Nîmes en fête à l’occasion des 40 ans de la 6e Brigade légère blindée

Nîmes en fête à l’occasion des 40 ans de la 6e Brigade légère blindée

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Rendez-vous le samedi 20 avril prochain pour les 40 ans de la 6e Brigade légère blindée. 6e BLB

Ce samedi 20 avril, tous les regards sont tournés vers la ville de Nîmes qui va célébrer en grande pompe le 40e anniversaire de la 6e Division Légère Blindée. Un événement marquant dans l’histoire militaire, promettant un programme riche et varié : colloque, démonstrations militaires, exposition de matériel, concert de la Légion Étrangère… Un rendez-vous incontournable !

Le 20 avril prochain marquera un moment particulier dans l’histoire de la 6e Brigade Légère Blindée (6e BLB) avec une journée commémorative riche en événements. Cet anniversaire exceptionnel sera l’occasion de célébrer les 40 ans d’engagement opérationnel de la brigade, et d’apprécier ses évolutions.

Au programme : 

De 9 h à 13 heures – Colloque dans l’auditorium de Carré d’Art : Un colloque captivant débutera la journée, accueillant des personnalités éminentes telles que M. François Sureau, membre de l’Académie Française, ainsi que les généraux Bernard Janvier, Robert Rideau et Pierre Gillet. Au programme, des discussions sur l’histoire militaire de Nîmes, les 40 ans d’engagements opérationnels et les évolutions de la 6e BLB.

De 10 h à 18 h – Stands militaires et partenaires sur le parvis des Arènes et l’Esplanade : Les visiteurs auront l’opportunité de découvrir de près le matériel utilisé par les différents régiments de la 6e BLB, y compris des véhicules emblématiques tels que le véhicule blindé Griffon et l’engin blindé de reconnaissance et de combat Jaguar.

De 15 h à 18 h – Déambulations musicales en centre-ville de Nîmes : Les rues de Nîmes résonneront aux sons des troupes de Marine, de la Légion Étrangère et de la fanfare des Spahis, offrant une ambiance festive à tous les participants 

De 19 h 30 à 22 h 20 – Soirée aux Arènes : La journée se clôturera en beauté avec une soirée mémorable aux Arènes, comprenant des aubades musicales, des prises d’armes et la diffusion d’un court-métrage. Enfin, des démonstrations militaires dynamiques et des projections de vidéos plongeront les spectateurs au cœur d’une véritable opération militaire, en toute sécurité.

L’occasion également, pour les visiteurs,  de se renseigner sur le Cirfa, la Légion Étrangère, la Réserve Opérationnelle. 

7 500 militaires répartis en 7 régiments

Depuis sa création à Nîmes en 1984 en tant que 6e Division Légère Blindée, cette dernière a été sur tous les fronts : de l’ex-Yougoslavie à l’Afrique, de l’Afghanistan au Levant, de la bande sahélo-saharienne au flanc-Est de l’Europe, elle a laissé son empreinte dans les théâtres d’opérations les plus divers.

Fortement enracinée dans le sud de la France, avec son état-major basé à Nîmes, la 6e Brigade Légère Blindée est la pièce maîtresse des forces opérationnelles terrestres du front méditerranéen. Avec près de 7500 militaires répartis en 7 régiments, elle incarne la puissance et la polyvalence des forces françaises.

La 6e Brigade Légère Blindée incarne, en somme, l’excellence opérationnelle et l’engagement inébranlable de l’armée française. Avec 40 ans d’histoire et d’expérience, elle continue de relever les défis contemporains tout en préparant l’avenir, assurant ainsi la sécurité et la défense des intérêts nationaux et internationaux.

RWANDA : Droit de réponse du général Jean-Claude LAFOURCADE

RWANDA : Droit de réponse du général Jean-Claude LAFOURCADE

ASAF – publié le 8 avril 2024

https://www.asafrance.fr/item/rwanda-droit-de-reponse.html


Mise au point du Général Jean Claude Lafourcade suite à la déclaration du Président Macron du 4 avril 2024

« La France aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains mais n’en a pas eu la volonté » (Pdt Macron)

En tant qu’ancien commandant de l’opération Turquoise je peux témoigner que la France a eu la volonté de rétablir la paix et d’arrêter le génocide au Rwanda.

Dès le début de l’agression du Rwanda par le FPR tutsi, le Président Mitterrand a eu la volonté constante de rétablir la paix et de mettre fin au conflit en imposant des négociations au Président Hutu Habyarimana. Les accords d’Arusha en 1993 ont permis d’arrêter les combats et d’instituer un partage du pouvoir avec l’installation d’un bataillon du FPR à Kigali. Une force de l’Onu de 2.500 hommes, la Minuar, a été mise en place pour contrôler ces accords. Tous les soldats français ont alors quitté le Rwanda.

L’attentat sur l’avion du Président rwandais le 6 avril 1994 a été l’événement déclencheur des massacres et du génocide. L’ONU, sous la pression des occidentaux et du FPR, a alors inexplicablement retiré l’essentiel des troupes de la Minuar alors qu’elle aurait pu arrêter les massacres. Comment ne pas penser que les américains et les britanniques voulaient laisser le champ libre à Kagame dans sa conquête du pouvoir. En effet ces occidentaux, lorsque les massacres ont pris de l’ampleur, ont refusé d’intervenir. C’est la France la première qui, dès le mois de mai, reconnait un génocide et décide d’une intervention avec la Force Turquoise sous mandat de l’ONU malgré l’opposition du FPR et de la Minuar. Aucun de ses « alliés occidentaux » ne s’est joint à elle.

L’opération Turquoise a été la manifestation de la volonté de la France d’arrêter le génocide et le nier n’est pas acceptable pour les soldats qui ont rempli cette mission difficile avec courage et honneur.  Mais les blocages des américains à l’Onu n’ont permis l’intervention Turquoise qu’au mois de juin, laquelle, bien que tardive, a arrêté le génocide et sauvé plus de 15.000 vies rwandaises.

Pourquoi refuse-t-on de s’interroger sur l’absence de volonté des occidentaux d’arrêter le génocide alors que la France était la plus mal placée pour le faire compte tenue de ses accords de coopération précédents avec le Rwanda ?

Général (2S) Jean-Claude LAFOURCADE
 Lille le 5 avril, 2024

L’armée de Terre se déploie de nouveau en Bosnie-Herzégovine

L’armée de Terre se déploie de nouveau en Bosnie-Herzégovine

https://www.opex360.com/2024/04/08/larmee-de-terre-se-deploie-a-nouveau-en-bosnie-herzegovine/


Nommé par le Conseil de mise en œuvre des accords de paix et devant rendre compte de la situation devant le Conseil de sécurité des Nations unies, un haut représentant international est chargé de s’assurer du bon fonctionnement des institutions bosniennes.

Enfin, le volet militaire relève de la force de l’Union européenne [EUFOR] Althea, laquelle a pris la suite de la SFOR, la force de stabilisation de l’Otan, en 2004. Son mandat autorisant sa présence en Bosnie-Herzégovine a été renouvelé par le Conseil de sécurité en novembre dernier.

Cependant, ce dispositif n’a pas mis un terme aux tensions entre les trois communautés. Tensions pouvant par ailleurs être attisées par des ingérences extérieures. Ces dernières années, dirigée par Milorad Dodik, dont les sentiments pro-russes ne sont pas un mystère, la Republika Srpska tend à prendre de plus en plus de distance à l’égard de Sarajevo. Ira-t-elle jusqu’à proclamer son indépendance et à souffler sur les braises d’un conflit mal éteint ?

Un tel scénario ne pourrait que déstabiliser les Balkans occidentaux, qui, selon la Revue stratégique française, représente un « enjeu majeur pour l’Europe et pour la sécurité de l’ensemble du continent », notamment à cause de leurs faiblesses, susceptibles d’être exploitées par des « État tiers » ainsi que par les groupes criminels et terroristes.

Aussi, peu après le début de la guerre en Ukraine, l’effectif d’EUFOR Althea fut significativement renforcé, passant de 600 à 1100 militaires. Et le groupe aérien [Gaé] du porte-avions Charles de Gaulle effectua plusieurs patrouilles dans l’espace aérien bosnien.

Actuellement, la situation en Bosnie-Herzégovine est toujours tendue. Fin mars, le chef des Serbes de Bosnie a menacé de bloquer les institutions centrales du pays si le haut représentant international – l’allemand Christian Schmidt – ne retirait pas sa réforme de la loi électorale, censée empêcher les irrégularités.

Quoi qu’il en soit, les forces françaises n’ont que très peu été présentes dans les Balkans, notamment depuis la fin de leur mission au Kosovo, en 2014. Mais cette année, l’armée de Terre arme une « force de réserve stratégique » européenne, susceptible de renforcer à tout moment le Bataillon multinational sur lequel repose EUFOR Althea. Or, celle-ci vient d’être déployée en Bosnie-Herzégovine pour une période d’un mois, dans le cadre de l’exercice « Méléagre » [le fils d’Althée, selon la mythologie].

Cette « force de réserve stratégique » se compose d’un état-major tactique, d’un escadron de reconnaissance et d’intervention, d’un groupe d’infanterie et d’un groupe du génie fournis par le 5e Régiment de Dragons, implanté à Mailly le Camp. Elle est complétée par des pelotons roumains et italiens.

« Environ 250 soldats et leur équipement seront déployés par voie aérienne, ferroviaire et routière. Le processus de déploiement [ROMSI – Receiving, Staging, Onward Movement and Integration] fera également partie de l’exercice », explique le commandement d’EUFOR Althea, pour qui l’arrivée de cette force de réserve stratégique témoigne de l’engagement de l’UE envers la Bosnie-Herzégovine à maintenir un « environnement sûr et sécurisé ».

Et d’ajouter que l’unité française effectuera des patrouilles et s’entraînera avec les forces de l’EUFOR et les éléments des forces armées de Bosnie-Herzégovine « afin d’accroître la coopération et l’interopérabilité. »

Hiver 2031, Finlande, opération Arctic Shield

Hiver 2031, Finlande, opération Arctic Shield

par Revue Conflits – publié le 5 avril 2024

https://www.revueconflits.com/hiver-2031-finlande-operation-arctic-shield/


Novembre 2030 : la Russie envahit la Finlande. Les forces françaises et européennes doivent réagir à cette agression. Un scénario imaginaire qui oblige à l’anticipation et à la préparation, ce qui est le propre des armées.

Le chef de bataillon Ludovic C. est officier dans l’armée de Terre et a notamment servi dans les troupes de montagne.

30 novembre 2030. Crépuscule. Une pluie de missiles balistiques en provenance de Russie s’abat sur la Laponie finlandaise. En quelques heures, les aéroports, les bases militaires et les installations énergétiques sont détruits, plongeant le pays dans le chaos. Après la nuit polaire, c’est la nuit rouge qui enveloppe désormais la Finlande. Le 1er décembre au matin, le monde se réveille sous le choc. Une réunion de crise est convoquée à Bruxelles, et l’OTAN déclenche les plans régionaux. Concomitamment, la XIVe Armée Interarmes de l’Arctique (AIA), forte de quatre divisions et 80.000 hommes, franchit la frontière en Laponie, submergeant totalement les unités finlandaises. Moins de cinq années après la fin du conflit ukrainien, qui a fragilisé l’OTAN, l’Europe est de nouveau plongée dans la guerre.

« L’incertitude marque notre époque », écrit le général de Gaulle dans son livre Le fil de l’épée. La France, qui n’a jamais cru à l’arrêt de l’expansionnisme russe, se prépare depuis 2028 à la guerre de haute intensité face à un adversaire symétrique en milieu « grand froid ». La loi de programmation militaire 2028-2034 (LPM 28-34), précédée par les ajustements annuels de la programmation militaire (A2PM) de la LPM 24-30, a donné les moyens de déployer à compter de 2027, une division sous 30 jours au sein d’une coalition internationale en Europe, dans le cadre d’une opération de haute intensité au nord du cercle polaire.

Pour autant, répondre à un tel scénario suppose la prise en compte des spécificités du « grand froid » dans l’armée de Terre, alors même que les enjeux sont grands et la menace réelle. Faire du Général Hiver un allié, déjà vainqueur de nombreuses armées, reste pourtant possible.

Avec le retour de la guerre en Europe et la menace d’un engagement au nord du cercle polaire, la France doit dès à présent opérer un changement d’échelle dans l’équipement, l’entraînement et le soutien en milieu « grand froid » de l’armée de Terre, en s’appuyant sur l’expertise de la 27e brigade d’infanterie de montagne (27e BIM).

Cet article imagine une invasion de la Laponie finlandaise par la Russie durant l’hiver 2031. Après avoir développé le contexte de la montée des tensions entre la Finlande et la Russie, le cadre de l’action de la coalition, de la décision politique au plan de campagne opératif permettra d’en définir les contours avant d’aborder les mesures et les décisions permettant à l’armée de Terre française de tenir son rang dans un tel scénario.

Le contexte de la montée des tensions entre la Finlande et la Russie

Une montée de tensions orchestrée par Moscou

Avril 2023. L’intégration de la Finlande dans l’OTAN génère un accroissement des tensions avec la Russie, considérée comme une violation de son environnement proche.

Novembre 2023. À la suite « d’une augmentation des menaces visant le pays », Vladimir Poutine signe un décret accroissant de 15% le nombre de soldats dans les FAR. Le 17 décembre 2023, dans une interview télévisée, il annonce la création du district militaire de Leningrad et la concentration d’unités le long des 1340 kilomètres de frontière avec la Finlande. Le XIVe corps d’armée, composé de la 80e brigade d’infanterie arctique et de la 200e brigade d’infanterie motorisée de la Garde, devient la XIVe AIA. Les brigades sont transformées en divisions, en incluant la 61e brigade d’infanterie navale.

Figure 1. Ordre de bataille partiel des unités terrestres de la flotte du Nord, avant et après transformation

Décembre 2023. La Finlande et les États-Unis signent un accord de défense conférant, à l’armée américaine, un large accès au territoire finlandais en cas de conflit en Europe.

Mars 2024. La réélection de Vladimir Poutine conforte son pouvoir. Les pertes matérielles russes en Ukraine augmentent drastiquement et la Russie décide d’augmenter sa production industrielle.

Novembre 2024. La réélection de Donald Trump à la présidence des États-Unis entraîne une baisse drastique du soutien à l’Ukraine, et une moindre contribution aux budgets et entraînements de l’OTAN.

Décembre 2024. Les FAR reprennent les exercices de manœuvre des grandes unités (brigades, divisions et AIA) avec des déploiements massifs de troupes et de matériels, au rythme d’une occurrence tous les deux ans. Ces exercices, baptisés « Severo-Zapad », se déroulent sur la péninsule de Kola, durant la nuit polaire dans des conditions extrêmes. Le déploiement des unités s’appuie sur deux lignes ferroviaires nouvellement construites, permettant de rallier les villes de Kandalaksa à Kuoloyarvie et Mourmansk au poste-frontière d’App Lotta, situé à 50 kilomètres à l’Est d’Ivalo en Finlande. En parallèle, la Russie conduit d’importantes manœuvres navales à partir des ports de Saint-Pétersbourg et de Mourmansk.

Printemps 2025. Le soutien à l’Ukraine génère de très fortes critiques dans de nombreux pays membres de l’OTAN. La Finlande annonce en outre la découverte du plus grand gisement de terres rares d’Europe près du lac de Lokan tekojärvi, au sud d’Ivalo. Ce gisement, évalué à dix millions de tonnes, est dix fois plus important que celui de Kiruna en Suède, découvert en janvier 2023. La Laponie est en effet très riche en gisements de minéraux industriels et en métaux (terres rares, fer, etc.). La surexploitation de ses propres gisements depuis 2014 contraint la Russie à multiplier ses sources d’approvisionnement. L’objectif côté russe est en effet double : éviter une rupture stratégique et maintenir sa production industrielle de véhicules blindés (minerai de fer) comme de matériels de haute technologie présents notamment dans les optiques de ses sous-marins et avions de chasse (terres rares).

Janvier 2026. Faute de soutien, l’Ukraine doit négocier une paix avec la Russie, cède les territoires conquis et redevient un pays satellite russe. La cohésion de l’OTAN est durement fragilisée.

Mars 2027. Des rapports militaires top secrets de l’OTAN, interceptés par des hackers russes, révèlent la faiblesse des défenses militaires le long de la frontière finlandaise en Laponie. Ils pointent également les difficultés de mise en œuvre de la mobilisation générale en cas d’attaque. La Finlande, jusqu’alors réticente, consent au déploiement d’une brigade américaine à Rovaniemi.

Décembre 2028. La Russie conduit un exercice militaire d’ampleur baptisé « Severo-Zapad 28 ». 50.000 hommes appartenant à la XIVe AIA sont déployés dans la péninsule de Kola durant deux mois et manœuvrent à quelques kilomètres de la frontière finlandaise.

Été 2029. « L’adhésion de la Finlande à l’OTAN est une violation de l’espace vital russe », déclare le Président russe. La Russie demande alors officiellement à la Finlande de quitter l’OTAN et propose de conclure un accord de défense bilatéral, à l’image du Grand-Duché de Finlande en 1809. La Finlande refuse. Les tensions s’accroissent et de nouvelles vagues migratoires sont orchestrées par Moscou, laissant craindre une infiltration d’espions. À l’automne, l’ambassadeur de Finlande en Russie est expulsé et les relations diplomatiques sont suspendues.

Mars 2030. Vladimir Poutine est réélu pour un 6e mandat, comme le lui permet la Constitution. La Russie lance alors, dans le plus grand secret, les préparatifs d’une invasion de la Laponie finlandaise durant l’hiver 2031. Conforté dans son jugement par le haut commandement militaire, le Président russe ne croit ni au déclenchement de l’article 5 ni à l’utilisation de l’arme nucléaire par l’OTAN.

Une invasion répondant à un triple objectif stratégique : préserver l’honneur russe, détruire la cohésion de l’OTAN et capter des ressources naturelles supplémentaires

Octobre 2030. La Russie conduit l’exercice « Severo-Zapad 30 » et déploie massivement ses troupes à sa frontière nord-ouest avec la Finlande. Des manœuvres navales ont lieu en mer de Barents, à partir de la base navale de Mourmansk. Concomitamment, le Président russe annonce le déploiement d’armes nucléaires tactiques dans la péninsule de Kola, tout en assurant qu’« elles ne seraient utilisées qu’en cas de menace contre le territoire ou l’État russe ».

29 novembre 2030. Une cyberattaque massive paralyse les institutions finlandaises. L’OTAN accuse la Russie, qui dément toute implication.

30 novembre 2030. À 11h00 (heure locale russe), Vladimir Poutine annonce lors d’une allocution télévisée que « la Russie ne reconnaît pas les frontières de la Finlande » et impose de revenir au tracé de 1809 à l’époque du Grand-Duché pour sa frontière nord-ouest.

Figure 2. Grand-Duché de Finlande en 1809

Soir du 30 novembre 2030. Les FAR frappent par missiles balistiques, les aéroports, les bases militaires et les installations énergétiques au nord-est de la Finlande. L’aéroport de Rovaniemi, où stationne la brigade multinationale sous commandement américain, est touché, mais aucune perte humaine n’est à déplorer. Les principales bases aériennes, abritant les F-18 finlandais, sont détruites tout comme les batteries d’artillerie, les stocks de missiles, les dépôts logistiques, les systèmes de défense anti-aérienne et les systèmes informatiques des centres de commandement et de contrôle. Des avions de chasse russes pénètrent l’espace aérien finlandais et imposent une supériorité aérienne. En quelques heures, le travail de ciblage, préparé depuis de nombreuses années, permet de détruire sur position plus de deux tiers des cinquante-cinq F-18, des deux cents chars et des sept cents pièces d’artillerie, notamment les K9 Thunder coréens et les M270 Multiple Launch Rocket Systems. Les principaux matériels de l’armée finlandaise sont anéantis, plongeant le pays dans le chaos.

1er décembre 2030 à l’aube. La XIVe AIA lance une offensive terrestre d’envergure d’est en ouest sur deux principaux axes d’attaque, avec quatre divisions, soit 80.000 hommes. Dans le fuseau sud, la 80e division d’infanterie arctique appuyée par une division d’infanterie de montagne passe à l’offensive sur l’axe Alakourtti (péninsule de Kola) – Kemijärvi (Finlande). Dans le fuseau nord, la 200e division d’infanterie motorisée de la Garde attaque sur l’axe Mourmansk (péninsule de Kola) – Ivalo (Finlande). La 61e division d’infanterie navale est conservée en élément réservé à Spoutnik (péninsule de Kola). Le poste de commandement de la XIVe AIA de l’Arctique est stationné à Mourmansk.

L’offensive aéroterrestre des FAR se déroule en trois phases distinctes (figure 3.). La phase n°1, du 1er au 3 décembre 2030, est une attaque en force au sud et au nord de la Laponie finlandaise. La phase n°2, du 4 au 7 décembre 2030, relance l’offensive au centre. La phase n°3, du 8 décembre 2030, vise à sécuriser les territoires conquis.

Submergée par la puissance mécanique russe, la Finlande déclare la guerre à la Russie et ordonne la mobilisation générale. Helsinki annonce compter sur 280.000 soldats aptes au combat et plus de 600.000 autres réservistes pour seulement 5,5 millions d’habitants. Mais la mobilisation peine à se mettre en œuvre en raison du chaos général. L’armée finlandaise ne peut repousser l’attaque terrestre, mais parvient à contenir l’avancée des FAR et à stabiliser le front. En moins d’une semaine, le nord-est de la Laponie finlandaise est conquis.

Figure 3. Schéma de manœuvre de l’offensive russe et dispositif statique

Le cadre de l’action de la coalition

De la décision politique à l’état final recherché militaire

Le 1er décembre 2030 au matin, le monde se réveille sous le choc. Une réunion de crise extraordinaire est convoquée à Bruxelles au siège de l’OTAN. La Finlande, par la voix de son représentant, expose la situation et demande officiellement le déclenchement de l’article 5 à la suite de l’agression russe. Bien que ce dernier ne fasse pas l’objet d’un vote, la Turquie refuse son application et y met son veto. « Les conditions ne sont pas réunies », annonce le Président Erdogan. La décision turque entraîne alors une situation de blocage et d’autres membres commencent à en questionner la mise en œuvre, déclenchant une grave crise diplomatique qui paralyse l’OTAN. Les plans régionaux sont cependant mis en œuvre pour dissuader toute nouvelle attaque de la Russie.

La Finlande invoque alors les accords de défense avec les États-Unis, qui en dehors des pays nordiques, demeurent à ce jour leur principal allié. Une brigade américaine est d’ailleurs stationnée à Rovaniemi. La France, le Royaume-Uni, l’Italie et les pays scandinaves (Suède et Norvège) fustigent l’attitude turque et annoncent leur soutien total à la Finlande. Le Groupe des plans nucléaires de l’OTAN écarte tout recours à l’arme atomique, en raison d’opinions publiques défavorables à son emploi.

L’engagement d’une coalition ad hoc menée par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni est décidé avec comme état final recherché la restauration de l’intégrité territoriale finlandaise pour mi-avril 2031. L’état-major de la coalition s’installe à Bruxelles et démarre la planification de l’opération Arctic Shield.

Le plan de campagne opératif

À la suite de la planification de la coalition, l’opération interalliés, interarmées et interarmes Arctic Shield est conduite en quatre phases (figure 4.). La phase préalable, du 1er décembre 2030 au 28 février 2031, voit la montée en puissance et le déploiement en Norvège puis en Finlande. La phase n°1, du 1er au 15 mars 2031, consiste au lancement de l’offensive de l’ouest vers l’est et à la reprise des territoires finlandais conquis par les FAR, entre les villes de Sodankylä (fuseau nord) et Kemijärvi (fuseau sud) et la frontière avec la Russie. La phase n°2, du 16 au 31 mars 2031, doit permettre la relance de l’offensive au nord, vers la ville d’Ivalo et le lac Inarijärvi. La phase n°3, du 1er au 15 avril 2031, vise enfin à sécuriser la totalité de la Laponie finlandaise et à dissuader contre toute nouvelle offensive des FAR.

Figure 4. Schéma de manœuvre de l’opération aéroterrestre Arctic Shield

Afin de permettre le déclenchement de la phase n°1, la coalition décide le déploiement de deux groupes aéronavals (français et américain) en mer de Norvège pour renforcer la dissuasion et appuyer les troupes au sol. La coalition met en œuvre un blocus naval et neutralise avec succès la marine russe, en particulier ses sous-marins, stationnés dans la base navale de Mourmansk, en les empêchant de se déployer et de se diluer en mer de Barents. Enfin, des systèmes de défense aérienne de très courtes, courtes, moyennes et longues portées sont déployées à Narvik à partir de moyens américains, français et britanniques avec pour mission de couvrir les actions de la coalition.

Pour conduire l’opération Arctic Shield, assurer son déploiement et son soutien logistique, la coalition décide l’installation d’une base logistique de théâtre au nord-est de l’Écosse à Scapa Flow base à la suite de sa réhabilitation. Elle fut utilisée par les Britanniques pendant la Seconde Guerre mondiale. L’escorte des navires cargos et de transport de troupes (via des ferrys civils réquisitionnés) est assurée par la Royal Navy de Scapa Flow base jusqu’au port de Narvik en Norvège. Une base logistique de théâtre avec le volume de 10 DOS est déployée à Narvik accompagnée de plots logistiques à Gällivare (Norvège).

L’intention de la coalition est bien d’équiper les troupes en ordre de combat avant leur embarquement pour Narvik. Il s’agit là de tirer les leçons de la bataille de Namsos (1940) et de son échec sur le plan logistique. Narvik possède en effet un des rares ports en eaux profondes de Norvège accessible en plein hiver, expliquant notamment son intérêt pour nos anciens durant la Seconde Guerre mondiale.

En parallèle de l’élaboration du plan de campagne opératif, la coalition acte l’ordre de bataille des forces aéroterrestres. Le 5th Corps (Victory Corps) avec ses EOCA, basé en Pologne, est désigné comme l’état-major du corps d’armée multinational. Il disposera de deux divisions américaines (les 10th Mountain Division renforcée de la 173rd Airborne Brigade et la 2nd Marine Division), d’une division britannique et de la 1re division française comprenant la 27e brigade d’infanterie de montagne, la 7e brigade blindée, renforcée par la brigade arctique italienne et par la brigade Nord « Bardufoss » norvégienne. Ces quatre divisions autonomes disposeront de leurs EODIV et de leur groupement de soutien divisionnaire.

Quelle place pour l’armée de Terre française dans un tel scénario ?

L’engagement de haute intensité en milieu « grand froid » nécessite des savoir-faire spécifiques pour gagner la liberté d’action, concentrer les efforts et économiser les moyens. Appuyée par la 27e BIM, l’armée de Terre a ainsi opéré un changement d’échelle dans sa prise en compte des spécificités de ce milieu, autour des fondamentaux : stationner, se déplacer et combattre.

Des décisions du niveau politico-militaire à tactique

Si la France déploie une division à l’hiver 2031 aux côtés des Américains et des Britanniques, c’est parce qu’elle a pris la mesure du défi imposé par le milieu « grand froid » du niveau politico-militaire jusqu’au niveau tactique. L’engagement hivernal de la FOT ne repose désormais plus uniquement sur la 27e BIM.

Au niveau politico-militaire, le chef d’état-major de l’armée de Terre a su convaincre le politique de voter le programme « Panthère des neiges », construit autour des fondamentaux de l’engagement en milieu « grand froid » : stationner, se déplacer et combattre. Ce programme a été baptisé ainsi en raison des capacités d’adaptation hors norme de ce félin aux environnements exigeants, froids et enneigés. Ainsi, si les A2PM successives de la LPM 24-30 ont amorcé sa réalisation, la LPM 28-34, votée après l’élection présidentielle de 2027, a acté sa pleine mise en œuvre pour l’armée de Terre.

Au niveau stratégique et capacitaire, les entreprises de la base industrielle technologique de défense (BITD), orientées par la Délégation générale pour l’armement (DGA) pour les Armées et le Commandement du Combat Futur (CCF) pour l’armée de Terre, appuyées par l’expertise de la 27e BIM, ont su concevoir, développer et acheter auprès de partenaires crédibles et fiables de la France, les matériels indispensables à un engagement « grand froid ». Le VHM illustre un exemple concret, pour lequel l’École militaire de haute montagne (EMHM) est devenue le pôle d’expertise des Armées.

Au niveau opératif, la synchronisation et la mise en cohérence des effets interarmées en milieu « grand froid » ont systématiquement fait l’objet de recherches, selon les enseignements tirés depuis les années 2020 en particulier, des nombreux exercices Cold Response (Norvège) et Nordic Response (Finlande), et des déploiements opérationnels LYNX en Estonie et AIGLE en Roumanie.

Un changement d’échelle de l’armée de Terre

« En milieu grand froid, la force doit impérativement être formée et acclimatée ». La transformation du groupement d’aguerrissement montagne (GAM) de Modane en bataillon d’aguerrissement montagne (BAM) doublé d’un pôle d’expertise, rattaché à l’EMHM à l’été 2024, a amélioré l’acculturation et la formation d’adaptation des unités de la FOT. En outre, l’affectation d’officiers à USARAK, au Canada et dans les pays nordiques (Norvège, Suède et Finlande) a contribué au développement d’une culture « grand froid » dans l’armée de Terre. Des modules spécifiques ont aussi été ajoutés à la programmation des écoles de formation initiale (AMSCC, Saint-Maixent, etc.).

Une des premières considérations de l’engagement en milieu « grand froid » impose la protection contre le froid extrême, pour maintenir l’efficacité opérationnelle des combattants. Il leur faut combattre et non survivre. Pour répondre à la fois aux exigences du combat et de la protection thermique, le programme « Panthère des neiges » a ainsi fourni dès 2028 un paquetage C0 (températures allant de +4°C jusqu’à -21°C) et un paquetage C1 (températures allant de -22°C jusqu’à -33°C) respectivement à la FOT et aux unités spécialisées (27e BIM, unités du 2e cercle et forces spéciales). Combattre dans le froid nécessite aussi de stationner au chaud. Aussi, le renouvellement du parc de stationnement (tentes de postes de commandement, matériels de vie en campagne pour la troupe, effets de camouflage, etc.) a été pris en compte et intégré au programme dès l’A2PM 24.

La mobilité revêt par ailleurs un atout crucial dans un environnement où les conditions du terrain peuvent changer très rapidement. Les véhicules chenillés permettent de s’affranchir du réseau routier pour lancer des manœuvres ambitieuses d’enveloppement. Ils offrent aussi la capacité de créer l’incertitude sur les arrières ennemis, à contrôler et à exploiter les zones lacunaires en dehors des axes. La LPM 28-34 a donc défini comme prioritaire l’achat de véhicules chenillés (pour le combat et la logistique). Alors que la LPM 24-30 prévoyait la livraison de 150 VHM en 2030, la LPM 28-34 triple la cible à 450 VHM, permettant ainsi d’équiper le volume de trois GTIA.

En milieu « grand froid », la logistique occupe une place centrale, exigeant une planification méticuleuse pour surmonter les obstacles imposés par les conditions climatiques difficiles. Le transport et le ravitaillement sur terrain enneigé sont des éléments clés, compte tenu de la disponibilité limitée des ressources. Les Écoles militaires de Bourges (EMB), désignées comme pilote de domaine du soutien « grand froid », s’appuyant sur l’expertise du 511e régiment du train d’Auxonne et du 7e régiment du matériel de Lyon, ont permis le développement d’une logistique et d’une gestion des stocks recherchant l’autonomisation croissante des niveaux 3 à 5 (brigade interarmes, GTIA, S-GTIA). La création d’un régiment de voie ferrée à Lyon, le 1er janvier 2029, a permis de développer et d’entretenir les savoir-faire indispensables à la projection de la division française en Finlande à l’hiver 2031. Cependant, stationner et se déplacer n’est pas combattre et demande l’apprentissage d’une tactique particulière et surtout un entraînement dans des conditions les plus proches de la réalité.

Le combat en milieu « grand froid » exige une complémentarité des effets, dans la phase embarquée comme dans la phase débarquée. L’autonomie énergétique croissante des drones a révolutionné les phases d’acquisition du renseignement, permettant une accélération de la prise de décision du chef interarmes. Les enseignements tirés des missions opérationnelles AIGLE (Roumanie) et LYNX (Estonie) ont mis en exergue la complémentarité du couple « char Leclerc VHM » pour combiner au mieux le choc et le feu lors des phases d’engagement. Le développement d’une trame anti-char solide a également été inclus au programme « Panthère des neiges » pour les phases de combat débarqué. La création d’un CENTAC « grand froid » de l’OTAN, en Norvège, a ainsi permis d’évaluer et de qualifier les unités de l’armée de Terre lors de manœuvres globales. Les séquences d’entraînement, de jour comme de nuit, incluent une manœuvre logistique complète en planification comme en conduite, sur un terrain cloisonné et compartimenté, offrant peu de pénétrantes et de rocades accessibles aux rames logistiques sur roues pour conduire des ravitaillements.

Le programme « Panthère des neiges » a enfin considérablement accru les partenariats et les entraînements multinationaux avec les nations possédant une expertise et des unités aptes à combattre en milieu « grand froid » (Suisse, États-Unis, Canada, Norvège, Suède, Finlande, etc.). Ainsi, dès 2024, la participation aux exercices Cold Response (Norvège) et Nordic Response (Finlande), élargie à l’ensemble des unités de la FOT, a permis de renforcer la capacité opérationnelle des armées et la mise en œuvre des savoir-faire tactiques et logistiques en milieu « grand froid ».

Moins de cinq années après la fin du conflit ukrainien, l’invasion de la Laponie finlandaise par la Russie durant l’hiver 2031, en plein hiver polaire, a sidéré les pays occidentaux, et plongé de nouveau l’Europe dans la guerre.

« Je tenais l’immobilité pour une répétition générale de la mort ». Sans prise de conscience des décisions à prendre et malgré des troupes combinant une expérience opérationnelle comme des compétences « grand froid » uniques en Europe, la France et son armée de Terre pourraient bien être déclassées et déclarées inaptes à un tel engagement dès la prochaine décennie, sans mise en mouvement d’ensemble. L’engagement en milieu « grand froid » à l’échelle d’une crise majeure est possible et une victoire envisageable, à la condition d’opérer un changement d’échelle dans l’équipement, l’entraînement et le soutien en milieu « grand froid » des forces terrestres, en capitalisant sur l’expertise de la 27e brigade d’infanterie de montagne. Pour s’engager dans une coalition aéroterrestre au nord du cercle polaire, les défis sont nombreux pour l’armée de Terre française : confirmation d’une réelle ambition « grand froid » portée par la mise en œuvre d’un programme global à l’image de SCORPION, équipement de la FOT avec du matériel adapté aux climats C0 et C1, acculturation et entraînement aux spécificités d’un tel engagement, et enfin, développement d’un soutien dédié, car sans une logistique adaptée, résiliente et performante, il est tout simplement impossible d’y combattre.

Enfin, la France est le seul pays en Europe disposant d’une armée d’emploi avec une spécificité « montagne » et surtout « grand froid » reconnue de niveau brigade, là où la majorité des pays occidentaux (en dehors des États-Unis) possède au mieux un régiment, mais plus généralement des forces spéciales. La France doit donc tenir un rôle moteur en Europe dans le cas d’un engagement « grand froid » pour contribuer à garantir la liberté d’action de l’Occident.


Revue Conflits

Fondée en 2014, Conflits est devenue la principale revue francophone de géopolitique. Elle publie sur tous les supports (magazine, web, podcast, vidéos) et regroupe les auteurs de l’école de géopolitique réaliste et pragmatique.

Au Sahel, opération rime de nouveau avec externalisation

Au Sahel, opération rime de nouveau avec externalisation


Le ministère des Armées cherche à doter ses forces présentes au Tchad d’une capacité de récupération et d’évacuation médicale héliportée, lancement d’une consultation à la clef. 

Un millier de militaires français sont toujours à pied d’oeuvre au Sahel, tous basés au Tchad après les retraits successifs du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Un contingent aux moyens aériens limités et auprès duquel sera donc peut-être affrété un hélicoptère chargé de conduire des missions de récupération de personnel isolé en zone permissive et d’évacuation médicale (MEDEVAC).

Les besoins exprimés ? Une aptitude à opérer dans un rayon de 800 km à vide ou de 400 km avec une charge de 1 tonne. De quoi, dans le premier cas, couvrir l’essentiel d’un pays grand comme deux fois la France métropolitaine au départ de N’Djamena. Mais aussi un appui disponible 24/7 pour une alerte fixée à une heure, délai éventuellement réduit à 30 minute sur décision de la force. L’appareil devra pouvoir opérer à partir de terrains sommaires non reconnus. 

Conduite par le Service du commissariat des armées (SCA), la procédure n’en est qu’à une phase de consultation mais pourrait déboucher sur la notification d’un accord-cadre au troisième trimestre 2024. Montant maximal estimé de l’opération : plus de 18 M€ par an pour 800 heures de vol, ou 127 M€ pour les sept années que pourrait durer le marché. 

Ce type de service, l’Agence européenne de défense (AED) en propose un similaire depuis 2019. La Belgique, l’Allemagne, l’Autriche, la République tchèque, les Pays-Bas et la Facilité européenne de paix (FEP) sont bénéficiaires du dernier contrat AIRMEDEVAC signé l’an dernier pour 140 M€, mais pas la France. Les deux premiers y ont eu recours à une centaine de reprise entre 2020 et 2023 lors de leurs déploiements au Niger. 

Moins médiatisée que sous l’ère Barkhane, la présence française au Sahel se poursuit au travers du partenariat militaire opérationnel construit avec l’armée tchadienne. Début mars, les FFS et leurs partenaires locaux ont conduit l’exercice BODOLEX, manoeuvre entamée avec la projection par air d’un poste de commandement tactique et d’un sous-groupement tactique interarmes dans la zone de Faya-Lagueau, dans le nord du pays. 

Crédits image : EMACOM

Des troupes tricolores en Ukraine: pour quelles missions et avec quels effectifs?

Des troupes tricolores en Ukraine: pour quelles missions et avec quels effectifs?

par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 19 mars 2024

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


Emmanuel Macron n’en démord pas: samedi, dans un entretien publié par Le Parisien, il a réaffirmé que des opérations au sol en Ukraine par les Occidentaux seraient peut-être nécessaires “à un moment donné”.

On se souvient du “rien n’est exclu” du président français lors de sa conférence de presse du 27 février et de ses propos “pesés” et “mesurés” sur l’envoi de troupes occidentales sur le sol d’Ukraine. Des propos qui continuent de rassurer les uns ou d’inquiéter les autres, alors qu’un dernier groupe fait les comptes des effectifs à engager. 

Le 27 février, le président français avait énuméré cinq points de soutien urgent au profit de Kiev, sur lesquels il y avait un “consensus” entre les alliés de l’Ukraine rassemblés à Paris le même jour, après une “discussion très stratégique et prospective”:

1) le cyberdéfensif,
2) la coproduction d’armements, de capacités militaires, de munitions en Ukraine,
3) la défense de pays menacés directement par l’offensive russe, comme la Moldavie,
4) la capacité de soutenir l’Ukraine à sa frontière avec la Biélorussie avec des forces non militaires,
5) les opérations de déminage.

Certaines de ces actions pourraient nécessiter une présence sur le territoire ukrainien sans franchir le seuil de belligérance“, avait ensuite précisé le ministre des Affaires étrangères français, Stéphane Séjourné. Pour sa part, le ministre français des Armées avait écarté l’envoi de “troupes combattantes” mais il avait ajouté qu'”un certain nombre de pays (…) ont mis sur la table un certain nombre d’idées, notamment, autour du déminage et autour de la formation – non pas la formation sur le territoire polonais comme nous le faisons aujourd’hui, mais sur la formation sur le territoire ukrainien à l’arrière des lignes.” 

Dans l’esprit des dirigeants français, aucune troupe de mêlée (infanterie et cavalerie) ne sera déployée sur le front d’Ukraine et engagée dans des combats directs contre les forces russes.  “Jamais d’offensive”, a bien précisé Emmanuelle Macron, le 14 mars. De telles unités sont toutefois déjà déployées en Estonie et en Roumanie, deux pays où l’Otan a déployé des bataillons multinationaux dans le cadre de son renforcement sur le flanc est de l’Europe.

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En Estonie, dans le cadre de la mission Lynx, la France déploie un sous-groupement tactique interarmes de 300 hommes au sein du battlegroup britannique basé à Tapa (nord-est). Ce SGTIA est actuellement composé d’une compagnie de la Légion étrangère, appuyée par des blindés Griffon et bientôt par des blindés Jaguar .

En Roumanie, depuis 2022, dans le cadre de la mission Aigle en particulier, un millier de soldats sont déployés, appuyés par des chars Leclerc et des canons Caesar. Par ailleurs en 2025, Paris entend déployer une brigade blindée (7000 hommes environ) pendant plusieurs semaines, pour des manoeuvres conjointes en Roumanie.

En Ukraine, pas de mêlée, mais de l’appui et du soutien

Formation et déminage constituent deux des missions pour lesquelles des soldats européens ou otaniens sont susceptibles d’être déployés sur le sol ukrainien. Dans ces deux domaines, le travail ne manque pas.

Le déminage du pays a commencé mais tant que les combats ne cessent pas, la pollution aux munitions abandonnées ou non-explosées augmente. «174 000 km2 sont à déminer», selon le président Zelensky; et il faudra dix ans et 35 milliards d’euros pour dépolluer tout le pays selon la Banque mondiale.

Il faut aussi continuer à former des militaires ukrainiens pour combler les très lourdes pertes enregistrées par Kiev sur le front sud en particulier. Il faut aussi permettre aux Ukrainiens de renforcer les brigades de combat dont certaines ont été étrillées par des Russes plus nombreux, mieux armées et désormais quasi maîtres du ciel ukrainien avec leurs chasseurs et leurs bombardiers, leurs drones et leurs missiles.

Ce sont donc, outre de petites unités de mêlée (troupes de marine, troupes aéroportées par exemple) chargées des missions de formation, comme c’est le cas actuellement, des unités françaises d’appui (génie en particulier) qui pourraient être engagées en Ukraine. Or, les unités chargées de la formation et des missions de déminage/dépollution devront travailler en autonomie, de façon à ne pas dépendre des Ukrainiens dont les troupes pourront ainsi être engagées sur le front. 

L’autonomie va exiger des moyens supplémentaires humains et matériels. La France va devoir protéger ses formateurs et ses démineurs contre les menaces aériennes et les menaces cyber. Elle va devoir assurer la logistique de ces troupes (hébergement, restauration, transport, énergie…). Elle va devoir assurer le soutien médical de ces soldats. Elle va devoir leur permettre de communiquer.

Ce sont donc des contingents issus des Transmissions et de la guerre électronique, du Service de Santé des Armées, du Commissariat (voire de l’Economat des armées), des unités de lutte contre les drones…, qui devront aussi être déployées. Il faut donc multiplier par trois, voire quatre, les effectifs affectés à la formation et au déminage pour avoir une idée du volume de troupes qu’exige le type d’intervention envisagé par le pouvoir français. 

Et le soutien à la frontière biélorusse?

Emmanuel Macron a par ailleurs évoqué une “capacité de soutenir l’Ukraine à sa frontière avec la Biélorussie avec des forces non militaires”. Il s’agit à l’évidence de soulager l’armée ukrainienne de sa garde le long de la frontière biélorusse. Ce qui permettra de libérer plusieurs brigades et de les redéployer dans les zones critiques du Donbass ou plus au sud dans les oblast de Zaporidjjia et de Kherson.

Des “forces non militaires”? S’agirait-il d’observateurs, comme ceux de l’OSCE déployés au Donbass? Ou de contractors d’ESSD (entreprises de services de sécurité et de défense) chargés de mission ISR (renseignement, surveillance et reconnaissance)? De telles forces auraient certes leur utilité mais elles ne seraient guère dissuasives en cas de nouvelles tensions militaires dans ce secteur.

Et la Moldavie?

En Moldavie, les autorités prorusses de la région séparatiste de Transnistrie ont appelé Moscou à leur offrir sa « protection ». Paris et ses alliés ont donc de quoi s’inquiéter d’une détérioration de la situation sur place.

D’où deux initiatives françaises. En septembre 2023, la France a signé une lettre d’intention en vue d’établir une coopération militaire avec la Moldavie. Le 7 mars dernier, la présidente moldave a été reçue ce à l’Élysée pour y conclure un accord de défense entre les deux pays. Au cours de quatre derniers, trois lots d’équipements militaires ont été donnés par la France. 

L’armée française au Sahel : un corpus doctrinal à l’épreuve

L’armée française au Sahel : un corpus doctrinal à l’épreuve

par Niagalé Bagayoko – IFRI – publié le 14 mars 2024

https://www.ifri.org/fr/publications/notes-de-lifri/larmee-francaise-sahel-un-corpus-doctrinal-lepreuve


Les doctrines d’engagement des armées évoluent constamment en fonction des expériences de terrain. Au Sahel, les armées françaises ont mis en œuvre des conceptions héritées à la fois de leur histoire et des leçons tirées des interventions internationales des récentes décennies : interventions dans les Balkans ou « guerre » contre le terrorisme

En dépit de certains succès, ces conceptions se sont souvent avérées mal adaptées au milieu humain, social et politique des pays du Sahel.

L’engagement de la France au Sahel est le plus souvent analysé à travers un prisme opérationnel qui se concentre sur les interventions ou les capacités militaires mobilisées à partir du déploiement de ses forces spéciales au début des années 2010 jusqu’au retrait définitif des derniers soldats français du Niger en décembre 2023. Les interventions menées sont plus rarement examinées à l’aune des soubassements doctrinaux auxquels se sont référées les forces françaises déployées pour les conduire. Il apparaît pourtant essentiel de connaître et d’évaluer la pertinence du cadre doctrinal dans lequel s’est inscrite la présence militaire dans l’espace sahélien durant plus d’une décennie.


Niagalé Bagayoko est présidente de l’African Security Sector Network et responsable du programme Afrique de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques.

Lire et télécharger : ifri_bagayoko_corpus_doctrinal_francais_mars2024

Une version courte de cette étude a été publiée dans Politique étrangère, vol. 89, n° 1, 2024.

Marine & Océans 282 : dossier sur la Mission Jeanne d’Arc 2024 de la Marine nationale

Marine & Océans 282 : dossier sur la Mission Jeanne d’Arc 2024 de la Marine nationale


Exceptionnellement, ce numéro 282 de Marine & Océans, en partenariat avec Theatrum Belli, est gratuit et lisible dans son intégralité.

Nous vous invitons à vous abonner aux versions numériques de M&O.

Marine & Océans est le seul magazine maritime qui soit bilingue français-anglais.

Bonne lecture.

Lire et télécharger le document : Marine & Océans N°282 Mission Jeanne d’Arc

Biographie du Général Valentin SEILER commandant la 6e brigade légère blindée

Biographie du Général Valentin SEILER commandant la 6e brigade légère blindée

Marié et père de quatre filles, le général Valentin Seiler est né le 27 février 1972 à Strasbourg.

Il est admis à l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan en 1992 (promotion Capitaine Stéphane).

Après une année de formation à Saumur dans le domaine du combat blindé, il rejoint le 1er Régiment étranger de cavalerie à Orange en 1996.

Chef de peloton blindé, il est engagé en opérations au Tchad, au Congo-Brazzaville et en République Centrafricaine. En 1998, il est affecté à la 13e Demi-brigade de Légion étrangère à Djibouti pour deux ans. De retour au 1er REC, il prend le commandement du 3e escadron en 2001. Il effectue avec son unité une mission au Détachement de Légion étrangère de Mayotte, puis est engagé, en 2003, en opérations en Côte d’Ivoire.

Dans le cadre de l’enseignement militaire supérieur, il effectue un mastère à HEC (2005-2006). Il suit ensuite l’Advanced command and staff course au Joint services command and staff college à Shrivenham (UK), tout en effectuant un Master of arts in Defence studies au King’s college London, University of London (2006-2007).

A l’issue de sa formation en Grande-Bretagne, il rejoint l’Etat-major de l’armée de terre (EMAT) à Paris, où il sert comme officier traitant à la Division Performance-Synthèse.

De 2009 à 2011, il exerce la fonction de chef du bureau opérations-instruction du 1er REC ; au cours de son affectation, il est engagé en Côte d’Ivoire, comme chef opérations.

En 2011, il est affecté à l’Etat-major des armées (EMA) à Paris, où il contribue à l’élaboration de la loi de programmation militaire 2014-2019. Promu au grade de colonel en 2012, il achève son affectation à l’EMA au Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), où il suit les opérations menées en Afrique.

Il commande le 1er REC de 2015 à 2017 et est engagé en opérations en République Centrafricaine à la tête d’un groupement tactique interarmes.

En 2017, il rejoint le cabinet du chef d’état-major de l’armée de Terre pour prendre la fonction de chef adjoint de cabinet.

Après une année d’auditeur au Centre des hautes études militaires et à l’Institut des hautes études de la défense nationale (2019-2020), il rejoint l’EMA comme officier de cohérence opérationnelle (OCO) en charge de l’engagement au combat dans le milieu terrestre, puis comme secrétaire général des OCO.

Il est promu au grade de général de brigade le 1er juin 2022. A partir du 11 juillet 2022, il commande les dix centres d’entraînement spécialisés de l’armée de Terre, à Mourmelon-le-Grand.

Le 7 juillet 2023, il prend le commandement de la 6e brigade légère blindée à Nîmes, où il exerce également les fonctions de commandant de la base de défense Nîmes-Laudun-Larzac, de délégué militaire départemental du Gard et de commandant d’armes de la place de Nîmes.

Le général Valentin Seiler est officier de la Légion d’honneur, chevalier de l’ordre national du mérite et titulaire de la croix de la valeur militaire avec deux citations.

L’État Islamique du Grand Sahara (EIGS), des terroristes en puissance

L’État Islamique du Grand Sahara (EIGS), des terroristes en puissance 

 
Vidéo GEO : Quelle différence entre État islamique, Al-Qaïda et talibans ?

Né en 2015, l’État Islamique du Grand Sahara (EIGS), groupe armé djihadiste, ne cesse de se déployer dans le Sahel central, une zone reculée entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso.

L’État Islamique du Grand Sahara, une naissance entourée de rivaux

Le premier bastion de l’EIGS se situe dans le nord-est du Mali. La région comme le reste du pays est en crise depuis 2012. Une guerre oppose l’état malien aux rebelles touaregs rejoints par les djihadistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).

L’EIGS s’ajoute à ces acteurs déjà nombreux et s’engouffre donc dans cette spirale infernale en visant l’armée malienne, garante de l’état. Pendant un temps, ses actions sont limitées car l’armée française quadrille la zone. Paris a envoyé 5000 soldats, la force Berkhane.

L’ONU, quant à elle, mobilise aussi des milliers de Casques bleus avec la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali). Mais l’EIGS compte bien imposer son idéologie salafiste sur les populations et devenir le maître de la région. Les terroristes pratiquent l’extorsion de fonds auprès des populations civiles à travers la zakat, l’impôt religieux, dans les territoires qu’ils contrôlent. Avec leurs mines d’or artisanales, mais aussi l’argent qu’ils gagnent grâce à la contrebande de la drogue et des armes, l’EIGS devient autonome financièrement, ce qui n’est pas l’apanage de toutes les organisations djihadistes.

EIGS : une zone d’influence et de contrôle de plus en plus vaste

L’EIGS étend alors ses racines dans la zone dite “des trois frontières” aux confins du Niger, du Burkina Faso et du Mali. Terres éloignées des capitales des trois pays, peuplées de Peuls, traditionnellement des éleveurs, mais aussi d’agriculteurs, et surtout gigantesques par leur superficie, la stabilité n’y est pas une tradition.

Là, dans le delta intérieur du fleuve Niger, des milices se créent donc pour répondre aux conflits communautaires. Et l’EIGS de s’appuyer sur ces tensions pour asseoir progressivement son joug. Après deux ans d’activité, le groupe terroriste amplifie ses offensives en visant désormais les armées des trois pays du Sahel central, avec toujours la même optique : déstabiliser les pouvoirs en place.

Le scénario est identique. Des dizaines d’assaillants à moto ou en pick-up attaquent, mitraillettes en main, les postes militaires. Après avoir tué les soldats, ils repartent avec les stocks d’armes, puis disparaissent. À cette période et jusqu’en 2020, l’EIGS coexiste d’ailleurs avec l’autre courant djihadiste très présent sur place, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda. Les deux frères ennemis font cause commune, en tout cas, au départ.

Mais le 9 août 2020, un événement va faire connaitre l’EIGS au-delà du Sahel central. Six humanitaires français de l’ONG Acted, âgés de 25 à 31 ans, et leurs accompagnants, sont tués froidement lors d’une balade au milieu des girafes, dans la réserve naturelle de Kouré, au Niger. L’EIGS a commandité l’attentat et montre qu’elle vise aussi les Occidentaux.

2022, l’ascension de l’État Islamique du Grand Sahara (EIGS)

Le 16 septembre 2021, le président de la République française Emmanuel Macron et la ministre des Armées, Florence Parly, annoncent la mort d’Adnane Abou Walid al-Sahraoui, le chef de l’État islamique dans le Grand Sahara. Celui-ci a été abattu par drone quelques semaines auparavant avec une dizaine de ses hommes à l’est du Mali. Mais ces représailles ne vont pas affaiblir pour autant l’EIGS qui se dote d’un nouveau chef, Abou al-Bara al-Sahraoui.

Surtout, la France est en passe de quitter le Mali. La fin de l’opération Berkhane est annoncée le 17 février 2022. Le dernier soldat français quitte la zone le 15 août 2022. Parallèlement, le gouvernement de Bamako a souhaité limiter l’action de Minusma. L’EIGS a donc le champs libre sur ses zones d’influence et va même se renforcer et s’étendre encore plus. En décembre, une vidéo de propagande montre plusieurs centaines de combattants dans le désert. L’EIGS ne se cache plus et va amplifier son emprise…

Des milliers de victimes, dont des civils

Commerces et maisons brûlés, amputations en place publique, l’EIGS appliquent au grand jour des châtiments liés à la charia. Les massacres et tueries se multiplient dans les villages ce qui poussent de nombreux Maliens notamment à l’exil. D’après la ministre française des Armées Florence Parly, l’EIGS serait responsable de la mort de 2 000 à 3 000 civils au Mali, au Niger et au Burkina Faso, de 2015 à 2021. Fort d’un millier d’hommes, l’Etat Islamique du Grand Sahara a maintenant une quasi-hégémonie dans la zone des “trois frontières”. En 2023, ses attaques djihadistes n’ont fait qu’augmenter…