Taïwan: des ballons, outils chinois de déstabilisation avant la présidentielle ?
par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 8 janvier 2024
https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/
Pékin déploie régulièrement des avions de chasse, des drones de reconnaissance et des navires de guerre autour de l’île de l’île, dont il conteste la souveraineté. Ces vecteurs aériens s’approchent quotidiennement de la fameuse ADIZ, la zone d’identification de défense aérienne (à ne pas confondre avec l’espace aérien taïwanais), déclenchant la mise en alerte des moyens de défense taïwanais.
Ce 8 janvier, l’état-major taïwanais a publié son communiqué quotidien (ci-dessous) faisant état des passages d’avions et de navires à proximité de l’ADIZ:
Il est intéressant de noter qu’au communiqué quotidien, l’état-major a ajouté une précision sur trois ballons chinois détectés la veille (voir ci-dessous):
Depuis décembre, plus d’une vingtaine de ballons ont ainsi franchi le détroit de Taïwan qui sépare l’île de la Chine continentale, selon le ministère de la Défense taïwanais, qui y voit un harcèlement dit de “zone grise” destiné à “affecter le moral de notre peuple“.
Entre le 2 et le 7 janvier, 23 ballons chinois ont été détectés et au moins sept d’entre-eux ont survolé l’île qui se prépare pour les élections présidentielle et législatives du 13 janvier. Le scrutin présidentiel opposera l’actuel vice-président Lai Ching-te, du Parti démocrate progressiste (DPP) au pouvoir, défenseur de la souveraineté de l’île, à deux candidats favorables à un rapprochement avec Pékin.
Les ballons en provenance de Chine sont devenus un sujet politique sensible l’an dernier après que les États-Unis ont abattu un de ces aéronefs, qu’ils ont qualifié d'”espion”, après qu’il eut pénétré leur espace aérien. Pékin avait de son côté affirmé qu’il s’agissait d’un dirigeable civil ayant dévié de sa trajectoire.
Déstabilisation pré-électorale?
Qualifiant d'”irresponsable” l’envoi de ballons à de telles altitudes, l’expert en défense Su Tzu-yun estime que “l’objectif politique est bien plus important que l’objectif militaire”. Pékin “veut susciter des doutes et de l’inquiétude (…) afin de changer l’attitude du peuple taïwanais dans le cadre des élections“, a-t-il déclaré à l’AFP.
“Pékin signifie qu’il peut violer l’espace aérien taïwanais et remettre en cause sa souveraineté“, estime pour sa part Raymond Kuo, expert de Taïwan au sein de l’institut américain Rand Corporation, cité par l’AFP.
Selon Gerry Soejatman, expert indépendant en aéronautique, ces ballons “représentent une menace” car ils “risquent de perturber le trafic aérien“, les avions commerciaux volant généralement à une altitude de 24 000 à 40 000 pieds (7,3 à 12 kilomètres).