La grogne monte contre le programme SSN-AUKUS en Australie, y compris au sein du parti travailliste au pouvoir
La grogne monte contre le programme SSN-AUKUS en Australie, y compris au sein du parti travailliste au pouvoir
En 2022, quelques mois après avoir été annoncés, l’alliance AUKUS et le programme SSN-AUKUS, qui rassemblent l’Australie, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, et qui prévoient de doter la Royal Australian Navy de huit sous-marins nucléaires d’attaque, jouissaient d’un important soutien populaire en Australie.
À ce moment-là, en effet, 33 % des Australiens se déclaraient très en faveur de ces programmes, alors que 37 % se disaient plutôt favorable. Seuls 11 % des personnes interrogées se positionnaient fermement contre la conception et l’acquisition de sous-marins nucléaires d’attaque par la Marine australienne.
368 Md$ plus tard, le budget prévisionnel du programme SSN-AUKUS tel qu’il a été prévu par le gouvernement travailliste d’Antony Albanese, la perception publique a sensiblement évolué à ce sujet.
Selon un sondage réalisé en mars dernier, par le même organisme que celui précédemment cité, 26 % des personnes interrogées soutenaient fermement le programme (-7 %), alors que 41 % se déclaraient plutôt favorables (+4 %), 21 % y étant plutôt opposées (+4 %). Un second sondage, réalisé à la même époque par un autre institut, suggérait même que le soutien populaire au programme était désormais à parité avec ceux qui s’y opposaient.
Cette dynamique s’est invitée à la convention du parti travailliste australien, actuellement au pouvoir, qui s’est tenue à Brisbane cette semaine. En effet, l’aile gauche du parti, ainsi que les puissants syndicats qui la composent, ont déposé une motion visant précisément à empêcher la poursuite du programme SSN-AUKUS soutenu par le gouvernement Albanese.
Pour les opposants au programme, aucun débat public n’a véritablement eu lieu sur le sujet, ce d’autant que la perception publique quant à la réalité de la menace chinoise est loin d’être aussi tranchée que ne laissent supposer les sondages AUKUS.
De plus, les dépenses engendrées par ce programme, 368 Md$ ($ australiens constants) selon les dernières projections sur l’ensemble de la durée de vie des navires, s’avèrent considérables, équivalentes à plus de 60 % du budget fédéral australien annuel aujourd’hui.
Selon ces opposants, la question de savoir si cette somme doit ou non être investie dans cet unique programme, mérite, elle aussi, un débat public, si ce n’est un référendum.
Rappelons que si le gouvernement promet la création de 20.000 emplois liés à l’exécution de ce programme, sa structure interdit à l’Australie de developper des compétences propres lui permettant d’exploiter les acquis du programme au-delà de lui-même.
En d’autres termes, une fois le programme terminé, l’industrie australienne sera ramenée à son point de départ, et les investissements fédéraux ne créeront qu’une activité transitoire ne pouvant perdurer par la suite.
La fronde au sein du Parti travailliste australien aura toutefois tourné court, le premier ministre Antony Albanese ayant aisément fait repousser la motion proposée, mettant fin par là même aux discussions à ce sujet.
Cependant, par ses couts pharaoniques, ses retours industriels et technologiques contestables et limités, et l’évidente aliénation aux Etats-unis qu’il entraine, le programme SSN-AUKUS ne manquera probablement pas de susciter encore de nombreux débats dans les mois à venir au pays des kangourous… et des grands requins blancs.
Reste qu’au-delà de ses faiblesses et excès, le programme SSN-AUKUS s’avèrera rapidement trop important, et surtout trop stratégique, pour pouvoir être annulé, même si ses couts et ses délais venaient à s’envoler. Toutefois, à l’instar de l’aile gauche travailliste, on peut raisonnablement s’interroger sur la validité des arbitrages menés, sachant qu’à budget égal, la Royal Australian Navy aurait pu se doter de deux groupes aéronavals complets autour de porte-avions de la classe Queen Elizabeth, et de 12 sous-marins conventionnels ..