L’arrivée des légionnaires sur le plateau du Larzac est une bouffée d’oxygène pour l’économie locale
Dans mon esprit l’armée, ça assure la sécurité de la nation, pas l’aménagement du territoire », avait lancé le président Sarkozy, pour justifier la réforme de la carte militaire que son gouvernement venait de lancer, en 2008, ainsi que la suppression massive de postes au sein du ministère de la Défense [des Armées aujourd’hui].
Depuis, dans un contexte marqué par le terrorisme et le retour de la « menace de la force », les armées ont revu leurs effectifs à la hausse. C’est notamment vrai pour l’armée de Terre, qui, après avoir fermé bon nombre de casernes, a dû pousser les murs de celles qui avaient échappé à la dernière vague de restructurations pour accueillir les 11.000 soldats supplémentaires de sa Force opérationnelle terrestre [FOT].
Cela étant, les villes moyennes qui ont dû se résoudre à voir fermer leur caserne ou leur base aérienne, la réforme de la carte militaire menée entre 2008 et 2014 a été vécue douloureusement, même si des plans visant à dynamiser la vie économique locale furent mis en place [ce qui n’a pas été non plus neutre sur le plan financier…]. En effet, quand un régiment est dissous, le marché immobilier en pâtit, de même que les commerçants et les entrepreneurs locaux. Et cela va même jusqu’à impacter les services publics de proximité.
Aussi, l’arrivée de la 13e Demi Brigade de Légion étrangère [DBLE] sur le plateau du Larzac, annoncée en 2015, est une bouffée d’oxygène pour l’économie du bassin de vie de Millau. Tel est le constat, peu surprenant, fait par l’Institut national de la statistique et des études économiques [INSEE], dans une étude publiée ce 19 février, à l’occasion d’un déplacement de Geneviève Darrieussecq, la secrétaire d’État auprès de la ministre des Armées, à La Cavalerie [Aveyron].
Dans un premier temps, les travaux majeurs d’infrastructure nécessaires pour l’installation de la 13e DBLE dans son nouveau camp, d’un montant total de 11,8 millions d’euros, ont surtout profité aux entreprises locales, quelle que soit leur taille. Et ce n’est pas fini puisque le chantier doit durer jusqu’en 2023.
Plus généralement, poursuit l’INSEE, la « 13e DBLE génère des revenus, directement pour ses effectifs militaire et civil, et indirectement pour les personnes travaillant dans les établissements sollicités pour les travaux d’infrastructure du camp ou pour les dépenses courantes. À son tour, chacun consomme et investit pour lui-même et sa famille : alimentation, habillement, logement, services, autant de besoins qui trouvent satisfaction à proximité des lieux de résidence et induisent de nouveaux emplois. »
« L’emploi généré par la consommation des familles [de militaires, ndlr] se localise surtout dans le bassin de vie de Millau, là où les trois quarts habitent : légionnaires et sous-officiers logés sur le camp, familles des autres personnels militaires et civils et des salariés des établissements sollicités par le camp. Ce sont ainsi 1.700 personnes en 2017 (respectivement 1 200 en 2016) qui vivent dans ce bassin de vie et dont un membre de la famille bénéficie directement ou indirectement de l’activité de la 13e DBLE », souligne l’étude.
Cela étant, plusieurs facteurs font que les bénéfices de l’installation de la 13e DBLE sur le Larzac pourraient être encore plus élevés. En effet, précise l’INSEE, « une grande partie des dépenses nécessaires pour faire fonctionner le camp et répondre aux besoins du personnel relèvent […] de marchés publics nationaux. »
Tel est par exemple le cas de l’alimentation, « dont 80 % du budget est régi par un marché national. » Une manne qui échappe donc en grande partie aux établissements locaux susceptibles d’approvisionner le mess de la 13e DBLE. En outre, de nombreux légionnaires, de part le règlement, ne peuvent pas se loger en ville. Aussi, ils « consomment en partie les produits fournis par le camp » et « en conséquence, les dépenses effectuées auprès d’établissements locaux s’en trouvent atténuées », souligne l’INSEE.
Mais il n’en demeure pas moins que les effets de l’arrivée des légionnaires sont tangibles.
« Au total, l’emploi généré par le camp correspond à l’équivalent de 953 salariés en 2016 et 1 408 en 2017. Le bassin de vie de Millau regroupe 93 % des effectifs en 2016 et 91 % en 2017. L’influence économique de la 13e DBLE sur ce territoire est significative : en 2016, ces emplois générés par la présence du camp représentent 8 % de l’emploi salarié du bassin de Millau et 11 % en 2017. À l’échelle du département, ils correspondent à 1 % de l’emploi salarié total en 2016 et 2 % en 2017 », avance l’INSEE.
Par ailleurs, l’implantation de la 13e DBLE sur le plateau du Larzac a aussi des effets sur le plan social. « Elle a tout d’abord été le déclencheur de la construction d’un collège sur le secteur sud de l’Aveyron, qui accueillera les enfants des populations nouvellement installées […] tout en allégeant les effectifs du collège de Millau. Elle a ensuite un impact mesurable sur l’activité de la maternité de Millau. Ainsi en 2017, 14 naissances sont recensées au sein des familles de légionnaires sur les 260 de la maternité, soit 5,4 % », fait valoir l’INSEE.
Et, ajouté l’institut, « l’arrivée de la Légion a accéléré le projet de création d’une maison de santé à La Cavalerie dont la livraison est prévue courant 2019. »
Enfin, l’INSEE souligne également l’introduction, par le ministère des Armées, de clauses sociales dans les marchés relatifs aux infrastructures. Ces dernières fixent un objectif de 50.000 heures d’insertion sur la durée des travaux « afin d’offrir des opportunités d’accès ou de retour à l’emploi à des personnes rencontrant des difficultés [travailleurs handicapés, demandeurs d’emploi de longue durée, etc.].
Le suivi des conséquences économiques de l’arrivée de la 13e DBLE sur le Larzac n’est pas terminé : l’INSEE a en effet précisé que deux deux études complémentaires seront menées pour suivre la « montée en charge sur l’année 2019 » et « l’atteinte d’un régime de croisière » en 2023.