Choisi par l’US Army pour ses fusils d’assaut, le calibre 6,8 x 51 mm va-t-il se généraliser au sein de l’Otan ?
En 2022, le Pentagone fit savoir qu’il avait retenu Sig Sauer pour remplacer les carabines M4 et les fusils d’assaut M16 ainsi que les mitrailleuses M249 de l’US Army, dans le cadre du programme NGSW [Next Generation Squad Weapon], lancé cinq ans plus tôt.
L’objectif était donc de mettre au point deux nouvelles armes, à savoir le XM-7 [ex-NGSW « Rifle »] et le XM-250 [ex-NGSW « Automatic Rifle »], censées avoir une précision et une létalité accrues, tout en étant plus silencieuses.
Pour cela, il fut décidé que ces nouvelles armes utiliseraient des cartouches de 6,8 x 51 mm… alors que le calibre 5,56 x 45 mm est la norme pour les fusils d’assaut en service au sein de l’Otan. Pour justifier ce choix, l’US Army fit valoir que de telles munitions offriraient une « capacité de pénétration supérieure ainsi qu’une meilleure précision ». Les « munitions de 5,56 mm risquent de ne plus être efficaces face à des gilets pare-balles vendus pour 250 dollars », avait-elle insisté.
Alors que l’Otan a dit vouloir une applications plus strictes de ses normes en matière de production de munitions – en particulier pour les obus d’artillerie de 155 mm – afin de garantir l’interopérabilité entre États membres, le choix de l’US Army interroge… à moins que d’autres forces armées de l’Alliance ne décident également d’adopter le calibre 6,8 x 51 mm.
Lors de l’édition 2024 du salon de l’armement aéroterrestre EuroSatory, Ron Cohen, le PDG de Sig Sauer, a confié que ce calibre « pourrait susciter un plus grand intérêt de la part d’autres pays de l’Otan ». A priori, rapporte Army Recognition, le 6,8 x 51 mm serait sur le point d’être adopté par plusieurs « pays nordiques ».
« La transition vers les munitions hybrides 6,8 x 51 mm s’inscrit dans une vision plus large de modernisation des forces armées des pays nordiques. Cette initiative pourrait inspirer d’autres pays membres de l’Otan à suivre la même voie, renforçant ainsi la cohésion et la puissance de l’Alliance », écrit le site spécialisé, en se basant sur des déclarations de dirigeants de Sig Sauer.
En France, le choix de l’US Army en faveur du calibre 6,8 x 51 mm avait été analysé dans un rapport parlementaire publié en septembre 2020. « Ce qui se passe aux États-Unis en matière de développement de nouveaux calibres doit retenir toute notre attention », avait prévenu Jean-Pierre Curbertafon, alors député.
« L’apparition et la généralisation d’un nouveau calibre […] pourrait […] avoir un impact important sur les standards de l’Otan : les États-Unis étant la nation-cadre par excellence au sein de l’Alliance atlantique, s’ils changent de calibre, ce dernier deviendra quasi nécessairement la norme de l’Otan à laquelle nous devrons tous nous plier », avait-il développé lors de l’examen du rapport en question par la commission de la Défense.
Aussi, avait poursuivi M. Cubertafon, « ce standard pourrait devenir le standard européen et le marché des munitions de petit calibre évoluer », avec, pour la France, la nécessité d’adopter, à terme, des fusils d’assaut compatibles avec des munitions de 6,8 x 51 mm… qu’aucun pays en Europe ne produit. « Nous serions [alors] complètement dépendants des États-Unis », avait-il prévenu. Sauf à conserver le 5.56 mm et, par conséquent, et « à [ne] plus être interopérables avec nos alliés américains et à être en retard d’une guerre sur le plan technologique ».