Le port flottant pour Gaza entre dans sa phase initiale de construction

Le port flottant pour Gaza entre dans sa phase initiale de construction

port flottant.jpg

 

par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 26 avril 2024

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


Les États-Unis ont commencé la construction d’une jetée flottante à Gaza, a annoncé jeudi le Pentagone. Ce projet est destiné à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire dans le territoire palestinien bombardé et assiégé par Israël. Jusqu’à présent, les Américains ont largué 2200 tonnes d’aide alimentaire, mais c’est insuffisant; d’où la mise en place d’une infrastructure flottante pour acheminer par voie maritime un supplément d’aide;

L’information a été donnée lors du point presse de jeudi soir par un officier américain qui a annoncé “que l’assemblage des éléments de la jetée a débuté au large de la côte de Gaza”. 

Les travaux ont donc commencé en dépit des mésaventures de ces derniers jours avec deux des huit navires acheminant les éléments des quais et jetées connaissant des problèmes techniques (voir mon post). Mais, selon le Pentagone, “tous les navires et les personnels nécessaires pour l’exécution de la phase initiale  de la mission sont en place dans l’est de le Méditerranée“. 

L’aide arrivera dans un premier temps à Chypre, où elle fera l’objet de vérifications, puis sera préparée en vue de son acheminement, a précisé un haut responsable militaire américain. Elle sera ensuite transportée par des navires commerciaux sur une plateforme flottante au large de la bande de Gaza, puis par des navires plus petits jusqu’à la jetée. La capacité opérationnelle sera au début de 90 camions d’aide par jour, puis de 150 par jour. Actuellement, en moyenne 220 camions entrent chaque jour dans la bande de Gaza.

La maintenance dans une opération d’envergure, enjeu majeur de l’économie de guerre (III de III)

La maintenance dans une opération d’envergure, enjeu majeur de l’économie de guerre (III de III)


Par le Chef d’escadron Thomas Arnal, officier de l’arme du Matériel et Ecole de guerre – Terre – Partie III : se donner les moyens d’une « industrie prête à la guerre »

Disposer d’une économie de guerre pour soutenir une opération d’envergure implique le renforcement d’un secteur économique structurant pour la France. Pour l’armée de Terre, il s’agit de saisir l’opportunité du contexte actuel pour retrouver l’épaisseur logistique indispensable pour répondre aux enjeux de défense actuels.


Economie de défense et défense de l’économie française

La BITD française est un maillage industriel d’environ neuf grands groupes et plus de quatre mille PME, dont quatre-cent-cinquante considérées comme stratégiques. Elle représente deux cent mille emplois de haute technicité, et 15 G€ de chiffre d’affaire (hors MCO). Avec jusqu’à 7% des emplois industriels de certaines régions, elle est l’un des rares secteurs avec l’aéronautique à contribuer positivement à la balance commerciale de la France (en 2018, l’export de la BITD représentait 6,9 G€, soit 20% des exportations françaises)1.

L’impact économique du secteur défense se mesure sur l’ensemble du territoire français à partir d’externalités (effets sur l’activité, l’emploi, la recherche et le développement). La BITD contribue activement au maintien de l’activité dans les zones industrielles sous-dotées et a remplacé des sites militaires fermés lors des réorganisations géographiques successives de la défense.

Il est estimé que chaque milliard d’euros investi dans la BITD génère deux milliards supplémentaires en activité (PIB) au bout de dix ans. De plus, les dépenses publiques n’évincent pas les investissements de recherche et développement (R&D) privés2. L’effet multiplicateur de cet investissement est supérieur à celui des dépenses de fonctionnement de l’Etat (qui sont de la consommation, sans retombée sur la productivité privée). L’effort en équipements militaires et en R&D concentre ainsi 80% de l’investissement public français. L’aspect national de la production de défense renforce encore cet effet, en ce sens que la BITD externalise davantage sa R&D vers des entreprises françaises (82%) que les entreprises privées (52%).

Enfin, le suivi et le pilotage de la BITD par la DGA témoignent du contrôle étatique et de la protection de la vie économique du secteur. La prise de conscience politique et l’expertise industrielle historique de notre pays sont des atouts à valoriser pour renforcer un secteur stratégique, source d’emploi et de croissance économique.


Remettre l’Etat au cœur d’un secteur stratégique

Au-delà des réquisitions, le SGA travaille sur la priorisation de la livraison de biens et services au bénéfice des forces armées3. Il s’agit de pouvoir ordonner à un partenaire contractuel de l’Etat de l’approvisionner par priorité sur tout autre engagement. Cette mesure s’inspire de la législation américaine dite DPAS pour « Defence Priorities and Allocations System »4.

Le régime de contrôle des entreprises de fourniture de matériels de guerre est également en étude de modernisation. La DAJ préconise la clarification des prérogatives des commissaires du gouvernement siégeant dans les entreprises liées à l’Etat par un marché relatif aux matériels de guerre (contrôle de la stratégie d’entreprise et mise en œuvre éventuelle de priorisation ou réquisition). Enfin, le SGA souhaite renforcer les prérogatives de contrôle de l’Etat dans le cadre des marchés publics, exclus du droit européen. Il s’agit d’éviter de soumettre ces marchés à des règles trop contraignantes. Cela peut également passer par l’extension des obligations liées aux enquêtes de coûts à ces marchés (transparence notamment). En effet, l’absence de mise en concurrence au sein de la BITD conduit régulièrement à une dérive de prix contraignante.

Pour le MCO-T, ces enjeux sont primordiaux pour commander et constituer dans la durée les stocks nécessaires au soutien d’une opération d’envergure.

Plusieurs autres pistes sont étudiées par la SIMMT, telles que :

  • la standardisation de sous-ensembles pour plusieurs types de matériels majeurs. Le passage à l’échelle SOR – HEM impose en effet la priorisation de la soutenabilité sur le respect exhaustif du cahier des charges. A titre d’exemples, on notera qu’entre 1945 et 1985, les Etats-Unis sont passés de vingt-sept châssis de camions de transports à un seul pour des dizaines de matériels différents. Idem, en 2010, l’Allemagne disposait de trois familles de moteurs différents pour équiper une dizaine de familles de matériels majeurs, quand la France en avait sept pour équiper le même volume de parcs différents.
  • Ou encore la prise en compte de l’évolution constante d’un matériel plutôt que l’acquisition de nouveaux parcs à échéance régulière. L’exemple du char T72 russe mérite à cet égard d’être étudié. Ce matériel est en évolution constante depuis 1973. Pensé pour une production de masse à des coûts maîtrisés par la planification, il permet d’ajouter la masse à l’innovation permise par les matériels plus récents. Pour la France, la conservation du VAB (matériel emblématique et connu de tous les militaires français, y compris nos réservistes) est une piste intéressante dans ce sens.


Saisir la réalité d’une opération d’envergure

Pour l’armée de Terre, le retour de la guerre en Europe doit se traduire par des moyens à la hauteur de la réalité de la menace. Dans le cadre de son ambition 2030, la SIMMT s’est fixé l’objectif d’une « industrie prête à la guerre ». Cela passe par une coordination des capacités industrielles au niveau ministériel et une contractualisation des évolutions nécessaires au soutien d’une opération d’envergure. Mais surtout, il s’agit de reconstituer des stocks étatiques au plus vite. En contexte budgétaire tendu, l’armée de Terre arbitre depuis des années entre l’activité des forces terrestres (le potentiel d’entraînement soutenable) et la constitution de stocks logistiques.

L’engagement opérationnel expéditionnaire mené depuis des décennies déterminait jusqu’à présent la priorité de l’activité. Après les récents désengagements militaires d’Afrique et l’affirmation d’une ambition HEM comme nation-cadre, l’armée de Terre doit s’adapter afin d’assurer une transition du modèle de l’opération expéditionnaire vers une logique de confrontation entre puissances étatiques. Ce changement d’échelle des menaces impose une anticipation, notamment logistique, ce qui nécessite des ressources financières plus élevées sur le temps long pour garantir le respect du contrat opérationnel fixé aux forces terrestres.

En raison de décennies de fragilisation de l’industrie française, l’épaisseur logistique de l’armée de Terre ne pourra être reconstituée qu’à force d’efforts s’inscrivant dans la durée, tandis que, parallèlement, les citoyens français doivent être davantage sensibilisés sur l’attractivité d’un secteur économique en pointe et dont la performance est reconnue à travers le monde.


Notes de bas de page : 

1 DGA – Développer la BITD française et européenne : https://www.defense.gouv.fr/dga/nos-missions/developper-bitd-francaise-europeenne
2 Chaire EcoDef de l’IHEDN : Impact économique de la défense (27/05/2020) : Impact économique de la défense – Chaire Économie de défense – IHEDN (ecodef-ihedn.fr).
3 Partie normative de la LPM : réquisitions ; BITD (note n°0001D22013106 ARM/SGA/DAJ du 21/07/2022).
4 NDLR : cette législation est associée au « Defense Production Act » établi en pleine guerre froide en 1950 et a été amendée pour la dernière fois en 2014. Elle est actuellement en cours de révision au sein du Bureau of Industry and Security du Département du Commerce >>> https://www.bis.doc.gov/index.php/other-areas/strategic-industries-and-economic-security-sies/defense-priorities-a-allocations-system-program-dpas ; https://www.bis.doc.gov/index.php/documents/federal-register-notices-1/3446-clarif-and-updates-dpas-proposed-ruleaj15-as-pub-ofr-272024/file

 

Photo : contrôle des stocks de missiles moyenne portée au dépôt de munitions du camp de Cincu en Roumanie dans le cadre de la mission AIGLE © CABCEMACOM (photo diffusée en ligne le 30 mai 2023 >>> https://www.defense.gouv.fr/terre/actualites/roumanie-service-interarmees-munitions-au-coeur-du-soutien-operationnel)

La maintenance dans une opération d’envergure, enjeu majeur de l’économie de guerre (II de III)

La maintenance dans une opération d’envergure, enjeu majeur de l’économie de guerre (II de III)



Par le Chef d’escadron Thomas Arnal, officier de l’arme du Matériel et Ecole de guerre – Terre –  Partie II :  de la prise de conscience au changement de paradigme

Pour participer au développement de l’économie de guerre, le MCO-T a déjà identifié des blocages structurels et bénéficie de premières actions prometteuses grâce à un volontarisme législatif et à l’innovation technologique.

 

Un changement de paradigme qui s’impose

La volonté politique d’entrer en économie de guerre est freinée par les difficultés structurelles de la BITD : frilosité des investisseurs et défaut d’attractivité du secteur. En mai 2023, une commission sénatoriale a publié un rapport d’information sur ce sujet1. Les entreprises du secteur défense y déplorent un accès au financement bancaire compliqué, mais difficilement quantifiable. Techniquement, les banques n’ont pas d’obligation à motiver un refus. Si une justification est apportée, celle-ci repose souvent sur des arguments financiers (structure bilancielle de l’entreprise, viabilité ou rentabilité du projet, etc.). Pour autant, il faut concéder que les cycles industriels sont aujourd’hui difficilement compatibles avec l’horizon financier du capital-investissement. Certains groupes bancaires (HSBC par exemple) rejettent purement et simplement le domaine de la défense de leur politique d’investissement. Dans le secteur public, la banque européenne d’investissement (BEI) ne finance plus les munitions, matériels et infrastructures militaires. Une décision qui ne découle ni du droit primaire, ni du droit dérivé, ni même des statuts de la BEI.

Ces difficultés touchent principalement les petites et moyennes entreprises (PME), ainsi que les opérations d’export. Cette frilosité s’étend par ricochet à d’autres secteurs, tels les assureurs refusant de couvrir certaines entreprises, les développeurs d’assurer la maintenance de sites internet, ou encore les bailleurs immobiliers de louer des bureaux. Ces situations marginales semblent révéler une tendance de fond, qui assimile industrie de défense et activités controversées par deux aspects : la conformité et la réputation. La multiplication de règles et normes dans le domaine de la défense – sans compter les exigences environnementales et sociales – poussent les financeurs à la « sur-conformité » et au refus. Le risque lié à la réputation pousse par ailleurs les investisseurs à imposer une politique restrictive vis-à-vis des entreprises de défense. Le déclin d’attractivité engendré a fragilisé le consensus de l’utilité sociale d’une BITD robuste et souveraine, tout en repoussant les jeunes talents français vers d’autres secteurs ou vers l’étranger.

Les rapporteurs de l’information parlementaire proposent quatre axes pour réduire ces difficultés structurelles :

  • établir un diagnostic (bilans annuels à organiser) ;
  • encourager les banques à s’engager au côté de la BITD, notamment en imposant la justification des refus de financement, en développant la communication interne sur l’importance du secteur défense pour l’économie nationale, ou encore en allégeant les procédures de vérification ;
  • développer le volontarisme au niveau européen par la révision de la « doctrine » de la BEI, la vigilance interministérielle sur les projets de textes potentiellement contraignants pour la BITD, etc.
  • renforcer l’accompagnement public des entreprises de la BITD avec le référencement des surtranspositions de textes européens contraignantes2, l’accompagnement financier pour certains marchés, la constitution de fonds d’investissement privés dans le secteur de la défense, voire la création de référents défense régionaux dans le secteur bancaire.

 

Le dépoussiérage en cours du concept de réquisition

La réquisition militaire est liée au concept d’économie de guerre. Le code de la défense précise « qu’en cas de mobilisation de l’armée de terre, le ministre de la défense détermine la date à laquelle commence, l’obligation de fournir les prestations nécessaires pour suppléer à l’insuffisance des moyens ordinaires de l’armée de terre »3. Ces réquisitions sont limitées par le cadre militaire et ne peuvent être ordonnées qu’à défaut de tout autre moyen adéquat disponible.

En juillet 2022, la direction des affaires juridiques (DAJ) du secrétariat général pour l’administration (SGA) avait proposé la rénovation du régime de réquisitions, qui date de 1959, d’où le décret sur le sujet adopté en mars dernier. En effet, les conditions de mise en œuvre peuvent gagner en simplification (réécriture synthétique), en proportionnalité (subsidiarité entre réquisition et commande publique), en clarification (cas d’usage : menace pour la sécurité nationale ou pour ses intérêts) et en portée (biens, services ou personnes concernés, neutralisation des droits de grève et de retrait, principe de rétribution après une réquisition)4.

Pour le MCO-T, la réquisition peut concerner du personnel, des matériels, des infrastructures, de l’outillage ou des moyens de stockage pour combler les manques patrimoniaux (pour équiper la division HEM, renforcer le territoire national et compléter les moyens de la BITD). Un dispositif d’intelligence économique renforcé permettrait la cartographie des réquisitions potentielles en cas de crise. Actuellement, il s’agit d’une surveillance conjointe SIMMT/DGA de la BITD et de leurs principaux fournisseurs. Pour la DGA, cette tâche est dévolue au service des affaires industrielles et de l’intelligence économique (S2IE). A la lumière du manque de profondeur logistique constaté, l’actualisation du concept de réquisition va donc dans le sens de l’économie de guerre.

 

Les travaux de la SIMMT avec la BITD

Le MCO constitue une source importante de financement et d’activités sur le long terme pour la BITD. La stratégie de soutien d’un programme d’armement définit un effort dans la durée pour l’industriel. Ainsi, la constitution de stocks de rechanges par la commande publique participe au renforcement des entreprises, permet l’entretien de compétences industrielles et contribue à la résilience industrielle française. L’absence de commandes régulières d’un rechange peut à l’inverse conduire à son obsolescence par perte de savoir-faire, de stock ou de matières premières.

La crise du COVID a permis de prendre conscience des faiblesses industrielles de la France. Cet épisode a révélé les fragilités de nos entreprises : tensions et perte de compétences faute de commandes, concurrence extra-européenne agressive avec la question de l’extraterritorialité du droit américain par exemple (la norme ITAR – International Traffic in Arms Regulation – autorisant Washington à s’opposer à l’exportation d’un système d’armes contenant au moins un composant américain), cyber-menaces, besoins d’une cartographie détaillée des fournisseurs et importance des stocks5. Cependant, la BITD terrestre a pu être partiellement renforcée par des commandes massives de pièces de rechange par la SIMMT, qui a ensuite imposé un droit de regard sur le dimensionnement des chaînes d’approvisionnement des entreprises6.

Au-delà de ces travaux d’intelligence économique, d’autres actions ont été initiées. La SIMMT se tourne vers l’innovation technologique pour optimiser les activités de maintenance et limiter la dépendance à des stocks indisponibles immédiatement. Parmi les pistes prometteuses, la maintenance prédictive, c’est-à-dire l’analyse par une intelligence artificielle des données collectées, permet de suivre l’évolution de l’état du matériel et de détecter pannes et casses avant qu’elles ne surviennent. Mais aussi, l’impression 3D : la SIMMT a ainsi développé avec la DGA la fabrication additive de rechanges en polymère. L’impression métallique, déjà opérationnelle dans d’autres forces armées alliées, permet un changement d’échelle, tout en constituant un atout pour limiter les empreintes logistique et écologique d’une force déployée. La rémunération de la propriété intellectuelle des entreprises est prise en compte, notamment par un système de block chain.

Dans le domaine des ressources humaines, la création de la réserve industrielle de défense (RID) en octobre 2023 va également dans le sens de l’économie de guerre. Ce système permet de renforcer l’industrie d’armement en cas de crise majeure. L’objectif fixé pour 2030 est d’atteindre trois mille RID. Ces réservistes ont vocation à être déployés au sein des entreprises de la BITD, du service industriel de l’aéronautique (SIAé), du service de la maintenance industrielle terrestre (SMITer), du service logistique de la marine (SLM) ou du service interarmées des munitions (SIMu).


Notes de bas de page : 

 1 Voir : Renseignement et prospective : garder un temps d’avance, conserver une industrie de défense solide et innovante >>> https://www.senat.fr/rap/r22-637/r22-637-syn.pdf.
NDLR : « [On] parle (…) de « surtransposition » pour désigner [un] différentiel proprement national à la règle européenne, différentiel susceptible de créer une distorsion concurrentielle qui porte préjudice aux opérateurs économiques français » >>> Voir sur ce sujet le rapport d’information n° 614 (2017-2018) du Sénat déposé le 28 juin 2018 et intitulé « La surtransposition du droit européen en droit français : un frein pour la compétitivité des entreprises » (https://www.senat.fr/rap/r17-614/r17-6141.html)
3 Article L2221-2 du Code de la défense.
4 Partie normative de la LPM : réquisitions ; BITD (note n°0001D22013106 ARM/SGA/DAJ du 21/07/2022).
5
Article OPEX360.com du 18/11/2020 : https://www.opex360.com/2020/11/18/le-terme-de-stock-est-aujourdhui-presque-un-gros-mot-deplore-le-chef-detat-major-de-larmee-de-terre/
6 Rapport d’information de la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée Nationale sur la préparation à la haute intensité du 17/02/2022 : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion_def/l15b5054_rapport-information#

 

Photo : innovation technologique du MCO-Terre Lab avec l’introduction de la réalité augmentée depuis 2020 dans les 6e et 8e Régiments du matériel avec le système Dedal et les lunettes Holo-Dedal © armée de Terre, photo diffusée en ligne le 24 mai 2022 (https://www.defense.gouv.fr/terre/linnovation-a-lheure-numerisation/au-service-maintenance)

La maintenance dans une opération d’envergure, enjeu majeur de l’économie de guerre (I de III)

La maintenance dans une opération d’envergure, enjeu majeur de l’économie de guerre (I de III)

Par le Chef d’escadron Thomas Arnal – OPS – publié le 15 avril 2024

https://operationnels.com/2024/04/15/la-maintenance-dans-une-operation-denvergure-enjeu-majeur-de-leconomie-de-guerre-i-de-iii/

Par le Chef d’escadron Thomas Arnal, officier de l’arme du Matériel et Ecole de guerre – Terre –  Partie I :

 

Le constat d’un manque de profondeur logistique

Le commandant Thomas Arnal est saint-cyrien (promotion CES Francoville) et officier de l’arme du Matériel. Il a servi successivement au 3e régiment du Matériel, au 2e régiment de parachutistes d’Infanterie de marine, au 8e puis au 6e régiment du Matériel. Il a été projeté au Tchad, au Mali et au Liban. Affecté en 2020 au centre opérationnel de la Structure Intégrée du Maintien en condition opérationnelle des Matériels Terrestres (SIMMT), il a développé les échanges et la coordination avec les industriels de défense pour le soutien MCO-T des opérations et de l’hypothèse d’un engagement majeur.

Dans cet article rédigé dans le cadre de la formation qu’il effectue actuellement au sein de l’Ecole de guerre-Terre et que nous diffusons en trois parties, il décrit la fragilisation du niveau de soutien nécessaire à la conduite d’une opération d’envergure contre un ennemi à parité et le « manque d’épaisseur logistique de l’armée de Terre ». Ainsi, « la maintenance des matériels militaires en constitue un des aspects essentiels pour hausser la disponibilité des équipements majeurs et régénérer pour pallier l’attrition. Composante essentielle d’une économie de guerre, la constitution de stocks de pièces et l’anticipation des montées en cadence doivent être initiées dès maintenant et soutenues dans la durée par un effort financier à la hauteur de l’enjeu. »

Une stratégie que le gouvernement français a commencé à mettre en œuvre sous l’appellation générale d’« économie de guerre » depuis près de deux ans – avec en particulier le décret récemment adopté « relatif à la sécurité des approvisionnements des forces armées et des formations rattachées »1 – et dont les initiatives commencent à porter leurs fruits, si l’on en juge par exemple par le triplement des cadences de production chez Nexter (pour le canon Caesar) ou Dassault Aviation (pour le Rafale).

De nombreux événements récents ont mis en exergue le manque de profondeur logistique de l’armée de Terre, qu’il s’agisse de la crise du COVID, de l’exercice de montée en puissance de l’armée de Terre (MEPAT) organisé en mai 2022, de notre projection de force en Roumanie, de l’exercice ORION 2023, ou encore des désengagements successifs du continent africain. Le domaine du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (MCO-T) – que l’on peut définir comme étant une sous-fonction logistique ayant pour but la conservation ou le rétablissement du fonctionnement nominal d’un matériel et incluant l’entretien et la réparation des matériels, l’approvisionnement, la livraison et la distribution des rechanges, la récupération et l’évacuation des chutes tactiques et techniques amies, ainsi que l’élimination de certains matériels – est de fait particulièrement concerné.

Dans le cadre d’une opération d’envergure, il s’agit de relever l’ambition opérationnelle fixée pour 2027 : la constitution, la projection et l’entretien dans la durée d’une division (avec ses appuis et soutiens) en trente jours. Pour rappel, l’opération d’envergure, encore récemment décrite comme hypothèse d’engagement majeur (HEM), définit un engagement terrestre volumineux (niveau division, voire au-delà) en coalition internationale face à un ennemi à parité. Un tel scénario est caractérisé par une forte attrition (matérielle et humaine) lors des phases de combat de haute intensité.

Après des décennies de réductions budgétaires et de politique logistique de flux plutôt que de stock, il semble difficile sur le court terme de satisfaire cette ambition. Pour autant, les crises multiples auxquelles le pays est confronté ont fait réémerger le concept d’économie de guerre. En juin 2022, le Président Macron expliquait que la France et l’Union européenne étaient entrées dans « une économie de guerre dans laquelle (…) nous allons durablement devoir nous organiser »2. Cette déclaration appelait au renforcement de l’industrie de défense tant française qu’européenne au regard des besoins militaires accrus mis en lumière par la guerre russo-ukrainienne. Cette prise de conscience politique fait écho au constat logistique fait par l’armée de Terre.

L’économie de guerre désigne une situation dans laquelle l’appareil productif national est dédié en priorité aux besoins de la guerre, possiblement par prélèvement autoritaire (réquisitions, livraisons obligatoires, etc.). Dans ce contexte, le MCO-T est déterminant, car il permet d’agir sur l’endurance industrielle, indispensable au soutien d’une opération d’envergure sur la durée.

 

I – Le constat d’un manque de profondeur logistique

Le MCO-T fait face à trois défis : générer la force, la soutenir et la régénérer :

• La génération de force implique de nombreuses actions : identifier les matériels à projeter, les affecter aux unités concernées, remonter la disponibilité des parcs, constituer les stocks de pièces de rechange et éventuellement une réserve de maintenance, regrouper les ressources, contrôler/réparer les matériels avant leur projection, désigner et équiper les maintenanciers projetés sur le théâtre (outillage technique notamment).

• Le soutien de l’engagement consiste à réparer les matériels indisponibles (pannes techniques et destructions par l’ennemi) dans les différentes zones d’opération. Cela concerne également le remplacement des matériels endommagés par des matériels en bon état en provenance de la zone arrière (réserve de maintenance de théâtre).

• La régénération de la force est un défi industriel national qui se joue principalement sur le territoire national. Il englobe les actions de production, de réparation lourde et d’acheminements (boucles arrière et avant). Elle concerne des acteurs tant étatiques que privés et relève directement de la Base industrielle technologique de défense (BITD) et de l’économie de guerre.

Ces trois défis se fondent sur plusieurs constats : le retour d’expérience (RETEX) des exercices récents MEPAT 2022 et ORION 2023, ainsi que sur l’écart entre la facture logistique d’une « division engagement majeur » et l’état réel des stocks détenus.

 

MEPAT : le retour d’une véritable planification de la montée en puissance

L’Etat-major de l’armée de Terre (EMAT) a organisé en mai 2022 une simulation de la manœuvre de montée en puissance de l’armée de Terre (MEPAT) pour répondre au défi d’un engagement majeur. Le scénario faisait de la France la nation cadre d’une coalition. Le RETEX démontre un défaut de profondeur logistique, accentué par des fragilités capacitaires. Cela se traduit par une armée de Terre à la fois limitée par un format strictement adapté à la gestion de crise, par des stratégies d’externalisation notamment en matière d’acheminement stratégique, (c’est-à-dire l’ensemble des actions de transport entre le territoire national et le théâtre d’opération) et la concurrence économique internationale en situation de crise (rareté des ressources et prédations).

L’enjeu principal de la MEPAT est la réactivité. L’armée de Terre doit disposer au bon moment des bonnes ressources en quantité suffisante, ce qui implique anticipation et souplesse. Pour le MCO-T, les stratégies de soutien actuelles semblent trop rigides pour remplir cet objectif (format, délais, volume financier alloué). Les procédures dérogatoires et les contrats de soutien doivent donc gagner en souplesse. Les mécanismes actuels de mobilisation et de réquisition ne sont en outre pas assez performants. Pourtant, le recours impératif à des moyens extérieurs est l’un des premiers enseignements du wargame.

Enfin, la MEPAT est subordonnée à la remontée de la disponibilité technique des matériels. Cela implique une remontée en puissance préalable de la base industrielle et technologique de défense (BITD). Mais elle ne vit pas au même rythme que l’armée de Terre. La réactivité est donc un des enjeux de l’économie de guerre. Il s’agit de constituer des stocks préalables et de réaliser des réquisitions planifiées. Cette anticipation ne doit pas attendre le « top départ » d’une montée en puissance à six mois au déclenchement d’une crise.

C’est pourquoi le nouveau référentiel opérationnel (NRO) fixé par la loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030 établit un délai de trente jours pour déployer une division à horizon 2027. L’armée de Terre doit donc disposer de leviers successifs pour chaque étape de ce scénario. Chaque levier serait caractérisé par des budgets dédiés, des commandes industrielles, des réquisitions de moyens privés et par l’abaissement de blocages juridiques ou administratifs propres au « temps de paix ». Le travail du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) sur les stades de défense (STADEF) va dans ce sens.

 

ORION 2023 : un rééquilibrage entre soutien et besoins opérationnels à revisiter

Concrétisation d’un entraînement d’envergure, l’exercice ORION fut l’un des évènements majeurs de 2023 pour l’armée de Terre. Il visait plusieurs objectifs : entraînement des forces terrestres, intégration de nations alliées, démonstration capacitaire dissuasive et établissement d’une « photographie instantanée » de nos capacités opérationnelles. S’il a confirmé la pertinence du modèle complet de l’armée de Terre, ORION en a aussi illustré certaines insuffisances capacitaires. Ces fragilités entraînent une autonomie limitée et une dépendance envers les nations alliées. Elles sont à même de fragiliser l’ambition nationale d’assumer le rôle de cadre dans un engagement en coalition.

ORION a également démontré les limites de la politique des parcs et des stratégies actuelles de soutien des matériels terrestres. La logique de densification des parcs régimentaires initiée en 2020 va dans le sens de l’ambition haute intensité. Le choix français d’une armée de Terre « échantillonnaire » permet en théorie de disposer d’une base de départ polyvalente avant une phase de massification par montée en puissance (sous réserve de délais, de financement et d’atouts industriels préalables).

Pour autant, les matériels majeurs du segment de décision (VBCI et char LECLERC) sont contraints par des impératifs liés aux marchés de soutien en service (MSS), ce qui implique le maintien d’un parc d’entraînement (PE) conséquent. Le principe du PE est de fournir aux unités en préparation opérationnelle dans les camps de manœuvre des matériels majeurs dédiés afin de conserver le potentiel de leurs propres matériels régimentaires. Ces marchés s’avèrent rigides dans l’anticipation de la consommation annuelle.

Pour l’armée de Terre, il s’agit donc de revoir ces stratégies et de définir l’équilibre entre socle de soutien industriel, niveaux des stocks et évolution du besoin en potentiels. Illustration de la limitation actuelle des ressources, la phase 4 d’ORION a non seulement vu le déploiement de vingt-trois XL et quarante-cinq VBCI, soit quatre fois moins que l’effectif théorique d’une division blindée, mais il faut garder à l’esprit que ledit déploiement des XL pendant deux semaines a à lui-seul représenté 40% des heures de potentiel annuel prévues en métropole par la Loi de programmation militaire (trois mille deux-cent-vingt-cinq heures sur huit mille).

Enfin, ORION a souligné l’impératif de consolider les données logistiques en haute intensité. Les limites de l’exercice n’ont pas permis l’emploi massif des ressources « consommables » d’une division (notamment les pièces de rechange pour le MCO-T). Pour autant, cet exercice a confirmé la nécessité de réévaluer les lois de consommation, ainsi que de constituer une base de données unique, partagée et accessible. Celle-ci est primordiale pour la constitution de stocks logistiques adaptés à une opération d’envergure.

 

L’état des stocks face à la « facture logistique » d’une division HEM

En avril 2023, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) a mené un exercice de planification avec les acteurs étatiques et privés (notamment les entreprises ARQUUS, NEXTER, THALES et NSE) du MCO-T. Il s’agissait d’une réflexion commune sur la montée en puissance industrielle nécessaire à un conflit de haute intensité, sur le scénario de la MEPAT.

Ces travaux mettent en lumière des stocks limités à la gestion de crise et difficiles à reconstituer. Sans entrer dans le détail de données classifiées, les taux de réalisation des stocks nécessaires à une division à une opération d’envergure, donc calculés à partir du contrat opérationnel fixé à l’armée de Terre, demeurent faibles. La reconstitution de stocks pour le MCO-T représente un effort élevé sur les plans budgétaires et logistiques. Cet investissement permettrait pourtant d’augmenter la capacité de production de la BITD et de gagner des délais sur la MEPAT en cas d’opération d’envergure. Ces besoins demeurent semble-t-il sous financés à ce stade par la LPM 2024-2030.

Au-delà du coût, les délais de production semblent également incompatibles avec l’ambition opérationnelle fixée pour 2027. Dans l’éventualité d’un déblocage en urgence de budgets dédiés, les délais de constitution des stocks s’avèreraient à ce jour inadaptés à l’objectif de projection en trente jours. Les délais de constitution de lots de rechanges de projection (LRP) par les industriels se comptent en effet en mois, un minimum de deux années étant généralement de mise et ce, sans compter avec les aléas dûs aux obsolescences de rechanges ou aux éventuels problèmes d’approvisionnement côté fournisseurs.

La BITD terrestre, actuellement structurée pour répondre aux justes besoins de la situation opérationnelle de référence (SOR), ne semble pas en mesure de soutenir une opération d’envergure, et encore moins dans la durée. Ce constat posé, il est intéressant d’étudier les premières mesures concrètes permettant potentiellement de dépasser ce blocage et de façonner une industrie de défense « prête à la guerre ».


Notes de bas de page :

1 Décret n° 2024-278 du 28 mars 2024 >>> https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000049339435

2 Voir par exemple : article du Monde du 13/06/2022 : « Economie de guerre » : Emmanuel Macron demande une réévaluation de la loi de programmation militaire.

Photo © formation des rames pendant Orion 2023, armée de Terre, 16 février 2023 (https://www.defense.gouv.fr/operations/actualites/orion-2023-montee-puissance-unites.

Le régiment médical reçoit ses premiers Griffon SAN

Le régiment médical reçoit ses premiers Griffon SAN

 

Deux Griffon SAN sont arrivés début avril au régiment médical de La Valbonne (Ain), actant l’entrée dans l’ère SCORPION d’une unité de l’armée de Terre unique en son genre.

Configurés pour l’évacuation médicale de l’avant, ces premiers Griffon « prennent la relève des mythiques VAB SAN », annonçait le RMED le 4 avril. Plus manoeuvrable, plus confortable, le Griffon SAN offre également une capacité de transport augmentée, une meilleure ergonomie et des moyens de monitoring et de médicalisation lourde, indique l’armée de Terre. 

Dotée d’une table de chargement mobile, la tranche arrière permet l’emport d’un blessé lourd intubé et d’un second blessé sur brancard, ou de quatre blessés légers sur brancard ou encore de deux blessés sur brancard et trois blessés assis. Hormis son matériel médical, la version SAN dispose des équipements communs à l’ensemble du parc de Griffon, dont un tourelleau téléopéré et la suite de systèmes de communication et de protection propres à l’environnement SCORPION. 

Bien que subordonné au commandement de la logistique des forces (COM LOG), le RMED conserve un lien direct avec un Service de santé des armées (SSA) pour lequel il arme et déploie les unités médicales opérationnelles (UMO). Ce SSA percevra 196 Griffon SAN d’ici à 2032 pour équiper ses équipes paramédicales et escouades d’évacuation sanitaire. De quoi entrevoir le retrait des derniers VAB SAN en 2029.

Le Griffon SAN sera à terme complété d’une version sanitaire du Serval véhicule de patrouille blindé. Le premier était qualifié en septembre 2022, le second un an plus tard. « Tardif par rapport au reste du programme SCORPION », le déploiement de ces matériels mériterait d’être accéléré, estimait l’an dernier le sénateur Dominique de Legge dans un rapport d’information sur le SSA. 

Cette accélération du renforcement de la composante terrestre du soutien médical « est d’autant plus indispensable qu’elle constitue la modalité préférentielle d’évacuation dans un contexte de haute intensité », relevait alors le sénateur LR. 

Crédits image : RMED

Au Sahel, opération rime de nouveau avec externalisation

Au Sahel, opération rime de nouveau avec externalisation


Le ministère des Armées cherche à doter ses forces présentes au Tchad d’une capacité de récupération et d’évacuation médicale héliportée, lancement d’une consultation à la clef. 

Un millier de militaires français sont toujours à pied d’oeuvre au Sahel, tous basés au Tchad après les retraits successifs du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Un contingent aux moyens aériens limités et auprès duquel sera donc peut-être affrété un hélicoptère chargé de conduire des missions de récupération de personnel isolé en zone permissive et d’évacuation médicale (MEDEVAC).

Les besoins exprimés ? Une aptitude à opérer dans un rayon de 800 km à vide ou de 400 km avec une charge de 1 tonne. De quoi, dans le premier cas, couvrir l’essentiel d’un pays grand comme deux fois la France métropolitaine au départ de N’Djamena. Mais aussi un appui disponible 24/7 pour une alerte fixée à une heure, délai éventuellement réduit à 30 minute sur décision de la force. L’appareil devra pouvoir opérer à partir de terrains sommaires non reconnus. 

Conduite par le Service du commissariat des armées (SCA), la procédure n’en est qu’à une phase de consultation mais pourrait déboucher sur la notification d’un accord-cadre au troisième trimestre 2024. Montant maximal estimé de l’opération : plus de 18 M€ par an pour 800 heures de vol, ou 127 M€ pour les sept années que pourrait durer le marché. 

Ce type de service, l’Agence européenne de défense (AED) en propose un similaire depuis 2019. La Belgique, l’Allemagne, l’Autriche, la République tchèque, les Pays-Bas et la Facilité européenne de paix (FEP) sont bénéficiaires du dernier contrat AIRMEDEVAC signé l’an dernier pour 140 M€, mais pas la France. Les deux premiers y ont eu recours à une centaine de reprise entre 2020 et 2023 lors de leurs déploiements au Niger. 

Moins médiatisée que sous l’ère Barkhane, la présence française au Sahel se poursuit au travers du partenariat militaire opérationnel construit avec l’armée tchadienne. Début mars, les FFS et leurs partenaires locaux ont conduit l’exercice BODOLEX, manoeuvre entamée avec la projection par air d’un poste de commandement tactique et d’un sous-groupement tactique interarmes dans la zone de Faya-Lagueau, dans le nord du pays. 

Crédits image : EMACOM

Le décret relatif à la sécurité des approvisionnements des forces armées publié au JO

Le décret relatif à la sécurité des approvisionnements des forces armées publié au JO

 

[République_française_Ordre_de_réquisition_[...]_btv1b53074649q_1.jpeg

 

par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 30 mars 2024

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2024/03/29/le-decret-relatif-a-la-securite-des-approvisionnements-des-f-24524.html


Le décret n° 2024-278 du 28 mars 2024 relatif à la sécurité des approvisionnements des forces armées et des formations rattachées a été publié vendredi au Journal officiel.

Il fait suite aux déclaration du ministre des Armées, mardi. Voir mon post. Sa parution rapide témoigne de la détermination du ministre pour pouvoir mettre en oeuvre les mesure de réquisition annoncées.

Ce décret détermine les conditions dans lesquelles l’autorité administrative peut ordonner:
– d’une part, la constitution d’un stock minimal de matières, de composants, de pièces de rechange ou de produits semi-finis stratégiques par des entreprises titulaires d’une autorisation de fabrication et de commerce de matériels de guerre, d’armes, de munitions et de leurs éléments des catégories A et B
– et, d’autre part, la réalisation de certaines prestations ou obligations par priorité sur tout autre engagement contractuel par des entreprises ayant conclu avec elle un marché de défense et de sécurité, par celles ayant passé un contrat avec une organisation internationale ou avec un Etat tiers ou par leurs sous-contractants de tous niveaux.

L’article 1 de ce décret s’articule autour de deux  sections:
section 1: Constitution de stocks minimaux de matières, de composants, de pièces de rechange ou de produits semi-finis stratégiques
Section 2:  Priorisation de prestations ou d’obligations sur tout autre engagement contractuel

Les réquisitions, permises par la Loi de programmation militaire (LPM) adoptée à l’automne, peuvent aller de “personnels, de stocks ou d’outils de production” pour les consacrer à la production de matériels militaires, a rappelé le ministre, estimant que c’était “l’outil le plus dur de notre arsenal juridique”.

Ce n’est pas l’outil prioritaire au moment où je vous parle, mais je vous dis que ça existe“, a-t-il précisé. Sébastien Lecornu envisage, en revanche, “dans les toutes prochaines semaines” d’imposer à certains industriels des niveaux minimaux de stocks, de manière à produire plus rapidement, ou d’exiger qu’ils accordent la priorité à la commande militaire face aux besoins civils.

L’armée française n’est qu’un tigre de papier sans stocks de munitions

L’armée française n’est qu’un tigre de papier sans stocks de munitions

OPINION – La guerre en Ukraine démontre chaque jour que l’accès aux munitions et missiles représente la condition essentielle pour tenir face à un adversaire dans un conflit de haute intensité. Sans cela, la bravoure des soldats pourrait s’avérer vaine au bout de quelques semaines, voire de quelques jours… Par le groupe de réflexions Mars.

Entre les objectifs du discours sur l'économie de guerre et la réalité des engagements budgétaires, il faut être clair : le compte n'y est pas - et de très loin !
Entre les objectifs du discours sur l’économie de guerre et la réalité des engagements budgétaires, il faut être clair : le compte n’y est pas – et de très loin ! (Crédits : Nexter)

La guerre ne se gagne pas avec des mots et des postures, aussi brillantes soient-elles. Elle se gagne avec les matériels et les munitions dont disposent nos soldats. Entre les objectifs du discours sur l’économie de guerre et la réalité des engagements budgétaires, il faut être clair : le compte n’y est pas – et de très loin ! Pourtant, cette situation n’est pas nouvelle. Déjà lorsque les troupes françaises ont été déployées en Afghanistan il y a plus d’une décennie, nos soldats tiraient le diable par la queue faute de stocks adéquats.

La situation vécue aujourd’hui par les armées ukrainiennes devrait pourtant produire un sursaut. Faut-il rappeler que l’artillerie ukrainienne consomme chaque jour un nombre d’obus correspondant à ce que notre industrie peut fabriquer en un mois ? Depuis trois décennies, les armées ont vu leurs stocks de munitions et de missiles se réduire sans cesse pour ne conserver qu’un niveau minimal et aboutir à une « armée bonzaï ». Cela ne peut pas fonctionner : dès que nos soldats sont engagés en opération, l’absence de munitions met rapidement en danger nos soldats qui n’ont plus les moyens nécessaires pour conduire leurs missions, voire pour se protéger des forces adverses.

Stocks échantillonnaires

Le constat de stocks échantillonnaires dépasse les frontières de l’Hexagone. Le général Richard Barrons, ancien chef d’État-major britannique, déclarait en février 2023 qu’après des années de réduction des livraisons, « pour certains types d’armes clés, l’armée serait à court de munitions après une après-midi chargée ». Il estimait que le Royaume-Uni disposait de stocks permettant uniquement de soutenir un engagement de haute intensité pendant une semaine environ.

Le principe de stricte suffisante fonctionne bien dans la dissuasion nucléaire mais il est trompeur, voire criminel pour les munitions et les missiles. La dissuasion fonctionne sur le principe de non-emploi, c’est-à-dire que l’existence de ces armes doit empêcher en soi une action de l’ennemi. Pour les munitions et les missiles, il est nécessaire d’engager ces armes face à l’adversaire pour le contraindre à revoir ses plans et lui imposer notre volonté. C’est pourquoi, dans les armes conventionnelles, la quantité est une qualité en soi.

Il est difficile de connaître l’état des stocks de munitions, car il s’agit d’une donnée classifiée, et donc de jauger la pertinence des stocks actuels. Toutefois, il est très probable que la France et ses principaux alliés soient dans une situation semblable à celle du Royaume-Uni compte tenu des commandes très réduites qui ont été passées au cours des dernières années. Une situation des plus préoccupantes…

Le stock vient avant le flux

Entre les objectifs du discours sur l’économie de guerre et la réalité des engagements budgétaires, il y a un grand écart évident. Imposer un changement de tempo à l’industrie, qui a fonctionné à rythme ralenti pendant des années, était nécessaire mais ce changement de cadence et de volume ne peut être efficace qu’en accroissant aussi la taille des stocks à pourvoir.

Il ne faut pas confondre la logique de flux et la logique de stocks. Certes, l’industrie a réussi à accroître ses cadences de production de manière somme toute rapide en quelques mois, mais cet effort peut être vain si les armées ne révisent pas les stocks dont elles doivent disposer. Du point de vue militaire, le stock vient avant le flux, car il permet d’encaisser le choc de la bataille. Et le flux est nécessaire pour maintenir le niveau des stocks de manière à préserver une capacité d’engagement permettant de contenir l’adversaire et, si possible, de le repousser.

Afin d’être capables de répondre à une menace majeure (la pierre d’angle de toute défense efficace et crédible), deux objectifs sont prioritaires : accroître les stocks de munitions et augmenter la capacité de production.Ces deux dimensions sont liées. Les commandes justifient un accroissement des capacités de production en augmentant les moyens de fabrication et en accroissant les achats intermédiaires. Une capacité de production plus importante permet de régénérer rapidement les stocks en cas de consommation accélérée ou inattendue.

Un changement de tempo de l’État

Le changement de tempo doit concerner l’État tout autant que l’industrie. It takes two to tango… Jean-Dominique Merchet soulignait le 22 février 2024 sur France Info que passer en économie de guerre, « cela veut dire des commandes. L’industriel ne va pas produire s’il n’a pas de commandes ». Ceci est en particulier vrai pour les PME et ETI qui n’ont pas une trésorerie aussi importante que les grands groupes qui, eux, dépendent des livraisons de leurs partenaires industriels pour être en mesure de répondre aux besoins des armées.

Rheinmetall va produire 700.000 obus en 2024 tous pays confondus, alors que la France peut en produire seulement 3.000 par mois (ce qui représente déjà un triplement de la production par rapport à 2022). Il n’y a pas là de miracle. En 2023, le groupe allemand a conclu un accord-cadre avec la Bundeswehr d’une valeur globale de 1,2 milliard d’euros d’ici à 2029. Ceci explique que Rheinmetall puisse investir 300 millions d’euros pour agrandir sa capacité de production à Unterlüß.

Le Royaume-Uni a passé des commandes de munitions à BAE Systems pour 430 millions de livres sterling en 2023, qui font partie d’un accord-cadre de 2,4 milliards sur 15 ans appelé Next Generation Munitions Solution. Pour Charles Woodburn, PDG de BAE Systems, ce partenariat stratégique de long terme avec le ministère britannique de la Défense « permettra d’augmenter considérablement la production et de maintenir une capacité souveraine vitale pour fournir des munitions de pointe » (obus de 155 mm et 30 mm et cartouches de 5,56 mm).

Même des pays plus petits s’engagent dans ces contrats pluriannuels. Ainsi, la Belgique négocie actuellement un contrat d’une valeur de 1,7 milliard d’euros avec FN Herstal, qui permettra d’ouvrir de nouvelles lignes de production.

De la constance

La constance est un élément important pour disposer des capacités industrielles adéquates. Le ministère des Armées examine en ce moment la réimplantation en France d’une capacité de production de munitions de petits calibres. Rappelons qu’un projet similaire piloté par Thales, NobelSport et Manurhin avait été envisagé sous Jean-Yves Le Drian en 2017. Si Florence Parly et Bercy n’avaient pas arrêté ce projet considéré non viable économiquement, la France serait aujourd’hui autonome en la matière. Pourtant, ces activités ont toujours été rentables en Allemagne, Scandinavie, Suisse, Italie, République tchèque… qui n’ont pas pour autant des besoins nationaux si différents de ceux de la France.

La constance est d’autant plus importante qu’accroître la production de munitions et de missiles prend du temps, plus encore s’il s’agit de développer de nouveaux moyens industriels. Grâce à son contrat-cadre au Royaume-Uni, BAE Systems va multiplier par huit sa capacité de production d’obus de 155 mm. Pour Woodburn, l’une des leçons du conflit en Ukraine est que, même si les entreprises peuvent accroître l’utilisation de l’outil industriel existant, « il y a des limites à ce que vous pouvez faire (…) Vous pouvez quasiment doubler votre débit en ajoutant des équipes et en exploitant votre capacité jusqu’à saturation, mais vous ne pouvez pas faire plus que doubler le volume de livraisons ».

Pour doubler ce volume, ajoute-t-il, cela prend du temps : il faut anticiper un délai de l’ordre de deux ans. Il s’agit ici d’une deuxième dimension essentielle : matériels, munitions et missiles sont des équipements complexes, requérant des multiples étapes de fabrication qui impliquent de nombreuses entreprises. Il n’est donc pas possible de commander à la dernière minute. L’enjeu porte notamment sur l’approvisionnement en matières premières et en produits élaborés de base comme les explosifs.

Cela veut dire que si l’État commande aujourd’hui, la filière industrielle ne sera pas capable de livrer le matériel correspondant avant plusieurs mois, voire plusieurs années. Même aux États-Unis, en dépit d’une industrie gigantesque comparée à celle de la France, les livraisons nécessitent des délais incompressibles en dépit de capacités industrielles prêtes à l’emploi. Pour produire un missile Patriot, il faut entre 35 et 40 mois.

Commandes pluriannuelles

Des commandes pluriannuelles (et non de vagues promesses qui n’engagent que ceux qui y croient) sont essentielles pour justifier des investissements massifs, longs à mettre en œuvre et nécessitant plusieurs années de production pour être amortis.Faute de commandes, serait-il raisonnable pour une entreprise d’accroître ses investissements et de produire par anticipation « juste au cas où » ?

Les stocks de munitions et de missiles ont bien entendu un coût. Au Royaume-Uni, le général Barrons estimait en 2023 dans une tribune publiée par le Sun que « reconstruire l’armée afin qu’elle puisse faire face à une attaque surprise russe coûterait 3 milliards de livres sterling en plus des dépenses déjà programmées chaque année pendant la décennie à venir ».

Un chiffre équivalent serait certainement nécessaire pour la France au-delà de ce que la LPM 2024-2030 prévoit déjà : 16 milliards d’euros (2,3 milliards par an). Ce montant peut sembler important, mais il faut garder en tête qu’un obus de 155 mm coûte 4.000 euros pièce, un obus intelligent type Bonus 30.000 euros, un missile Mistral 300.000 euros et un missile Aster 2 millions d’euros. Compte tenu des niveaux de consommation en situation de guerre, les budgets actuels sont nettement insuffisants et ne couvrent que les besoins déjà identifiés avant 2022.

Un tigre de papier

Cette approche par la dépense est d’ailleurs la raison qui a conduit les décideurs publics, quelle que soit leur couleur politique, à réduire progressivement les stocks. Cependant, tout coût doit être mis en parallèle avec les bénéfices attendus. Ils constituent une assurance pour la sécurité internationale de la France à deux niveaux.

D’une part, les armées doivent être en mesure d’assurer dans la durée une réponse militaire à une menace. Sans de tels stocks, une armée n’est qu’un tigre de papier dont la réalité apparaît rapidement après le choc de l’affrontement. Que peuvent faire les troupes les mieux aguerries sans les moyens de leurs actions ? La constitution de stocks à bon niveau est une nécessité pour garantir de pouvoir tenir face à l’adversaire, comme le montrent une fois encore les difficultés que rencontrent les troupes ukrainiennes ces dernières semaines.

D’autre part, les stocks de munitions et de missiles participent de la protection de la France en crédibilisant notre capacité à faire face à une agression. En effet, l’épaisseur des moyens a, en soi, un effet dissuasif car l’adversaire doit en tenir compte lorsqu’il estime ses chances de victoire. Qui s’y frotte s’y pique… À l’inverse, l’absence de stocks peut donner à l’adversaire le sentiment qu’il pourrait rapidement nous faire plier.

De ce fait, les stocks sont certes une dépense mais ils contribuent en même temps à la posture de défense en crédibilisant nos armées dans leur capacité à agir et à tenir. Ils représentent un investissement qui entre pleinement dans l’équation de notre sécurité internationale et doivent être considérés au-delà d’une évaluation purement budgétaire. Une conclusion s’impose : nous ne sommes pas prêts à faire face à un contexte de guerre majeure face à un pays doté de moyens militaires conséquents. En conséquence, la France doit accroître les stocks de munitions pour garantir sa sécurité.

                             —————————————————————–

* Le groupe Mars, constitué d’une trentaine de personnalités françaises issues d’horizons différents, des secteurs public et privé et du monde universitaire, se mobilise pour produire des analyses relatives aux enjeux concernant les intérêts stratégiques relatifs à l’industrie de défense et de sécurité et les choix technologiques et industriels qui sont à la base de la souveraineté de la France.

Faute de soutien, seulement 50% des chars Challenger 2 livrés à l’Ukraine sont actuellement opérationnels

Faute de soutien, seulement 50% des chars Challenger 2 livrés à l’Ukraine sont actuellement opérationnels

https://www.opex360.com/2024/03/11/faute-de-soutien-seulement-50-des-chars-challenger-2-livres-a-lukraine-sont-actuellement-operationnels/


A British Army Challenger 2 Main Battle Tank (MBT)

Pour le chancelier allemand, Olaf Scholz, il fallait agir en « étroite concertation » avec les États-Unis avant de prendre une décision à ce sujet. Mais l’annonce de la livraison d’engins blindés AMX-10 français à l’Ukraine fit bouger les lignes car, peu après le Royaume-Uni se décida à en faire autant avec 14 de ses chars Challenger 2 [soit l’équivalent d’un escadron]. Puis l’Allemagne céda à son tour et alla jusqu’à encourager la formation d’une « coalition Leopard » pour l’Ukraine. De même que les États-Unis, qui acceptèrent de céder 31 M1A1 Abrams SA [Situationnal Awareness].

Cependant, malgré une demande de Kiev, soutenue par certains experts des relations internationales, considérant sans doute le classement de l’institut Kiel comme l’alpha et l’oméga de l’aide militaire fournie à l’Ukraine, la France refusa de se séparer d’une partie de ses 200 chars Leclerc. À raison.

En effet, livrer des chars est une chose… Mais encore faut-il former leurs futurs équipages, tant au niveau technique que tactique, s’assurer de l’approvisionnement en munitions et prévoir le maintien en condition opérationnelle [MCO]. Évidemment, faire cohabiter plusieurs modèles de chars, même s’ils sont conformes aux normes de l’Otan, ne peut que compliquer l’équation.

Ainsi, l’aide militaire américaine [31 milliards de dollars] étant bloquée au Congrès, le soutien des M1A1 Abrams SA, dont au moins deux exemplaires ont été perdus, devient très compliqué. Celui des Leopard A1A5 et Leopard 2 l’est déjà, comme l’a fait savoir, le député allemand Sebastian Schäfer [Alliance 90/Les Verts]. En janvier, celui-ci a en effet déploré une pénurie de pièces de rechange et l’insuffisance de la formation des techniciens ukrainiens, dont les tentatives de réparations ont parfois entraîné des dommages supplémentaires aux chars qu’ils étaient censés remettre en état.

L’emploi des 14 Challenger 2 s’avère également compliqué. Déjà, contrairement à ses homologues occidentaux, le char britannique est doté d’un canon rayé de 120 mm [le L30A1], lequel n’est pas compatible avec les munitions de 120×570 mm au standard Otan.

Selon un reportage du quotidien britannique The Sun sur une unité de la 82e brigade d’assaut aéroportée de l’armée ukrainienne, le Challenger 2 est très précis, grâce à son canon mais surtout à son système de conduite de tir. En outre, il peut toucher une cible à une distance supérieure à 4 km.

Mais il présente quelques défauts, à commencer par un rapport poids/puissance inférieur de 30 % par rapport aux chars T-80 de conception soviétique. Affichant une masse de 64 tonnes, son groupe motopropulseur [GMP] de 1200 ch n’est pas assez puissant [à masse équivalente, le Leopard 2 et le M1A1 Abrams disposent chacun d’un GMP développant 1500 ch, ndlr]. Et cela joue sur sa mobilité. « Il reste coincé dans la boue parce qu’il est trop lourd », a confié un officier ukrainien au Sun.

Aussi, les Challenger 2 ukrainiens sont rarement utilisés pour du combat « char contre char »… En revanche, ils sont sollicités dès qu’il s’agit de détruire des casemates, de soutenir les « charges » de l’infanterie ou de « terrifier les troupes ennemies ».

« Le principal problème des Challenger 2 sur le champ de bataille est un commandant qui ne comprend pas pourquoi ils ont été conçus et qui ignorent leurs avantages et leurs inconvénients », a résumé le chef d’escadron « Kayfarick » dans les pages du Sun.

Lors de la contre-offensive lancée en juin 2023, un seul Challenger 2 a été perdu au combat. Touchés, deux autres ont pu être réparés. Cependant, le MCO peine à suivre, car sur les 14 exemplaires livrés, 7 sont encore opérationnels.

« Cinq sont tombés en panne et les pièces de rechange mettent parfois des mois pour arriver de Grande-Bretagne », a confié « Kayfarick ». Et d’insister : « Il faut beaucoup de temps pour obtenir des pièces de rechange. La logistique est très complexe, tant de notre côté que des Britanniques ». Les patins des chenilles, les composants de la tourelle, les systèmes de visée « ne durent pas longtemps », a-t-il déploré.

Outre les soucis logistiques, l’escadron ukrainien manque de techniciens qualifiés pour maintenir les Challenger 2 en bon état. Par ailleurs, afin de se prémunir des munitions téléopérées russes [le seul exemplaire perdu au combat a été victime d’un drone « Lancet »], les équipages ont installé, à leurs frais, des cages de protection sur deux de leurs chars.

A Coëtquidan, le 28 mars: “la maîtrise des flux, clé de la victoire ? Mouvements d’hommes, de matériels et d’informations dans les opérations militaires

A Coëtquidan, le 28 mars: “la maîtrise des flux, clé de la victoire ? Mouvements d’hommes, de matériels et d’informations dans les opérations militaires”

 

journée etudes saint cyr.jpg

 

par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 11 mars 2024

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2024/03/09/a-coetquidan-le-28-mars-la-maitrise-des-flux-cle-de-la-victo-24470.html


Le département d’histoire de l’Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (AMSCC) organise le 28 mars à l’Amphi Foch, à Coëtquidan, une journée d’études portant sur “la maîtrise des flux, clé de la victoire ? Mouvements d’hommes, de matériels et d’informations dans les opérations militaires, de la Grande Guerre à nos jours”.

C’est à cette question de la place des multiples types de flux dans les opérations militaires et, plus encore, à leur rôle dans le succès de ces opérations que cette journée d’étude voudrait s’intéresser. En dépassant une approche par “arme”, en l’inscrivant dans la longue durée des conflits qui se sont succédés depuis le début du XXe siècle, en combinant études historiques et RETEX d’officiers ayant servi en opérations au cours des 20 dernières années, il s’agira aussi de contribuer au renouvellement en cours des problématiques de l’histoire militaire. 

programme conf.jpg

Pratique:
Inscription/informations : JEFlux.AMSCC@gmail.com
Les personnes intéressées qui ne pourraient pas se rendre le 28 mars à l’Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (Morbihan) pourront suivre cette journée en visio-conférence.