Vers un nouveau pacte de défense franco-allemand
(Crédit: Elysée)
Ce nouvel accord s’appuiera sur les bases établies en 1963 « pour viser un nouvel objectif de convergence accrue entre la France et l’Allemagne et préparer les deux pays aux défis auxquels ils sont confrontés au XXIe siècle », précisait l’Elysée le 8 janvier dans un communiqué. Approuvé mercredi par le gouvernement fédéral allemand, ce traité devrait mettre le dossier de la politique de sécurité et de défense commune sur un piédestal. Le journaliste allemand Thomas Wiegold, auteur du blog Augen Geradeaus!, a eu accès aux articles constitutifs de ce chapitre, intitulé « Paix, sécurité et développement ». En voici un premier (et rapide) aperçu, à remettre évidemment en perspective dans une dizaine de jours.
Selon Wiegold, les deux pays réaffirmeront tout d’abord leur assistance mutuelle en cas d’attentat. Déjà garanti aux niveaux de l’Europe et de l’OTAN, ce soutien se retrouverait ici renforcé par la promesse, « en cas d’attaque armée de leurs territoires », d’une aide mutuelle incluant des moyens militaires.
De même, français et allemands s’engagent à agir « ensemble dans la mesure du possible » pour préserver la paix et la sécurité. Selon le document, cet objectif dépendra aussi de leur capacité à développer les compétences, la cohérence et la crédibilité de l’Europe au niveau militaire. De ce fait, les deux partenaires devront agir de concert « afin de combler les lacunes dans les capacités de l’Europe ».
Gouvernements français et allemand envisagent ensuite de renforcer le niveau de coopération de leurs armées respectives, non seulement dans la perspective d’une culture partagée, mais également à l’occasion de missions communes. C’est d’ailleurs l’un des chevaux de bataille de l’Initiative européenne d’intervention (IEI) âprement défendue par le président Emmanuel Macron depuis juin 2018, quand l’Allemagne se préoccupait davantage du volet culturel. L’aspect « missions conjointes » devrait donc en sortir renforcé.
Enfin, ce traité entend aussi renforcer la coopération en matière de programmes d’armement et d’industrie de défense. Outre la consolidation de la BITD européenne et l’intensification des programmes bilatéraux, Paris et Berlin entendent développer une approche commune concernant les exportations d’armement dans le cadre de tels programmes. Sur papier, la volonté semble y être. Reste à concilier dans les faits deux politiques d’exportation relativement discordantes. Au « tout à l’exportation » français s’oppose en effet une frilosité allemande propice aux restrictions en matière de vente d’armes. La différence de traitement du dossier saoudien en est un parfait exemple. Or, si le lancement de programmes conjoints est aujourd’hui acquis, ceux-ci n’ont que peu de sens si les deux pays ont des attentes antagoniques quand il s’agira de les exporter.
Gageons, par ailleurs, que ce volet industriel appuiera le renforcement, voire la création, d’outils de régulation favorables à la consolidation des structures industrielles bilatérales. Difficile, en effet, de ne pas penser à la coentreprise KNDS, formée par le duo Nexter-KMW, et dont l’équilibre est aujourd’hui potentiellement menacé par la gourmandise de Rheinmetall. Sans tomber dans un optimisme excessif, une annonce susceptible de conforter la place de chaque acteur industriel au sein des programmes franco-allemands Main Ground Combat System (MGCS) et Common Indirect Fire System (CIFS) apporterait sans doute un regain de confiance côté français. Il reviendra au Conseil de défense et de sécurité franco-allemand, qui soufflera ses 31 bougies le 22 janvier, d’exercer l’arbitrage politique nécessaire pour assurer la bonne tenue de ces obligations mutuelles.