Avec la commande de 486 lanceurs HIMARS supplémentaires, la Pologne aura 60 fois plus de lance-roquettes que la France en 2030.
Avec la commande de 486 lanceurs HIMARS supplémentaires, la Pologne aura 60 fois plus de lance-roquettes que la France en 2030.
C’était attendu depuis plusieurs semaines, et notamment depuis la visite de Mariusz Błaszczak sur le site d’assemblage des HIMARS de Lockheed-Martin de Camden, dans l’Arkansas, en mais dernier. C’est désormais chose faite.
Le 11 septembre, ce même Mariusz Błaszczak, le ministre de la Défense polonais, a annoncé avoir approuvé une très importante commande de systèmes HIMARS supplémentaires, ainsi que de munition, auprès de Lockheed-Martin, le tout pour une enveloppe pouvant atteindre 10 Md$.
486 lanceurs HIMARS et des milliers de munitions pour la Pologne
Selon le communiqué, la Pologne va donc commander, au travers du FMS, 486 lanceurs HIMARS, en plus des 20 déjà commandés en 2019, ainsi que plusieurs dizaines de milliers de missiles GMLRS, GMLRS-ER, ATACMS et PrSM, selon Lockheed-Martin.
Baptisés HOMAR-A (America), ces systèmes viendront ainsi renforcer les quelque 290 systèmes lance-roquettes K239 Chunmoo commandés il y a un an auprès de la Corée du Sud, et désignés par le nom de code HOMAR-K (Korea) dans les armées polonaises.
Les HIMARS polonais viendront armer 27 escadrons d’artillerie à longue portée, dont l’immense majorité devront être créés dans les années à venir, dans la mesure où les armées polonaises n’exploitaient qu’une centaine de lance-roquettes multiples de conception locale ou soviétique jusqu’ici.
Le contour exact de la commande n’a pas encore été présenté par les autorités polonaises. On ignore notamment le calendrier des livraisons, ainsi que la part de conception locale qui sera négociée entre LM et les autorités polonaises.
Bien évidemment, cette nouvelle annonce ne peut être considérée en dehors du contexte électoral polonais, avec des élections législatives aux résultats incertains approchant de leur échéance le 15 octobre. De fait, le gouvernement polonais du PiS, multiplie les annonces de ce type, visant à flatter son électoral nationaliste.
En revanche, si cette annonce venait à se concrétiser, les armées polonaises disposeraient alors d’une puissance de feu trois fois plus importante que celle de l’ensemble des armées européennes réunies.
60 fois plus de lance-roquettes multiples que l’Armée de Terre française en 2030
Rappelons, à ce titre, que la LPM 2024-2040 prévoit, pour l’Armée de Terre française, le remplacement des 8 LRU actuellement en service, par 13 nouveaux systèmes lance-roquettes à longue portée en 2030, 60 fois moins que n’en auront les armées polonaises.
Il sera, de toute évidence, beaucoup plus difficile pour les armées françaises de revendiquer le statut de « meilleures armées d’Europe », furent-elles plus expérimentées au combat par ses opérations extérieures.
Une bataille commerciale et industrielle avec l’Allemagne
Cette annonce risque aussi de couper l’herbe sous le pied de Rheinmetall, qui visait à devenir le partenaire privilégié de Lockheed-Martin en Europe afin de commercialiser un système dérivé du HIMARS produit dans le pays.
Il est, en effet, probable qu’avec une telle commande, Varsovie négociera une forme d’exclusivité territoriale pour le marché européen. Surtout, en mettant en œuvre un tel parc, la Pologne disposera de fait des infrastructures logistiques dimensionnées pour assurer la maintenance de large flotte.
On peut donc vraisemblablement s’attendre à ce que la France soit appelée à commander ses HIMARS auprès de Varsovie, si Paris décidait de se tourner vers ce système pour le remplacement des LRU.
L’hypothétique remplaçant français du LRU face à un marché européen saturé d’offres
Quant à l‘hypothèse d’un développement national français, elle devient de plus en plus improbable, alors que le marché européen se structure très rapidement avec l’apparition conjointe des offres polonaises basées sur l’HIMARS américain et le Chunmoo sud-coréen, et le PULS israélien vers lequel Berlin se tournera probablement, maintenant que Varsovie a choisi l’HIMARS.
Dès lors, les opportunités commerciales, indispensables à l’absorption des couts de développement élevés de ce type de système, seront de toute évidence très limitées en Europe pour un système national français.
Sauf à se tourner vers des partenariats extra-européens porteurs d’une forte demande, comme l’Inde ou l’Égypte, les options pour une solution nationale française s’amenuisent à vue d’œil.
Reste qu’une nouvelle fois, il faudra attendre les résultats des élections d’octobre, pour se faire une idée de ce vers quoi les armées polonaises évolueront dans les années à venir.