vassalisation affichée.”
Des réactions alarmistes qui ont également interrogé certains internautes : “Le porte-avions Charles-De-Gaulle va passer sous le contrôle de l’OTAN. Ne pourrait-on pas le débaptiser avant, par respect pour la mémoire du grand homme…“, s’inquiète l’un d’entre eux.
Oui, la France va bien participer à une mission de l’Alliance atlantique en mer Méditerranée, aux côtés d’autres nations alliées (Grèce, Espagne, Portugal, Etats-Unis, Italie). La mission, pilotée par l’état-major tactique de l’OTAN “StrikforNato” situé à Lisbonne, aura notamment pour objectif de “renforcer la posture défensive et dissuasive de l’Otan“, selon un tweet du ministère des Armées. Sauf que cette opération est temporaire et n’implique pas la perte du commandement du Charles-de-Gaulle…
Mission temporaire et réversible
En effet, dans le cadre de cette mission baptisée “Akila“, qui doit durer deux mois, le Groupe aéronoval (GAN) de l’armée française, qui comprend le mythique porte-avions, sera placé sous le commandement de l’OTAN. Mais seulement pour une “petite quinzaine de jours” a expliqué le contre-amiral Jacques Mallard, commandant du GAN, en conférence de presse le 11 avril 2024. C’est-à-dire du 26 avril au 10 mai précise l’Agence France Presse (AFP), citée par plusieurs médias.
Sur cette courte période, “le Chef d’État-Major des armées renonce temporairement aux contrôles opérationels du bateau“, indique aux Surligneurs Camille Grand, ancien secrétaire général adjoint de l’OTAN. Mais ce transfert de compétences relève uniquement “d’ordres opérationels militaires.Toutes les forces sont reliées à la force nationale“, abonde Michel Goya, ancien colonel des troupes marines et enseignant spécialisé dans l’histoire militaire et l’analyse des conflits. “Au final, c’est toujours la chaîne nationale qui a le dernier mot.”
En plus d’être strictement limité à une mission en particulier, “ce transfert de compétence est toujours réversible”, précise Camille Grand. “Il n’existe aucun cas où l’OTAN puisse exiger le contraire.”
Le vice-amiral français Didier Maleterre, numéro deux du commandement maritime de l’Otan, l’avait d’ailleurs déjà précisé auprès de l’AFP : “à tout moment on peut récupérer le mandat, et en un claquement de doigts récupérer le commandement national en cours d’opérations.”
Contexte de tensions
Reste que si ce type de transfert est courant, “c’est la première fois que le GAN est placé sous le commandement [de l’OTAN] dans son intégralité“, indique Camille Grand. Un moyen de montrer que la France “est un allié” mais aussi d’observer et “de comprendre comment la chaîne de commandement de l’OTAN fonctionne“, précisait le contre-amiral Jacques Mallard lors de la conférence de presse, dans un contexte de tensions galopantes avec la Russie.
Une erreur dans ce contenu ? Vous souhaitez soumettre une information à vérifier ? Faites-le nous savoir en utilisant notre formulaire en ligne. Retrouvez notre politique de correction et de soumission d’informations sur la page Notre méthode.