Le ministère des armées assurera le soutien du futur avion de combat et de l’hélicoptère HIL
Par Michel Cabirol – La tribune | 20/08/2018
Selon la directrice de la direction de maintenance aéronautique, Monoque Legrand-Larroche, »le SIAé n’a pas vocation à être sous-traitant d’un industriel avec lequel l’État passe un contrat ». (Crédits : Airbus Helicopters) Le ministère des Armées souhaite confier le soutien de certaines de ses flottes au Service industriel aéronautique (SIAé). Notamment une partie du maintien en condition opérationnelle du système de combat aérien du futur (SCAF) et de l’hélicoptère interarmées léger (HIL).
Ceux qui avaient des craintes sur l’avenir du Service industriel de l’aéronautique (SIAé) peuvent être rassurés après l’audition de la directrice de la direction de la maintenance aéronautique (DMAé), Monique Legrand-Larroche, début juillet devant la commission de la défense de l’Assemblée nationale. « Nous souhaitons garder un SIAé étatique, car l’État a besoin de cette compétence en son sein« , a-t-elle annoncé aux députés. Dans ce cadre, elle ne prévoit pas « à ce stade des fermetures de sites du SIAé ». Auteur d’un rapport sur le MCO aéronautique, Christian Chabbert, avait pourtant estimé que « l’existence même du SIAé n’est pas assumée par les instances de direction du ministère ».
« Je crois profondément en l’utilité de disposer, au service de l’État, d’un outil industriel apte à concevoir et effectuer des solutions de réparation innovantes et de haut niveau », avait clairement souligné en décembre dernier la ministre des Armées, Florence Parly.
En revanche, la question de l’évolution du statut du SIAé (vers un EPIC?) n’est « pas tranchée », avait précisé Monique Legrand-Larroche, mais selon la directrice de la DMAé, « elle ne me paraît pas déterminante dans l’objectif consistant à assurer la pérennité du SIAé ». En revanche, a rappelé Monique Legrand-Larroche, la France a fait le choix de « ne plus faire appel à une entreprise privée » pour le MCO (Maintien en condition opérationnelle) de ses appareils « mais d’assurer ce soutien par le SIAé ». « Cela n’appelle pas de mise en concurrence, puisque c’est l’État qui assurera le soutien », a-t-elle fait valoir. La volonté politique est aujourd’hui là. Au SIAé de saisir sa chance.
Le SIAé, un acteur à part entière du soutien aéronautique
Pour conforter le SIAé, pas question que cet organisme devienne le sous-traitant des industriels du secteur. « Je considère que le SIAé n’a pas vocation à être sous-traitant d’un industriel avec lequel l’État passe un contrat, car cela équivaudrait à se condamner à une double peine : l’industriel pourrait avoir tendance à étrangler le SIAé et ce serait ensuite à l’État qu’il reviendrait de renflouer son service maltraité par l’industriel!« , a expliqué la directrice de la DMAé. Pour éviter ce scénario, la DMAé a prévu à l’avenir « de passer un contrat avec le SIAé et, en parallèle, un autre contrat avec un industriel pour assurer le reste du soutien ». Ce sera le cas par exemple pour les avions de patrouille maritime Atlantique 2.
« Pour ce qui est de l’impact de la nouvelle organisation sur le SIAé, nous cherchons à responsabiliser les industriels en choisissant l’un d’eux comme maître d’œuvre », a affirmé Monique Legrand-Larroche.
Comment assurer la pérennité du SIAé
Pour garder un SIAé étatique efficace et dans la durée, l’ingénieure générale hors classe de l’armement souhaite dans un premier temps s’assurer qu’il puisse intervenir « pour le soutien de nos flottes d’aujourd’hui, mais aussi pour celui de nos flottes de demain ». C’est d’ailleurs elle dans son poste précédent qui avait déjà poussé le SIAé à assurer le soutien du C-130H et celui de l’A400M. Et ce en dépit de certaines réticences fortes à l’époque. Ce sera également le cas pour le soutien des avions Atlantique 2. Au-delà, Monique Legrand-Larroche souhaite que le SIAé soit associé au soutien du système de combat aérien du futur (SCAF) et de l’hélicoptère interarmées léger (HIL). « Il faudra, a-t-elle affirmé, que le SIAé garde une compétence à la fois sur les avions de combat, les hélicoptères, les avions de transport – c’est fait avec le C-130 et l’A400M ».
« Si nous avons choisi de travailler avec Airbus Helicopters pour le Cougar, en revanche, pour le Dauphin Pedro, le Panther et le C-130H, nous avons souhaité que le SIAé soit le maître d’œuvre du soutien de ces appareils : c’est pour lui une nouvelle compétence« .
Assurer la pérennité du SIAé implique de lui assurer également « au minimum le maintien d’un compte de commerce performant », « un compte pleinement actif, sans contraintes administratives particulières », a expliqué la directrice de la DMAé. Selon elle, « le SIAé ne serait pas en état d’assurer une activité industrielle s’il revenait en zone budgétaire ». Si l’évolution du statut n’est pas prioritaire pour Monique Legrand-Larroche, elle a toutefois estimé que « l’une des difficultés pour le SIAé est que son statut ne lui permet pas de conclure de vrais partenariats engageants avec l’industrie ». Concrètement, la DMAé ne ne peut pas faire intervenir le SIAé en cotraitance. « Je suis obligée de passer un contrat avec un industriel et, en parallèle, un quasi-contrat avec le SIAé, ce qui est à l’origine d’une coupure qui peut être dommageable », a-t-elle regretté.
Des modes d’action modernisés
Les modes d’action du SIAe seront également modernisés. Le MCO aéronautique justifie que« le SIAé dispose de moyens industriels, et notamment qu’il ait la capacité d’embaucher sans avoir besoin de trop d’autorisations pour ce faire, d’anticiper sur une future augmentation de la charge de travail et former ses personnels », a estimé la directrice de la DMAé. D’autant que le MCO aéronautique, a-t-elle rappelé, nécessite l’intervention d’équipes ayant suivi une formation d’un excellent niveau. Le SIAé a récemment obtenu une souplesse dans la gestion de ses personnels. Ils ont aujourd’hui la possibilité de travailler en deux huit, a fait remarquer Monique Legrand-Larroche. Le feu vert a été donné pour permettre un meilleur soutien de l’A400M, afin de pouvoir procéder aux visites dans un délai plus réduit.
S’agissant des moyens industriels, le SIAé doit entre autre acquérir la technologie permettant de fabriquer des pièces en fabrication additive, a convenu Monique Legrand-Larroche. Plus largement, le SIAé doit être doté des moyens qui lui permettront « de se moderniser et d’acquérir les nouvelles compétences du MCO aéronautique de demain, de manière à être toujours aussi performant dans le soutien de nos aéronefs ». Christian Chabbert avait d’ailleurs estimé que le SIAé est « en train de décrocher par rapport aux standards industriels actuels (système d’informations, datas, flexibilité, innovation, management …) » dans certains activités. Au SIAé de se réformer pour assurer sa place dans le soutien aéronautique.