Le patron de Wagner insulte les chefs de l’armée russe et menace de retirer ses forces
par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 5 mai 2023
https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/
Dans une vidéo mise en lignes par les services de communication de Concord, le patron de la SMP russe Wagner, Evguéni Prigojine, accuse l’état-major russe de ne pas fournir suffisamment de munitions à Wagner pour le priver d’une victoire à Bakhmout qui ferait de l’ombre à l’armée régulière.
Dans cette vidéo, Prigojine se met en scène devant un groupe de ses soldats. Il y menace de retirer ses forces du front de Bakhmout d’ici au 10 mai, « parce que sans munitions, nous sommes condamnées à une mort insensée ».
Voici un extrait de son message:
Dans une autre vidéo particulièrement virulente publiée un peu plus tôt dans la nuit de jeudi à vendredi, Prigojine s’en prend nommément au ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou et au chef de l’état-major Valéri Guerassimov. « Shoigu ! Gerasimov ! Où sont ces putains de munitions ! », hurle-t-il, entre deux jurons et en montrant du doigt des rangs de corps criblés de balles et de shrapnels.
Cette vidéo est d’une rare violence ; elle va beaucoup plus loin que les vidéos précédentes de Prigojine filmées dans des cimetières militaires avec des drapeaux et des couronnes mortuaires. Certes, il y apostrophait déjà les chefs militaires russes qui, selon lui, refuseraient de livrer des munitions à Wagner et condamneraient ainsi à mort les miliciens de la société militaire privée. Mais la mise en scène macabre de la vidéo mise en ligne la nuit dernière tranche dramatiquement avec le ton et le decorum des vidéos diffusées jusqu’à présent.
Dans une autre vidéo, visiblement prise quelques heures auparavant la macabre mise en scène nocturne, Evgueni Prigojine parle de 116 tués dans les rangs de Wagner lors d’une opération offensive dans Bakhmout. Opération qui aurait permis « une avancée de 230 m » dans la ville en ruines. Ce succès a été enregistré, au prix de lourdes pertes, mais aussi en dépit d’un manque de munitions critique. Wagner ne disposerait plus que d’ »un stock pour quelques jours « .
Toutes ces vidéos, dont celle de Prigojine hurlant des insultes envers Choïgou et Guerassimov, ont de quoi surprendre par leur virulence et leur mise en scène. Elles suscitent aussi au moins une question sur l’autonomie, voire l’impunité, de Prigojine. Si le fondateur et patron de Wagner se permet une telle intervention virulente, cela signifie qu’il en a les moyens et qu’il se sent politiquement suffisamment puissant.
Serait-il devenu l’aboyeur de Vladimir Poutine ? Le président russe garde un silence total sur le rôle de Wagner en Ukraine. Un rôle qui se limite, il ne faut pas l’oublier, à une participation directe au combat de la région de Bakhmout.