Un triple effort pour renouveler un pan de l’optronique du combattant
Après les jumelles de vision nocturne, place à l’acquisition de jumelles multifonctions et de viseurs d’armes de nouvelle génération. Une démarche en trois actes lancé hier et pour laquelle le ministère des Armées envisage d’investir plus de 1,5 Md€.
Noël ne pouvait être célébré sans une petite surprise de dernière minute de la part de la Direction générale de l’armement (DGA). Hier, celle-ci lançait un appel d’offres visant à acquérir de nouvelles aides à la visée, des jumelles multifonctions au profit des unités de combat et des jumelles multifonctions pour les unités spécialisées dans l’appui-feu et le renseignement.
Trois besoins et autant d’ « accords-cadres multi-attributaires à marchés subséquents » potentiellement conclus pour une durée de sept ans. Chaque lot pourra être attribué à plusieurs candidats. Montant maximal estimé de cet investissement consenti principalement au profit de l’armée de Terre ? 1,573 Md€. Les cibles ne sont pas connues, mais l’un des prérequis exigés permet d’en mesurer l’étendue. Pour être retenu, il faudra notamment pouvoir fabriquer au minimum 1500 viseurs ou 250 jumelles par an.
Plus de 400 M€ sont fléchés vers l’achat d’un viseur d’armes, une enveloppe dont la partie ferme permettra de compléter un développement déjà engagé et de qualifier une solution combinant une voie directe optique et une voie infrarouge. Des commandes suivraient pour équiper tant le fusil d’assaut HK 416F que des armes d’appui comme la MINIMI. Il s’agit d’une seconde tentative pour les armées, à l’origine d’une procédure nommée « tir réflexe » mais finalement avortée.
Mais l’engagement le plus significatif relève des jumelles multifonctions. Près de 1,2 Md€ sont consacrés au remplacement des parcs actuels par deux nouveaux modèles. L’un, pour le combattant, sera doté a minima d’une vision infrarouge thermique, d’une vision longue portée d’une part, et moyenne portée d’autre part. L’autre, pour les unités spécialisées, devra proposer une vision bi-oculaire, une voie infrarouge thermique, un télémètre et un pointeur laser, des fonctions logicielles de calcul et d’interfaçage avec des systèmes d’information, le tout à très longue portée.
Ces marchés étaient attendus de longue date, la filière française a donc eu le temps d’aiguiser son offre. Difficile de ne pas penser aux deux géants du secteur, Safran et Thales. Le premier devrait miser sur le succès des jumelles JIM Compact et Moskito TI, mais aussi sur une nouvelle référence. Baptisée Nightwolf, cette jumelle est la première au monde à intégrer nativement un capteur infrarouge à ondes courtes (Short-Wave Infrared ou SWIR). S’il reste discret sur la question du viseur, Safran a bel et bien pris pied dans le segment grâce à un système DANIS à première vue au stade du prototype.
Fournisseur des Sophie aujourd’hui en service, Thales a depuis longtemps levé le voile sur ses jumelles de 4e génération Sophie Ultima et Optima. Si l’Ultima s’oriente vers les fonctions spécialisées et a déjà trouvé preneur à l’export, sa « petite soeur » Optima répondrait aux besoins du combattant. Sa production en série est programmée pour 2025. Côté viseur, Thales propose un système XTRAIM lui aussi vendu à l’export. D’autres pourraient tenter l’aventure, à l’instar d’Elynxo. Il lui faudra néanmoins intégrer un groupement pour répondre au critère d’envergure du chiffre d’affaires.
Crédits image : 11e RAMa