L’Otan monte au créneau, à défaut de monter au front
Des avions F-16, des batteries de défense antiaérienne, une « trajectoire irréversible » vers l’adhésion: les pays de l’Otan ont multiplié mercredi les gages d’un soutien renforcé à l’Ukraine, lors d’un 75e sommet historique marqué par les incertitudes politiques, notamment aux Etats-Unis.
Pour voir l’intégralité de la Déclaration du Sommet de Washington publiée par les chefs d’État et de gouvernement des pays membres de l’OTAN à l’issue de la réunion du Conseil de l’Atlantique Nord qui s’est tenue tenue à Washington le 10 juillet 2024, cliquer ici.
On notera l’établissement du « programme OTAN de formation et d’assistance à la sécurité en faveur de l’Ukraine (NSATU) afin de coordonner les livraisons d’équipements militaires ainsi que les activités de formation militaire organisées par les Alliés et leurs partenaires. Ce programme vise à inscrire dans la durée l’assistance à la sécurité fournie à l’Ukraine, garantissant ainsi un soutien renforcé, prévisible et cohérent. Le NSATU, qui opérera dans les pays de l’Alliance, aidera l’Ukraine à assurer sa défense dans le respect de la Charte des Nations Unies. Le NSATU ne fera pas de l’OTAN une partie au conflit au sens du droit international. Il soutiendra la transformation des forces de défense et de sécurité ukrainiennes, facilitant la poursuite de l’intégration du pays dans l’OTAN ». On notera que mercredi soir, le DoD a annoncé la nomination du général (deux étoiles) Steven G. Behmer au poste d’adjoint au commandant du Security Assistance Group – Ukraine, installé à Wiesbaden, en Allemagne.
On notera aussi:
– « la création du Centre OTAN-Ukraine d’analyse, d’entraînement et de formation (JATEC), qui servira à déterminer et à exploiter les enseignements à tirer de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine et permettra à l’Ukraine de gagner en interopérabilité avec l’OTAN »,
– et la décision du secrétaire général de nommer un(e) haut(e) représentant(e) de l’OTAN en Ukraine.
Les points 25, 26 et 27 de la Déclaration porte sur le rôle de la Chine. La Chine « joue désormais un rôle déterminant dans la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine », précise le texte otanien qui appelle Pékin, « en sa qualité de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU (..) à cesser de soutenir matériellement et politiquement l’effort de guerre russe ».
« La RPC continue de faire peser des défis systémiques sur la sécurité euro-atlantique. Nous constatons que la RPC est à l’origine d’incessantes activités cyber et hybrides malveillantes, y compris d’activités de désinformation », poursuit la Déclaration.
La Chine a exprimé dès ce jeudi son « vif mécontentement » et dénoncé un communiqué de l’Otan « empreint d’une mentalité digne de la Guerre froide et d’une rhétorique belliqueuse », selon un communiqué du porte-parole de la mission chinoise auprès de l’Union européenne (UE). « L’Otan devrait cesser de faire du tapage sur une soi-disant menace chinoise, cesser d’inciter à la confrontation et à la rivalité, et contribuer davantage à la paix et à la stabilité dans le monde », a-t-il souligné, dénonçant des propos « remplis » de « calomnies ».
Extension de la lutte
L’Otan a par ailleurs annoncé une réunion « avec les dirigeants de l’Australie, du Japon, de la Nouvelle-Zélande et de la République de Corée et ceux de l’Union européenne pour parler des défis de sécurité communs et des domaines de coopération ». Au travers de ces partenariats, l’Otan entend « favoriser la sécurité et la stabilité au Moyen-Orient et en Afrique, et contribuer ainsi à la paix et à la prospérité ».
Un engagement à aider durablement l’Ukraine
Cette Déclaration comporte aussi un « Engagement à aider durablement l’Ukraine à assurer sa sécurité » dont voici le texte intégral (c’est moi qui souligne):
« Aujourd’hui, nous affirmons notre indéfectible attachement à l’Ukraine, qui, pour rester un État souverain, démocratique et indépendant, a besoin de notre aide sur le long terme. Depuis le début de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, les Alliés apportent à cette dernière un soutien politique et une aide économique, militaire, financière et humanitaire d’une ampleur inédite, l’assistance militaire se chiffrant à quelque 40 milliards d’euros par an. Les Alliés mettent en outre à disposition leur capacité industrielle de défense pour répondre aux besoins de l’Ukraine. Tous ces efforts portent leurs fruits en permettant aux Ukrainiens de se défendre efficacement et de faire payer chèrement à la Russie ses agissements.
Nous sommes déterminés à aider l’Ukraine à mettre en place des forces capables de vaincre l’agresseur russe aujourd’hui et de le dissuader de commettre une nouvelle agression demain. À cet effet, nous comptons dégager une enveloppe de base d’au moins 40 milliards d’euros pour l’année à venir, et maintenir ensuite l’assistance à la sécurité à un niveau soutenable, pour que l’Ukraine l’emporte ; il sera tenu compte de ses besoins, de nos procédures budgétaires respectives et des accords de sécurité bilatéraux que des Alliés ont conclus avec le pays. Les chefs d’État et de gouvernement réexamineront les contributions des Alliés lors des prochains sommets de l’OTAN, à commencer par celui qui se tiendra en 2025 à La Haye.
Notre engagement porte sur la fourniture d’une assistance et d’équipements militaires à l’Ukraine et sur la formation des militaires ukrainiens, et couvre donc notamment :
– l’achat d’équipements militaires pour l’Ukraine ;
– les dons en nature au profit du pays ;
– le coût du transport des équipements militaires destinés à l’Ukraine, de leur maintenance et de la logistique ;
– le coût de la formation des militaires ukrainiens ;
– les coûts opérationnels relatifs à la fourniture d’une assistance militaire à l’Ukraine ;
– les investissements dans les infrastructures de défense et l’industrie de défense du pays ainsi que le soutien dont elles ont besoin ;
– toutes les contributions aux fonds d’affectation spéciale OTAN pour l’Ukraine, notamment sous la forme de moyens non létaux.
Toutes les aides apportées par les Alliés à l’Ukraine relevant des catégories précitées seront comptabilisées, qu’elles soient fournies par l’intermédiaire de l’OTAN, à titre bilatéral, à titre multilatéral ou de toute autre manière. Soucieux d’assurer un partage équitable des charges, les Alliés s’attacheront à contribuer chacun de manière proportionnelle à la concrétisation du présent engagement, en tenant compte notamment de leur part dans le PIB global de l’Alliance.
Deux fois par an, les Alliés informeront l’OTAN de l’assistance qu’ils auront fournie à l’Ukraine en vertu du présent engagement. Leur premier compte rendu inclura les contributions mises à disposition à compter du 1er janvier 2024. Le secrétaire général se fondera sur ces informations pour établir un récapitulatif de toutes les contributions déclarées par les Alliés.
En plus de fournir l’assistance militaire couverte par le présent engagement, les Alliés entendent continuer d’apporter à l’Ukraine un soutien politique et une aide économique, financière et humanitaire. »