Kourou : Lancement réussi pour le satellite militaire CSO-1

Kourou : Lancement réussi pour le satellite militaire CSO-1

Ce lancement, à partir d’un lanceur russe SOYOUZ, marque le début du renouvellement de l’ensemble des capacités spatiales de la défense française. Le renouvellement complet interviendra pendant la loi de programmation militaire 2019-2025, dans les domaines de l’observation, des communications et du renseignement électromagnétique.

 

La constellation CSO, composée de 3 satellites, inaugure la nouvelle génération de satellites d’observation militaire qui sera complètement déployée à l’horizon 2021, en remplacement des satellites Hélios 2 actuellement en service. CSO apporte une qualité d’image sans équivalent en Europe permettant aux armées d’accéder à un plus grand niveau de détails, une plus-value significative pour les activités de renseignement et de ciblage. CSO est également un système à la pointe de la technologie offrant aux utilisateurs, en un seul survol, plus d’images sur une même zone géographique. Enfin, ses capacités de réactivité permettent une meilleure adaptation au rythme des opérations.

Le projet CSO, développé dans un cadre national au sein du programme MUSIS (Multinational Space-based Imaging System), est résolument ouvert aux partenariats européens au travers d’accords bilatéraux : l’Allemagne, la Suède et la Belgique ont déjà rejoint la communauté CSO via des accords de coopération ; des accords avec d’autres pays européens sont en discussion.

La Direction générale de l’armement (DGA) assure la conduite du programme MUSIS, en équipe intégrée avec le Commandement interarmées de l’espace de l’État-major des armées. Elle assure en propre la maîtrise d’ouvrage du segment sol utilisateurs, ainsi que l’ensemble des aspects liés à la mise en place des partenariats de coopération. La DGA a délégué au Centre national des études spatial (CNES), la maîtrise d’ouvrage pour la réalisation et le lancement des satellites CSO, ainsi que pour la réalisation du segment sol mission. La maîtrise d’œuvre des éléments constitutifs du système MUSIS fait intervenir les industriels Airbus Defence & Space, Thales Alenia Space, Thales Services, Capgemini et Arianespace.

Vidéo ci-dessous : décollage à partir de la 21e minute

Syrie : Suheil al-Hassan, un maître espion sanglant

Syrie : Suheil al-Hassan, un maître espion sanglant

TTU – Publié le 19 septembre 2018

https://www.ttu.fr/syrie-suheil-al-hassan-un-maitre-espion-sanglant/

Récemment promu général à 48 ans, le charismatique patron des forces spéciales syriennes Quwat al-Nimr reste à ce jour le seul militaire de son pays à s’être entretenu en privé avec Vladimir Poutine, et sans doute l’officiel syrien le plus écouté par les services occidentaux. Donné pour mort en 2015, érigé en héros par le régime qui l’a, depuis, surnommé le Tigre, auteur de poésies, Suheil al-Hassan est l’objet d’un véritable culte de la personnalité sur les réseaux sociaux.

En novembre dernier, Valery Gerasimov déclarait qu’il était le chef militaire syrien qui avait accompli «les missions les plus importantes dans les batailles les plus décisives». Membre à part entière de l’état-major russo-syrien, Hassan intègre à son dispositif plusieurs dizaines d’anciens Spetsnaz regroupés dans une unité baptisée «Le détachement», financée et entraînée par Moscou.

Membre de la minorité alaouite, il a prouvé sa loyauté au clan Assad dès le début de la contestation en 2011. Espion, il se spécialise dans le contre-terrorisme, et infiltre plusieurs agents au sein des réseaux d’Al-Qaida dès 2005. Commissaire politique, il est chargé dès le début des troubles des opérations spéciales au profit de la Direction du renseignement aérien sur la base de Hama, dans le but de veiller à la loyauté des officiers lorsque ceux-ci reçoivent l’ordre de tirer sur les manifestants. Il crée une unité spéciale constituée de volontaires et de mercenaires destinée à exécuter tous les défecteurs et les contestataires au sein de l’armée syrienne, puis à massacrer les populations des villages rebelles.

Sa politique de la terre brûlée a eu un impact psychologique considérable sur le moral de la population sunnite au moment où le pouvoir de Damas était sur le point de s’effondrer en 2012. Les militants des droits de l’Homme le considèrent comme le criminel de guerre le plus sanglant de Bachar el-Assad.

Chef de guerre enfin, en 2013 il intègre les forces spéciales Qawat al-Khassa pour faire face au Front Al-Nosra dans la région stratégique de Lattaquié, où est située la base navale russe. Une nomination qui lui permet non seulement de se distinguer au combat mais surtout de tisser son réseau auprès des Russes. Là il prend rapidement conscience de la nécessité de constituer un autre corps de forces spéciales, plus offensif et spécialisé dans les opérations urbaines bientôt baptisé Quwat al-Nimr, dont il prend le commandement.

 

Deux anciens de la DGSE mis en examen pour trahison au profit d’une puissance étrangère

Deux anciens de la DGSE mis en examen pour trahison au profit d’une puissance étrangère

Le ministère des Armées a partiellement confirmé une information donnée par l’émission « Quotidien » [TMC] et le journal Le Monde, selon laquelle des agents de la Direction générale de la sécurité extérieure [DGSE] ont été arrêtés et mis en examen pour intelligence avec une puissance étrangère.

Ainsi, via un communiqué publié le 24 mai au soir, le ministère des Armées précise que deux de ses « anciens personnels et la conjointe de l’un d’entre eux ont été déférés devant le juge d’instruction, pour des faits susceptibles de constituer les crimes et délits de trahison par livraison d’informations à une puissance étrangère, provocation au crime de trahison et atteinte au secret de la défense nationale. »

Toujours d’après la même source, les deux individus concernés, qui ont « appartenu à la DGSE par le passé », n’étaient plus en activité au moment de leur arrestation.

Contrairement à ce qu’ont affirmé Quotidien et Le Monde, les agissements de ces deux personnes n’ont pas été détectés par la Direction générale de la sécurité intérerieure [DGSI] mais par la DGSE elle-même. « Ces agissements d’une extrême gravité ont été détectés par ce service qui a porté à sa propre initiative ces faits à la connaissance du procureur de Paris, sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale », précise en effet le ministère des Armées.

D’après une source judiciaire sollicitée par l’AFP, l’une des personnes impliquées a été mise en examen du « chef de provocation directe au crime de trahison ».

« Ce sont des faits graves. Les informations qui auraient été transmises sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’État », a indiqué Florence Parly, la ministre des Armées, ce 25 mai, à CNEWS.

Le ministère des Armées et cette source judiciaire n’ont pas précisé la « puissance étrangère » pour laquelle ces deux anciens de la DGSE ont travaillé. D’après les deux médias qui ont révélé cette affaire, il s’agirait de la Chine.

Si tel est le cas, ce ne serait pas inédit. À la fin des années 1990, un officier de la DGSE en poste à Pékin, chargé d’assurer la liaison TOTEM, qui consiste à entretenir des relations avec les services chinois, avait été « retourné » par son interprète féminin. Cette information avait été révélée par Franck Renaud, dans son livre « Les diplomates : Derrière la façade des ambassades de France« .

Cyber espionnage : les supply chain occidentales ciblées

Cyber espionnage : les supply chain occidentales ciblées

TTU -24/05/2018

https://www.ttu.fr/cyber-espionnage-les-supply-chain-occidentales-ciblees/

L’interdiction de commercialisation des smartphones chinois ZTE sur les bases militaires américaines a relancé le débat sur les techniques de cyber espionnage ciblant les secteurs stratégiques occidentaux par l’infiltration de malwares logiciels ou matériels au travers des éléments les moins protégés de leur supply chain, dont la détection et la neutralisation sont par nature rendues délicates en raison de leur complexité.

C’est la société russe d’antivirus Kaspersky qui a été au cœur de la polémique l’année dernière, en raison de la présence de ses solutions sur plusieurs milliers d’ordinateurs des agences fédérales américaines, et du financement de la thèse de son fondateur par l’ancien service d’interception, le FAPSI, désormais intégré au FSB.

Pourtant, régulièrement, Kaspersky identifie les risques liés à des logiciels utilisés par des milliers d’entreprises occidentales, et souvent reliés aux services chinois. La solution NetSarang, installée sur de nombreux serveurs DNS (qui établissent la correspondance entre un nom de domaine et une adresse IP), ou le logiciel de nettoyage des disques durs CCleaner abritent en effet de puissantes backdoors. Mais les documents d’Edward Snowden avaient également révélé l’instrumentalisation par les services anglo-saxons des systèmes d’exploitation de Microsoft ou d’Apple sans même évoquer la suite bureautique Office.

L’approche matérielle est, elle, beaucoup plus coûteuse et complexe à détecter. Les semi-conducteurs sont souvent contrefaits pour abriter des solutions d’écoutes, et leur analyse nécessite en effet des inspections physiques (imagerie au rayon X, chromatographie, tests acoustiques, microscopie électronique…), électrique, ou logique (surveillance des flux entrants et sortants).

Loin d’être marginales, ces contrefaçons sont massives et représentent un marché de 100 milliards de dollars par an. Mais ce sont sans doute les coûts d’achats des matériels qui représentent la porte d’entrée la plus efficace pour les opérations de renseignement. C’est ainsi que certains routeurs de fabrication chinoise ou certains chipsets de PC ou de smartphone sont désormais en situation de quasi-monopole pour avoir permis la démocratisation de ces technologies à un prix attractif.

 

Frappes en Syrie : les détails de la contribution française

Frappes en Syrie : les détails de la contribution française

T.d.L, avec A.D | Le Parisien – 14 avril 2018,

leparisien.fr/international/frappes-en-syrie-les-details-de-la-contribution-francaise-14-04-2018-7663731.php

L’Elysée a diffusé ce cliché pris dans la nuit du président français et de la ministre des Armées, ainsi qu’une bonne partie de l’Etat-major militaire, dans une salle de crise, pendant l’opération militaire. Présidence de la République.

La France a tiré douze missiles sur deux cibles, dans la région de Homs.

Macron, chef de guerre. Pour la première fois de son quinquennat, le jeune président français a du enfiler ce costume maintes fois utilisé par son prédécesseur, en faisant participer l’armée française, conjointement avec les armées américaine et britannique, à une série de frappes en Syrie.

Des frappes « circonscrites aux capacités du régime syrien permettant la production et l’emploi d’armes chimiques », selon les mots-mêmes du chef de l’Etat, qui s’est exprimé dans un communiqué pendant la nuit, alors que ses services diffusaient une photo le montrant avec Florence Parly, ministre des Armées, et plusieurs membres de l’État-major militaire dans le fameux « PC Jupiter », en pleine coordination des attaques.

Des missiles depuis la Méditerranée

Sur la centaine de missiles – selon la Russie – tirés par les trois armées, la France en a lancé douze. L’attaque s’est déroulée en deux temps. Un volet maritime d’abord, avec la mobilisation de 5 frégates multi-missions et un bâtiment de soutien. De ces frégates, sont partis trois missiles de croisière, comme on peut le voir sur cette vidéo diffusée par la ministre des armées.

VIDEO. Tir de missile depuis une frégate française

https://twitter.com/i/web/status/985051075303616512

Un raid aérien

Vingt à trente minutes plus tard, neuf autres missiles ont été lancés par des chasseurs français qui avaient décollé plusieurs heures plus tôt de «de plusieurs bases aériennes en France », selon la ministre. Ce raid aérien comprenait cinq Rafale, quatre Mirages 2000-5, deux Awacs (avions de reconnaissance) et cinq ravitailleurs.

Là encore, l’armée a diffusé une vidéo du décollage des chasseurs français.

VIDEO. Le décollage des Rafale dans la nuit

https://twitter.com/i/web/status/984984444623781888

Les frappes françaises avaient comme objectif un site de stockage d’armes et un site de production, situés tous deux dans la région de Homs.

Une attaque «coordonnée »

Comme Washington et Londres, Paris a insisté sur l’étroite collaboration qui a permis ces frappes «coordonnées ». Parlant d’une «parfaite synchronisation », la ministre des Armées Florence Parly a expliqué s’être entretenue avec ses homologues étrangers toutes les nuits de la semaine passée. Ce qui laisserait entendre que l’opération était déjà en cours de préparation depuis plusieurs jours, alors même que Donald Trump distillait des indices contradictoires sur son imminence.

Concernant la frappe en elle-même, Emmanuel Macron n’a prévenu son homologue russe Vladimir Poutine, allié d’Assad, qu’une fois l’opération lancée.

Sur le plan intérieur, Edouard Philippe avait prévenu dès vendredi soir les présidents de l’Assemblée et du Sénat.

Objectif atteint ?

« Une bonne partie de son arsenal chimique a été détruite », a déclaré Jean-Yves Le Drian sur la chaîne BFMTV. « Beaucoup a été détruit par les frappes de cette nuit », a-t-il insisté.

S’il a assuré que toute utilisation «d’armes chimiques déclencherait une «nouvelle intervention », il a assuré que la visite fin mai du président Emmanuel Macron en Russie, alliée de Damas, n’était « pas remise en cause ».

Au delà de la destruction de l’arsenal chimique syrien, l’objectif de la diplomatie française est clairement de faire le pari des frappes pour relancer le processus politique de résolution du conflit. Paris souhaite ainsi «travailler sérieusement» avec la Russie pour parvenir à « une solution politique », a souligné l’Elysée. Une proposition de dialogue bien ambitieuse au vu de la réaction de l’ambassadeur Russe à Washington ce samedi, qualifiant ces frappes d’ «insultes» au président russe.

 

Poker (sans le nucléaire) à la syrienne: Fremm, Rafale, Mirage et leur cortège de sortie cette nuit

Poker (sans le nucléaire) à la syrienne: Fremm, Rafale, Mirage et leur cortège de sortie cette nuit

Philippe Chapleau – Lignes de défense – 14 04 2018

http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/

Les moyens engagés par …

La France:
– selon les premières informations dévoilées par l’Elysées et l’EMA, en mer, 3 Fremm qui ont tiré des missiles de croisière navals (MDCN), une frégate AA, une frégate SAM et un bâtiment de commandement,
– dans le ciel: deux Awacs, 5 tankers pour le ravitaillement (photo ci-dessous, armée de l’air)

et 5 Rafale pour les frappes air-sol (photo ci-dessous EMA), ainsi que 4 Mirage 2000:

12 missiles français auraient été tirés dont 9 par des Rafale lors de ce raid dont la partie aérienne a tout d’un exercice Poker.

Les Etats-Unis:
– l’US Air Force a mis en l’air des bombardiers B-1B Lancer,
– des F-16 et des F-15 ont assuré des missions de couverture aérienne
– l’USS Donald Cook (DDG-75) et un croiseur lance-missiles de la classe Ticonderoga, entre autres, ont tiré des Tomahawk.
– des drones dont un RQ-4B ont assuré des missions ISR pré et post frappes

La Grande-Bretagne:
– Londres a utilisé quatre avions de chasse Tornado GR4 de la Royal Air Force, équipés de missiles Storm Shadow. Huit missiles ont été tirés selon le MoD.

Trois cibles principales ont été visées selon le Pentagone:

Attaque chimique : La France publie un  » faisceau de preuves  » mettant en cause la responsabilité de Damas

Attaque chimique : La France publie un « faisceau de preuves » mettant en cause la responsabilité de Damas

par Laurent Lagneau – Zone militaire- Le 14-04-2018

opex360.com/2018/04/14/attaque-chimique-france-publie-faisceau-de-preuves-mettant-cause-responsabilite-de-damas/

Quelques heures après les frappes contre le programme syrien d’armes chimiques, le ministère des Armées a publié une « évaluation nationale » [.pdf] concernant les faits ayant eu lieu à Douma [Ghouta orientale], le 7 avril dernier.

Ce document, qui compile des « analyses techniques d’informations de source ouverte et de renseignements déclassifiés obtenus par les services français », réunit donc des élements qui constituent un « faisceau de preuves suffisant pour mettre en cause la responsabilité » de Damas dans les attaques chimiques ayant visé cette localité, alors sous contrôle du groupe rebelle Jaych al-Islam.

Dans un premier temps, cette évaluation nationale établit la chronologie des faits. « Dans le contexte d’une reprise de l’offensive militaire du régime syrien et d’une forte activité aérienne dans la ville de Douma, dans la Ghouta orientale, deux nouveaux cas de recours à
des substances toxiques ont fait l’objet d’une communication spontanée de la société civile et des médias locaux et internationaux à partir du 7 avril en fin d’après-midi », y lit-on.

« Un afflux massif (au minimum une centaine de personnes) de patients présentant des symptômes d’exposition à un agent chimique dans les centres de soin de la Ghouta orientale a été constaté et documenté en début de soirée. Au total, plusieurs dizaines de personnes, au moins quarante selon plusieurs sources, seraient mortes d’une exposition à une substance chimique », poursuit le document.

À partir de ce moment, les services français ont analysé les témoignages, les photographies et les vidéos diffusés « spontanément » sur les sites spécialisés, la presse et les réseaux sociaux.

Le texte mentionne également de « témoignages obtenus par les services ».

Ainsi, l’analyse des vidéos et des images en question a « permis de conclure avec un haut degré de confiance que la grande majorité est de facture récente et ne relève pas d’une fabrication. » En outre, la « nature spontanée de la mise en circulation des images sur l’ensemble des réseaux sociaux confirme qu’il ne s’agit pas d’un montage vidéo ou d’images recyclées. » Enfin, poursuit le document, « une partie des entités ayant publié ces informations est reconnue comme habituellement fiable. »

Qui plus est, estiment les analystes, « une manipulation des images diffusées massivement à partir du samedi 7 avril n’est pas crédible, dans la mesure notamment où les groupes présents dans la Ghouta n’ont pas les moyens de mener une manœuvre de communication d’une telle ampleur. »

Toujours au sujet des images, l’évaluation nationale affirme qu’ «  aucune mort par effet mécanique n’est visible » et que l’ensemble des symptômes constatés est « caractéristique d’une attaque par armes chimiques, notamment par des agents suffocants et par des agents organophosphorés ou de l’acide cyanhydrique. »

Reste à savoir pourquoi le régime syrien a lancé une telle attaque chimique. Pour y répondre, le document rappelle que le tactique des forces syriennes consiste à séparer les différents groupes rebelles alors présents dans la Ghouta orientale afin de « concentrer l’effort et d’obtenir des accords de reddition négociés ».

Cette tactique a ainsi fonctionné avec Ahrar al-Cham et Faïlaq al-Rahmane puisque ces deux groupes ont conclu des accords ayant abouti à leur évacuation. « Dans cette première phase, la stratégie politique et militaire du régime syrien a consisté à alterner actions militaires offensives indiscriminées contre les populations locales, avec possible usage de chlore, et pause opérationnelle permettant des négociations », rappelle l’évaluation nationale française.

Seulement, les discussions avec Jaysh al-Islam n’ont pas été concluantes, 4.500 à 5.000 de ses combattants, localisés essentiellement à Douma, ayant refusé tout accord. « Dès lors, à compter du 6 avril, le régime syrien, appuyé par les forces russes, a repris ses bombardements intensifs sur la localité, mettant fin à une pause opérationnelle, tant terrestre qu’aérienne, constatée depuis le lancement des négociations mi-mars. C’est dans ce contexte que sont intervenues les frappes chimiques analysées ici », explique le document.

Pour ce dernier, l’usage d’armes chimiques par les forces syriennes fait « sens », tant au nivau tactique que stratégique.

Tactiquement, cela permet de déloger les rebelles « abrités dans des habitations afin d’engager le combat urbain dans les conditions les plus avantageuses pour le régime. Et à ce titre, il constitue un « accélérateur de conquête et un démultiplicateur d’effet visant à faire tomber au plus vite le dernier bastion des groupes armés. »

Stratégiquement, le recours à des armes chimiques, « notamment au chlore, documentée depuis le début 2018 dans la Ghouta orientale », rappelle l’évaluation nationale, vise à « punir les populations civiles présentes dans les zones tenues par des combattants opposés au régime » et à « provoquer sur elles un effet de terreur et de panique incitant à la reddition. » Et le document d’ajouter : « Alors que la guerre n’est pas terminée pour le régime, il s’agit, par des frappes indiscriminées, de démontrer que toute résistance est inutile et de préparer la réduction des dernières poches. »

Par ailleurs, les services français estiment que la Syrie n’a pas déclaré l’intégralité de son arsenal chimique et de ses capacités en la matière, contrairement à l’engagement qu’elle avait pris au moment de son adhésion à la Convention internationale d’interdiction des armes chimiques.

« La Syrie a ainsi omis de déclarer un grand nombre d’activités du Centre syrien d’études et de recherches scientifiques (CERS). Elle n’a accepté que récemment la déclaration de certaines activités du CERS au titre de la Convention, sans pour autant déclarer l’intégralité de ce centre. Elle a également initialement omis de déclarer les sites de Barzeh et Jemrayah qui ne l’ont finalement été qu’en 2018 », précise le document.

Enfin, cette évaluation nationale, qui revient sur l’attaque de Khan Cheikhoun (4 avril 2017), affirme que les services français soupçonne l’usage, par le régime syrien, de gaz toxiques dans au moins 11 autres cas depuis un an. « On notera dans ce contexte une recrudescence notable des cas d’emploi après le non renouvellement du mandat du mécanisme d’enquête conjoint OIAC-ONU (JIM) en novembre 2017, en raison du véto de la Russie au CSNU », y est-il souligné.

 

 

 

 

Une liste de 2.626 noms de policiers du renseignement intérieur tombée dans les mains d’une personne fichée S

Une liste de 2.626 noms de policiers du renseignement intérieur tombée dans les mains d’une personne fichée S

par Laurent Lagneau – Zone militaire – Le 11-04-2018

http://www.opex360.com/2018/04/11/liste-de-2-626-noms-de-policiers-renseignement-interieur-tombee-mains-dune-personne-fichee-s/

Le 13 juin 2016, à Magnanville (78), Jean-Baptiste Salvaing et Jessica Schneider, un couple de fonctionnaires de police, furent assassinés devant leur jeune enfant par Larossi Abballa, un jihadiste ayant fait allégeance à l’État islamique (EI ou Daesh). Ce dernier fut tué lors de l’intervention du RAID et de la BRI. Pour les enquêteurs, il s’agissait alors de savoir comment le terroriste avait choisi ses victimes et s’il faisait partie ou non d’une organisation plus large.

Lors des investigations, une empreinte génétique n’appartenant pas à Abballa fut trouvée sur le socle de l’ordinateur portable des victimes. Ce qui motiva, en décembre 2017, l’arrestation et la mise en examen pour « association de malfaiteurs en vue d’une entreprise terroriste » d’un certain Mohamed Lamine A., dont l’ADN correspondait à la trace en question.

Le 9 avril l’enquête a connu un nouveau rebondissement avec la mise en garde à vue de six autres personnes. Parmi elles, l’on trouve un délinquant de droit commun, un homme fiché S ainsi qu’une policière de 48 ans, ancienne responsable départementale du syndicat Alliance 78, son fils de 26 ans, lequel montrerait des signes de radicalisation, sa fille de 30 ans, et Mina S., une amie de cette dernière, déjà incarcérée à Fleury-Merogis après avoir été mise en examen en octobre dans le cadre d’une autre affaire liée à la mouvance jihadiste.

Selon une information révélée par l’hebdomadaire Le Point et franceinfos, confirmée par la suite, les enquêteurs ont trouvé chez Mina S. une clé USB ayant contenu une liste de 2.626 noms et matricules de policiers du renseignement intérieur (ceux de Jean-Baptiste Salvaing et Jessica Schneider n’y figuraient pas).

Cette liste avait été établie en 2008, au moment de la création de la Direction de centrale du renseignement intérieure (DCRI), fruit de la fusion entre les Renseignements généraux (RG) et la Direction de la surveillance du territoire (DST).

Comment a-t-elle pu se retrouver entre les mains d’une personne appartenant à la mouvance jihadiste? C’est ce que cherchent à comprendre les enquêteurs. Mais une piste se dessine.

En effet, à la demande de sa fille, Mina S., par ailleurs soeur du « fichier S » interpellé lundi, a été hebergée, pendant un temps chez la policière placée en garde à vue. À l’époque où elle était responsable syndicale, cette dernière a ainsi pu avoir accès au document en question, comme le veut d’ailleurs la loi. En effet, comme l’a expliqué le criminologue Alain Bauer sur les ondes de RTL, quand deux services fusionnent, comme cela a été le cas de la DST et des RG, la liste des personnels concernés est transmises aux partenaires sociaux, afin de leur permettre de défendre au mieux leurs intérêts.

D’après Le Point, la liste avait été effacée de la clé USB trouvée par les enquêteurs au domicile de Mina S. Mais c’est en restaurant les données qu’elle contenait qu’ils ont fait cette découverte.

Quoi qu’il en soit, la garde à vue a été prolongée pour cinq des six personnes interrogées par la sous-direction antiterroriste (Sdat) de la police judiciaire (le délinquant a été a priori remis en liberté le 10 avril au soir). Selon l’AFP, les enquêteurs cherchent à savoir si Mina B. a effectivement consulté cette liste des agents de l’ex-DCRI (devenue DGSI).

Cette affaire n’est pas sans rappeler deux autres ayant récemment concerné la gendarmerie. En 2014, une gendarme adjointe volontaire du peloton autoroutier de Saint-Maximin/La-Sainte-Baume, radicalisée, avait été condamnée par le tribunal correctionnel de Draguignan pour la consultation illicite des fichiers confidentiels. Un an plus tard, une autre femme gendarme travaillant au fort de Rosny-sous-Bois avait été révoquée en raison de sa relation avec un complice d’Amédy Coulibaly, l’auteur de l’attaque de l’Hyper Casher.

 

 

 

 

David Martinon :  » Le monde est en état de cyberguerre froide permanente « 

David Martinon : « Le monde est en état de cyberguerre froide permanente »

Depuis 5 ans, il est la vigie de l’Hexagone dans le cyberespace. David Martinon, ambassadeur de France en charge du digital, tire la sonnette d’alarme.

Par Baudouin Eschapasse – Le Point.fr  – Publié le 02/04/2018

lepoint.fr/high-tech-internet/david-martinon-le-monde-est-en-etat-de-cyberguerre-froide-permanente-02-04-2018-2207326_47.php

Cybersoldats chinois à Chongqing (Chine). Photo d’illustration © Gao xiaowen / Imaginechina/ Gao xiaowen

Ambassadeur pour le numérique depuis 2013, l’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy attire depuis longtemps l’attention des plus hautes autorités de l’État sur les dangers que constitue la multiplication des cyberattaques et la véritable montée des tensions dans le monde virtuel. Les accrochages entre puissances militaires sur la Toile mondiale peuvent avoir des suites dans le monde réel. L’affrontement des blocs sur le Web s’apparente, selon lui, à un état de « cyberguerre ». À ce titre, il milite pour que le dialogue diplomatique prévienne toute escalade.

Le Point : Après avoir été consul général de France en Californie de 2008 à 2012, vous occupez depuis 2013 un poste diplomatique méconnu : celui de cyber-ambassadeur. En quoi consiste le job ?

David Martinon, 46 ans, est ambassadeur de France pour le numérique – © DR

David Martinon : Ma fonction a évolué. Je dis souvent que l’intitulé de mon poste a rétréci à mesure que mes responsabilités croissaient. Au départ, j’avais été nommé représentant spécial de la France pour les négociations internationales concernant la société de l’information et le développement du numérique. C’était il y a cinq ans. Ma mission était centrée sur les débats de gouvernance internationale de l’Internet, et notamment la réforme de l’Icann… En octobre 2015, le ministre des Affaires étrangères, alors Laurent Fabius, m’a nommé ambassadeur pour la cyberdiplomatie et l’économie numérique avec pour lettre de mission de coordonner l’ensemble des sujets Internet et cyber, et donc notamment les négociations internationales sur la cybersécurité. Depuis novembre 2017, j’ai été nommé en conseil des ministres ambassadeur pour le numérique, avec la mission d’engager un dialogue direct avec les grandes entreprises du numérique pour mieux lutter contre l’utilisation d’Internet à des fins terroristes. J’ai depuis été également chargé d’élargir ce dialogue aux contenus illicites et en particulier aux contenus haineux. Pour autant, je continue de représenter notre pays dans les négociations internationales sur la cybersécurité, la gouvernance de l’Internet et des réseaux. J’interviens également en soutien à l’exportation des savoir-faire des entreprises françaises, spécialisées dans le numérique.

Les incidents se sont multipliés depuis un an sur le Web. Pensez-vous que ces cyber-incidents mettent en danger la paix mondiale  ?

L’année qui vient de s’écouler a montré que les enjeux de cybersécurité pouvaient avoir des implications graves dans le monde réel. Nous avons basculé dans une nouvelle ère. Le monde est en état de « cyberguerre froide » permanente. Le Net est devenu un espace de conflit et de crise. Or, nous pensons désormais que des affrontements cyber pourraient déboucher sur un vrai conflit d’ampleur internationale entre grandes puissances. La France a un rôle à jouer pour éviter l’escalade.

Votre mission ne consiste pas seulement à éviter une troisième guerre mondiale, rassurez-nous.

Mon champ d’intervention englobe effectivement des thématiques diverses, de la préservation de la liberté d’expression sur Internet à la protection de la propriété intellectuelle dans le domaine digital.

Vos interlocuteurs ne sont donc pas seulement des acteurs étatiques…

Je dialogue avec des homologues étrangers, mais aussi des représentants d’organisations internationales ou d’organisations de droit privé. Nous avons ainsi conduit des échanges fructueux entre 2013 et 2017 avec le groupe d’experts de l’ONU sur la question du droit applicable dans le cyberespace. Mais je suis aussi amené à discuter avec des acteurs privés, au sein d’enceintes diverses, tel le Global Internet Forum to Counter Terrorism, pour ne prendre qu’un exemple, ou en direct.

Nous ne voulons pas qu’Internet se transforme en zone de non-droit où chaque acteur privé se ferait justice soi-même

Vous discutez aussi avec les Gafam, comme on désigne les géants du Net que sont Google, Amazon, Facebook, Apple ou Microsoft ?

Bien entendu. Ces grands groupes comptent parmi nos interlocuteurs. Mais nous nous adressons aussi à des opérateurs de plus petite taille, dont le rôle peut être crucial dans la régulation du Net.

Que leur demandez-vous ?

Nos discussions portent essentiellement sur la mise en place de dispositifs permettant d’empêcher la prolifération de contenus faisant l’apologie du terrorisme et, plus généralement, de la haine. Je commence à parler avec eux de prévention en matière de diffusion de « fake news ».

Et ces échanges sont fructueux ?

Cela dépend des interlocuteurs.

Le compte Twitter du cyber-ambassadeur lui offre l’opportunité d’apostropher les patrons des GAFAM. Ici: Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook.© DR

En février dernier, lors de la présentation de la revue stratégique de cyberdéfense, vous manifestiez votre déception après l’échec des discussions multilatérales conduites sous l’égide de l’ONU. Qu’en est-il ?

Un consensus se dessinait, en 2013, au sein du groupe d’experts gouvernementaux de l’ONU chargé d’établir les normes de comportement applicables dans le monde virtuel. Tout le monde était alors d’accord pour affirmer la pleine applicabilité de la charte des Nations unies dans le cyberespace. En 2015, de nouvelles normes de comportement avaient été évoquées, mais le dernier round de négociations, l’été dernier, n’a pas permis d’aller plus loin. Il n’empêche que d’autres discussions avancent. Notamment concernant la négociation d’un protocole additionnel à la Convention de Budapest qui doit permettre une meilleure coopération judiciaire entre États. Ces questions sont sensibles, car elles mettent en jeu la souveraineté des États.

Où en est-on de la coopération franco-américaine à ce sujet ?

L’adoption du « Cloud Act » par le Congrès américain, fin mars, ouvre une séquence nouvelle. Ce texte, signé par le président Trump, offre désormais un cadre légal au transfert à des juges et des enquêteurs d’États étrangers d’éléments de preuves numériques comme des e-mails, des documents et communications électroniques localisés dans les serveurs de sociétés américaines. Ce « Cloud Act » (« Cloud » signifiant ici « clarifying lawful overseas use of data act ») devient une alternative au processus de partage d’informations qui avait lieu dans le cadre de l’entraide judiciaire internationale, via les accords de coopération judiciaire internationale (les MLAT, pour « mutual legal assistance treaty »). Si l’on veut être positif, ce texte peut faciliter grandement la coopération entre Washington et Paris. Mais il pose également des questions juridiques si l’on veut assurer la protection des internautes. J’ajouterai cependant que nous conduisons ce travail avec de nombreux partenaires et pas seulement les États-Unis. Nous travaillons main dans la main avec les Britanniques dans le domaine de la prévention des actes terroristes.

La doctrine militaire française est désormais claire. Le ministère des Armées l’a réaffirmée à plusieurs reprises. La France se réserve le droit de riposter militairement en cas d’agression numérique d’ampleur. Quel rôle avez-vous joué dans cette évolution ?

Sur ce sujet, les dialogues stratégiques cyber que je mène avec nos partenaires les plus importants (États-Unis, Japon, Chine, Brésil, Inde, Allemagne, Royaume-Uni) nous ont permis de compléter notre compréhension des stratégies et des postures de chacun dans le champ « cyber ». Dans la mesure où plusieurs États ont affirmé clairement envisager des contre-mesures militaires en cas de cyberattaque, il était normal que la France fasse de même.

Pour autant, vous êtes hostile au « Hack Back », c’est-à-dire à la possibilité pour un particulier ou une entreprise de riposter à une attaque ou une intrusion numérique ?

La loi et la doctrine françaises sont claires. Nous ne voulons pas qu’Internet se transforme en zone de non-droit où chaque acteur privé se ferait justice soi-même. Nous ne voulons pas que la Toile mondiale vire au Far West.

La difficulté d’attribution des attaques, le recours à des équipes de mercenaires posent quand même problème…

Raison de plus pour lutter contre la prolifération des cyberarmes et pour mieux définir le rôle et la responsabilité des acteurs privés et publics. Dans les westerns, vous avez peut-être déjà vu un shérif accrocher une étoile à la veste d’un citoyen au moment où il lui demande de l’aider à arrêter des voleurs de chevaux ou de bétail. Ce dispositif légal qui avait cours à la fin du XIXe siècle aux États-Unis et qu’on désigne sous le nom de « deputization » est une idée, parmi d’autres, qui peut nourrir la réflexion sur de nouveaux partenariats public-privé.

 

La Direction du renseignement militaire peine à recruter au sein des armées

La Direction du renseignement militaire peine à recruter au sein des armées

par Laurent Lagneau – Zone militaire – Le 31-03-2018

opex360.com/2018/03/31/direction-renseignement-militaire-peine-a-recruter-sein-armees/

 

Renseignement géo-localisé et géo-référencé, traitement de volumes de données toujours plus importants, cyber, intelligence artificielle… Le métier du renseignement évolue et cela n’est pas sans conséquence sur la gestion des ressources humaines des services concernés.

Tel est le cas de la Direction du renseignement militaire (DRM), qui se devant être à la pointe dans ces nouveaux domaines, éprouve quelques difficultés en matière de recrutement. Même si, comme son chef, le général Jean-François Ferlet l’a dit aux députés de la commission de la Défense, elle n’a jamais assez d’effectifs, ce n’est pas un souci de création de postes, dans la mesure où les politique menées ces dernières années ont fait la part belle à la fonction « connaissance et anticipation » [la DRM compte 1.800 personnes et 300 doivent venir la renforcer d’ici 2019, ndlr].

Le problème de la DRM est de trouver les compétences dont elle a besoin tout en veillant à maintenir un certain équilibre entre le personnel civil et militaire.

« Certaines spécialités vont disparaître dans nos rangs. Par exemple, nous employons aujourd’hui des spécialistes très pointus dans le domaine de l’interception HF, avec des expertises particulières » car « demain les traitements seront automatisés et nous n’[en] aurons plus besoin. En revanche, nous aurons besoin d’autres spécialistes, notamment les data scientists », a expliqué le général Ferlet.

S’agissant plus particulièrement des spécialités liées au big data, la DRM a « procédé à d’importants recrutements de personnels civils » parce qu’elle n’avait « procédé à d’importants recrutements de personnels civils », a dit le général Ferlet. « Et ce recrutement va continuer sa montée en puissance, avec de nouveaux experts dans de nouveaux domaines », a-t-il ajouté.

Seulement, a constaté le DRM, « j’ai un vrai déficit en militaires ». Il s’agit « de spécialistes qui n’existaient pas avant dans les armées, qu’il nous faut recruter, former et dont il nous faut accroître le nombre », a-t-il continué. Pour le moment, ce déficit est donc « partiellement compensé par le recrutement de civils ». Mais il n’est pas possible d’aller au-delà des 30% de civils qui font partie du personnel de la DRM.

« Il m’est très difficile d’aller au-delà, car je suis par ailleurs soumis à des contraintes de projection de personnels du renseignement sur les théâtres d’opérations, et que je ne peux pas y projeter de civils », a fait valoir le général Ferlet. Pour le moment, l’une des solutions consiste à faire signer des contrats de réserviste aux civils ainsi recrutés afin de leur permettre de « partir en opération ». Mais cet expédient a ses limites. « Aujourd’hui, certains postes en opération ne sont pas honorés, faute de militaires disposant des bonnes compétences », a-t-il déploré.

En outre, le recrutement de civils n’est pas tout. Encore faut-il pouvoir les fidéliser. Et c’est d’ailleurs l’un des 9 axes du projet « DRM 2020 », qui parle de « recruter des experts et des profils atypiques » et « d’assurer des carrières épanouissantes. »

« Compte tenu du contexte sécuritaire dans lequel nous vivons, nous n’avons pas trop de mal à recruter, du moins des spécialistes de haut niveau. Mais il est plus difficile de recruter des experts de catégorie B, et surtout de les fidéliser car ces experts sont très demandés dans le monde civil », a dit le général Ferlet. « Souvent, ils viennent chez nous pour une première expérience, pour se faire un CV, puis ils vont chercher un autre emploi à l’extérieur. C’est un problème », a-t-il ajouté.

Si le métier du renseignement évolue avec l’avènement de technologies nouvelles, il n’est pas non plus encore bouleversé. Et il a encore besoin d’analystes et surtout de linguistes. D’autant plus que les outils d’intelligence artificielle censés faire de la traduction automatique sont loin d’être au point. « Ces dispositifs ne sont pas très fiables dans des langues courantes comme l’anglais, nous n’attendons pas de bons résultats pour demain avec une langue rare aux dialectes multiples », a souligné le général Ferlet.

Le tamasheq, la langue parlée par les Touareg, « dont est issu le noyau dur des groupes terroristes que nous rencontrons dans le Sahel » (dixit le général Ferlet) est un exemple (comme l’ont été le dari et le pachto à une autre période).

« Le tamasheq n’est pas une langue unique : il comporte de nombreux dialectes un peu différents selon les régions, car nous trouvons des Touaregs en Mauritanie, au Mali, en Algérie, au Niger ou en Libye. Les locuteurs du tamasheq sont difficiles à recruter », a expliqué le DRM. « En général, il s’agit de Touaregs qui ont encore des attaches familiales au Sahel. Ces candidatures sont, comme tous les personnels civils et militaires du ministère, transmis à la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) pour les habiliter au niveau de sécurité idoine », a-t-il continué.

Pour les missions ponctuelles, le général Ferlet voudrait pouvoir « pré-identifier et pré-habiliter » des contractuels dans « le cadre de missions d’intérim ». C’est « une des pistes pour compléter notre boîte à outils. J’ai lancé en interne un chantier relatif aux ressources humaines et je souhaite que l’on fasse preuve d’audace et d’innovation », a-t-il avancé.