La France évoque une initiative « coordonnée » avec les États-Unis pour assurer la sécurité dans le détroit d’Ormuz
Après le sabotage de plusieurs navires dans les environs du détroit d’Ormuz, les États-Unis avaient dit vouloir mettre sur pied une coalition navale afin de garantir la liberté de navigation dans cette partie du monde, par ou transite un tiers du trafic pétrolier mondial. Seulement, peu de pays se déclarèrent prêts à les rejoindre.
Ainsi, le Royaume-Uni, alors menacé par l’Iran de représailles pour avoir saisie le pétrolier Grace 1 au large de Gibraltar car devant livrer sa cargaison à la Syrie [ce qu’il vient de faire, après avoir été relâché par les autorités britanniques et rebaptisé « Adrian Darya 1 », nldr], déclina en effet la proposition américaine, le chef du Foreign Office, Jeremy Hunt, s’étant dit favorable à une opération navale européenne.
La raison? La différence d’approche entre Londres et Washington sur le dossier du nucléaire iranien, les Britanniques étant favorables aux efforts visant à maintenir l’Iran dans l’accord de Vienne [JCPOA], signé en juillet 2015. Et cela, même si les Gardiens de la révolution iraniens venaient d’arraisonner le pétrolier Stena Impero en réponse à la saisie de l’ex-Grace 1.
Toutefois, la nomination de Boris Johnson à la tête du gouvernement britannique changea la donne. « Le Royaume-Uni est déterminé à protéger ses navires […]. C’est pourquoi nous avons rejoint la nouvelle mission de sécurité maritime dans le Golfe », conduite par les États-Unis, annonça Ben Wallace, qui venait de prendre ses fonctions de ministre de la Défense.
Finalement, fin août, le chef du Pentagone, Mark Esper, annonça le lancement officiel de l’opération « Sentinel », avec la participation du Royaume-Uni, de l’Australie et de Bahreïn. « Entre notre présence et la présence de nos alliés et partenaires dans la région, je pense jusqu’à présent, nous avons dissuadé tout nouveau comportement provocateur », déclara-t-il à cette occasion, en évoquant les actions de l’Iran.
Cela étant, la France, pleinement engagée pour tenter de sauver l’accord sur le nucléaire iranien, plaida en faveur d’une opération européenne. « Il serait malencontreux de donner le sentiment que nous nous inscrivons dans l’initiative américaine de sanctions maximales », avait expliqué la ministre française des Armées, Florence Parly, à l’occasion d’une rencontre avec ses homologues de l’Union européenne à Helsinki, le 29 août.
« Nous devons veiller dans tout ce que nous faisons à ne pas compromettre les efforts diplomatiques que nous menons pour préserver l’accord sur le nucléaire conclu avec l’Iran », fit valoir Annegret Kramp-Karrenbauer, la ministre allemande de la Défense. À noter que, à Berlin, une participation de la Deutsche Marine à une éventuelle opération navale européenne est loin d’être garantie…
Quoi qu’il en soit, les efforts diplomatiques de la France en faveur du JCPOA ne sont, pour le moment, pas couronnés de succès… l’Iran ayant annoncé, ce 6 septembre, sa décision de relancer la production d’uranium enrichi, avec la remise en route de 20 centrifugeuses de type IR-4 et 20 autres de type IR-6. Un « mauvais signal », estimera-t-on, sans doute, au Quai d’Orsay…
« Je ne suis pas surpris que l’Iran ait annoncé qu’il allait violer le JCPOA. Ils le violent déjà, ils ont violé le traité de non-prolifération pendant des années donc ce n’est pas une surprise », a commenté Mark Esper, lors d’une conférence de presse conjointe avec Mme Parly.
Aussi, et alors que Paris donnait l’impression de vouloir se démarquer à tout prix de l’opération américaine Sentinel, il est désormais question de lancer une initiative européenne qui en serait « complémentaire. »
« Les États-unis ont pris une initiative il y a quelques semaines dans un contexte où la France souhaitait avant toute chose pouvoir contribuer à pouvoir faire baisser les tensions vis-à-vis de l’Iran », a rappelé Florence Parly.
Et d’ajouter : « Donc nous avons pensé qu’il était utile de prendre une initiative dans laquelle un certain nombre de partenaires qui probablement ne rejoindront pas l’initiative américaine de pouvoir néanmoins contribuer à la sécurisation maritime dans le golfe et nous souhaitons évidemment le faire de façon parfaitement coordonnée et en complémentarité et en transparence avec nos amis américain. »
Toutefois, la minsitre française a rappelé que l’objectif de Paris reste de « ramener l’Iran au respect de l’accord de Vienne » de 2015. Mais on n’en prend pas vraiment le chemin…