Le canon laser Helma-P, capable de toucher un drone à un kilomètre, sera-t-il l’arme de demain de l’armée française ?
star wars•Le canon laser Helma-P, qui fait partie des armes à énergie dirigée (AED), a été l’une des attractions du Sofins, le salon des Forces spéciales en Gironde, et devrait commencer à équiper l’armée française d’ici à la fin de l’année
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Le Helma-P de la société française Cilas, est capable de percer par échauffement un drone à une distance d’un kilomètre.
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Ce canon laser était l’une des composantes de la bulle antiaérienne mise en place par l’armée de l’Air durant les JO de Paris.
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S’il doit commencer à équiper l’armée française d’ici la fin de l’année, il n’a pour le moment pas vocation à remplacer les armes traditionnelles.
On aura attendu le test sur le champ de tir durant les trois jours du salon. En vain. Rien à voir avec la météo ni avec la sécurité, mais en raison d’une autorisation administrative qui n’aurait jamais été délivrée, nous assure la société Cilas.
Dommage, car même si on nous avait prévenus qu’un tir au canon laser risquait d’être décevant, « parce que c’est très rapide et qu’au final il n’y a pas grand-chose à voir », on avait quand même sacrément envie d’observer un drone se faire transpercer par l’échauffement du rayon. On se contentera de manipuler le petit engin volant abattu lors d’un précédent test, et de regarder ce trou de la taille d’une pièce de monnaie que le Helma-P lui a laissé sur le flanc.
Un canon laser de 600 kg
Le canon laser Helma-P était une des grandes attractions du salon des Forces spéciales Sofins, qui s’est tenu cette semaine sur le camp militaire de Souge (Gironde). Il ne s’agit pas du seul canon laser à être développé sur le marché, mais c’est celui dont on parle le plus ces derniers mois, avec sa capacité à détruire un drone à un kilomètre de distance. L’armée de l’Air en avait fait une des composantes de la bulle antiaérienne déployée au-dessus de Paris lors des JO l’été dernier. Si les militaires n’avaient pas eu à s’en servir, ils avaient néanmoins mené un test au-dessus de la capitale avant l’été. « C’était une première mondiale, puisqu’il n’y avait jamais eu de tir laser au-dessus d’une zone aussi urbanisée », assure Laurent Tard, responsable commercial chez Cilas.
L’entreprise a par ailleurs montré sur le salon Sofins le petit frère du Helma-P, un fusil laser Helma-LP d’une quinzaine de kilos. De moindre puissance, il est néanmoins capable de brouiller des systèmes optroniques à quelques centaines de mètres, voire d’enflammer de petits engins. Son avantage est qu’il peut être emporté par les soldats sur le terrain, quand le Helma-P, avec ses 600 kg, doit être posé sur une plateforme.
Comment ça marche ? « Le but est d’amener l’énergie la plus importante possible sur la cible, pour créer un point chaud qui va détruire ou endommager cette cible, résume Olivier Prat, directeur de Cilas. Un faisceau laser étant divergent, cette énergie va se répandre dans un cône, il faut donc être en capacité de faire converger cette énergie sur la cible pour maximiser la densité de puissance dessus. Le paramètre essentiel est donc la puissance arrivant sur la cible. Nous, avec une puissance de 2 kW, on a pu déposer notre énergie à une distance d’un kilomètre, sur un diamètre équivalent à une pièce d’un euro. »
Point fort du laser, « la discrétion »
Le développement de cette technologie n’est pas nouvelle, puisqu’elle a démarré il y a plus d’une dizaine d’années. L’entreprise française a, elle, lancé les premiers essais du Helma-P il y a environ cinq ans, notamment avec la DGA (Direction générale de l’armement). « Tout l’enjeu portait sur la miniaturisation du système pour obtenir un matériel simple d’utilisation, intégrable par les forces. Il ne faut pas que ce soit un objet de laboratoire », explique Olivier Prat. « On a atteint cet objectif, puisque les opérateurs de l’armée de l’Air ont été formés en quarante-huit heures avant les JO. »
La puissance du laser étant réglable, « on peut obtenir différents effets » dit-il encore. « L’effet extrême c’est la destruction, mais on peut aussi s’en servir pour brouiller des systèmes optiques ou optroniques, ou neutraliser temporairement une cible. »
Si l’arme laser revendique « 100 % de coups au but », elle a aussi ses limites. Le Centre français de recherche sur le renseignement, relève ainsi que « les faisceaux laser, comme tous les systèmes optiques, sont très sensibles aux conditions météorologiques ». « Les nuages, la pluie, la présence de poussières ou de fumées sont autant de conditions susceptibles de réduire fortement la portée et la puissance du faisceau laser. Une part importante de l’énergie sera absorbée, diffractée ou réfléchie par ces éléments. Certaines conditions [brouillard épais ou tempête de sable par exemple] peuvent rendre purement et simplement inopérant ce type d’armes. » Par ailleurs, « comme tout système optique, l’inter-visibilité avec la cible est nécessaire, en clair il est impossible d’engager une cible masquée, ce qui limite son emploi aux tirs directs ».
Olivier Prat reconnaît que l’on aura « toujours besoin des systèmes d’armement plus classiques » et envisage le laser, pour le moment, comme un complément. « Chaque arme a ses avantages, et les points forts du laser sont la discrétion, et le fait qu’il n’y ait pas de correction de tir nécessaire puisque le laser c’est la vitesse de la lumière… »
Un système utilisé durant la guerre en Ukraine
Cette technologie se développe au sein de plusieurs nations occidentales : Allemagne, Angleterre, Israël, Etats-Unis… « De premières dotations commencent à être faites aux Etats-Unis, où des lasers équipent désormais des véhicules, relate Olivier Prat. Nous avons eu également écho d’un système qui aurait été utilisé durant la guerre en Ukraine, ajoute-t-il, mais on n’en sait pas beaucoup plus. »
Le Helma-P doit de son côté « entrer en dotation au sein de l’armée française d’ici à la fin 2025, pour de la lutte anti-drone », assure le directeur de l’entreprise.