KNDS France espère porter les chars Leclerc émiriens à un « niveau de performance inégalé »

KNDS France espère porter les chars Leclerc émiriens à un « niveau de performance inégalé »


Selon la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30, l’armée de Terre devra se contenter de 200 chars Leclerc portés au standard XLR à l’horizon 2035. Aussi, contrairement à l’Allemagne, il n’est pas question, du moins pour le moment, de financer le développement d’une solution intérimaire permettant d’attendre la mise en service du Système principal de combat terrestre [MGCS – Main Ground Combat System].

Le standard XLR du Leclerc comprend l’intégration d’équipements nécessaires au combat collaboratif, comme le Système d’information du combat SCORPION [SICS] et la radio CONTACT, d’un tourelleau téléopéré de 7,62 mm et d’une nouvelle conduite de tir. L’accent est mis sur la protection, en particulier contre les engins explosifs improvisés et les roquettes. Il est aussi question d’installer le brouilleur BARAGE. L’ajout d’un système de protection active [APS], pourtant souhaité par l’armée de Terre, n’a pas été retenu.

Les Leclerc français seront-ils, à l’arrivée, moins performants que ceux mis en œuvre par les forces armées émiriennes ?

À l’occasion du salon de l’armement IDEX, qui vient d’ouvrir ses portes à Abou Dhabi, KNDS France a réaffirmé « son soutien aux forces armées émiriennes pour les 30 prochaines années ». Et l’industriel d’ajouter qu’il a « structuré un projet de modernisation des chars Leclerc » avec plusieurs acteurs locaux, dont les groupes EDGE et BHE. Et cela à l’appui d’une « offre engageante » en cours de discussion avec le ministère émirien de la Défense afin de « porter le Leclerc à un niveau de performance inégalé ».

Reste à voir ce que KNDS France entend par « niveau de performance inégalé ». En tout cas, selon la photographie illustrant son communiqué de presse relatif au salon IDEX 2025, le char Leclerc devant être exposé n’est pas doté du système ASCALON.

Cela étant, la modernisation des chars Leclerc émiriens est sur la table depuis plusieurs années. En novembre 2020, le directeur de KNDS France [Nexter, à l’époque] pour le Moyen-Orient avait expliqué au mensuel Al Jundi [« Le soldat »] que cette rénovation consisterait à augmenter la puissance de feu ainsi que la capacité d’observation grâce à la robotique. Un accent devrait être mis sur les capacités C2 [command & control] et la protection.

Probablement que l’armée de Terre suivra de près cette affaire… car si la modernisation de ses Leclerc doit se faire a minima, c’est parce qu’il lui manquait des partenaires pour être plus ambitieuse. En tout cas, c’est ce qu’avait suggéré son chef d’état-major, le général Pierre Schill, lors d’une audition parlementaire en 2023.

« Concernant le Leclerc, mon objectif est de lancer une première modernisation. Nous réaliserons des études complémentaires afin de définir en 2025 la portée et la profondeur de cette modernisation », avait-il dit. « Je souhaite m’associer autant que possible à des pays partenaires », avait-il continué, avant de préciser que les « Émiriens [étaient] prêts à coopérer » avec la France.

Pour rappel, les forces armées émiriennes ont reçu 388 exemplaires d’une version « tropicalisée » du Leclerc, ainsi que 46 chars de dépannage. Et cela, dans des conditions très avantageuses puisque le contrat, signé en 1992, se révéla être un gouffre financier pour la partie françaises. Engagés au Yémen, ils ont fait une très bonne impression, à en juger par les retours d’expérience [RETEX] publiés à l’époque. Puis, les Émirats arabes unis en ont cédé plusieurs dizaines d’unités à la Jordanie, en 2020.

Variations sur un thème

Variations sur un thème

Blablachars – publié le 22 janvier 2025

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L’International Armoured Vehicles (IAV) Conference qui a débuté hier à Farnoborough a déjà permis de se faire une idée assez précise des tendances en matière de blindés. La principale ligne de force constatée au vu des présentations effectuées hier semble être la constitution de familles de véhicules blindés, issue d’un châssis unique. Ainsi, la présentation de General Dynamics United Kingdom (GDUK) a permis de découvrir la composition de la famille issue de la plateforme Ajax, déjà déclinée en six versions répondant aux noms d’Ajax, Ares, Athena, Argus, Atlas et Apollo. Le futur de l’Ajax pourrait être constitué par le développement de huit autres versions : véhicule de combat d’infanterie (VCI), mortier (sous tourelle), appui feu direct, défense sol-air (DSA), surveillance, ambulance, poseur de pont et  soutien. L’autre déclinaison annoncée est celle du blindé de Rheinmetall pour lequel l’armée italienne envisage pas moins de seize versions ! Selon les informations disponibles, la plateforme du Lynx italien servirait de base pour des versions VCI, Reconnaissance 120mm, Appui feu, commandement, antichar, génie (déminage), transport de munitions, mortier sous tourelle 120mm, lutte anti drone (LAD), ambulance, Reconnaissance (spécifications inconnues), génie (lame dozer), dépannage, mortier de 81mm et entraînement. Le programme A2CS prévoit la fourniture de 1050 véhicules pour un montant global de 16 milliards d’euros, avec l’objectif de disposer d’une première brigade équipée d’ici cinq ans.

Ces deux présentations appellent quelques commentaires. La prise en compte de la nécessité de posséder une véritable composante blindée mécanisée s’impose désormais à la quasi totalité des armées en Europe ou ailleurs. Cette volonté se traduit de plus en plus par le choix d’une plateforme unique, dont la polyvalence autorise le développement de nombreuses versions. Un autre aspect notable de cette tendance est la présence au sein des familles évoquées d’une version char médian doté d’un armement de 120 ou de 105mm, ce dernier pouvant être suffisant pour certains pays confrontés à des menaces mixtes. Cette nouvelle tendance est une véritable aubaine commerciale pour les industriels concernés qui trouvent là une réelle opportunité de développement et rentabilité pour le VCI. Sur le plan technique, la création d’une famille de blindés à partir d’une plateforme unique impose de doter cette dernière de caractéristiques spécifiques telles que : Implantation du groupe moto propulseur à l’avant permettant de dégager l’espace arrière, poids contenu pour se constituer une réserve de masse suffisante ou encore architecture ouverte permettant d’intégrer des modules de mission en mode « plug and play ». Pour le moment, Rheinmetall avec le Lynx, General Dynamics Land Systems avec l’Ajax avec l’Ajax et l’Ascod II et BAE Systems Hagglunds avec le CV90 offrent déjà des possibilités. Il est probable que demain, ces constructeurs seront rejoints par d’autres, désireux de profiter à leur tour de cette tendance. 

 

 

Variations proposées par GDUK pour l’Ajax

 

Les versions du Lynx pour le programme A2CS

 

Enfin, il est dommage (pour ne pas triste) de constater que le pays inventeur du concept de famille blindée reste pour le moment absent de ce marché. Avons-nous le droit d’assister en simple spectateur à l’émergence de cette tendance, quand on peut revendiquer la création des familles d’AMX 13, AMX 30 et dans une moindre mesure AMX 10 ? Il est intéressant de noter que les trois firmes déjà présentes sur le marché ont développé les engins sur leurs fonds propres sans attendre d’hypothétiques commandes étatiques pour leur produit. Devrons nous attendre la mise en route du programme Titan ou celui du MGCS pour voir des engins chenillés peupler nos brigades mécanisées. Outre l’aspect blindé mécanisé d’une telle composante, une initiative française en ce sens contribuerait à redonner une véritable masse de manœuvre à l’armée de terre, facteur essentiel de conflits de haute intensité ! Sébastien Lecornu a récemment demandé aux armées françaises « de prendre des risques » et a rappelé que « la France n’échangera pas sa « sécurité militaire contre des hamburgers et des voitures allemandes » traçant la voie pour les industriels concernés sans attendre les financements nécessaires pour rattraper trente années d’abandon de la composante blindée mécanisée !