Côte d’Ivoire : la « réarticulation » de la présence militaire française enclenchée
CAP. Alors que l’exécutif planche sur une nouvelle feuille de route militaire, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, a évoqué plusieurs pistes à Abidjan.
Par Le Point Afrique – publié le 21 février 2023
Évincée du Mali, puis du Burkina Faso, la France revoit sa coopération militaire avec les États menacés par le djihadisme. Dimanche, la junte au pouvoir à Ouagadougou a annoncé la fin officielle des opérations de la force française Sabre sur son sol, quelques semaines après avoir dénoncé l’accord de défense liant les deux pays. En revanche, la Côte d’Ivoire voisine est l’un des plus solides alliés de la France en Afrique de l’Ouest. Le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, était justement en visite à Abidjan pour évoquer les contours que pourrait prendre la présence militaire française en Afrique dans les prochaines années.
Abidjan, principal partenaire de la France dans la région
Selon l’entourage du ministre, les relations avec Ouagadougou sont « neutres » et le redéploiement de Sabre se fait « discrètement ». « Ce serait malhonnête de dire que ce redéploiement en coordination avec les autorités burkinabées ne se passe pas bien », poursuit-on de même source. Aucune décision n’a été officiellement prise pour l’heure concernant leur éventuel redéploiement dans d’autres pays africains, et une partie de ces forces devrait d’abord rentrer en France. Ce retrait fait suite à celui des forces françaises du Mali, achevé en août 2022, à la demande des militaires putschistes au pouvoir dans ce pays comme au Burkina Faso.
À la sortie d’un entretien avec le chef de l’État, Alassane Ouattara, Sébastien Lecornu a noté les « efforts remarquables accomplis dans la montée en puissance de l’appareil de sécurité en Côte d’Ivoire ». « L’armée de Côte d’Ivoire n’a rien à voir aujourd’hui avec celle d’il y a 10 ans. Cela fait de la Côte d’Ivoire un pays de stabilité, dont le rôle de puissance d’équilibre régionale s’établit de plus en plus », a-t-il ajouté.
Vers une réarticulation sur deux volets
Sébastien Lecornu, dont c’est la deuxième visite en sept mois en Côte d’Ivoire, a également rencontré son homologue, le ministre de la Défense, Téné Birahima Ouattara. Outre la situation sécuritaire dans la région, où plusieurs pays sont confrontés aux violences djihadistes et à des coups d’État, puis la question de la prédation des matières premières et du trafic de drogue ainsi que celle de la guerre en Ukraine, les deux hommes ont échangé sur la question de la « réarticulation » de la présence militaire française dans la région.
Paris compte quelque 950 militaires au sein des Forces françaises en Côte d’Ivoire (FFCI), un nombre qui pourrait se réduire dans les années à venir, tout en répondant de manière plus ciblée aux besoins ivoiriens. « Le président Emmanuel Macron nous a demandé de réfléchir à la réarticulation de la présence française en Afrique », a expliqué Sébastien Lecornu, détaillant les projets de partenariat avec la Côte d’Ivoire : une partie de « formation » de l’armée ivoirienne et une autre partie « plus capacitaire » concernant des équipements pour l’Armée de l’air et de terre. Le ministre français des Armées n’a pas donné plus de précision sur un éventuel calendrier ni sur des chiffres concrets.
Sur le volet capacitaire, le ministère français des Armées veut mettre en place un dispositif dans lequel les industriels français d’équipements militaires auraient un plus grand rôle. « On pourra compter sur les équipements de l’armée de l’air, les équipements terrestres sur lesquels nous avons échangé sur des enjeux de partenariat. J’ai demandé à notre industrie de défense, notre délégation générale pour l’armement de faire un tour de table. Et peut-être de dépêcher dans les semaines qui viennent un panel d’entrepreneurs français sous conduite de la délégation générale pour l’armement, sous conduite de la banque publique d’investissement pour faire des propositions à l’État de Côte d’Ivoire pour permettre d’avoir cet agenda matériel », a-t-il souligné.