Le général Schill défend la pertinence des troupes aéroportées
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Un article publié en 2016 par le Modern War Institute, affilié à l’académie militaire de West Point, avait été catégorique : les opérations aéroportées [OAP] massives appartiennent au passé. Pourquoi ? Parce que « l’augmentation spectaculaire de la précision des systèmes de défense aérienne a considérablement réduit la capacité de survie des avions impliqués dans ce type de mission ».
Et d’ajouter : « Les avantages tactiques limités des opérations aéroportées modernes de grande envergure sont éclipsés par leurs pertes stratégiques potentielles. L’armée devrait donc les mettre de côté et plutôt se limiter aux opérations spéciales. »
La guerre en Ukraine a pu apporter de l’eau au moulin à l’auteur de cet article. La seule manœuvre d’ampleur dite d’enveloppement vertical tentée par les troupes aéroportées russes [VDV] a pris la forme d’un assaut aéromobile contre l’aéroport de Hostomel, avec l’objectif d’établir une tête de pont près de Kiev. Or, elle s’est soldée par un échec.
« Ce type d’assaut pouvait être anticipé compte tenu d’une part de l’appétence de longue date de l’armée russe pour l’enveloppement vertical, d’autre part de la géographie du champ de bataille : l’objectif est positionné à moins de 100 km de la zone de contact », a ainsi résumé une note de la Fondation pour la recherche stratégique [FRS], publiée en mars 2022.
Depuis, les combats en Ukraine ont pris la forme d’une guerre d’usure et de position, avec un recours massif aux feux indirects [roquettes, missiles, munitions téléopérées, etc.].
Pour autant, ces dernières années, l’armée de Terre a mené plusieurs OAP au Sahel. Mais il est vrai que l’environnement n’y était pas contesté comme il l’est en Ukraine. Cependant, en 2022, la 11e Brigade Parachutiste [BP] prit par à l’exercice « Thunder Lynx », lequel consista à mener une opération aéroportée à très court préavis en Estonie. Celle-ci « illustre la capacité des forces françaises à intervenir en urgence et à soutenir un pays allié », fit alors valoir l’État-major des armées [EMA]. Et d’ajouter qu’elle avait été « exécutée comme un acte de solidarité stratégique » envers Tallinn.
Quoi qu’il en soit, comme l’a rappelé le général Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT] à l’issue d’une inspection de la 11e BP, cette semaine, certains « concluent de l’observation des conflits actuels que les troupes parachutistes, légères par nature, deviennent désuètes ». Or, pour lui, c’est tout le contraire.
La 11e BP, « faite d’unités cultivant agilité et capacité d’autonomie tactique, est capable d’opposer à l’hyper létalité des drones et de l’artillerie sa mobilité et sa capacité à s’adapter », a fait valoir le CEMAT. « Celles-ci sont des sources de fulgurance, de nature à dépasser le blocage tactique de la prévalence du feu que la guerre en Ukraine illustre aujourd’hui », a-t-il ajouté.
En outre, « l’esprit para », qui se caractérise par « la souplesse » et la « trempe », pour reprendre les mots du général Marcel Bigeard, illustre « parfaitement les qualités nécessaires à la mise en œuvre du commandement par l’intention », a poursuivi le CEMAT. »
« Pour être aux résultats, il convient de laisser toute leur place aux subordonnés et à leur esprit d’initiative. Alors que la transparence s’impose sur le champ de bataille et que la tendance est à la centralisation de la décision, le commandement par l’intention apparaît comme un moyen concret d’entretenir la liberté d’action nécessaire à la victoire », a-t-il expliqué.
Le général Schill n’est pas le seul à considérer que les troupes aéroportées ne sont pas « désuètes » : en témoigne l’exercice aéroporté Saber Junction, dont le coup d’envoi a été donné à Eglsee [Allemagne], sous l’égide de l’US Army, le 4 septembre. Celui-ci mobilise 4500 parachutistes venus de 11 pays membres de l’Otan.
« Les opérations de combat à grande échelle sont quelque chose que nous devons constamment pratiquer, nous devons rester au courant de tous les changements qui se produisent », a expliqué le général américain Steve Carpenter, le chef du 7th Army Training Command. « Nous devons nous adapter à ce qui se passe en Ukraine et nous entraîner […] afin que tout adversaire de l’Otan […] pense qu’il est absolument impensable de déclencher une guerre contre les États-Unis ou leurs alliés et partenaires », a-t-il conclu.