Pour Mme Parly, on peut « parler d’une forme de résurgence de Daesh en Syrie et en Irak »
Au cours de l’année 2020, dans le cadre de l’opération Chammal, les Rafale opérant depuis la base aérienne projetée [BAP] H5, en Jordanie, ont effectué plusieurs frappes aériennes contre des positions tenues par l’État islamique [EI ou Daesh], notamment dans le nord de l’Irak. La dernière a été effectuée le 5 décembre dernier, lors d’une mission d’appui aérien rapproché au profit des forces irakiennes.
Plus généralement, et depuis la fin de son « califat » autoproclamé avec sa défaite à Baghouz [Syrie], en mars 2019, Daesh a repris de la vigueur au cours de ces derniers mois, au point d’avoir été en mesure de lancer un assaut coordonné d’une ampleur qui n’avait plus été vue depuis longtemps contre des milices chiites du Hachd al-Chaabi [unités de la Mobilisation populaire], dans la région de Samarra [Irak], en mai. Plus récemment, en Syrie, dans le triangle Alep – Hama – Raqqa [c’est à dire dans la « Badiya »], il a multiplié les attaques meurtrières contre les forces gouvernementales syriennes et les troupes russes, ces dernières ayant été également visées par le groupe Hurras al-Din, le 1er janvier.
Selon le groupe d’experts du comité de suivi des Nations unies sur les sanctions imposés aux organisation jihadistes, Daesh se livre actuellement à une « guerre d’usure » en s’en prenant aux forces locales, en détruisant les récoltes appartenant aux minorités et à ses opposants et en commettant des assassinats ciblés contre des personnalités politiques.
Le dernier rapport de l’inspection du Pentagone concernant l’opération Inherent Resolve [OIR – nom de la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis] a observé que Daesh continuait « mener une insurrection de faible niveau » tant en Irak qu’en Syrie, en se concentrant sur les zones rurales. Et, citant le général Kenneth McKenzie, le chef de l’US Centcom, le commandement américain pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale, il a prévenu que l’organisation jihadiste « pourrait reprendre des territoires en peu de temps en cas de diminution de la pression antiterroriste. »
Qui plus est, s’appuyant sur des informations de la Defense Intelligence Agency [DIA – renseignement militaire américain, ndlr], ce rapport a également souligné que Daesh cherchait toujours à encourager ses sympathisants à commettre des attaques dans les pays occidentaux, sans probablement avoir la capacité de les planifier par lui-même. « L’État islamique cherche à inspirer des attaques locales à petite échelle pour démontrer sa portée en Occident », a avancé l’Inspection générale du Pentagone.
Quoi qu’il en soit, son rapport parle d’un risque de « résurgence » de Daesh. Résurgence pouvant être rendue plus compliquée par la difficulté qu’il éprouve à se financer, ses « flux de revenus » étant désormais « précaires ».
Pour autant, à Paris, l’évaluation de la menace que représente Daesh va au-delà de celle décrite par le rapport du Pentagone. Sur les ondes de France Inter, le 10 janvier, la ministre des Armées, Florence Parly, s’est inquiétée de la « résurgence » de l’État islamique au Levant et non du « risque de résurgence ».
« La France est toujours engagée » et « considère que Daesh est toujours présent. On peut même parler d’une forme de résurgence de Daesh en Syrie et en Irak », a en effet affirmé Mme Parly. « Depuis la chute de Baghouz, dans la moyenne vallée de l’Euphrate où était concentré le dernier bastion de l’EI, on peut constater que Daesh reprend des forces en Syrie », a-t-elle insisté, évoque l’attaque contre un bus des forces syriennes, commise dans le secteur de Deir ez-Zor, le 30 décembre.
« Donc Daesh n’est pas éradiqué au Levant. C’est la raison pour laquelle nous y sommes toujours, à travers des actions de formation et notre chasse puisque nous sommes hébergés par les Jordaniens », a ajouté la ministre.
Il y a un peu plus d’un an, le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, avait livré la même estimation. « Daesh n’est pas mort. Daesh a subi des défaites, mais cette menace est permanente. Un arc terroriste est en train de se constituer. Il y a les risques d’extension de ces groupes terroristes vers le Tchad, vers le Nigeria. […] Il y a aussi les groupes terroristes qui fonctionnent en Libye. Tout cela fait un arc des groupes terroristes qui peuvent remonter jusqu’au Levant », avait-il dit, également à l’antenne de France Inter, en décembre 2019.