Des fibres stratégiques

Des fibres stratégiques

TTU.fr 15/01/2018

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Les 400 câbles de fibres optiques qui parcourent le fond des océans pour relier les continents totalisent plus de 1,1 million de kilomètres. Ils véhiculent désormais près de 99% du trafic Internet, et des échanges financiers avec un total de dix mille milliards de dollars de transactions quotidiennes.

Une attaque choisie sur ce dispositif serait catastrophique pour l’économie mondiale et pourrait désorganiser les dispositifs de réponse militaire en cas d’offensive ciblée (Baltique ou mer de Chine).

Les experts de l’Otan s’inquiètent depuis 2015 de la forte augmentation des opérations navales des sous-marins russes à proximité de certaines connexions exclusivement militaires. Notamment celles du bâtiment de renseignement océanographique «Yantar», qui dispose de deux submersibles autonomes capables de cartographier les câbles et les connexions ultra secrètes du réseau de communications du Pentagone, DoDIN.

Les Chinois, depuis l’entrée en service du sous-marin «Shenhai Yongshi» en novembre, disposent d’une capacité analogue. Craignant des opérations de sabotage, l’Otan a mis en place un réseau redondant de «black cables» pour renforcer la sécurité de son dispositif, mais pouvant également accueillir les échanges entre places financières en cas d’attaque hybride. La surveillance de ceux-ci par le déploiement des drones de type Sea Hunter est devenue un enjeu majeur. Trois interconnexions sont particulièrement vulnérables : celles passant par les détroits de Luzon, Bab el-Mandeb et Malacca.

En 2013, la Marine égyptienne avait arrêté trois hommes responsables du sabotage de la plateforme terrestre de raccordement à Alexandrie, qui avait privé de moyens de communication 60 millions d’Indiens. En 2015, lors des opérations en Crimée, le trafic ukrainien passant par la plateforme d’Odessa a été fortement perturbé.

Cartographie de leurs localisations, installations de pods d’écoutes, destruction, les câbles sous-marins constituent une préoccupation majeure pour l’ensemble des nations, puisque l’on compte près de 150 incidents par an. Et si Russes et Chinois sont pointés aujourd’hui du doigt, ils cherchent eux aussi à assurer la sécurité de leurs communications.

De 1970 à 1981, la NSA avait fait placer par le sous-marin «Halibut» un système d’écoute du câble soviétique passant au nord du Japon par la mer d’Okhotsk. Edward Snowden a diffusé en 2015 des documents attestant des dispositifs d’écoutes des câbles transatlantiques par le GCHQ grâce à son installation de Bude dans les Cornouailles.

Enfin, les Etats-Unis disposent également de plateformes chargées d’opérations offensives sur les câbles avec le sous-marin «Jimmy Carter» et le bâtiment de surface USNS «Impeccable», régulièrement ciblé par la marine chinoise.