Le général Burkhard justifie sa décision de ne plus attribuer de grades honorifiques aux réservistes citoyens
Seulement, cela a pu donner lieu à quelques abus, certains ayant vu une opportunité à enrichir, à peu de frais, leur carte de visite avec un grade d’officier supérieur sans aucun rapport avec de quelconques mérites militaires. Et cela d’autant plus que la distinction entre la « réserve citoyenne » et la « réserve opérationnelle » n’est pas toujours très claire aux yeux du public.
En 2021, le général François Lecointre, alors chef d’état-major des armées [CEMA], avait commencé à y mettre bon ordre en décidant que les réservistes citoyens de la Marine nationale ne pourraient plus porter l’uniforme avec leurs galons honorifiques comme ils étaient jusqu’alors autorisés à le faire.
« Je considère que si un réserviste opérationnel doit porter les galons de son grade, tel n’est pas le cas des réservistes citoyens. […] L’uniforme et les galons sont porteurs de sens et reflètent des compétences. […] Or, en arborant les galons d’un capitaine de corvette, vous pourriez vous trouver dans la situation d’être salué par un vieux maître principal dont les compétences dans le domaine maritime seraient dix fois supérieures aux vôtres et ce uniquement parce qu’il vous prendra pour un capitaine de corvette ou un réserviste opérationnel. Et je ne trouve pas cela bien », avait ainsi expliqué le général Lecointre.
Son successeur, le général Thierry Burkhard, est allé encore plus loin en décidant de ne plus attribuer de grades honorifiques aux réservistes citoyens à partir du 1er février dernier, et d’opter pour l’appellation, plus sobre, d’ « officier de la réserve citoyenne ».
Cette mesure a fait quelques vagues… comme en ont témoigné certains députés lors d’une récente audition du général Burkhard au sujet de la « contribution des armées à une nouvelle politique africaine de la France » [le compte-rendu vient d’être publié, ndlr].
« Les réservistes citoyens de ma circonscription m’ont interrogée sur la suppression des grades honorifiques. J’ai fait face à une véritable levée de boucliers. Ils ne comprennent pas cette décision et la vivent mal », a en effet avancé Josy Poueyto, élue [Modem] des Pyrénées-Atlantiques.
« Si j’ai pris pris cette décision, c’est parce qu’aujourd’hui je suis incapable d’expliquer le bien-fondé des critères d’attribution des grades aux réservistes citoyens, qui vont de caporal à colonel », a commencé par répondre le général Burkhard.
« Son caractère aléatoire ou arbitraire est même contraire à l’esprit dans lequel les grades sont attribués dans les armées, qui consiste pour la réserve citoyenne à les associer à une activité ou à un niveau d’études. Ce système est le contraire de l’escalier social des armées », a-t-il continué.
« Voilà ce qui a motivé ma décision, et non, bien entendu, une quelconque forme d’hostilité à l’égard des réservistes citoyens, dont l’abnégation et l’investissement dans leur mission ne sont pas à démontrer », a ensuite justifié le CEMA, pour qui « l’action d’un réserviste citoyen ne vaut pas en raison de sa tenue ou de son grade » car « ce qui fait la valeur de son engagement, c’est son expertise, son rayonnement et son engagement ».
« Il ne s’agit pas de nier l’engagement des gens dans la réserve citoyenne, mais de l’identifier pour ce qu’elle est », a insisté le général Burkhard. « Dorénavant, tous [du caporal au colonel] auront l’appellation d’officiers de la réserve citoyenne, quelle que soit leur situation professionnelle dans le monde civil », a-t-il rappelé.
Et d’estimer que « si certains sont gênés par la perte de leur grade, c’est que la réserve citoyenne ne correspond pas à ce qu’ils veulent faire ». Aussi, a-t-il fait valoir, « ma décision me semble conforme à l’esprit de la réserve citoyenne » et « il faut que les choses soient propres et claires ».