Ces autres programmes d’équipement attendus pour 2020
Pour qui ne craint pas les montagnes de chiffres et autres termes financiers, les documents techniques annexés au budget 2020 des Armées offrent un panorama particulièrement détaillé des programmes en cours et à venir. C’est notamment le cas de la « Justification au premier euro » du programme 146 (Équipement des forces), qui passe en revue les crédits demandés par le ministère des Armées en vue de l’acquisition de nouveaux matériels.
Une fois passés les interminables tableaux chiffrés, les quelques lignes justificatives disponibles apportent un éclairage précieux sur les projections du programme 146. À commencer par l’armée de Terre, dont la politique de renouvellement des matériels, résumée à tort aux véhicules Scorpion, fait pourtant la part belle à d’autres projets essentiels, quoique moins médiatiques. Petit tour d’horizon non exhaustif des développements et achats planifiés pour l’an prochain (et après).
Fusils pour tireurs d’élite : Le PLF 2020 envisage l’acquisition de « fusils pour tireurs d’élite », à ne pas confondre avec le programme FPSA qui, lui, vise au remplacement des fusils FR-F2. Le document ne mentionne ni cible, ni calendrier, ni raison précise au lancement de ce programme. S’agit-il de remplacer le PGM Hécate II ? D’une modernisation des fusils existants ? Conçu par le Français PGM Précision, le fusil Hécate II est en service depuis le milieu des années 1990 dans les sections TELD de l’armée de Terre.
CAESAR : Parmi les principaux engagements repris dans la sous-action « Frapper à distance », le ministère des Armées prévoit de continuer « les travaux préparatoires à l’acquisition d’un complément de 32 CAESAR » pour atteindre la cible de 109 pièces annoncée par la LPM 2019-2025. Le PLF 2020 y alloue 35M€ en autorisations d’engagement. Selon le document consulté, la réalisation de cette commande supplémentaire n’est pas programmée avant 2021, pour des livraisons devant se clôturer en 2025.
AT4 F2 : Attendue depuis 2018, « l’acquisition de munitions dont la roquette AT4 de nouvelle génération […] » est à nouveau au menu de la loi de finances. Un accord-cadre pluriannuel avait été signé dans ce sens avec Saab en 2014, pour un coût global estimé à 193M€. L’entreprise suédoise avait alors sélectionné Nexter Munitions pour la fourniture d’un soutien logistique tout au long du programme. Baptisée AT4 F2 par l’armée de Terre, cette nouvelle version du lance-roquette de 84 mm est encore « en développement » d’après le général Beaudoin, directeur plans et programmes à l’EMAT. Le standard F2 est appelé à reprendre la relève de l’Eryx et de l’AT4 CS F1, en complément du missile MMP. Il apportera un complément essentiel en terme de portée et de variété de munitions. L’AT4 F2 permettra au fantassin de choisir entre une roquette anti-blindé (ABL), une roquette anti-structure (AST) partagée avec les sapeurs et une roquette antipersonnel (AP). Une fois couplée à un nouveau moyen d’aide à la visée non jetable, absent sur la version CS F1, la roquette AP procurera un mode airburst efficace jusqu’à 1000 mètres. Les travaux en cours concernent l’acquisition d’une capacité de tir de nuit à l’horizon 2020.
Fardeau Mistral : Le ministère des Armées est engagé depuis une décennie dans la rénovation à mi-vie du système sol-air à très courte portée Mistral, produit par MBDA. Après la livraison de 850 missiles de nouvelle génération, ce programme prévoyait dès 2017 la confection d’un nouveau fardeau pour l’aérolargage du système d’armes. Après des reports successifs, il pourrait enfin se concrétiser l’année prochaine. Le sujet devrait tout particulièrement intéresser le 35e régiment d’artillerie parachutiste, principale unité d’appui de la 11e brigade parachutiste, et le 1er régiment du train parachutiste, spécialisé dans l’appui à la projection et le soutien par voie aérienne.
Désignateur laser : À nouveau, le sujet se limite à « la commande […] de pointeurs-désignateurs-illuminateurs laser ». Il faut revenir en avril 2017 pour retrouver le lancement par la DGA d’un projet de « qualification et [d’] acquisition de Désignateurs Laser Nouvelle Génération (DL-NG) légers, à longue distance de désignation efficace ». Le besoin alors exprimé était 70 systèmes d’une masse égale ou inférieure 4 kg et dont le faisceau laser présente une énergie supérieure ou égale à 80 millijoules. Deux industriels français pourraient en bénéficier, à savoir CILAS et Safran.
VBL Ultima : Nouvelle motorisation, nouvelles suspensions, tourelleau téléopéré, radio CONTACT, etc. : 800 VBL subiront une cure de jouvence nécessaire pour assurer l’intervalle jusqu’à l’horizon 2025 et l’arrivée progressive du VBAE. Prévue à l’origine pour décembre de cette année, la livraison du 50e VBL Ultima interviendra finalement l’an prochain. Des commandes ont déjà été passées pour les 250 premières plateformes. L’exercice 2020 envisage la commande d’un nouveau lot de 120 unités, de même que la livraison de 103 véhicules supplémentaires. Après avoir subi un décalage de quelques semaines, l’inauguration de la ligne de production devrait intervenir au début du mois de décembre par la DGA.
Kits Barage : Les Armées envisagent ensuite l’acquisition de kits d’adaptation véhicules pour le brouilleur Barage. On ne sait que peu de choses de ce discret programme mené par la DGA, hormis qu’il est destiné à équiper les véhicules Scorpion d’un nouveau système de protection électronique contre les IED. Basé que le système Eclipse de Thales, déjà en service dans d’autres pays, le brouilleur Barage couvre toute la gamme de fréquences (20 à 2500 MHz) tout en restant compatible avec les communications amies, dont les radios tactiques, GPS militaires et communications par satellites en bande X. Selon Thales, trois modes sont disponibles : hybride, réactif et actif duel pour optimiser l’efficacité du brouillage. Le système a passé avec succès les essais de qualification de la DGA en 2016.
[En bonus] SAMP/T NG : Oui, nous savons parfaitement que, dans l’armée française, le système de défense antiaérienne SAMP/T Mamba n’est pas opéré par les Terriens mais par l’armée de l’Air. Nous ferons une exception pour cette fois. Lancé cette année, le développement du SAMP/T NG projette l’intégration du missile Aster 30 B1 NT (Block 1 Nouvelle Technologie) et du successeur du radar multifonction Arabel aux sections SAMP/T de l’armée de l’Air. Si MBDA s’est naturellement imposé pour le développement du standard B1NT, le segment conduite de tir devrait en théorie reposer sur le radar AESA GF 300 (Ground Fire 300) conçu par Thales. Les autorisations d’engagement ouvertes en 2020 pour ce programme s’élèveront à 343M€ afin de couvrir « le développement de la conduite de tir du système SAMP/T NG ». Les livraisons du premier missile Aster 30 B1NT sur les 118 de la cible globale et de la première section rénovée ont par ailleurs été décalées de 2024 à 2027 « en cohérence avec les travaux d’ajustement de la programmation militaire ».