MGCS : Paris et Berlin tranchent un noeud gordien

MGCS : Paris et Berlin tranchent un noeud gordien

 
– Forces opérations Blog – publié le

Pile à l’heure, ou presque. Conformément à l’engagement pris à Berlin un mois plus tôt, les ministres de la Défense français et allemand ont signé hier matin l’accord de lancement de la première phase du programme de système de combat terrestre principal (SCTP, ou MGCS). 

Trancher un noeud gordien

Signe de l’éclaircie constatée depuis juillet dernier, le soleil lui-même s’est invité à la cérémonie de signature. Exit les scénarios d’impasse et autres bisbilles par presses ou parlementaires interposés, place au changement de logiciel et à la signature d’un Memorandum of Understanding (MoU) actant l’entrée dans la phase dite 1A de MGCS, celle du développement de démonstrateurs technologiques. 

C’est, selon le ministre des Armées Sébastien Lecornu, « un moment important » dans le chemin vers la succession des chars Leclerc et Leopard 2 à l’horizon 2040. Paris et Berlin sont désormais alignés, résultat d’un processus centré non plus sur les solutions techniques mais sur l’identification du besoin opérationnel et l’harmonisation de la demande entre armées partenaires. 

« Nous ne discutons pas là d’un programme trivial mais du système de combat terrestre appelé à remplacer des ‘vedettes’ nationales que les guerres de demain rendront obsolètes, le Leclerc côté français et le Leopard 2 côté allemand », soulignait pour sa part le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Pierre Schill, sur les réseaux sociaux.

Crédits image : ministère des Armées

Le document règle, entre autres, l’épineuse question du partage de la charge. « Nous avons tranché le noeud gordien sur la répartition des responsabilités industrielles », s’est félicité le ministre de la Défense allemand, Boris Pistorius. En résulte un partage à 50/50 des coûts et de la charge entre les deux filières qui se maintiendra tout au long des différentes phases. 

Calqué sur le référentiel du SCAF, MGCS se structure désormais selon deux niveaux et huit piliers. Ce sont le niveau 0 du système de systèmes et le niveau 1 relevant des plateformes de combat (canon, missile et appui). À chaque niveau correspondent des études conceptuelles et d’architecture qui serviront à définir progressivement les futurs systèmes.

Les huit piliers englobent les activités de R&D et de démonstration. Conduits en national ou en binational, ils relèvent des plateformes (Allemagne), des feux classiques (France-Allemagne), des feux innovants (Fr), de la connectivité (Fr-Al), de la simulation (Fr-Al), des capteurs (Fr), de la protection au sens large dont la protection active et la lutte anti-drones (Al), et des infrastructures et du soutien (Fr-Al).

Un contrat notifié d’ici 2025

Chaque pilier ayant désormais son ou ses drapeau(x), reste à y associer des champions industriels. S’ouvre une nouvelle phase, celle de la négociation et de la notification d’un premier contrat d’une durée de trois ou quatre ans par l’Allemagne, pilote du programme. Il s’agira d’aboutir d’ici début 2025, « un objectif très ambitieux », concède le ministre de la Défense allemand.

Ce futur contrat sera confié à une « Project Company » constituée par KNDS France, KNDS Deutschland, Rheinmetall et Thales SIX GTS. Évolution de la coentreprise déjà constituée ou nouvelle structure, ce quatuor aura la charge de conduire l’ensemble des activités réalisées au niveau industriel. 

À l’exception de KNDS et de Rheinmetall, tant les industriels concernés que leur répartition parmi les piliers restent des secrets bien gardés qui ne seront dévoilés qu’ « en temps utile », indique l’entourage de Sébastien Lecornu. Une once de logique permet cependant d’éclaircir le tableau. Difficile, en effet, d’imaginer un pilier des feux classiques conduit sans KNDS France, relève par exemple le cabinet ministériel. Idem pour Thales, que l’on imagine mal être écarté du pilier de la connectivité, et pour MBDA, candidat naturel au pilier des feux innovants. 

La France investira 500 M€ d’ici à 2030, l’Allemagne plusieurs centaines de millions d’euros d’ici à  2027. « Un demi-milliard d’euros, c’est beaucoup d’argent », soulignait Sébastien Lecornu. Les deux ministres ont donc donné le « la » : « vous avez en face de vous deux ministres clients ». Deux donneurs d’ordre dont la mission reste de garantir la fourniture de l’équipement demandé par leurs armées respectives. Dès lors, hors de question de dévier de l’objectif fixé, celui de parvenir à un char identique pour les deux armées en 2040. 

Ce jalon désormais franchi, l’ouverture de MGCS à d’autres partenaires européens pourrait intervenir « sans doute plus tôt qu’on ne le croit », indique Boris Pistorius. « Il faut aller chercher d’autres partenaires », ajoutait-il, mentionnant au passage l’Italie, officiellement observateur, mais aussi la Pologne, membre d’un triangle de Weimar récemment ravivé et dont le nouveau gouvernement se veut davantage pro-européen. 

Une copie qui s’affine

La vision franco-allemande est connue dans ses grandes lignes. Arrivé à terme, MGCS débouchera sur un système de systèmes interconnectés et en partie robotisés. Des plateformes dotées de briques d’intelligence artificielle, de capteurs, armements et de protections de nouvelle génération. Bref, un « char du futur » qui se conçoit « en surplomb des crises, à l’abri du tempo et du fracas médiatiques », relevait le CEMAT.

D’annonce en annonce, la copie se précise mais reste à prendre avec du recul au vu de l’horizon fixé et des obstacles potentiels à surmonter. Après les armées françaises, la Bundeswher s’est à son tour essayée au jeu de la prospective. Exemple avec la mobilité, dont les performances pourraient être augmentées en privilégiant la réduction de la masse, estime l’armée allemande dans un article publié en marge de la cérémonie. 

La masse maximale du MGCS « doit être réduite par rapport aux plateformes actuelles – une exigence qui a été formulée compte tenu de l’augmentation significative du poids lors des récentes revalorisations des chars de combat principaux de l’OTAN », pointe la Bundeswehr. Cette mobilité, les deux armées la conçoivent autour d’un châssis commun à tous les systèmes et d’une motorisation innovante. « Les diesels hybrides seront très probablement utilisés pour la propulsion, un moteur électrique étant alors chargé par le diesel. Le moteur électrique silencieux peut alors être utilisé dans certaines situations tactiques », note l’article. 

Autre exemple avec l’équipage, réduit à deux ou trois membres et opérant dans un compartiment protégé placé au sein du châssis. Selon le BAAINBw, pendant allemand de la Direction générale de l’armement, « il est maintenant assumé que la tourelle du MGCS sera inhabitée ». L’avantage ? Une tourelle plus compacte malgré un système d’arme plus volumineux, mais mieux protégée et participant à réduire la silhouette. 

Quant à la fonction feu principale, aucune piste n’est pour l’instant privilégiée. Seule certitude : « le canon de 120 mm, largement utilisé aujourd’hui, n’a plus aucun potentiel de croissance », explique un expert du BAAINBw. Si le 130 mm de Rheinmetall et le 140 mm de KNDS sont tous deux dans les starting blocks, un scénario à deux voies parallèles semble maintenant exclu, une seule solution devant être sélectionnée à l’issue de tests comparatifs. 

Crédits image : EMACOM

Pour la première fois dans l’histoire, des soldats français vont monter la garde au palais de Buckingham

Pour la première fois dans l’histoire, des soldats français vont monter la garde au palais de Buckingham

À l’inverse, des soldats britanniques vont garder les portes du palais de l’Élysée.

8 avril 2024 
https://www.leparisien.fr/international/pour-la-premiere-fois-dans-lhistoire-des-soldats-francais-vont-monter-la-garde-au-palais-de-buckingham-08-04-2024-MOLSW7IYNNDNNMLTJTHQY44C7U.php

Un membre de la Garde républicaine française échange son chapeau avec un membre de la F Company Scots Guards de l'armée britannique après une répétition en vue d'une cérémonie spéciale de relève de la garde, à Wellington Barracks, à Londres, le 5 avril 2024. AFP/Benjamin Cremel
Un membre de la Garde républicaine française échange son chapeau avec un membre de la F Company Scots Guards de l’armée britannique après une répétition en vue d’une cérémonie spéciale de relève de la garde, à Wellington Barracks, à Londres, le 5 avril 2024. AFP/Benjamin Cremel
Une première historique. Ce lundi 8 avril, à 10h45 pétante, une trentaine de soldats de la Garde Républicaine française participeront à la traditionnelle cérémonie de relève de la garde devant Buckingham Palace, à Londres. La France est le premier pays non-membre du Commonwealth à participer à cette véritable institution britannique qui attire chaque jour de très nombreux touristes.

Cette grande première a été décidée à l’occasion du 120e anniversaire de l’Entente cordiale. La France et le Royaume-Uni, longtemps frères ennemis, ont signé une série d’accords de coopération le 8 avril 1904 à Londres pour améliorer leur relation ponctuée de nombreuses guerres.

« L’exercice militaire entre la France et la Grande-Bretagne n’est pas le même, les espaces non plus », relève le Lieutenant-colonel Nicolas Mejenny dans une vidéo de Force news. Les soldats français se sont entraînés aux côtés leurs camarades britanniques vendredi 5 avril pour être prêts le jour J.

Sur le parvis du palais de Buckingham, les 32 soldats français de la Garde républicaine seront rejoints par 40 gardes de la compagnie F Scots Guards, précise le Dailymail. Ils seront inspectés par le duc et la duchesse d’Édimbourg, le chef d’état-major général du Royaume-Uni (CGS), le général Sir Patrick Sanders, le chef d’état-major de l’armée française, le général Pierre Schill, et l’ambassadrice de France au Royaume-Uni, Hélène Duchene.

« Un symbole de la force de la relation entre nos deux pays »

Pendant ce temps, à Paris, 16 soldats de la 7e compagnie Coldstream Guards, coiffés de leur traditionnel bonnet à poil, le bearskin, vont rejoindre la Garde Républicaine pour assurer la garde présidentielle à l’extérieur du palais de l’Élysée. La aussi, il s’agit d’une première.

« Je suis extrêmement fier d’avoir été invité à partager ce moment avec nos amis britanniques, a commenté le chef d’escadron Guillaume Dewilde. Nous sommes comme des frères et sœurs, et célébrer ce moment ensemble est un symbole de la force de la relation entre nos deux pays. »

Même son de cloche côté britannique. « C’est un signe de la force de nos relations. Les Français font partie de nos amis les plus proches. Et qui sait quand nous pourrions avoir besoin l’un de l’autre ? », a déclaré le lieutenant-colonel James Shaw.

75e anniversaire de l’OTAN : discussions sur le choix du prochain secrétaire général

75e anniversaire de l’OTAN : discussions sur le choix du prochain secrétaire général

AP Photo/Peter Dejong

 

par Alban de Soos – Revue Conflits – publié le 4 avril 2024

https://www.revueconflits.com/75e-anniversaire-de-lotan-discussions-sur-le-choix-du-prochain-secretaire-general/


Au cœur du conflit en Ukraine et des élections américaines, notamment avec un éventuel retour de Donald Trump, le choix du prochain secrétaire général de l’OTAN apparaît comme crucial pour l’avenir de l’Alliance.

Traditionnellement menées à huis clos, les élections pour le nouveau secrétaire se dérouleront publiquement, avec une transparence totale. Officiellement, les alliés ont jusqu’à juillet pour élire celui qui prendra les rênes de l’OTAN le 1er octobre 2024, succédant ainsi à Jens Stoltenberg.

Cependant, le processus électoral est complexe et hautement diplomatique, impliquant notamment des consultations informelles entre les pays membres, qui proposent des candidats pour le poste. La décision n’est ensuite confirmée que lorsqu’un consensus est atteint sur un candidat.

De coutume, ce poste prestigieux a été occupé par des figures politiques européennes d’envergure, et deux candidats en lice, tous les deux crédibles, perpétuent cette tradition. D’un côté, Klaus Iohannis, président de la Roumanie, et de l’autre, Mark Rutte, Premier ministre par intérim des Pays-Bas.

Le choix du prochain secrétaire général façonnera significativement la trajectoire de l’Alliance

Dans cette élection, deux questions sont centrales : le niveau de soutien à l’Ukraine, et l’implication des pays d’Europe de l’Est dans les relations OTAN-Russie.

Les deux candidats partagent plusieurs points communs dans leur vision de l’OTAN. En ce qui concerne le conflit en Ukraine, le Premier ministre Rutte et le président Iohannis envisagent d’accentuer le soutien à l’Ukraine, et d’affirmer le respect du droit international et la recherche de solutions diplomatiques pour résoudre le conflit. Les deux leaders ont d’ailleurs exprimé leur solidarité à l’Ukraine et ont appelé à des mesures pour contrer l’attaque russe.

Concernant l’Europe de l’Est, ils souscrivent tous deux au principe d’ « équité historique », qui reconnaît les injustices passées, notamment celles subies par les nations longtemps dominées par l’Union soviétique, et qui promeut la recherche d’un « avenir plus juste ». Ce principe se manifeste dans les aspirations communes de l’Europe de l’Est et de l’Occident à rejoindre l’OTAN. À ce titre, Iohannis, président de la Roumanie, incarne parfaitement ce cheminement.

Néanmoins, le président Iohannis et le Premier ministre Rutte présentent des perspectives et des approches distinctes qui mettent en avant les divergences d’opinions au sein de l’OTAN.

La vision de Klaus Iohannis

La perspective du président Iohannis adopte une approche plus offensive comme il l’explique dans un manifeste publié sur POLITICO, en raison de l’emplacement géographique de la Roumanie par rapport aux Pays-Bas. En effet, étant donné la position stratégique de la Roumanie le long de la mer Noire et de sa frontière avec l’Ukraine, le pays est au premier plan des préoccupations en matière de sécurité régionale. À cet égard, il est probable que le président roumain plaide en faveur d’un renforcement de la présence de l’OTAN et de ses capacités de défense en Europe de l’Est. Cela pourrait impliquer des exercices militaires accrus et une augmentation de la présence avancée pour dissuader les agresseurs potentiels et rassurer les alliés vulnérables.

Iohannis a également mis en avant la contribution précieuse de l’Europe de l’Est aux discussions et décisions de l’OTAN, en insistant sur le soutien indéfectible apporté à l’Ukraine dans sa lutte contre la Russie. Il a d’ailleurs appelé les pays de l’OTAN à remplir leurs obligations en aidant Kiev dans ses aspirations à rejoindre l’alliance et l’UE. De plus, il préconise le renforcement de la coopération par le développement de partenariats plus ambitieux, tout en consolidant la base industrielle de défense de l’Alliance.

La vision de Mark Rutte

Bien que le Premier ministre Rutte n’a pas encore publié de document complet exposant sa vision stratégique de l’OTAN, il a déjà souligné l’importance de renforcer la coordination entre les nations européennes, mettant en avant la nécessité de maintenir l’ouverture à la communauté mondiale. Il semble que le Premier ministre Rutte accorderait une priorité à l’unité de l’UE dans la réponse au conflit, favorisant les efforts diplomatiques au sein de l’Union européenne, ainsi qu’un renforcement des sanctions contre la Russie et un soutien à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Toutefois, les positions de Mark Rutte privilégieraient probablement les efforts diplomatiques pour résoudre le conflit. À cet égard, il a souligné le rôle central de V. Zelensky dans le lancement des négociations de paix. En établissant un parallèle avec les dialogues sur la sécurité lors de l’unification allemande en 1990, il souhaite aussi un engagement collectif des États-Unis, de l’OTAN et de la Russie pour discuter des arrangements futurs en matière de sécurité. M. Rutte a suggéré que ces discussions seraient cruciales pour garantir la stabilité en Europe.

La dynamique semble être propice à Mark Rutte qui a obtenu le 22 février dernier le soutien des États-Unis, du Royaume-Uni et de l’Allemagne, trois des plus importants pays de l’Alliance. Tous trois ont l’espoir qu’il saura tenir tête à la diplomatie trumpiste en cas de victoire républicaine à l’automne prochain, scénario qui hante les couloirs de l’Alliance.

Paris et Berlin alignés sur la prochaine phase de MGCS

Paris et Berlin alignés sur la prochaine phase de MGCS


« Viel vorgenommen ». De fait, la coopération franco-allemande a fait plusieurs bonds en avant hier à Berlin, les ministres de la Défense de chaque pays actant notamment le lancement de la prochaine phase de développement du système appelé à succéder aux chars Leclerc et Leopard à l’horizon 2040-2045. 

Progresser sur huit piliers

« Nous avons un accord », s’est félicité Sébastien Lecornu lors d’une conférence de presse conduite avec son homologue allemand, Boris Pistorius. Repris en main il y a huit mois par les deux ministres, le dossier du « Main Ground Combat System » (MGCS) franchit enfin un nouveau jalon après un temps de latence. 

Parfois âpres mais toujours maintenues, ces discussions principalement étatiques débouchent sur une clef de répartition à 50/50 de la charge de travail entre industriels français et allemands tant pour la phase de développement que pour celle de production. Exit les 13 « Main Technological Demonstrators » qui prévalaient jusqu’alors, place à une phase dite « 1A » et à une logique de piliers capacitaires, deux notions héritées de l’équivalent aérien du MGCS, le programme « système de combat aérien du futur » (SCAF).

Non détaillés pour l’instant, ces huit piliers se concentreront sur des fonctions principales telles les feux « classiques », les feux « innovants », les plateformes, les systèmes de communication et de commandement (C2) et autres clouds de combat, la simulation, les capteurs, protections et infrastructures nécessaires pour accueillir le futur « système de systèmes » en unité. À l’inverse de MTD éphémères, ces piliers sont destinés à structurer le programme tout du long. 

Le ministre des Armées l’a plusieurs fois répété, MGCS sera bien plus qu’un simple successeur des chars actuels. L’innovation s’étendra par exemple aux feux, ceux-ci comprenant potentiellement des armes lasers privilégiées pour se prémunir de la menace anti-drones mais pas seulement. « Il y aura un usage massif de l’intelligence artificielle », complète le cabinet ministériel, mentionnant une IA injectée non seulement dans les systèmes de C2 mais aussi dans les capteurs.

« Un bon accord »

L’effort à venir mobilisera plusieurs acteurs. Les deux maîtres d’œuvre du programme bien sûr, KNDS (Nexter+KMW) et Rheinmetall, mais aussi d’autres grands noms du secteur comme MBDA, Thales, ou encore Safran. Et jusqu’à quelques PME, dont au moins relevant du domaine des armes à énergie dirigée. Il s’agira pour l’équipe constituée de plancher sur un pré-démonstrateur ainsi que de répondre à plusieurs questions en suspend, dont celle du nombre et de la tailles des plateformes composant un système MGCS.

Le cabinet ministériel a salué l’obtention d’« un bon accord », non seulement « parce qu’il permet d’avancer » mais aussi parce qu’il consolide les intérêts industriels de chaque pays. Ainsi, si chaque pilier sera piloté par un industriel allemand, français, ou par un duo binational, « Nexter sera un acteur très important de la partie française, KMW sera un acteur très important de la partie allemande ». « Ce qui est important pour nous et est respecté par cet accord, c’est que le groupe KNDS est bien le centre du projet », nous explique-t-on. 

La suite ? La signature, le 26 avril à Paris, de l’engagement juridique relatif à cette phase 1A. L’alignement obtenu, les industriels retenus se verront notifier les contrats correspondants d’ici la fin de l’année par l’Allemagne, pilote du projet. Coût de la manœuvre ? De l’ordre de «  plusieurs centaines de millions d’euros ». Côté français, 500 M€ sont sanctuarisés par la loi de programmation militaire pour 2024-2030 pour abonder le sujet MGCS. Un engagement qui prend une autre dimension au vu des 30 M€ investis depuis 2017. 

Cette avancée ouvre, enfin, de nouvelles perspectives en matière d’élargissement. « D’autres pays frappent à la porte, et notamment en Europe », pointe l’entourage ministériel. Désormais observatrice à part entière, l’Italie est l’une des premières concernées par une bascule vers un « dialogue beaucoup plus étroit ». Dans un second temps, certes, mais cette fois avec un horizon bien dégagé.

Armée : la France peut mobiliser 20 000 hommes en 30 jours, affirme le chef d’état-major de l’armée de terre

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Alors que la Russie a déjà mis en garde la France contre le possible envoi de troupes en Ukraine en brandissant la menace nucléaire, le chef d’état-major de l’armée de terre, Pierre Schill, assure dans une tribune publiée dans « Le Monde » que l’armée « se tient prête ».

par Richard Gira – Journal du dimanche – publié le

Le chef d’état-major des Armées, Pierre Schill, lors d’une cérémonie en Inde au mois de février 2024. © Hindustan Times/Sipa USA/SIPA

Une nouvelle guerre frappe-t-elle aux portes de l’Europe ? Le conflit opposant la Russie à l’Ukraine ne cesse de s’enliser, et les dernières déclarations du président russe Vladimir Poutine en marge de sa réélection à la tête du pays n’ont rassuré personne. Le 26 février dernier, Emmanuel Macron avait surpris tout le monde en évoquant la possibilité d’envoyer des troupes françaises en Ukraine, affirmant que « rien ne doit être exclu ». Trois semaines plus tard, il avait « assumé » ses propos face au tollé qu’ils avaient provoqué dans l’Hexagone, mais également parmi ses homologues européens. Cependant, « la France ne mènera pas d’offensives », avait-il assuré. De son côté, Vladimir Poutine s’est montré serein au cours d’un entretien accordé à l’agence de presse RIA Novosti et à la chaîne de télévision publique Rossiya 1.

Si « rien ne presse » selon lui, la Russie est « évidemment prête », a-t-il lancé à propos d’un conflit nucléaire. Dans une tribune publiée dans le quotidien Le Monde ce mardi 19 mars, le chef d’état-major de l’armée de terre, Pierre Schill, l’affirme : la France a des atouts à faire valoir, elle qui est un membre historique de l’Otan. Soulignant que le début de l’année est « placé sous le signe de tensions internationales », les risques « d’engrenage » et d’extension de conflits sont nombreux. Pour le chef d’état-major, « le projet d’un ordre mondial reposant sur la souveraineté des États, le droit international et le règlement des différends par la négociation » est présenté comme « contingent et occidental, voire battu en brèche ».

« Jusqu’à 60 000 hommes » mobilisables

Et il y a une explication à ce regain de tensions et de violences, que ce soit en Ukraine ou dans la bande de Gaza entre le Hamas et Israël. « Le retour de la violence guerrière s’impose en miroir de l’affaiblissement des règles internationales », juge Pierre Schill. Les nouvelles formes de violences et les évolutions technologiques (comme les drones) participeraient à ces nouveaux conflits. Et selon lui, « les conflits actuels amènent à reconsidérer la notion de volume de force. […] Le temps où l’on pouvait infléchir le cours de l’histoire avec 300 soldats est révolu ». Mais « l’armée de terre se tient prête », assure Pierre Schill, qui avance que la France peut mobiliser « 20 000 hommes, dans un délai de trente jours ».

Plus globalement, l’armée peut même se doter de moyens pour commander un corps d’armée en coalition, « soit jusqu’à 60 000 hommes ». Le chef d’état-major évoque une « montée en gamme » qui permet de se doter de moyens de commandements « plus performants » et des capacités de déploiement également plus importantes afin de « peser demain dans le jeu des puissances ». Car la France dispose aussi de la dissuasion nucléaire. Autant d’éléments nécessaires pour « décourager un adversaire éventuel afin de “gagner la guerre avant la guerre” ». L’armée française est donc « prête », et peu importe les évolutions internationales, les « soldats répondront présents », martèle Pierre Schill.

Les Pays-Bas choisissent Naval Group pour la construction de quatre sous-marins

Les Pays-Bas choisissent Naval Group pour la construction de quatre sous-marins

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Par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 15 mars 2024

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


Le gouvernement néerlandais a annoncé ce vendredi dans un communiqué avoir sélectionné le français Naval Group pour la construction de quatre sous-marins. 

Après un processus de devis minutieux, Naval Group construira les nouveaux sous-marins” pour les Pays-Bas, a déclaré le secrétaire d’Etat à la Défense, Christophe van der Maat, lors d’une visite à Le Helder, dans le nord du pays, où se situe la plus grande base navale de la marine néerlandaise. “Ils ont réussi à proposer une offre équilibrée, polyvalente et réaliste. L’industrie néerlandaise a également un rôle important à jouer, condition importante dans le processus d’attribution“, a-t-il ajouté.

La compétition opposait le groupe public français Naval Group, allié au néerlandais Royal IHC, à l’allemand Thyssenkrupp Marine Systems (TKMS) et au suédois Saab qui a fait alliance avec le constructeur naval néerlandais Damen.

Ce long processus entamé en 2015 vise à remplacer les quatre sous-marins de classe Walrus lancés au début des années 1990 et dont le premier a été retiré du service à l’automne dernier pour que ses pièces puissent servir à l’entretien des autres.

Attention toutefois: le Parlement néerlandais sera appelé à entériner le choix du gouvernement avant toute signature de contrat.

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Cette victoire de Naval Group marque le premier succès à l’export de son sous-marin Barracuda, dont 12 exemplaires avaient été vendus à l’Australie avant que Canberra n’annule le contrat au profit du partenariat Aukus avec Londres et Washington. L’équipementier français, qui construira les futures coques à Cherbourg, s’est dit “honoré de la décision du ministère de la Défense néerlandais. À travers cette décision, le groupe s’engage dans un partenariat stratégique à part entière avec les Pays-Bas, visant à soutenir la flotte sous-marine de la Marine royale néerlandaise et à intensifier la coopération avec le ministère de la défense, l’industrie néerlandaise ainsi que les partenaires industriels et académiques des Pays-Bas.”

Carte. L’Organisation du traité de l’Atlantique nord en 2024

Carte. L’Organisation du traité de l’Atlantique nord en 2024

Par AB PICTORIS, Pierre Verluise – Diploweb – publié le 14 mars 2024

https://www.diploweb.com/Carte-L-Organisation-du-traite-de-l-Atlantique-nord-en-2024.html


Conception et réalisation de la carte : AB Pictoris. AB Pictoris est une jeune entreprise française fondée par Blanche Lambert, cartographe indépendante. Passionnée de cartographie et de géopolitique, elle a obtenu un Master en Géopolitique (parcours cyber, IFG, Paris VIII) et en Géostratégie (Sciences Po Aix) après une licence de Géographie et Aménagement du Territoire (Paris I).
Commentaire de la carte : Pierre Verluise, Docteur en Géopolitique, fondateur du Diploweb.com

Mi-mars 2024, 23 pays membres de l’UE-27 sont membres de l’OTAN-32. La plupart des États membres de l’UE sont donc également membres de l’OTAN, dont la France. Il résulte de cette double appartenance OTAN / UE des problématiques subtiles.
Une carte inédite copubliée sur le Diploweb.com et AB Pictoris, conçue et réalisée par Blanche Lambert.
Carte grand format en pied de page, JPG et PDF.

FONDEE en 1949 dans le contexte de la Guerre froide, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) aurait pu ne pas y survivre. Pourtant, l’Union européenne n’a pas été en capacité de démontrer durant les années 1990 son aptitude à mettre fin aux guerres d’ex-Yougoslavie. Ce sont les Etats-Unis et l’OTAN qui ont été mobilisés. Les anciens pays satellites de l’Union soviétique et les trois États baltes soviétisés de force ont gardé de plusieurs décennies derrière le Rideau de fer des représentations documentées de la menace russe. Post Guerre froide, leur besoin – légitime – de sécurité a été satisfait par leur adhésion à l’OTAN, puis leur adhésion à l’Union européenne. La relance de la guerre d’agression russe en Ukraine, le 24 février 2022 a même conduit deux États membres de l’Union européenne précédemment très attachés à leur neutralité à sauter le pas d’une adhésion à l’OTAN : la Finlande et la Suède. Autrement dit, cette guerre que la Russie n’ose même pas appeler par son nom a conduit à un nouvel élargissement de l’OTAN. Mi-mars 2024, 23 pays membres de l’UE-27 sont membres de l’OTAN à 32 (OTAN-32). La plupart des Etats membres de l’UE sont donc également membres de l’OTAN-32, dont la France. Ce qui explique pourquoi cette carte est ici placée dans la rubrique UE.

Carte. L’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) en 2024
Conception et réalisation de la carte : AB Pictoris, B. Lambert, 2024. Voir la carte au format PDF haute qualité d’impression
Lambert/AB Pictoris

Il résulte de cette double appartenance OTAN / UE des problématiques subtiles qui semblent longtemps pénaliser l’essor d’une défense européenne. Depuis le 24 février 2022, les relations UE / OTAN ont été renforcées… mais l’hypothèse d’une réélection de D. Trump à la présidence des Etats-Unis induit des questionnements.

Voir la carte au format PDF haute qualité d’impression

Carte au format JPG ci-dessous.

Copyright pour la carte AB Pictoris/Blanche Lambert
Copyright pour le texte Verluise/Diploweb.com


Plus avec Diploweb

. La carte de l’OTAN à 29 pays membres après l’adhésion du Monténégro… en attendant celle de la Macédoine du Nord

. La carte de l’OTAN à 30 Etats membres

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Carte. L’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) en 2024
Conception et réalisation de la carte : AB Pictoris, B. Lambert, 2024. Voir la carte au format PDF haute qualité d’impression

Document ajouté le 14 mars 2024
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Savez-vous combien de pays sont membres de l’OTAN ? Et combien des pays de l’OTAN sont des membres de l’UE ? A quelle date sont-ils entrés dans l’OTAN ? Dans quel contexte ? Localisées et datées, les réponses sur cette carte.

Les huit points clés de l’assistance militaire de la France à l’Ukraine (2/2)

Les huit points clés de l’assistance militaire de la France à l’Ukraine (2/2)

OPINION – « Le Gouvernement peut, de sa propre initiative (…), faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité ». C’est sur ce fondement constitutionnel (art. 50-1) qu’un débat aura lieu mardi 12 à l’Assemblée nationale et mercredi 13 au Sénat sur la situation en Ukraine à la suite de la signature le 16 février d’un accord bilatéral de sécurité avec l’Ukraine. A cette occasion, le groupe Mars propose une réflexion en huit points sur notre assistance militaire à l’Ukraine. Après la publication du premier voler lundi 11 mars, voici le second ce mardi. Par le groupe de réflexions Mars.


Un camion Caesar
                                Un camion Caesar (Crédits : INTS KALNINS)


 

5. Comment envisager la fin des hostilités ?

Qui croit encore que l’Ukraine puisse reconquérir par les armes le territoire perdu depuis dix ans ? A l’inverse, quoi qu’en disent certains, l’OTAN n’a ni vocation, ni envie, ni même les moyens (hors improbable engagement américain) d’intervenir aux côtés des forces armées ukrainiennes (FAU) pour rétablir une situation tactique compromise. C’est pourquoi des voix commencent à s’élever outre-Atlantique pour négocier un armistice durable, débouchant à terme sur une paix de compromis. Certains appellent cela « a Pay for Peace Strategy » qui pourrait reposer sur un accord transactionnel négocié par les Américains consistant par exemple à aider à la reconstruction économique des deux belligérants via la reprise des livraisons à l’Europe des hydrocarbures russes en échange d’un retrait des troupes d’occupation. Il est vrai que la guerre et l’UE ont sauvé la production américaine de gaz de schiste, mais les besoins sont tels qu’il y a de la place pour tout le monde.

Cela fait à vrai dire des mois que la presse mainstream américaine envoie des messages pour prévenir d’un prochain changement d’attitude. Mais la position de l’administration Biden n’est pas encore fixée sur le sujet, et rien ne sera fait pour que le camp républicain puisse lui imputer une seconde défaite stratégique après la chute de Kaboul. Mais, en dehors des idéologues néo-conservateurs qui ne sont plus aussi influents qu’il y a vingt ans, les Américains ont le pragmatisme des « boutiquiers » (pour reprendre le mot de Napoléon à propos des Britanniques) : « it’s the economy, stupid ! », martelait le candidat Clinton. Ils ont sans doute cru en 2022 que l’économie russe s’effondrerait. Comme cet objectif semble aujourd’hui inatteignable, les États-Unis se contenteront d’avoir durablement vassalisé l’économie européenne dans les secteurs stratégiques de l’énergie et de la défense. Mais ils ne veulent à aucun prix d’un effondrement russe qui profiterait à la Chine.

Tout volet économique devrait être accompagné d’un volet stratégique consistant par exemple pour la Russie à accepter l’intégration de l’Ukraine dans l’OTAN en échange de la reconnaissance par l’Ukraine de la souveraineté russe sur la Crimée.

L’historien objectera malgré tout que l’équilibre des puissances en Europe exige parfois le maintien de certains territoires « tampon » en dehors du contrôle des empires. De manière emblématique, il est intéressant d’observer que le choix de Bruxelles comme capitale européenne n’est pas étranger au statut de neutralité de la Belgique, héritière des Pays-Bas espagnols, puis autrichiens avant d’être absorbés dans l’empire napoléonien, exigé par le congrès de Vienne en 1815.

Faut-il chercher à l’autre bout du monde un modèle à suivre ? Une dépêche AFP du 29 février nous apprend que « la Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui a longtemps eu des relations difficiles avec l’Indonésie, a ratifié un accord de défense avec son voisin, près de 14 ans après sa signature, a indiqué le gouvernement de Port Moresby dans un communiqué ». « La sécurité est la pierre angulaire du commerce, des investissements et des affaires », a déclaré le ministre des affaires étrangères de Papouasie-Nouvelle-Guinée, pays voisin de l’Australie (et de la Nouvelle-Calédonie) « qui entretient des relations tendues avec l’Indonésie depuis que Jakarta a annexé l’ouest de l’île de Nouvelle Guinée à la suite d’un vote des représentants tribaux en 1969 ».

6. Comment traiter avec le régime russe ?

Cela suppose évidemment de ne pas commencer les tractations en menaçant de faire rendre gorge à Poutine, dont la fiabilité est nulle dans une négociation. Il faut parler son langage : celui de l’intérêt personnel et du rapport de forces. En aucun cas, on n’accule un fauve blessé qui dispose de 6000 têtes nucléaires et d’une doctrine pour s’en servir. Nulle mieux que Julia Navalnaia, veuve du principal opposant russe, n’a esquissé la meilleure conduite à tenir vis-à-vis du régime mafieux qui tient le Kremlin, et avec lui la Russie et toute la gamme de ses capacités de nuisance.

« Vous ne pourrez atteindre Poutine avec une résolution ou un autre paquet de sanctions, ni l’emporter sur lui en pensant qu’il est guidé par la morale et des règles, il ne l’est pas. Alexeï l’a réalisé il y a longtemps. Il ne s’agit pas d’un homme politique mais d’un bandit avec du sang sur les mains, à la tête d’un réseau criminel organisé ». « Nous devons lutter contre ce réseau » et « utiliser les méthodes de lutte contre la criminalité organisée » : « des enquêtes dans les systèmes de montage financier, la recherche d’associés de cette mafia dans vos pays, les juristes discrets, les financiers qui aident à dissimuler cet argent ». « Vous avez des dizaines de millions de russe qui peuvent vous y aider, vous devez travailler avec eux, avec nous ».

7. Quelle architecture européenne de sécurité future ?

Il conviendrait ensuite de profiter de cette dynamique, avec deux protagonistes militairement et économiquement très affaiblis, pour édifier enfin une architecture européenne garantissant la sécurité de chacun, à commencer par l’Ukraine et la Russie. Notons que ce type de proposition émane des voix les plus autorisées qui soient. Ainsi Pierre Vimont, archétype de ce que la diplomatie française peut offrir de meilleur (au point d’avoir servi de modèle à une célèbre bande dessinée portée à l’écran, sous les traits de l’acteur Niels Arestrup), ancien secrétaire général exécutif du SEAE (service européen pour l’action extérieure, a publié récemment une analyse en ce sens pour la Fondation Robert Schuman, cercle de réflexion qui ne passe pas pour un repaire de kremlinophiles.

« La situation politique qui prévaudra après la fin de la guerre sera largement le produit de l’évolution qui se sera progressivement dessinée sur le terrain militaire. En filigrane, se dessine une fois de plus la nécessité d’une réflexion sur la relation à définir au sortir de ce conflit avec la Russie ». L’ambassadeur Vimont ajoute : « Est‑il utopique de vouloir ouvrir dès à présent la réflexion sur un nouvel ordre de sécurité en Europe ? Malgré les apparences, une telle discussion n’a que trop tardé. Elle aurait dû intervenir bien plus tôt, au moment de la fin de l’Union soviétique. Les crises qui se sont multipliées en Europe depuis trente ans ont accompagné en fin de compte le lent processus de dissolution, encore en cours, de l’empire soviétique. Faute de s’être entendus sur la manière de parler avec Moscou, les Européens se sont enfermés dans une absence de diplomatie qui a nui à leurs intérêts. Personne ne doute de la difficulté à dialoguer avec les régimes autoritaires, mais les obstacles rencontrés ces dernières années dans les négociations avec d’autres interlocuteurs, tout aussi difficiles quoique plus lointains, comme la Chine ou l’Iran, montrent la nécessité pour la diplomatie européenne de relever ce défi. Dans le cas de la Russie, il y a urgence si l’objectif est bien d’empêcher à tout prix, au sortir de la guerre d’Ukraine, la répétition d’un tel conflit et de garantir la stabilité de l’Europe sur le long terme » (1).

Ce qu’il convient d’éviter, c’est une nouvelle situation de guerre froide avec une Russie avide de vengeance. La meilleure des garanties de sécurité pour les voisins de la Russie, c’est que chacun soit satisfait dans ses exigences de sécurité. L’Ukraine ne peut plus craindre à nouveau pour sa sécurité. Il en va de l’avenir de la politique de non-prolifération nucléaire. Mais la Russie ne peut non plus se sentir menacée d’encerclement par une alliance hostile. Utopique ? En tout cas, ce qui est assurément utopique, c’est de se croire en sécurité avec une Russie avide de revanche (4).

Dans ce contexte, la France aurait un rôle éminent à jouer (5), un vrai rôle d’équilibre, en tant que puissance nucléaire entretenant avec la Russie, dans le cadre des relations OTAN-Russie, un véritable dialogue stratégique sans « ambiguïté ». En matière de dissuasion nucléaire, la masse compte peu : avec moins de 5% de l’arsenal atomique russe, la France pourrait détruire des dizaines de grandes villes et la plupart des centres industriels russes avec ses seuls moyens en alerte permanente (2). Voilà qui est absolument dénué d’ambiguïté. Preuve s’il en est que le meilleur moyen de rééquilibrer le rapport de forces n’est pas d’envoyer en Ukraine des combattants français. Notre SNLE en patrouille suffit, et il est déjà en place. Tout le reste n’est que communication politique.

8. Pacifisme ou bellicisme, une dialectique faussée ?

Enfermer la réflexion dans des slogans et des anathèmes revient à refuser le débat et à imposer une « pensée unique » qu’il devrait tout de même être permis de contester, surtout si elle conduit à la ruine de notre pays. Les références à « Munich » sont hors de propos quand on sait à quoi a conduit le slogan « l’Allemagne paiera ! ». Non seulement l’Allemagne n’a pas payé, mais elle a réarmé et remilitarisé faute d’un nouveau Congrès de Vienne. A ce titre, le pacifisme allemand, porté notamment par le SPD du chancelier Scholtz, a de solides arguments à faire valoir, tant les crimes perpétrés par la Wehrmacht en Ukraine entre 1941 et 1943 a marqué le peuple allemand d’une empreinte indélébile fondatrice de la démocratie allemande (6).

Face à une Russie impérialiste, l’urgence n’est pas de lui donner des prétextes à pousser plus avant son aventurisme. Comme face à l’Allemagne de 1936 qui réoccupe militairement la Rhénanie, il faut opposer un rapport de forces favorable à la protection des alliés, jusqu’aux confins du limes de l’empire occidental, à commencer par les pays baltes. Cela implique non pas un discours ambigu, mais un budget militaire à la hauteur des nécessités. En revenir aux 3% ne doit pas être un tabou : c’est sans doute un minimum, un bon début. Si tu veux la paix… La protection de nos alliés bénéficierait sans doute d’un soutien massif de l’opinion, au contraire du soutien à la cause ukrainienne en général, et à son éventuelle adhésion à l’Union européenne en particulier (7), qui ne cesse de baisser au point d’être aujourd’hui minoritaire, comme le révèlent les enquêtes périodiques de l’Ifop publiées par la Fondation Jean-Jaurès (8), confirmées par CSA pour le JDD et Ipsos pour la Tribune du dimanche.

Ne faut-il pas voir dans la fuite en avant belliciste de certains une sorte de fatigue démocratique qui, face à l’ampleur de l’effort de redressement à envisager, préfère choisir la fuite en avant dans l’utopie fédéraliste européenne ? En effet, quel meilleur moyen de souder la population européenne dans un nouveau « destin commun » qu’une bonne guerre face à un ennemi commun ? Les petits pas ne suffisent pas, « l’UE de défense » ne fonctionne pas, en dépit des efforts de l’actuelle Commission. Il faut un choc, un « grand geste », pour se lancer enfin dans le « saut fédéral » (9) !

Il est stupéfiant que ces bonnes âmes s’abandonnent ainsi à un projet réactionnaire par essence, puisqu’il consiste à démanteler le cadre national démocratique que la Révolution française a imposé à l’Europe (Russie exclue) pour émanciper ses peuples, et lui substituer le retour à une « Sainte Alliance » bien peu démocratique. Il fut un temps où le projet européen visait avant tout à préserver la paix et garantir la prospérité. Marianne* reviens, ils sont devenus fous !

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Cette tribune est publiée en souvenir de notre ami journaliste et membre du groupe Mars, Jean-Michel Quatrepoint, qui nous a quittés en début d’année.

(*) La carrière de journaliste spécialiste des questions industrielles de notre ami Jean-Michel Quatrepoint l’a conduit à collaborer notamment au journal Le Monde avant de rejoindre l’hebdomadaire Marianne où il laisse de nombreux regrets.

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(4) Cf. https://www.latribune.fr/opinions/ukraine-derriere-poutine-il-y-a-la-russie-qui-sera-toujours-voisine-de-l-europe-1-2-935023.html

(5) https://www.latribune.fr/opinions/ukraine-la-question-a-poser-aux-candidats-a-la-fonction-de-chef-des-armees-904988.html

(6) Cf. https://www.latribune.fr/opinions/les-illusions-de-la-russie-a-nouveau-brisees-a-kharkov-917879.html

(7) Cf. https://www.latribune.fr/opinions/pourquoi-faut-il-rester-prudent-sur-une-adhesion-rapide-de-l-ukraine-a-l-union-europeenne-928453.html

(8) L’opinion publique française face à la guerre en Ukraine, deux ans après le début du conflit – Fondation Jean-Jaurès (jean-jaures.org)

(9) Le saut fédéral : réponse politique au momentum sur la défense européenne ? – Fondation Jean-Jaurès (jean-jaures.org)

(1) Une nouvelle architecture de sécurité européenne (robert-schuman.eu) (égalemen disponible en anglais sur la même page). Cf. aussi la récente tribune d’un autre éminent diplomate (notre premier ambassadeur à Kiev) : Tribune (defnat.com)

(2) https://meta-defense.fr/2024/02/29/dissuasion-francaise-vs-russe-2024/

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* Le groupe Mars, constitué d’une trentaine de personnalités françaises issues d’horizons différents, des secteurs public et privé et du monde universitaire, se mobilise pour produire des analyses relatives aux enjeux concernant les intérêts stratégiques relatifs à l’industrie de défense et de sécurité et les choix technologiques et industriels qui sont à la base de la souveraineté de la France.

La coopération de défense franco-arménienne réaffirmée à Erevan

La coopération de défense franco-arménienne réaffirmée à Erevan

– Forces opérations Blog – publié le 2

Entre livraisons d’équipements, visites de terrain et signatures de nouveaux accords, le ministre des Armées était vendredi dernier en Arménie pour prendre acte in situ des effets du rapprochement bilatéral engagé il y a deux ans. 

Après une rencontre bilatérale en octobre dernier à Paris, Sébastien Lecornu s’est cette fois rendu en Arménie pour de nouveaux échanges avec son homologue arménien, Souren Papikian. Une première pour un ministre des Armées français, accompagné pour l’occasion de parlementaires et d’industriels français, dont MBDA, Thales, Nexter, Arquus et Safran. 

L’enjeu d’une visite présentée comme « historique » ? « Confirmer le soutien résolu de la France » envers un « partenaire de longue date qui fait aujourd’hui face à un défi de sécurité majeur, au sein d’un environnement régional incertain ». Régulièrement menacée, l’Arménie craint une nouvelle attaque du voisin azerbaïdjanais, soutenu par la Russie et la Turquie et accusé de préparer « une guerre totale ». 

« L’Arménie est dans le cadre de ses frontières. Elle doit pouvoir les défendre, elle doit pouvoir aussi défendre ses populations civiles et je rappelle que l’essentiel des armes que nous allons livrer en Arménie sont des armes purement défensives, et notamment la défense sol-air. (…) Il suffit que personne n’attaque Erevan et l’Arménie pour que ces armes soient inutiles, c’est aussi simple que cela », déclarait le ministre des Armées au micro de LCI. 

Entrepris dès 2022, le renforcement du soutien français se concentre depuis autour du triptyque équipements-formations-conseil. Ainsi, le ministre des Armées n’aura pas atterri dans la capitale arménienne les mains vides. Dans les soutes d’un A400M de l’armée de l’Air et de l’Espace, un lot de jumelles de vision nocturne conçues par Safran. Et dans les cartons, une offre pour l’acquisition de missiles sol-air Mistral 3 ainsi qu’un contrat, signé celui-là, pour la fourniture de fusils de précision par l’entreprise savoyarde PGM Précision. 

La délégation française aura également pris acte de la réception de véhicules de transport Bastion, des blindés légers produits par Arquus et dont la remise aux forces arméniennes était pressentie depuis plusieurs mois. Quant aux trois radars de surveillance GM200 de Thales commandés en octobre dernier, le premier « sera livré avant la fin de l’année », explique le ministère. 

Hormis l’envoi de conseillers de défense, la relation bilatérale s’étoffe d’un partenariat conclu entre Saint-Cyr et l’académie militaire Vazgen Sargsyan. Cinq cadets arméniens seront ainsi formés en France cette année, indique le ministère des Armées. Comme annoncé à l’automne dernier, un détachement d’instructeurs des troupes de montagne forme ce mois-ci des militaires arméniens au combat en montagne. Une formation conduite dans un camp d’entraînement de la région d’Armavir, dans l’ouest du pays, et qui sera suivie d’autres en 2024. 

Crédits image : ministère des Armées

Le couple franco-allemand : une liaison qui s’étiole à relancer

Le couple franco-allemand : une liaison qui s’étiole à relancer


Les changements politiques dans les deux pays ont vu progressivement s’éloigner la France et l’Allemagne, qui donnent l’impression de ne plus partager la même vision du monde. Ne rayons pas de nos mémoires le traité de l’Élysée de janvier 1963 qui a amorcé un destin commun entre nos deux Nations. Fin connaisseur des relations franco-allemandes grâce à sa double expérience acquise dans les sphères militaire et industrielle, le GCA (2S) Arnaud Sainte-Claire Deville propose de nous saisir de l’opportunité de l’élan donné par cette loi de programmation militaire pour relancer les relations entre les deux armées de terre.

***

Dans un contexte marqué par une détérioration générale de la relation franco-allemande, le domaine spécifique de la coopération de défense n’échappe pas à cette tendance. Pour autant la nouvelle LPM votée de ce côté du Rhin et, en regard, les efforts budgétaires conséquents annoncés par l’Allemagne constituent une opportunité pour redynamiser cette coopération de façon pragmatique et constructive, en particulier dans le domaine terrestre. Après avoir tenté de donner quelques clefs de compréhension au fossé qui semble se creuser entre les deux nations, cet article se propose d’esquisser dans trois domaines clefs que sont la formation, l’engagement opérationnel et le capacitaire, quelques pistes concrètes d’actions à mener à partir d’un existant, souvent omis, voire décrié, pourtant bien présent.

Alors que l’on observe le retour de la guerre de haute intensité susceptible d’être conduite en particulier sur le théâtre européen, il est essentiel de souligner la différence de culture stratégique de nos deux armées de terre.

Alors que nous continuons à privilégier un modèle médian, que nous estimons adapté à relever les différents défis des engagements de l’armée de terre, aussi bien dans le cadre de la solidarité stratégique, que de la prévention-influence comme de la protection-résilience, l’armée de terre allemande, même si elle a acquis au cours des trois dernières décennies une réelle capacité à intervenir loin de ses frontières, se recentre sur son cœur de métier historique , à savoir sa contribution à la défense de l’espace territorial de l’Alliance.

De façon plus ou moins consciente, le haut état-major allemand, s’il a un vrai respect pour la compétence de l’armée de terre française à conduire des opérations extérieures de contre-insurrection, se montre dubitatif quant à sa capacité à conduire des opérations d’envergure en contexte de haute intensité. La défaite de 40 continue de peser lourdement dans cette appréciation négative. Dans le subconscient de la culture militaire terrestre allemande, l’armée de terre française reste celle qui a été défaite en quelques semaines au cours de ce sombre printemps 1940. De plus notre modèle médian privilégiant des véhicules blindés à roues aptes à la projection mais moins mobiles tactiquement que des véhicules chenillés (privilégiés de l’autre côté du Rhin,) n’est pas de nature à modifier cette appréciation. Alors que nous revoyons à la baisse le rythme de modernisation de nos LECLERC, les Allemands accélèrent sur le plan qualitatif (annonce du Léopard 2 A8) comme sur le plan quantitatif (création de deux nouveaux bataillons de chars pour passer de 200 à 300 chars en ligne).

Il n’est donc pas étonnant dans ce contexte, pour reprendre l’analyse de plusieurs spécialistes, que la France n’apparaisse plus aujourd’hui pour la communauté de défense en Allemagne que comme un partenaire dont l’importance est en recul, cela étant tout particulièrement vrai dans le domaine terrestre. 

Certes comme une petite musique, régulièrement reprise de-ci de-là pourrait le laisser croire, nous pourrions, prenant en compte ces fortes divergences, délaisser cette relation. Or l’Allemagne reste incontournable, si nous voulons avancer dans la construction d’une Europe de la Défense, capable de protéger ses citoyens et de relever les défis sécuritaires qui concernent le territoire européen comme les enjeux liés à l’immigration en général et panafricaine en particulier. Seul un couple franco-allemand solide aussi sur les aspects défense pourra sensibiliser, via notre partenaire allemand, les Européens du Nord et de l’Est à ces défis ! 

La coopération de défense dans le domaine terrestre peut, en s’appuyant sur l’existant, apporter une contribution pragmatique, tout en se gardant de toute envolée lyrique.

L’exploitation du dispositif de formation initiale des officiers français (respectivement allemands) en est un premier exemple. En effet, alors que les officiers allemands ayant suivi ce cursus quittent ou viennent de quitter la Führungsakademie comme tout jeune breveté, leurs alter ego français commencent à intégrer l’enseignement militaire supérieur du 2e degré. Bien au-dessus de l’interopérabilité des matériels ou des procédures, celle des esprits peut permettre une meilleure compréhension de l’autre et dissiper les préjugés et idées reçues qui pervertissent notre relation bilatérale. Ce vivier restreint d’officiers brevetés possédant par leur cursus antérieur une véritable double culture doit faire l’objet d’une gestion fine de la part des DRH française comme allemande, en leur garantissant un parcours professionnel qualifiant dans leur propre armée tout en identifiant des périodes privilégiées les amenant à servir dans des états-majors opérationnels ou centraux de l’autre armée. L’objectif est bien d’employer le plus intelligemment possible ces officiers, en particulier en n’en faisant pas seulement des « spécialistes du franco-allemand », mais surtout des généralistes « comprenant le partenaire allemand ». 

La deuxième opportunité est offerte par la BFA. Souvent injustement critiquée et vilipendée (en particulier par ceux qui n’y ont jamais servi !), cette unité dispose dès le temps de paix d’un état-major permanent, outil remarquable pour améliorer la connaissance réciproque de la culture militaire de l’autre, puissant gage d’efficacité dans le cas d’un engagement opérationnel. La BFA, désignée en avril 2004 pour assurer dans le cadre de l’ISAF (sous commandement de l’Eurocorps) le mandat de juillet 2004 à janvier 2005 de la Kabul Multinational Brigade (KMNB), sut ainsi parfaitement relever le défi opérationnel. Articulée autour de deux bataillons appartenant organiquement à la brigade et un troisième multinational, la brigade s’appuya sur un état-major à 80 % franco-allemand, dont la moitié servait déjà au sein de l’état-major temps de paix de la brigade. La bonne intégration des 40 autres pourcents (Français et Allemands « de l’intérieur ») fut facilitée par ces pratiquants au quotidien du franco-allemand. Face au mauvais procès de la non-interopérabilité de la BFA, j’opposerai la certification réussie (prononcée en binational) de l’état-major lors d’un Aurige numérique en 2017, pilotée par une équipe binationale dont le chef était un officier général britannique, adjoint opérationnel de notre 1re Division. 

Dans le cadre de la solidarité stratégique avec nos alliés, il serait intéressant en s’appuyant sur ce vécu de prévoir en planification des scénarios d’engagement d’une brigade franco-allemande autour de ce noyau dur de la BFA, garant ab initio d’un niveau correct d’interopérabilité. La participation régulière (mais sans être systématique) d’éléments franco-allemands de la BFA à des missions de renforcement du flanc Est de l’OTAN serait de nature à conforter sa crédibilité opérationnelle. Des possibilités comme « Lynx » en Estonie et « Aigle » en Roumanie sous la responsabilité française ou en Lituanie sous la responsabilité allemande méritent d’être exploitées.

Le domaine capacitaire, pour peu que l’on adopte une approche réaliste et pragmatique, offre aussi des opportunités pour redynamiser une coopération qui au-delà des grandes déclarations politiques (certes nécessaires, mais toujours insuffisantes !), est pour le moins atone. Sans remettre en question notre choix d’une armée de forces médianes, réactive, agile et soutenable, qui fait le choix de la cohérence plus que de la masse, il existe en matière capacitaire des convergences possibles avec une armée de terre allemande viscéralement très attachée à sa culture blindée-chenillée.

Il ne s’agit pas ici d’évoquer le MGCS[1], qui se situe dans un cadre espace-temps dépassant ces quelques réflexions. Son arrivée dans les parcs, au mieux en 2050, pose cependant le problème de la rénovation de nos propres Leclerc qui, compte tenu du tuilage avec l’arrivée de ces nouveaux matériels, seront encore en service dans une bonne partie de la deuxième moitié de ce siècle. La rénovation en cours du char Leclerc se limite en fait à une « scorpionisation » avec quelques timides améliorations dans le domaine de la protection. Alors que le Leopard 2 est en passe d’aborder son 8e incrément d’amélioration depuis 1980 avec une version A8 en préparation, alors que KNDS[2] a présenté au dernier salon Eurosatory l’intégration possible d’équipements de nouvelle génération[3] (protection, LAD[4]…), alors que les Émirats arabes unis réfléchissent également sur l’amélioration de leurs propres XL, les conditions semblent réunies pour concevoir et développer en franco-allemand, en s’appuyant sur un acteur industriel binational comme KNDS, des solutions pour améliorer et garantir la pérennisation du Leclerc à un juste niveau de performances.

Le retour au premier plan de l’importance de l’artillerie à travers le conflit ukrainien offre également des possibilités communes de développement tant dans le domaine des lanceurs que celui des munitions.

Enfin les domaines de la mobilité et de la contre-mobilité qui reviennent eux aussi au centre des discussions, peuvent également offrir d’autres opportunités de développement en commun.    

Le projet capacitaire TITAN qui vise à reporter sur les forces lourdes l’effort fait sur les forces médianes avec SCORPION pourrait intégrer ces domaines de coopération.

La coopération avec nos partenaires allemands reste dans le domaine terrestre comme dans bien d’autres un exercice difficile, mais pas impossible. Il serait à mon sens dangereux de céder par facilité et conformisme intellectuel à la tentation de tout arrêter.

Alors que l’Allemagne va porter son effort budgétaire de défense à 75 Md € annuel dès 2024 (à comparer avec nos 47 Md €), il serait inconséquent de ne pas chercher à entretenir et à développer les liens avec cet incontournable partenaire géostratégique en Europe, comme dans les approches de ce continent. Des opportunités existent à partir d’un existant bien réel et pour lequel des investissements ont été consentis depuis de nombreuses années. Nos deux armées ont une opportunité pour écrire en commun une feuille de route pragmatique et concrète dans les trois domaines clefs de la formation, de l’engagement opérationnel et des équipements.


NOTES :

  1. Programme d’armement MGCS – Wiklipedia.
  2. Krauss Maffei Nexter Defense System.
  3. Ces équipements étaient intégrés sur la plate-forme de démonstration de l’E-MBT développé par KNDS.
  4. Lutte Anti-Drones.

CERCLE MARÉCHAL FOCH

CERCLE MARÉCHAL FOCH

Le G2S change de nom pour prendre celui de Cercle Maréchal Foch, tout en demeurant une association d’anciens officiers généraux fidèles à notre volonté de contribuer de manière aussi objective et équilibrée que possible à la réflexion nationale sur les enjeux de sécurité et de défense. En effet, plutôt qu’un acronyme pas toujours compréhensible par un large public, nous souhaitons inscrire nos réflexions sous le parrainage de ce glorieux chef militaire, artisan de la victoire de 1918 et penseur militaire à l’origine des armées modernes. Nous proposons de mettre en commun notre expérience et notre expertise des problématiques de Défense, incluant leurs aspects stratégiques et économiques, afin de vous faire partager notre vision des perspectives d’évolution souhaitables. (Nous contacter : Cercle Maréchal Foch – 1, place Joffre – BP 23 – 75700 Paris SP 07).