M. Le Drian laisse entendre que la fin de la présence militaire française au Mali est proche
Au Mali, « on a un double problème. On a d’abord un problème politique. Les autorités du Mali, aujourd’hui, c’est une junte de colonels. Cinq colonels qui ont pris le pouvoir il y a deux ans et qui disent : ‘il faut qu’on le garde encore pendant cinq ans’. Et c’est avec […] une junte de ce type qu’il faudrait qu’on travaille », alors qu’ils « dénient tout processus démocratique au sein de ce pays », a commencé par expliquer M. Le Drian.
Et de souligner que la junte a été « condamnée » par ses « voisins », en particulier ceux de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest [Cédéao], laquelle a imposé des sanctions sévères à Bamako [avec le soutien, par ailleurs, de la France]. « C’est la junte qui s’isole, c’est la junte qui perd, c’est la junte qui est faillie et qui devra assumer la suite », a martelé le chef du Quai d’Orsay, dont des propos antérieurs avaient en partie motivé l’expulsion de l’ambassadeur de France au Mali par les autorités maliennes dites de transition, en janvier dernier.
L’autre problème évoqué par M. Le Drian est d’ordre militaire, la force Barkhane n’ayant visiblement plus tout la latitude nécessaire pour combattre les groupes armés terroriste [GAT], qui est sa raison d’être.
« Progressivement, on met des entraves à notre capacité opérationnelle, on renvoie des Européens avec lesquels il y avait des accords dûment écrits [en l’occurrence, le contingent danois qui avait été engagé dans la force européenne Takuba, ndlr], on demande de modifier le traité qui nous unit au Mali pour assurer notre fonctionnement militaire. Et puis, en plus, [le groupe paramilitaire] Wagner arrive [avec] maintenant un millier de mercenaires russes, qui ont pour objectif affiché de protéger la junte et qui se sont payer, comme de bons mercenaires », a détaillé le ministre.
Aussi, a-t-il poursuivi, « dans ces conditions là, il est difficile de continuer […]. Et donc le président de la République a souhaité que l’on se réorganise » pour continuer le « combat contre le terrorisme ».
Sur ce point, M. Macron avait déjà annoncé une évolution du dispositif militaire français au Sahel, avec le retrait de trois bases situées dans le nord du Mali [celles de Tombouctou, Kidal et Tessalit, ndlr]. Ce qui a d’ailleurs servi de prétexte aux autorités maliennes pour se tourner vers la Russie et solliciter les services de Wagner.
« Donc, si les conditions ne sont plus réunies, ce qui est manifestement le cas, pour qu’on puisse être en mesure d’agir au Mali, on continuera de combattre le terrorisme à côté, avec les pays du Sahel qui sont, eux, tout à fait demandeurs », a insisté M. Le Drian.
Quoi qu’il en soit, l’annonce de la fin de la présence militaire française au Mali [ainsi que celle de la force européenne Takuba] serait imminente, probablement pour prendre de court la junte malienne, qui a déjà fait savoir qu’elle n’hésitera pas à demander le retrait des forces françaises si elle le juge nécessaire.
Selon Reuters, qui cite trois sources diplomatiques, le retrait français du Mali pourrait être annoncé d’ici la fin de cette semaine. L’agence de presse a également évoqué l’existence d’un document qui, envoyé aux pays impliqués au Mali, précise que « la France et ses partenaires de la Force Takuba étaient convenus de coordonner le retrait de leurs ressources militaires du territoire malien ».
À noter que le Premier ministre, Jean Castex, a promis un débat sur la base de l’article 50-1 de la Constitution. En attendant qu’il ait lieu, le Sénat a auditionné la ministre des Armées, Florence Parly et en fera de même avec M. Le Drian, le 16 février.
Photo : EMA