La France et la Norvège renforcent leur coopération militaire, avec la vente de frégates en toile de fond

La France et la Norvège renforcent leur coopération militaire, avec la vente de frégates en toile de fond


Pour équiper ses forces armées, la Norvège ne se tourne pas spécialement vers la France, avec laquelle elle entretient des relations cordiales [et anciennes] dans le domaine militaire. Les chiffres sont formels : sur 115 milliards d’euros de prises de commandes obtenues à l’exportation par la Base industrielle et technologique de défense [BITD] française entre 2014 et 2023, les achats norvégiens ne représentent que 0,23 % [268,1 millions]. Mais cela pourrait changer à l’avenir.

En novembre, le ministère norvégien de la Défense fit savoir qu’il venait de retenir la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis pour lui livrer cinq à six nouvelles frégates afin de remplacer celles de la classe « Fridtjof Nansen » à plus ou moins brève échéance. Outre les caractéristiques et les performances des navires en lice, il avait expliqué qu’il souhaitait rejoindre un programme en cours et, surtout, nouer un « partenariat stratégique » avec un alliée proche, l’achat, l’exploitation et le maintien en condition opérationnelle devant être réalisés conjointement.

Parmi les quatre pays retenus, seule la France n’avait pas établi de coopération « renforcée » en matière de défense avec la Norvège. C’est désormais chose faite. En effet, le 16 janvier, à Oslo, le ministre norvégien de la Défense, Bjørn Arild Gram, et son homologue français, Sébastien Lecornu, ont signé une lettre d’intention à cette fin.

« La France est l’un de nos partenaires alliés qui navigue et s’entraîne principalement dans nos environs immédiats. Ce pays joue également un rôle important dans la défense de l’Ukraine et dans les efforts visant à renforcer les capacités de défense de l’Otan. Nos intérêts communs sont nombreux et vastes. Nous avons un fort intérêt mutuel à développer davantage notre collaboration », a fait valoir M. Gram, cité dans un communiqué publié par son ministère.

De son côté, M. Lecornu a rappelé que le lien de la France avec la Norvège était « aussi celui du sang versé pour la liberté en 1940 lors de la bataille de Narvik, pour tenter de repousser l’invasion de la Norvège » et en 1944, avec les « 3 000 soldats norvégiens ayant combattu en Normandie ». Et d’ajouter : « C’est dans cette histoire partagée que nous forgeons l’avenir ».

Sans entrer dans les détails de ce protocole d’accord, la partie norvégienne indique que la France et la Norvège y « soulignent leur compréhension stratégique commune des menaces à la sécurité mondiale ainsi que l’importance de maintenir une connaissance de la situation et une présence dans les régions du nord ». Il est question d’une « coopération renforcée » en matière de préparation opérationnelle, de formation et de protection des infrastructures critiques, comme les « câbles sous-marins et les lignes d’approvisionnement en énergie ».

Cela étant, les questions industrielles ont aussi été abordées à cette occasion. Ainsi, la délégation française a assisté à une présentation du drone sous-marin HUGIN qui, conçu par Kongsberg, a déjà été acquis par la Marine nationale dans le cadre de sa stratégie sur les fonds marins. Et le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM] en a profité pour vanter les mérites de la Frégate de défense et d’intervention [FDI] auprès des autorités norvégiennes [voir photo ci-dessus].

« L’excellence norvégienne en matière d’industrie de défense en fait un partenaire naturel pour la France : nos industries partagent les mêmes exigences, et un haut niveau de maturité et de complémentarité. Nos armées en bénéficient par exemple à travers de nombreux équipements Kongsberg dans notre flotte hydrographique ou dans le domaine de la maîtrise des fonds marins, comme l’illustre notre acquisition récente d’un drone Kongsberg », a d’ailleurs commenté M. Lecornu.

« Nous souhaitons approfondir ces synergies et développer ensemble des capacités croisées de production », a insisté le ministre français, avant d’estimer que la Norvège devait « finalement être associée aux réflexions entre États membres de l’Union européenne sur notre stratégie d’acquisition commune visant à affirmer une préférence européenne ».

Sur ce point, la Norvège a droit à un traitement particulier en France, étant donné que le code de la Défense précise que les « dispositions relatives aux importations, aux exportations et aux transferts à destination ou en provenance des États membres de l’Union européenne » lui « sont applicables ». Ce qui vaut, au passage, aussi pour l’Islande.

Quant à l’achat de nouvelles frégates, le ministère norvégien de la Défense a seulement rappelé que la France « fait partie des pays » sélectionnés pour participer à l’appel d’offres. Comme la procédure est encore en cours, il ne pouvait guère en dire davantage.

En attendant, la FDI a de réelles chances de s’imposer. Du moins, c’est ce que suggère l’Association norvégienne de défense [Norges Forsvarsforening], qui, dans un récent article, souligne que le premier navire pourrait être livré par Naval Group à la Marine royale norvégienne d’ici cinq ans.

Par ailleurs, lors d’une audition au Sénat, en novembre, le Délégué général pour l’armement, Emmanuel Chiva, a fait valoir que la frégate française était « bien placée par rapport à la concurrence grâce aux caractéristiques de son moteur, adaptées à la navigation dans les fjords ». Enfin, c’est sans compter sur le savoir français en matière de lutte anti-sous-marine. Savoir-faire que la FREMM Normandie a brillamment démontré l’an passé, lors de l’exercice Nordic Response 24.

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