L’équipement, l’autre défi du contre-terrorisme

L’équipement, l’autre défi du contre-terrorisme

La ministre des Armées Florence Parly s’adresse aux forces spéciales françaises, le 13 juin au 4e RHFS de Pau


« Ma mission numéro un, c’est la protection des Français. Et ma menace numéro un, c’est le terrorisme », rappelait hier la ministre des Armées Florence Parly lors d’un discours prononcé à Pau devant un parterre d’opérateurs du COS. Dispersé mais réorganisé et toujours menaçant, le terrorisme « est là pour durer, car il se pense lui-même dans la durée », expliquait la Ministre. Restent, en conséquence, quatre défis majeurs à relever pour le ministère des Armés, dont l’un des plus concrets sera celui des équipements.

Véhicules PLFS et VPS2, micro-drone Black Hornet 3, missile MMP, etc. , c’est peu dire si les opérations menées au Sahel et au Levant ont, en toute logique, imprimé de leur marque l’évolution du portfolio capacitaire des forces françaises. Ces cinq dernières années, le ministère des Armées s’est « profondément réformé pour s’adapter à cet adversaire diffus, agile, inventif », résume Parly. Les milliers de militaires déployés sur Barkhane et Chammal auront acquis un capital d’expertise considérable, permettant de réviser considérablement les dispositifs et les moyens engagés. Ainsi, « le recueil de renseignements est devenu plus pointu, la fusion des données issue de tous les capteurs est plus efficace », a pointé Parly. Et la Ministre de préciser que « nous avons adapté nos équipements, en prévoyant dans la LPM l’armement des drones, qui pourra, j’en suis certaine, épargner des vies ». Ces drones, des MQ-9 Reaper armés de bombes GBU et de missiles Hellfire, devraient arriver sur le théâtre de l’opération Barkhane avant la fin de l’année.

Et pourtant, malgré les (très) nombreux systèmes présentés hier, la question des équipements reste au coeur des préoccupations. L’adversaire n’a de cesse d’ajuster ses tactiques et son armement, forçant le ministère des Armées à revoir sa stratégie d’innovation. « Comment nous adapter à un ennemi versatile, qui a su bricoler de sérieuses menaces contre nous, comme des drones commerciaux lestés de grenades, toutes sortes d’explosifs improvisés cachés dans des vélos, des motos, des ânes et même des vaches ? », questionne la Ministre. Pour que l’initiative ne change pas de camp, il est donc impératif d’ « adapter nos propres cycles d’innovation pour développer nos moyens de détection, de protection, de destruction parfois aussi ».

Les Armées devront continuer à innover, mais en raccourcissant nécessairement le temps de l’innovation pour parvenir à conserver une avance déstabilisante, donc potentiellement fatale pour l’adversaire. « J’ai ainsi créé tout récemment l’Agence d’innovation de défense, qui nous aidera à garder un temps d’avance dans les équipements, mais aussi les processus. Les innovations seront identifiées, expérimentées, et mises en œuvre en boucle courte », pointe Parly. Lancée le 1er septembre 2018, l’AID a pour mission de coordonner les initiatives à l’échelle nationale et de fédérer les acteurs concernés. Sorte de guichet unique pour tout porteur de projet, cette agence devra, en coordination avec l’Innovation Defense Lab, contribuer à « faire flèche de tout bois » en assouplissant et en accélérant le déroulé.

 

La ministre des Armées Florence Parly s'adresse aux forces spéciales françaises, le 13 juin au 4e RHFS de Pau

La ministre des Armées Florence Parly s’adresse aux forces spéciales françaises, le 13 juin au 4e RHFS de Pau

Entre autres « sursauts technologiques » envisagés, la ministre des Armées a non seulement mis l’accent sur « l’action Cyber qu’il faut renforcer, avec les outils appropriés », mais également sur « les systèmes de brouillage et de détection des explosifs improvisés, ces engins qui ont déjà fait bien trop de victimes parmi les nôtres ». Confrontées à un ennemi invisible et mouvant, les forces doivent par ailleurs disposer « des meilleurs technologies, des meilleurs analystes pour comprendre, anticiper, surveiller, avec précision et endurance ». À ce titre, Parly mise notamment sur les mécanismes européens en cours d’implémentation. « Les 13 milliards du fonds européen de défense sont un levier pour y parvenir. Déjà, c’est 100 millions d’euros qui seront consacrés à l’Eurodrone, capacité essentielle pour repérer et suivre les terroristes. Mais au-delà, de nombreuses idées se profilent. Je pense par exemple à des ballons de haute altitude, qui nous permettraient de surveiller ou de communiquer dans les terres désertiques du Sahel », déclare-t-elle.

Enfin, la ministre des Armées l’a bien souligné, il s’agira aussi de s’appuyer sur le capital créativité et le pouvoir d’expérimentation des forces spéciales. Des évènements tels que la visite d’hier, le Forum innovation défense ou encore le salon SOFINS l’ont démontré: les membres du COS occupent une place essentielle au sein du vivier de l’innovation participative. Exigeants et pragmatiques, ils sont également parmi les meilleurs « bêta-testeurs » des Armées. Dans la longue lutte qui s’annonce, « les forces spéciales que vous êtes, Mesdames et Messieurs, joueront pleinement leur rôle bien établi de laboratoire de pointe en milieu hostile », a donc indiqué Parly.