Au Gabon, un groupe d’officiers dit avoir mis fin au régime d’Ali Bongo
Un second coup d’État militaire fut tenté en janvier 2019, alors que la réélection – trois ans plus tôt, du président en exercice, Ali Bongo [qui avait succédé à son père, Omar Bongo, en 2009], était contestée, notamment en raison de graves difficultés économiques. Mais les choses n’allèrent pas plus loin qu’un appel à l’insurrection lancé par le « Mouvement patriotique des jeunes des forces de défense et de sécurité » sur les ondes Radio Gabon : sur les cinq mutins, deux furent tués et les autres arrêtés.
La troisième tentative connaîtra-t-elle un sort différent? En effet, alors que les autorités gabonaises venaient à peine d’annoncer qu’Ali Bongo allait entamer un troisième mandat après avoir remporté les élections présidentielles du 26 août, avec 64,27% des voix, un groupe d’officiers supérieurs, prétendant représenter « toutes les forces de sécurité et de défense du Gabon », a dit contester ce résultat et annoncé avoir pris le pouvoir.
« Nous, forces de défense et de sécurité, réunies au sein du Comité pour la transition et la restauration des institutions [CTRI], au nom du peuple gabonais et garant de la protection des institutions, avons décidé de défendre la paix en mettant fin au régime en place », ont en effet affirmé ces officiers, dans un message lu par l’un des leurs à la télévision. « À cet effet, les élections générales du 26 août 2023 ainsi que les résultats tronqués sont annulés », ont-ils ainsi fait savoir.
Ces militaires, issus apparemment de la Garde républicaine [GR] et de l’armée régulière, ont dénoncé un scrutin non transparent ainsi qu’une « gouvernance irresponsable, imprévisible, qui se traduit par une dégradation continue de la cohésion sociale, risquant de conduire le pays au chaos ». En outre il sont annoncé la dissolution de toutes les istitutions gabonaises ainsi que la fermeture des fronière « jusqu’à nouvel ordre ».
Producteur de pétrole et bien pourvu en ressources naturelles [manganèse, bois], le Gabon a pris ses distance avec la France au cours de ces derniers mois, malgré la présence d’environ 300 militaires français sur son sol [via les « Éléments français au Gabon – EFG].
Ainsi, en juin 2022, au côté du Togo, ce pays francophone a rejoint le Commonwealth, composé d’anciennes colonies… britanniques. Et, plus récemment, il a renforcé ses liens avec la Chine [qui est son premier partenaire économique] à la faveur d’une visite à Pékin d’Ali Bongo [par ailleurs en indélicatesse avec la justice française au sujet de l’affaire dite des « biens mal acquis].
Pour le moment, seule la cheffe du gouvernement français, Elisabeth Borne, a réagi à cette tentative de putsch en disant suivre avec la « plus grande attention » la situation à Libreville. En revanche, la Chine a rapidement appelé les « parties concernées à agir dans l’intérêt du peuple gabonais […], au retour immédiat à l’ordre normal et à garantir la sécurité personnelle d’Ali Bongo ».
Quoi qu’il en soit, cette tentative de putsch est la huitième depuis 2020 en Afrique, après celles ayant eu lieu au Mali, au Burkina Faso [ces deux pays en ont chacun connu deux en huit mois], en Guinée, au Soudan et, plus récemment, au Niger.
« Il y a une épidémie de putschs dans tout le Sahel. Mais qui repose sur quoi? Sur la faiblesse des systèmes militaires, sur une insuffisance d’efficacité et aussi sur la politique que nous devons conduire en soutien avec toute la région. […] Et donc, je pense que nous devons sur ce point être clairs. La période est très difficile […] mais nous devons, avec fermeté, là aussi, éviter tout double standard, rester sur nos principes et avoir cette politique de clarté », avait affirmé le président Macron, le 28 août, lors de la Conférence des ambassadeurs.
Quelques mois plus tôt, à l’occasion du « One Forest Summit », organisé à Libreville en mars dernier, le locataire de l’Élysée avait affirmé que « l’âge de la Françafrique était révolu ».
« On semble encore aussi attendre [de la France] des positionnements qu’elle se refuse à prendre et je l’assume totalement. Au Gabon comme ailleurs, la France est un interlocuteur neutre qui parle à tout le monde et dont le rôle n’est pas d’interférer dans des échanges de politique intérieure », avait-il alors expliqué.