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À quels types de guerre se prépare l’armée française?
En 2022, les dépenses militaires dans le monde ont atteint un niveau record de 2 240 milliards de dollars, indiquait en avril 2023, un rapport du Sipri, l’Institut international de recherches sur la paix de Stokholm. Si les États-Unis ont toujours veillé à conserver leur suprématie militaire, la Chine, deuxième, a depuis 10 ans augmenté de 75 % les crédits consacrés à ses forces armées tandis que l’Inde occupe désormais la 3ème marche du podium.
En Europe, l’agression russe de l’Ukraine, le 24 février 2022, a brutalement rappelé qu’aucun pays n’était à l’abri d’une invasion de son territoire. Un scénario que l’on pensait pourtant révolu depuis la fin de la guerre froide… Alors, de Varsovie à Berlin, de Bruxelles à Paris, les Européens ont décidé de revoir à la hausse les budgets consacrés à la défense et à la sécurité…
En France, le gouvernement espère promulguer, d’ici au 14 juillet, fête nationale, la nouvelle loi de programmation militaire 2024-2030… 413 milliards d’euros sur 7 ans pour transformer les armées : c’est 40% de plus que le budget précédent….
Cet effort permettra-t-il de pallier les faiblesses de l’armée française que la guerre en Ukraine a mises en évidence ? Quelles leçons Emmanuel Macron, chef des armées, a-t-il tirées du conflit ? Le modèle stratégique français est-il adapté au contexte géopolitique préoccupant, entre un possible affrontement Chine/États-Unis sur la question de Taïwan, un conflit qui s’éternise en Ukraine et le terrorisme jihadiste qui gagne du terrain en Afrique ? Faut-il s’inquiéter du réarmement du monde ?
Avec :
- Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS)
- Elie Tenenbaum, directeur du Centre des études de sécurité de l’Ifri
- Jean-Dominique Merchet, spécialiste des questions militaires au quotidien L’Opinion
Est-ce que les pays européens ont commis l’erreur de baisser un peu la garde ? De croire que la chute du mur de Berlin et la fin de la Guerre froide signifiaient qu’on était entrés dans une ère de paix sur le Vieux continent ?
« Si vous regardez les pays d’Europe de l’Est, ils ont effectivement eu une chute après la Guerre froide, à une époque où leurs économies étaient entièrement en train de se réorganiser. Néanmoins, depuis leur intégration dans l’OTAN à partir du début des années 2000 et surtout à partir de la « première » guerre en Ukraine en 2014, leurs dépenses de défense ont augmenté considérablement : environ + 30 % de dépenses militaires pour les pays de l’est de l’Europe entre 2014 et aujourd’hui. Ils ont désormais retrouvé un niveau de dépenses de défense à peu près équivalent à celui qui était le leur à l’époque du pacte de Varsovie, ce qui laisse entrevoir une logique de réarmement claire fondée sur la perception et la réalité d’une menace russe sur le flanc est de l’Europe.
Ceci dit, les choses sont plus compliquées pour les pays d’Europe occidentale. On a une situation contrastée entre des pays qui ont été « sérieux » sur les affaires de défense, comme la France et le Royaume-Uni en dépit de la période des dividendes de la paix des années 1990, même s’il y avait tout de même une érosion puis une restructuration des formats d’armées orientés davantage vers des missions expéditionnaires de stabilisation ou de lutte contre le terrorisme. Il ne s’agit pas uniquement de regarder les dépenses de défense, il s’agit aussi de voir à quoi elles servent et pour quels types de guerre les armées se préparent.
Puis, d’autres pays ont laissé filé un peu plus facilement la dépense militaire et certains l’ont laissée s’effondrer complètement, tels que la Suède dans les années 1990 et 2000. Ces pays sont aujourd’hui dans une dynamique de rattrapage tardive« , analyse Elie Tenenbaum.
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