Nucléaire/Ukraine : L’Otan dénonce la rhétorique « dangereuse » et « irresponsable » de la Russie
Ainsi, le 15 septembre, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a prévenu que les États-Unis franchiraient une « ligne rouge » et deviendraient une « partie au conflit » si jamais ils s’avisaient de livrer aux forces ukrainiennes des missiles MGM-140 ATACMS [Army Tactical Missile System], qui, d’une portée de 300 km et tirés par le système d’artillerie M142 HIMARS, seraient susceptibles d’atteindre des cibles en Russie. Moscou « se réserve le droit de défendre son territoire », a-t-elle lancé.
Quatre jours plus tard, la Russie a mis en garde la France contre les livraisons d’équipements militaires aux forces ukrainiennes, lors d’un entretien entre Pierre Levy, l’ambassadeur de France en Russie, et Alexandre Grouchko, le numéro deux de la diplomatie russe. « L’accent a été mis sur le caractère inacceptable de la poursuite du gavage de l’Ukraine avec des armes occidentales, dont françaises, que le régime de Kiev utilise pour bombarder des installations civiles et des infrastructures », a résumé la diplomatie russe.
Puis, ce 21 septembre, soit au lendemain de l’annonce concernant la tenue de référendums sur l’annexion par la Russie de quatre régions ukrainiennes [dont celles de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijjia], le président russe, Vladimir Poutine, a décrété une « mobilisation partielle », qui se traduira par le rappel de 300’000 réservistes ayant une « expérience du combat », avant d’accuser les Occidentaux [et plus particulièrement l’Otan] de se livrer à un « chantage nucléaire » dans l’objectif de « détruire la Russie ». Aussi s’est-il dit prêt à utiliser « tous les moyens » à [sa] disposition » pour protéger « l’intégrité territoriale » et « l’indépendance » de son pays.
Évidemment, cela concernera les quatre régions ukrainiennes que Moscou a l’intention d’annexer. « Ce n’est pas du bluff », a même insisté le chef du Kremlin, qui, par le passé, a déjà agité la menace nucléaire…
Lors d’un entretien diffusé par Bild TV, le président ukrainien, Volodymyr Zelenski, a dit « ne pas croire » à le menace posée par Moscou. « Je ne crois pas qu’il [Vladimir Poutine] utilisera ces armes. Je ne crois pas que le monde le laissera faire », a-il estimé. Faute de quoi, a-t-il continué, « demain, Poutine pourra dire : « Nous voulons une partie de la Pologne en plus de l’Ukraine, sinon nous utiliserons des armes nucléaires ». Or, « nous ne pouvons pas accepter ce genre de compromissions », a-t-il ajouté.
Cependant, aux États-Unis, on prend au contraire M. Poutine au sérieux. D’autant plus que, le 19 septembre, le président Biden a de nouveau mis en garde son homologue russe contre la tentation de recourir à des armes de destruction massive en Ukraine. « Cela changerait le cours de la guerre d’une façon jamais vue depuis la Seconde Guerre mondiale. […] Ne le faites pas, ne le faites pas, ne le faites pas », a-t-il imploré, avant de promettre une réponse « conséquente » de la part de Washington si une telle ligne rouge venait à être franchie.
S’agissant des derniers propos de M. Poutine, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale [NSC], John Kirby, a affirmé que les États-Unis prennent « au sérieux » la menace d’un recours à l’arme nucléaire. « C’est une rhétorique irresponsable de la part d’une puissance nucléaire. […] Nous surveillons du mieux que nous pouvons leur posture stratégique de manière à pouvoir changer la nôtre si besoin. Rien ne dit actuellement que ce soit nécessaire », a-t-il dit.
Le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a quant à lui rappelé que M. Poutine n’en est pas à sa première menace de ce genre. « Ce n’est pas nouveau, il l’a déjà fait à de nombreuses reprises », a-t-il déclaré. Le président russe « sait très bien qu’une guerre nucléaire ne devrait jamais être déclenchée et ne peut être gagnée » et « notre réaction dépendrait bien sûr de la situation et du type d’armes qu’ils [les Russes] pourraient utiliser », a-t-il confié à l’agence Reuters, en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, à New York. Mais, a-t-il insisté, « le plus important est d’éviter que cela se produise ».
Cependant, a encore relevé M. Stoltenberg, « aucun changement dans la posture nucléaire de la Russie n’a été détecté » pour le moment. « Nous surveillons cela de près et nous restons vigilants », a-t-il assuré. Et de conclure : « Le discours du président Poutine démontre que la guerre ne se passe pas comme il l’avait prévu, il a fait une énorme erreur de calcul ».