La dissuasion nucléaire française est-elle crédible face à la Russie ?

La dissuasion nucléaire française est-elle crédible face à la Russie ?

L’arsenal nucléaire français (290 têtes déployées) est sous-dimensionné pour répondre à la menace russe (1.600 têtes déployées). À quelles conditions la France pourrait-elle assurer une dissuasion à l’échelle européenne, alors que la protection des États-Unis ne semble plus garantie ?

Des avions de l’armée française en démonstration. © David ALLIGNON

Benoît Grémare, Chercheur associé à l’Institut d’Etudes de Stratégie et de Défense, Université Jean Moulin Lyon 3

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.


Dès 2020, Emmanuel Macron a proposé une réflexion sur la dimension européenne de la dissuasion nucléaire française. En ce sens, il a proposé un dialogue stratégique ainsi que des exercices nucléaires conjoints entre les partenaires européens. Cinq ans plus tard, en février 2025, Friedrich Merz, futur chancelier fédéral, a répondu à cet appel, préconisant une extension du parapluie nucléaire français à l’Allemagne alors que les États-Unis de Donald Trump n’apparaissent plus comme un partenaire fiable pour protéger l’Europe.

Mais la France a-t-elle les capacités de défendre l’Europe ? L’hypothétique déploiement du parapluie nucléaire français en Europe de l’Est permettrait-il de concrétiser l’autonomie stratégique de l’Europe, lui donnant les moyens de se défendre en toute indépendance ?

La dissuasion nucléaire française face à la menace russe

À l’origine, la France a développé son armement atomique pour répondre à la menace de l’invasion soviétique et pour éviter toute dépendance vis-à-vis des États-Unis. Selon une doctrine stable et régulièrement réaffirmée par le pouvoir politique, Paris utiliserait son arsenal stratégique par voie aérienne et sous-marine en cas d’attaque contre ses intérêts vitaux.

Reste que, sans le soutien états-unien, le rapport de force apparaît largement défavorable à la France, laquelle dispose de 290 têtes nucléaires contre 1 600 têtes déployées (4 380 têtes avec les stocks) côté russe.

Certes, la puissance explosive des ogives thermonucléaires, alliée à la portée balistique du missile mer-sol balistique stratégique français M51, permettrait de vitrifier les principales villes russes, dont Moscou.

Mais à l’inverse, il suffirait aux Russes de « 200 secondes pour atomiser Paris », selon une estimation donnée à la télévision russe au sujet des missiles thermonucléaires Satan.

Cette opération classique de communication renvoie à la perspective dite du « goutte à goutte » consistant à détruire les villes ennemies dans un échange atomique au coup par coup, dans lequel la Russie peut compter sur son immensité pour gagner à l’usure. C’est cette potentielle vitrification réciproque qu’il faut garder à l’esprit dans le pari mutuel de la dissuasion nucléaire.

Afin de doper l’impact de la dissuasion nucléaire français, un partenariat pourrait être envisagé avec le Royaume-Uni. Puissance nucléaire depuis 1952, Londres ne possède plus que des missiles balistiques lancés par sous-marin et a décidé, depuis le Brexit, de renforcer son arsenal à 260 têtes nucléaires. Mais, bien que partageant des intérêts communs, ces deux puissances nucléaires européennes ne sont pas équivalentes.

Contrairement au Royaume-Uni, qui est membre du groupe des plans nucléaires de l’Otan et dont les ogives sont conçues aux États-Unis, la France produit ses armes sur son propre territoire et n’est soumise à aucune obligation de l’Otan, ce qui donne à Paris une grande marge de manœuvre pour définir sa doctrine. Enfin, la France reste légitime pour parler au nom de l’Union européenne, dont elle fait politiquement partie depuis sa création.

La force nucléaire française : une alternative à la dissuasion élargie des États-Unis

La France est devenue officiellement une puissance atomique dès 1960 en s’appuyant sur ses propres ressources, le soutien extérieur des États-Unis oscillant au gré des événements. Car l’apparition d’une force stratégique française indépendante a longuement contrarié Washington qui a cherché à la restreindre par des traités internationaux – comme le traité de 1963 limitant les essais nucléaires atmosphériques ou encore le Traité de non-prolifération (TNP) en 1968. Depuis 1974, officiellement, la force nucléaire française a un rôle dissuasif propre au sein de l’Otan, contribuant à la sécurité globale de l’Alliance en compliquant les calculs des adversaires potentiels.

Il y a près de soixante ans, la mise en place de la riposte graduée par le président Lyndon Johnson avait renforcé les doutes sur la détermination de la Maison Blanche à s’engager pleinement dans la défense de l’Europe. Aujourd’hui, la volonté du président Trump de mettre fin au soutien de son pays à l’Ukraine confirme ces soupçons. Dès lors, des voix de plus en plus manifestes et insistantes plaident pour l’acceptation d’une force nucléaire française qui ne serait plus chimiquement pure, mais qui s’étendrait à l’échelle européenne.

Le pré-positionnement du parapluie nucléaire français en Europe de l’Est

La demande du futur chancelier allemand Friedrich Merz rejoint la proposition française d’établir un dialogue engageant les Européens dans une démarche commune. Comme l’a rappelé le ministre des armées, la définition précise de l’intérêt vital relève de la seule responsabilité du président de la République française en fonction des circonstances. Pour autant, l’emploi de l’arme nucléaire pour protéger l’Europe implique une discussion stratégique pour définir la puissance à acquérir, les intérêts à défendre et le mode de commandement du feu nucléaire.

Avancer vers le cadre d’une européanisation de la force nucléaire signifie augmenter les capacités de dissuasion et, donc, accroître l’arsenal français pour lui permettre de répondre aux menaces qui concernent l’ensemble des 27 États membres de l’Union européenne. Cela nécessite de constituer des stocks supplémentaires de matières fissiles et donc de réactiver les usines de production de Pierrelatte (Drôme) et Marcoule (Gard) démantelées en 1998, sacrifiées sur l’autel du désarmement unilatéral.

Le dogme de la stricte suffisance doit également être questionné. Si aujourd’hui, 290 têtes nucléaires représentent la valeur que la France accorde à la défendre de son existence, ce prix paraît négliger l’échelle du continent européen, et la logique le confirme : les puissances nucléaires de taille continentale telles que les États-Unis, la Russie et bientôt la Chine déploient un arsenal à hauteur d’un millier de têtes thermonucléaires.

La remontée en puissance prendra du temps et nécessitera un effort budgétaire pour son extension européenne au travers de l’augmentation du nombre de missiles et d’avions porteurs. Outre la construction de nouvelles infrastructures dans les pays européens partenaires, le coût pourrait dépasser 10 milliards d’euros annuels, sans compter les coûts indirects liés à la maintenance et à la logistique. Un temps long à prendre en compte d’autant que l’offre politique et stratégique d’une protection nucléaire élargie évolue au gré des circonstances.

Alors que Berlin préférait jusqu’à présent que la France assume un rôle simplement complémentaire à la dissuasion élargie des États-Unis, l’abandon de l’Ukraine par ces derniers donne une prime à l’agresseur russe. Comme l’indique Emmanuel Macron, la France pourrait en réaction proposer un prépositionnement de ses forces nucléaires dans les pays d’Europe de l’Est avec l’idée de se substituer à terme aux États-Unis.

Ce parapluie nucléaire français concrétiserait l’autonomie stratégique européenne à travers le déploiement d’avions de combat à capacité nucléaire, signe de la solidarité politique européenne et rendant plus difficiles les calculs de Moscou.

La présence visible de ces avions en Europe de l’Est pourrait empêcher la Russie d’attaquer les pays en question avec des moyens conventionnels, une telle attaque risquant de provoquer une riposte nucléaire française au nom de l’Europe.

Guerre Ukraine-Russie, jour 1105 : l’aide américaine suspendue, Vance maintient la pression

Guerre Ukraine-Russie, jour 1105 : l’aide américaine suspendue, Vance maintient la pression

Un député sud-coréen a indiqué mardi 4 mars 2025 avoir rencontré deux soldats nord-coréens détenus en Ukraine. Donald Trump a décidé d’ordonner lundi une « pause » dans l’aide militaire des États-Unis à l’Ukraine, selon un responsable de la Maison-Blanche.

Funérailles d’un militaire ukrainien à Kiev, lundi 3 mars 2025. SERGEY DOLZHENKO / EPA

Un député sud-coréen rencontre des soldats nord-coréens

Un député sud-coréen a déclaré mardi 4 mars avoir échangé avec deux soldats nord-coréens détenus en Ukraine après avoir combattu pour la Russie, et que l’un d’eux lui avait dit son souhait de vouloir vivre « une vie normale » en Corée du Sud.

En janvier, les renseignements sud-coréens ont affirmé que l’armée ukrainienne avait capturé deux soldats nord-coréens envoyés par Pyongyang en Russie pour combattre l’Ukraine.

Le député Yu Yong-weon a affirmé au cours d’une conférence de presse avoir pu échanger avec ces deux soldats détenus dans une prison d’Ukraine – dont la localisation exacte n’a pas été dévoilée – après avoir obtenu le feu vert des autorités de Kiev.

Trump suspend l’aide militaire à l’Ukraine

Donald Trump a mis sa menace à exécution et ordonné lundi une « pause » dans l’aide militaire des États-Unis à l’Ukraine en guerre contre la Russie, selon un responsable de la Maison-Blanche. « Nous faisons une pause et réexaminons notre aide pour nous assurer qu’elle contribue à la recherche d’une solution » au conflit entre l’Ukraine et la Russie, a déclaré ce responsable sous couvert d’anonymat.

« Le président a clairement indiqué qu’il se concentrait sur la paix. Nous avons besoin que nos partenaires s’engagent eux aussi à atteindre cet objectif », a-t-il ajouté. Il s’agit essentiellement de l’aide militaire déjà approuvée sous l’ancienne administration de Joe Biden et très largement soldée mais dont il reste encore des équipements et armes à livrer.

JD Vance convaincu que Zelensky finira par discuter de la paix

Le vice-président des États-Unis, J. D. Vance, s’est dit convaincu que le dirigeant ukrainien Volodymyr Zelensky finirait par accepter de discuter de la paix avec la Russie, après le fiasco de sa rencontre vendredi avec Donald Trump.

Dans un entretien à la chaîne Fox News, il a estimé que le président ukrainien avait « montré un refus clair de s’engager dans le processus de paix » souhaité par le président américain. « Je pense que Zelensky n’y était pas encore, et je pense, franchement, qu’il n’y est toujours pas, mais je pense qu’il finira par y arriver. Il le faut », a affirmé le vice-président dans cet entretien enregistré avant l’annonce d’une pause dans l’aide militaire américaine à l’Ukraine.

Les députés français divisés sur la défense européenne

Unis dans leurs mots de soutiens à Kiev, les députés ont de nouveau étalé leurs divergences stratégiques à l’Assemblée sur la défense française et européenne, son financement, ou l’intégration de l’Ukraine dans l’UE et l’Otan.

« Accélérons le processus d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. C’est la solution pour pouvoir faire front lors des échanges à venir », a martelé l’ancien premier ministre Gabriel Attal, chef du groupe Ensemble pour la République.

Marine Le Pen pour le RN a appelé à « soutenir » Kiev avec « réalisme ». « Nous ne pouvons pas promettre à l’Ukraine une adhésion à l’Otan » et une adhésion à l’Union européenne « va incontestablement à l’encontre de nos intérêts », a-t-elle avancé.

Retour en Russie de 33 habitants de la région de Koursk

Moscou a annoncé le retour en territoire sous contrôle de la Russie de 33 personnes venant de la partie de la région de Koursk occupée par l’armée ukrainienne et qui avaient été évacuées en Ukraine.

Le 24 février, Moscou avait indiqué avoir trouvé un accord avec Kiev pour rapatrier des habitants de la région qui se trouvaient en Ukraine. « Il s’agit principalement de personnes âgées, mais il y a aussi quatre enfants. Nombre d’entre eux souffrent de blessures et de maladies graves », a indiqué sur Telegram la médiatrice russe pour les droits humains, Tatiana Moskalkova.

D’après elle, la Russie « a négocié avec la partie ukrainienne » avec « le soutien du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et la médiation de la Biélorussie », allié de Moscou par lequel ont transité les évacués.

Nouveau contretemps pour la fusée Ariane 6 et le satellite militaire français d’observation CSO-3

Nouveau contretemps pour la fusée Ariane 6 et le satellite militaire français d’observation CSO-3


L’opération BUBO 25, menée par l’armée de l’Air & de l’Espace avec trois Rafale, trois A400M et un avion ravitailleur A330 MRTT [avec le colonel de réserve et spationaute Thomas Pesquet parmi les membres de son équipage], va durer plus longtemps que prévu.

En effet, celle-ci vise à renforcer le dispositif interarmées TITAN, mis en place pour sécuriser le Centre spatial guyanais [CSG] à l’occasion du premier vol commercial de le fusée Ariane 6, laquelle doit mettre sur orbite CSO-3, le troisième et dernier satellite militaire français de la constellation « Composante Spatiale Optique ».

En janvier, Arianespace avait indiqué qu’Ariane 6, « en version Ariane 62 », allait être lancée « le 26 février, à 13 h 24 [heure locale] », depuis Kourou. Et cela alors qu’un lancement avait initialement été envisagé en décembre 2024.

Seulement, vingt-quatre heures avant cette échéance, la société a annoncé que ce premier vol commercial serait reporté « suite à des opérations additionnelles nécessaires sur le moyen au sol ». Et d’assurer que lanceur et le CSO-3 étaient « toujours maintenus dans des conditions stabilisées et en sécurité ».

Ce contretemps ne devait pas être préjudiciable puisque le vol VA263 d’Ariane 6 avait été reprogrammé au 3 mars, à 13 h 24 [17 h 24, heure de Paris]. Sauf qu’il n’a pas pu avoir lieu.

Pourtant, plus tôt, le directeur du transport spatial de l’Agence spatiale européenne [ESA], Toni Tolker-Nielsen, avait assuré que « tout se déroulait bien », malgré une « pluie fine tropicale ». Mais, trente minutes avant le décollage, l’opération a été suspendue à cause d’une « anomalie au sol ».

« La seule décision possible maintenant est de repousser le lancement » qui « n’aura pas lieu aujourd’hui », a en effet déclaré David Cavaillolès, le président exécutif d’Arianespace. « Je n’ai pas de doute que nous repartirons en vol prochainement », a-t-il ajouté. Reste donc à savoir quand…

Pour rappel, CSO-3 aurait dû rejoindre CSO-1 sur une orbite héliosynchrone phasée à 800 km d’altitude en 2021. Mais le retard pris dans le développement d’Ariane 6 avait contraint le ministère des Armées à solliciter un lanceur russe Soyouz pour un lancement prévu en 2022. Lancement qui fut annulé, la coopération avec Moscou ayant été suspendue après le début de la guerre en Ukraine.

L’Allemagne prépare un avion/navette capable de dépasser les 6174 km/h et d’évoluer dans l’espace à des fins militaires

L’Allemagne prépare un avion/navette capable de dépasser les 6174 km/h et d’évoluer dans l’espace à des fins militaires

L'Allemagne prépare un avion/navette capable de dépasser les 6174 km/h et d'évoluer dans l'espace à des fins militaires
L’Allemagne prépare un avion/navette capable de dépasser les 6174 km/h et d’évoluer dans l’espace à des fins militaires

 

Vitesse hypersonique et ambitions spatiales ! l’Allemagne défie la Chine et les Etats-Unis avec une nouvelle navette.

Le gouvernement allemand a récemment officialisé son engagement dans le développement d’un engin spatial hypersonique réutilisable, marquant un tournant significatif dans la course à la suprématie technologique et militaire face à la Chine et les États-Unis. Ce projet, piloté par POLARIS Raumflugzeuge GmbH, promet de révolutionner le transport spatial et la reconnaissance militaire avec une mise en service prévue pour 2028.

L’Allemagne prépare une nouvelle navette spatial hypersonique avec des ambitions spatiales

Le nouvel appareil, conçu pour décoller horizontalement et atteindre des vitesses hypersoniques (donc supérieures à Mach 5 soit 6174 km/h) , sera doté de deux étages et aura la capacité de réutilisation, un critère devenu essentiel dans l’industrie spatiale moderne. La collaboration avec POLARIS Raumflugzeuge GmbH, entreprise innovante dans le domaine aérospatial, vise à développer un prototype fonctionnel d’ici six ans.

Objectifs multiples du projet de Polaris Raumflugzeuge GmbH

L’engin spatial envisagé servira de plateforme pour des tests hypersoniques approfondis. Au-delà de ses fonctions de recherche, l’appareil aura également la capacité de lancer de petits satellites. Cette polyvalence est rendue possible grâce à sa conception réutilisable, offrant une solution plus économique et plus fréquente que les lanceurs traditionnels.

Une contribution importante pour le secteur de la défense allemande

Le rôle potentiel de cet engin dans la reconnaissance spatiale pourrait transformer la capacité de l’Allemagne à surveiller ses adversaires. En fournissant des données de renseignement en temps réel, tout en étant presque insensible aux armes antisatellite, cet appareil représente un atout stratégique majeur pour les forces armées allemandes.

Le nouvel appareil, conçu pour décoller horizontalement et atteindre des vitesses hypersoniques (donc supérieures à Mach 5 soit 6174 km/h).
Le nouvel appareil, conçu pour décoller horizontalement et atteindre des vitesses hypersoniques (donc supérieures à Mach 5 soit 6174 km/h).

Développement progressif et innovations techniques

Le développement se fera en plusieurs étapes, avec des prototypes de plus en plus grands. Le modèle le plus avancé, mesurant environ 5 mètres de long et pesant 240 kg, précédera un prototype de 8 mètres de long et pesant entre 1,5 et 2 tonnes, dont le premier vol est prévu pour la fin de l’année 2025.

Capacité de transport et perspectives d’avenir

Le prototype final devrait être capable de transporter environ 1 000 kg de charge utile en orbite. En outre, POLARIS explore la possibilité d’étendre les fonctions de l’engin pour inclure des missions de reconnaissance spatiale, ce qui représenterait un avantage considérable pour les opérations de défense et de renseignement de l’Allemagne.

L’avenir des prototypes et tests en vol

POLARIS opère actuellement huit prototypes qui servent de démonstrateurs technologiques pour une gamme de clients existants. Le prototype développé spécifiquement pour le ministère de la Défense allemand sera le neuvième de la série, et son développement continue à un rythme soutenu, avec des tests de vol prévus pour évaluer et optimiser les systèmes de contrôle de vol de l’appareil.

Cette initiative allemande ne se contente pas de répondre à un besoin de défense; elle incarne aussi un pas en avant dans l’ambition de l’Allemagne de devenir un acteur majeur dans la nouvelle ère de l’exploration spatiale. Avec une approche résolument tournée vers l’innovation et la réutilisabilité, ce projet pourrait bien redéfinir les normes du voyage spatial et de la surveillance globale dans les prochaines décennies.

Source : Communiqué de presse de Polaris Raumflugzeuge GmbH

Démissions dans la Gendarmerie : la mise au point, chiffres à l’appui de la Direction générale

Démissions dans la Gendarmerie : la mise au point, chiffres à l’appui de la Direction générale


Drone de la Gendarmerie (Photo d’illustration GendInfo.fr)

Groupe Facebook, articles en série dans la presse, questions de parlementaires au gouvernement : le sujet des départs et démissions dans la Gendarmerie, 15000 en 2022 selon la Cour des comptes qui tient ces chiffres de la Gendarmerie elle-même, fait couler beaucoup d’encre.

La Gendarmerie a décidé de communiquer sur ce sujet. Dans un article publié dans GendInfo, l’Arme fait un point, chiffres à l’appui, sur ces départs et démissions.

Il n’y a pas d’hémorragie” affirme la Direction de la Gendarmerie pour laquelle “ces départs restent en effet conformes aux prévisions de l’institution, au regard notamment du mécanisme permettant aux sous-officiers et aux officiers de faire valoir leurs droits à la retraite avec jouissance immédiate de leur pension après respectivement 17 et 27 ans de carrière, mais aussi au regard des évolutions sociétales que la Gendarmerie intègre dans sa stratégie de recrutement” assure la DGGN.

Le détail des 15 000 départs

Dans cet article, la Gendarmerie explique le chiffre de 15 000 départs évoqué par la Cour des comptes. Celui-ci englobe l’ensemble des flux, y compris les changements de corps détaille la Gendarmerie. “Il inclut donc les départs de Gendarmes adjoints volontaires (GAV), admis dans une école de sous-officiers, mais aussi de sous-officiers intégrant l’un des corps d’officiers” poursuit la DGGN qui précise que “plus de la moitié des sous-officiers recrutés au cours des trois dernières années étant d’anciens GAV, on comprend mieux l’ordre de grandeur de ces flux internes”.

Ce chiffre se décompose en 3700 changements de corps, 2 950 flux sortants temporaires et 8 350 départs définitifs de la Gendarmerie (mobilité des personnels civils et fins de contrat GAV inclus). Les 15 000 intègrent également les départs temporaires telles les affectations au sein des gendarmeries spécialisées relevant du ministère des armées ou encore les détachements en “mobilité extérieure” au sein d’autres administrations ou organisations nationales et internationales.

1 571 radiations des cadres en 2024 dont 545 dénonciations de contrat en écoles d’officiers et de sous-officiers.

Après déduction du nombre annuel de départs en retraite après 17 et 27 ans de service, le nombre total de radiations des cadres avant d’avoir acquis les droits à une retraite à jouissance immédiate (tous corps confondus, hors population de volontaires) s’est élevé à 1 571 en 2024, dont 545 dénonciations de contrat en écoles d’officiers et de sous-officiers.

Après deux années de hausse consécutive, en 2022 et 2023, le nombre de départs anticipés s’est toutefois stabilisé au cours de l’exercice 2024 annonce la DGGN.

La Gendarmerie estime encore “qu’elle est loin de connaître la “grande démission” évoquée et “qu’elle dispose toujours d’une réelle attractivité”. Ainsi, elle indique “recevoir des centaines de demandes de gendarmes souhaitant dépasser la limite d’âge ou se réengager après une expérience externe ou une retraite anticipée, comme le permet désormais la dernière LPM (loi de programmation militaire ndlr)”.

Toutes ces demandes n’ont d’ailleurs pas pu recevoir un retour favorable de la part de la DRH, afin justement de laisser la place aux jeunes recrues” ajoute d’ailleurs l’institution.

Enfin l’Arme précise “qu’avec 12 000 postes pourvus en 2024, la gendarmerie n’a jamais autant recruté, sans pour autant le faire au détriment de ses standards de sélection”.

L’article de GendInfo.

Nouvelle-Calédonie : Réflexions sur un accord à venir (ou pas)

Nouvelle-Calédonie : Réflexions sur un accord à venir (ou pas)

AP Photo/Charlotte Antoine-Perron)/MEU103/24268478680297//2409241524

par Eric Descheemaeker – Revue Conflits publié le 3 mars 2025

https://www.revueconflits.com/nouvelle-caledonie-reflexions-sur-un-accord-a-venir-ou-pas/


Paris et Nouméa seraient sur le point de trouver un accord, que les deux parties attendent. Mais un accord pour faire quoi et pour quel but ? Réflexions sur la Nouvelle-Calédonie.

Alors que tout Paris et Nouméa bruissent des discussions qui pourraient parvenir – quoique cela semble en réalité peu probable – à un « accord » que tout le monde dit espérer comme la terre la pluie après une longue sécheresse, essayons comme à l’habitude de prendre un peu de recul sur l’actualité immédiate. C’est le but de ces Chroniques calédoniennes : réfléchir à haute voix, agiter des idées, suggérer, proposer. Libre à chacun, ensuite, d’en faire ce qu’il veut.

Deux remarques, d’abord, sur la nature même de ce processus. Pourquoi vouloir un « accord » – et un accord sur quoi, pour faire quoi ? On ne se pose qu’à peine la question, tant tout le monde semble partir du principe que celui de Nouméa ayant expiré (« cette solution définit pour vingt années l’organisation politique de la Nouvelle-Calédonie et les modalités de son émancipation », dit le point 5 du préambule), il faut bien le remplacer par quelque chose d’autre. Côté indépendantiste, ou séparatiste, de nouvelles « modalités d’émancipation » ; côté pro-français, une nouvelle « organisation politique ». Pourtant, il y au moins deux différences fondamentales entre 1998 et 2025, dont les implications sont considérables.

1998, 2025 : deux différences fondamentales

La première, c’est qu’il n’y a plus deux blocs face à face.

S’il y a une chose qu’on n’a pas reprochée à l’accord de Nouméa, comme avant à ceux de Matignon-Oudinot, c’est de ne pas être représentatifs de la population de l’archipel. Bien sûr, chaque camp a dû négocier avec ses propres troupes autant qu’avec son adversaire, mais il y avait bien, face à l’État, d’un côté une délégation indépendantiste (en 1998, le FLNKS en tant que tel), de l’autre, une délégation non-indépendantiste (en 1998 le RCPR). Aujourd’hui, à l’inverse, il n’y a plus un seul parti, ou une seule figure, rassemblant chacun des camps – à supposer même qu’on pût encore ranger tout le monde d’un côté ou de l’autre (quid des « non maintenant, oui plus tard » de l’Éveil océanien ?). Ce sont désormais pas moins de six délégations qui sont censées représenter – sans qu’on ne nous ait d’ailleurs expliqué pourquoi ni comment – les Calédoniens (dont on ne sait pas non plus qui ils sont, la définition même des parties intéressées étant, de manière un peu circulaire, un enjeu des négociations) ! Pas grand monde ne semble avoir remarqué, à haute voix tout du moins, que cela change radicalement la nature de l’exercice, puisque l’éventuel accord à venir ne serait pas bilatéral, mais multilatéral ; ni avoir posé deux questions pourtant fondamentales. Qui devrait le signer : toutes les six, ou bien une majorité (mais de qui ou de quoi) ? Et qui serait demain, dans un paysage politique calédonien en constante fluctuation, responsable de la parole ainsi donnée et de sa mise en application ?

La seconde, c’est la durée de cet accord (en tout cas telle que lui-même l’envisagerait). Matignon et Oudinot – dont on peut d’ailleurs considérer qu’ils forment un processus unique, le second ayant été conclu pour ne pas aller au référendum prévu par le premier – se donnaient une date d’échéance. C’est dans la logique d’un accord politique, qui est avant tout un accord de cessez-le-feu en échange de concessions réciproques. Mais celui à venir ? Pour ceux qui veulent faire sécession, sa limitation de durée va de soi : il s’agit de conduire, à nouveau, « Kanaky » vers sa « pleine émancipation », en 2053, par exemple.

Du côté loyaliste, c’est beaucoup moins clair. Ils veulent d’évidence un statut pérenne, ce qui semble la moindre des choses dans la mesure où nous sortirions des « dispositions transitoires » de Nouméa (et sa traduction juridique en droit français). Mais ils semblent réserver un droit à l’autodétermination de l’île, c’est-à-dire la possibilité unilatérale pour celle-ci de recommencer un processus référendaire qui pourrait, nécessairement, mener à la fin de ses propres dispositions. Et puis, il est peu probable qu’ils aient le désir de fixer « pour toujours » les grandes questions institutionnelles, surtout en ayant si peu préparé leur affaire. Sans compter, bien sûr, qu’en droit constitutionnel français tout ou presque est temporaire par nature : contrairement au Royaume-Uni et aux pays suivant son modèle, les Français changent structurellement de régime toutes les quelques décennies. Dans la mesure où, statistiquement, la Constitution de la 5e République n’en a plus pour très longtemps à vivre, il pourrait être intéressant de se demander ce qui arriverait alors aux dispositions concernant la Nouvelle-Calédonie…

Préparer l’avenir

Mais si, explicitement ou de manière tacite, l’accord conclu est lui aussi « pour vingt années » (ou « pour aussi longtemps qu’il pourra tenir politiquement »), alors il est évident qu’il ne réglera rien. Il ne ferait, comme Matignon et comme Nouméa, que remettre les problèmes à plus tard en échange d’un retour au calme immédiat. Que cela fasse le miel des séparatistes est une évidence. On comprend beaucoup moins bien comment cela pourrait satisfaire ceux qui pensent que non veut dire non, pas non maintenant, plus tard on verra.

Dans ces conditions, on peut se demander si la meilleure solution, d’un point de vue loyaliste, ne serait pas qu’il n’y ait pas d’accord : cela obligerait alors l’État à formuler lui-même un projet (incluant un suffrage universel ou quasi-universel pour les habitants de l’île, puisque la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme l’exige). En tous les cas, il serait inconcevable de signer un accord censé être autre chose que définitif sans se demander maintenant ce qu’il se passera lorsqu’il faudra, de nouveau, en sortir : c’est de ne pas s’être posé la question dès 1998 que l’accord de Nouméa agonise aujourd’hui, entraînant le Caillou dans son sillage. Il est vrai qu’on a eu 25 ans depuis pour anticiper le jour d’après et que cela non plus n’a pas été fait. Il fut un temps où gouverner c’était prévoir ; manifestement ces temps ne sont plus.

Nouméa ou Kanaky ?

Poursuivons le raisonnement. Ce que veulent les séparatistes, c’est d’évidence unkana « Nouméa-II » avec de nouvelles concessions françaises tout de suite et de nouveaux référendums pour plus tard, exigés par la Constitution puisqu’on ne peut pas se débarrasser d’un territoire sans l’accord de ses habitants. Référendums qu’ils espèrent bien gagner, ils nous l’ont montré depuis un an de la manière la plus transparente possible, en faisant fuir ceux qui pourraient s’opposer à eux. Dont acte. Mais alors que convient-il, en face, de vouloir ? Avant tout, nous semble-t-il, un statut effectivement pérenne au sein de la France, c’est-à-dire définitif dans son principe, même si on ne sait jamais ce que l’histoire nous réservera. Cependant, on l’a dit, d’une part, on voit mal un statut satisfaisant être conçu en quelques mois – toute la question des institutions, de leurs compétences, de l’éventuelle citoyenneté, etc. devra être revisitée – ; d’autre part, un accord transitoire serait pire encore que pas d’accord du tout, puisqu’il forcerait le Caillou à revivre ce qu’il a déjà vécu, tout en encourageant les plus radicaux des indépendantistes dans leur politique de « la valise ou le cercueil ».

Espérer que les problèmes s’évaporeront entre temps relève d’une pensée magique qui ne devrait plus avoir cours depuis longtemps.

Dans ces conditions, un accord général, en plus de n’être dans les faits pas réaliste, n’apparaît plus comme aussi désirable qu’on n’a tendance à le penser (du moins à haute voix). Un statut imposé d’en haut, mais qu’on aurait pris le temps de concevoir de manière intelligente, si possible en réfléchissant à la manière dont la Calédonie s’articulerait avec le reste de l’outre-mer français, et qui serait, lui, a priori aussi intangible que n’importe quelle autre norme constitutionnelle (ou constitutionnalisée), serait probablement bien meilleur. Les indépendantistes n’en voudront certes pas, mais qu’est-ce que cela change ? Ils ne veulent de toute façon de rien, sauf d’une indépendance aux frais du contribuable français. Quant à l’éternel chantage aux violences, on a vu à quoi y céder nous menait.

Trouver malgré tout un accord

Cela ne veut pas dire qu’il faille renoncer à toute perspective d’accord, aujourd’hui en 2025. À moins d’être va-t’en-guerre, on ne peut que préférer la concorde à une division actée entre deux camps. Mais comme un accord global n’est ni possible ni sans doute même souhaitable, restreignons-le aux seules questions urgentes : le retour à la paix civile et l’élargissement du corps électoral pour les provinciales à venir. Tout le reste peut attendre. Reste la question de savoir comment obtenir un accord avec les indépendantistes (et d’ailleurs, on l’a dit, quels indépendantistes ?) sans rien leur donner de ce qu’ils disent vouloir. Question difficile à laquelle il serait bien prétentieux de prétendre avoir la réponse, mais c’est à cela qu’on devrait réfléchir, à Nouméa comme à Paris.

Deux pistes : un véritable travail d’explication du fait que, sans ce que la France apporte, les Kanaks seront les premiers à souffrir, bien plus qu’hier, bien plus qu’en 2024, et dans une mesure qu’ils n’ont visiblement pas l’air de comprendre. Travail qui devrait venir en large mesure de tous ces Kanaks qui l’ont, eux, déjà compris, et savent que l’histoire a noué leur destin à celui de la France. Et puis de véritables réformes économiques et fiscales qui permettraient à tous ceux qui le souhaitent de s’intégrer à la société commune dans des conditions plus justes qu’aujourd’hui (à ne pas confondre, bien sûr, avec le chèque social, aussi contre-productif que méprisant).

Un petit accord rapidement, modeste dans ses ambitions, mais qui pourrait réellement changer la vie des habitants de l’île, plutôt qu’un accord global, dont on voit mal comment il ne ferait pas que décaler les problèmes pour que ceux-ci nous reviennent encore plus violemment au visage dans une génération, et qui de toute façon, ne semble avoir aucune chance d’aboutir : voilà en tout cas une suggestion. Libre, comme toujours, à chacun d’en faire ce qu’il veut.

*Eric Descheemaeker est professeur à l’Université de Melbourne

Intelligence économique des guerres d’Ukraine

Intelligence économique des guerres d’Ukraine

Bernard BESSON* – CF2R – Tribune libre N°172 / mars 2025

https://cf2r.org/tribune/intelligence-economique-des-guerres-dukraine/


*Contrôleur général honoraire de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) et de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ). Ancien chef de cabinet du directeur central des Renseignements Généraux (DCRG) et du directeur de la Surveillance du territoire (DST), il a été chargé de mission auprès du Haut responsable pour l’intelligence économique (HRIE). Bernard Besson est également directeur scientifique du Comité intelligence économique des Ingénieurs et scientifiques de France (IESF), membre de la Commission intelligence économique du MEDEF Ile-de-France et auteur de nombreux ouvrages consacré à l’intelligence économique et de thrillers géopolitiques dont l’un a obtenu le prix Edmond-Locard 2000 du roman noir en langue française.

 

 

Les guerres d’Ukraine sont aussi multiples que leurs lectures. On sait depuis Montaigne que la géographie commande la vérité. La Défaite de l’Occident[1] d’Emmanuel Todd parle d’un affaiblissement sociologique, religieux et moral de l’Occident. C’est une lecture. Nous serons plus court et tenterons de prévoir les conséquences de l’affrontement. Rien ne commence le 24 février 2022. L’invasion de l’Ukraine par la Russie est une conséquence avant d’être une cause. L’Opération Z ne doit pas cacher la forêt qui précède. Ces guerres viennent de loin. Plusieurs grilles d’interprétations décrivent des événements superposés à d’autres évènements. Comme les couches géologiques ces évidences s’accumulent sans s’annuler. Les guerres d’Ukraine interrogent les diplomaties de nos États et de nos entreprises. Des acteurs émergent qui ne pensent pas le monde comme nous.

 

Le droit international

Le droit international est invoqué par les deux parties. L’Occident dénonce la violation des frontières. L’ONU déplore l’agression commise par la Fédération de Russie contre l’Ukraine en violation du paragraphe 4 de l’article 2 de la Charte des Nations unies. L’Organisation « exige que la Fédération de Russie cesse immédiatement d’employer la force contre l’Ukraine et s’abstienne de tout nouveau recours illicite à la menace ou à l’emploi de la force contre tout État membre. » On ne peut être plus clair.

La Russie de son côté invoque l’article 51 de la charte des Nations unies qui lui permet après la reconnaissance des Républiques de Donetsk et de Lougansk de répondre à la demande de légitime défense d’États soucieux de mettre fin aux bombardements des populations civiles. En théorie l’argument est recevable. Mais les circonstances sont pour le moins discutables…

Il n’en reste pas moins que le droit international est malmené. Par exemple le non-respect des multiples résolutions de l’ONU dans le conflit israélo palestinien, la contestation par plusieurs pays africains de la justice pénale internationale, les guerres illégales des États-Unis depuis 1945[2] affaiblissent ce même droit international.

Le non-respect des accords de Minsk 1 et Minsk 2 garantis par la France et l’Allemagne conjointement avec l’Ukraine et la Russie dans le format Normandie[3] ne renforce pas le droit international. La chancelière aussi bien que le président français ont reconnu publiquement avoir menti aux Russes pour permettre à l’Ukraine de se réarmer entre 2014 et 2022 afin de reconquérir la Crimée et le Donbass[4].

Savoir que les Russes n’étaient pas dupes, n’oblitère pas l’affaiblissement de la crédibilité occidentale dans le respect des engagements diplomatiques. Le décret présidentiel ukrainien interdisant toute discussion avec le président Poutine ajouté à l’annulation des élections en Ukraine paralysent pour l’instant les solutions diplomatiques.

Les accords d’Istambul[5] signés le 29 mars 2022 grâce aux démarches du gouvernement israélien et de la présidence turque décrivaient sur 32 pages un accord de cessez-le feu. Une rencontre entre Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine était prévue sous l’égide des Nations Unies. L’Ukraine reconnaissait des droits linguistiques et administratifs aux minorités russophones de l’Est dont elle conservait les territoires. En échange du retrait militaire russe, déjà entamé, elle s’engageait à ne pas intégrer l’OTAN, seconde exigence de Moscou. L’arrivée à Kiev le 8 avril 2022 de Boris Johnson, Premier ministre britannique, encourage un revirement de la partie ukrainienne soutenue par l’Union européenne et les États-Unis[6]. La guerre va se poursuivre.

Cette paix ratée, confirmée par le Premier ministre israélien Naftali Bennett et le président turc Recep Erdogan, offrait une porte de sortie au président Zelensky. Celui-ci avait été élu le 20 mai 2019 avec 73,2% des voix à la suite de sa promesse de finir une guerre civile ayant fait 14 000 morts depuis la destitution du président Ianoukovitch en février 2014, après l’insurrection de Maïdan. Les historiens, en Ukraine et aux États-Unis, débattent du déroulement et du financement de cette révolution de couleur, notamment du rôle de la CIA, du MI 6 et de madame Victoria Nuland, alors sous-secrétaire d’État à l’Eurasie dans la conduite des opérations.

Depuis leur arrivée à la Maison Blanche le président Donald Trump et Robert F. Kennedy Jr ont à plusieurs reprises confirmé cette thèse affirmant que la CIA, avec les fonds de L’USAID (5 milliards de dollars) a programmé le coup d’État de Maïdan et poussé la Russie à intervenir en Ukraine pour secourir les populations russophones.

L’objectif était comme nous allons le démontrer de s’emparer des richesses et matières premières de l’immense Fédération de Russie à la suite de son effondrement économique. L’échec de cette entreprise démocrate conduit les Républicains à se replier sur le Groenland et Panama, et à taxer l’Union européenne le Canada, le Mexique, la Chine.

 

L’équilibre de la terreur

Le conflit entre la Russie et les États-Unis n’a pas éclaté pour cause de terreur réciproque. En 2022 les deux puissances renoncent à s’affronter directement. En témoigne l’absence d’interdiction aérienne par les États-Unis et à fortiori par l’OTAN. L’Occident laisse l’aviation russe décapiter celle de l’Ukraine. La partie sur le plan militaire est jouée dès le début malgré les discours sur les plateaux de télévision. Plusieurs raisons expliquent la non-intervention américaine.

Le 24 février 2022 la Russie dispose de forces balistiques, aériennes et sous-marines redoutables. Les vecteurs R-28 Sarmate, Avangard, Kinjal, Poséidon, RS-26, R28, Zircon, pour ne citer que ceux-là, sont des armes hypervéloces atteignant des vitesses proches des 30 000 km/h. Ils sont également d’une grande précision. Ces vecteurs utilisent les possibilités offertes par la MHD, magnétohydrodynamique[7] théorisée en France par le physicien Jean-Pierre Petit. Les forces balistiques russes ont accordé de l’importance à ses publications scientifiques.

Le 21 novembre 2024 une attaque conventionnelle à partir de l’un de ces vecteurs l’Oreshnik (noisetier) pouvant transporter quatre bombes atomiques a touché le complexe militaro-industriel Iouzhmash à Dnipropetrovsk. La destruction par armes cinétiques de ces installations n’est pas anodine. Il s’agit d’une réponse politique et personnelle adressée au président Joe Biden qui autorisa l’Ukraine le 16 novembre 2024 à tirer 6 missiles ATACMS dans la profondeur du territoire russe[8].

Pour éviter tout malentendu, le Kremlin prévint les États-Unis avant le lancement du missile en certifiant qu’il ne transporterait pas d’armes nucléaires. Avertissement confirmé le lendemain par la porte-parole du Pentagone. Depuis 1945, les deux puissances n’ont jamais cessé d’utiliser les « canaux de sécurité habituels » afin d’éviter les méprises. Il en fut ainsi lors de la crise des missiles de Cuba en 1962.[9] Il en va de même dans le monde du renseignement où les dirigeants des deux communautés, russes et américaines, se connaissent et gardent le contact.

La « nuit du noisetier » s’adresse à la France et à la Grande-Bretagne autant qu’aux États-Unis. La Russie montre qu’elle peut à partir d’un missile hypersonique de moyenne portée (5 000 km), atteindre le sol ennemi et surtout le sous-sol avec des armes cinétiques.[10] En avertissant l’adversaire, elle montre que ses vecteurs sont à l’abri de toute interception. Elle met en avant un souci des populations civiles destiné à la propagande qui impressionne l’opinion.

En ajoutant un échelon conventionnel en amont de la dissuasion nucléaire, la Russie plonge les états-majors de l’OTAN dans une réflexion qu’ils avaient anticipée. Le Pentagone, bien informé, avait déjà retiré son porte-avions de mer Rouge.[11] La Chine, préoccupée par Taïwan, observe avec envie ce nouvel outil dissuasif. L’Inde, nous le verrons, coopère déjà avec le complexe militaro-industriel russe.

Ironie de l’Histoire, cette dissuasion non-nucléaire d’une portée moyenne a été rendue possible par le président Donald Trump lorsqu’il a dénoncé les traités interdisant ce type de missiles sur le théâtre européen lors de son premier mandat (2019). « La Russie a dû s’adapter » affirme le Kremlin. L’initiative de ces traités et leur dénonciation par les uns ou les autres mérite une étude spécifique tant les propagandes et désinformations entourent le sujet.

Présentée le 13 avril 2018 par le président Poutine devant les députés de la Douma et plusieurs centaines de scientifiques,[12]la panoplie balistique russe dissuade pour l’instant tout belligérant, fussent-ils les États-Unis. Cette technologie intéresse depuis longtemps les BRICS. Le BrahMos est un missile de croisière supersonique pouvant être lancé à partir d’un sous-marin, d’un bâtiment de surface, d’un avion ou d’une station terrestre. Développé conjointement par l’Inde et la Russie – qui ont créé à cette fin une société commune, BrahMos Aerospace Private Limited -, il tire son nom du Brahmapoutre, fleuve indien, et de la Moskova, fleuve russe. Sa vitesse de croisière est d’environ Mach 2,5-2,8, ce qui le rend trois fois et demie plus rapide que le missile subsonique américain Harpoon. Une version hypersonique de ce vecteur est en développement, le BrahMos-II. Cette supériorité aérospatiale se retrouve dans le domaine aéronautique où les performances des derniers Sukoi 57[13] et Mig 41 intéressent les armées de plusieurs nations.

 

Le champ de bataille

Avant d’aborder les conséquences économiques, culturelles, politiques de cette guerre, il est utile de comparer les deux lectures du champ de bataille.

Les experts occidentaux, à part quelques exceptions, commentent les combats à partir des avancées ou des reculs sur la carte. Ils recensent sur des tableaux les moyens matériels et financiers à la disposition des belligérants. Les experts russes s’expriment sur les médias domestiques et ceux du Sud Global où ils sont écoutés. Le souvenir de l’URSS qui soutint les guerres anticoloniales leur garantit une attention particulière. Les auditeurs et téléspectateurs comparent les spécialistes de la « guerre civile européenne ». Pour l’OTAN, les progrès territoriaux de Moscou ont longtemps paru médiocres, obtenus au prix de « pertes abyssales ».

L’art de la guerre russe, héritier d’une longue tradition[14] ne vise pas prioritairement la conquête ou la conservation des territoires. Les campagnes contre la Suède, la Pologne, l’Allemagne ou la France ont enseigné aux officiers russes que l’essentiel est la destruction de l’armée ennemie. L’espace, le temps et la météo sont pour eux des avantages gratuits. Le silence également.

La foi dans l’industrie financière caractérise l’approche anglo-saxonne. Avec un budget militaire de 916 milliards de dollars – contre 109 pour la Russie -, les États-Unis disposent d’une force écrasante.[15] Cette supériorité justifie la dépréciation de l’ennemi. Madame Ursula Van der Layen déclarait le 14 septembre 2022 à la tribune du Parlement européen que la Russie achetait des machines à laver partout dans le monde pour récupérer des puces électroniques afin de faire voler ses fusées et ses avions. Elle ajoutait que le complexe militaro-industriel russe était en lambeaux…

Selon Karen Kwiatkoswski, sociologue du complexe militaro-industriel, ancien officier, le budget américain entretient une pléthore de généraux. Il produits des armements couteux bénéficiant aux entreprises de la Défense dans lesquelles nombre d’officiers achèveront leur carrière. Cette armée trop grasse est moins efficace que dans le passé. Sur le terrain il s’avère que les matériels occidentaux ne sont pas à la hauteur d’une guerre terrestre de haute intensité. Les armes qui devaient « changer la donne » en faveur de l’Ukraine se révèlent les unes après les autres inefficaces. Seul le Caesar français, dont les tubes chauffent malheureusement plus vite que ses concurrents russes, et nos Rafale pourraient tenir tête à l’armée russe[16].

Les rapports se succèdent sur les échecs répétés du F-35. Fiabilité et furtivité ne sont pas à la hauteur des attentes. Parmi les problèmes figurent des retards fréquents dans la maintenance, des dysfonctionnements de l’armement et des vulnérabilités non résolues en matière de cyberdéfense. Selon Greg Williams, directeur du Project on Government Oversight (POGO) le dernier rapport révèle des failles importantes qui pourraient inciter l’administration Trump II à exiger une révision complète d’un programme dont les coûts immenses ne sont pas à la hauteur du résultat.[17]

Quand on sait que le projet F 35 « séduit » les aviations de l’OTAN, on mesure les défis auxquels nos forces aériennes, hormis la France, seront soumises. On se souviendra à l’occasion des déclarations d’experts militaires, de généraux, d’ambassadeurs, évoquant sur nos médias les faiblesses structurelles, voire congénitales, d’une armée russe démoralisée, sous-équipée, confrontée à des désertions massives, se battant avec des pelles…

Des journalistes de renom complétaient le tableau en évoquant la santé mentale voire physique du président Poutine, isolé dans son pays, paria sur la scène internationale. Ces encouragements repris par les médias ukrainiens galvaniseront une infanterie qui subira des pertes réellement abyssales, en croyant percer le système Sourovikine[18] en particulier à Robotino, Krinki, Uglédar et autres « sacs à feux ».

La très lente avancée des forces russes jusqu’à décembre 2024 n’a pas pour seule cause la stratégie d’attrition chère à Moscou. Une autre raison explique l’absence des grandes chevauchées blindées des années 1944-1945. Elles sont impossibles aujourd’hui car vouées à l’échec. Des deux côtés.

 

Les drones changent la guerre

Le combattant vit une guerre de plus en plus terrifiante menée des deux côtés par des jeunes gens intégrés dans les unités de première ligne. Ces nouveaux soldats jouent à la vraie guerre comme dans un jeu vidéo. Il n’y a plus de protection, il n’y a plus de tranchée ou d’abri comme à Verdun. « Si tu bouges le drone te repère, il te tue. Si tu es immobile il finit par te repérer, si tu urines contre un arbre, il détecte la chaleur qui sort de toi[19] ». « L’artillerie russe, tu ne la vois jamais mais elle te voit ! ».

Dans les deux camps l’ingéniosité des dronistes est stupéfiante. Le Babayaga ukrainien était à l’origine un drone agricole. Il en existe désormais plusieurs versions larguant des mines ou des grenades sur l’ennemi. Il va sans dire que la mise au point de ces engins est à l’origine d’accidents mortels, d’amputations des bras.

Chez les Russes la famille des Kolibri fait l’objet d’incessantes modifications. Ces appareils volent en essaim. Certains font de la reconnaissance. Ils éclairent le chemin des drones frappeurs. Spécialistes de la guerre électronique les Russes mettent au point une nouvelle génération de drones. Ils sautent d’une fréquence à une autre afin d’échapper aux tentatives de brouillage. Les drones deviennent compacts. Les Hummingbirds sont pliables. Ils tiennent dans un petit boîtier. Ils ne pèsent pas plus de quatre kilos. Des championnats internationaux de guerre des robots ont lieu dans les pays appartenant aux BRICS.

La guerre des drones augure d’un avenir inquiétant pour l’Europe. Les compétences du champ de bataille seront le bras armé de groupes radicaux ou mafieux. Ils mèneront des guerres dévastatrices contre leurs concurrents. Les spécialistes se forment sur place, in vivo. Le combattant de demain sera jeune, manipulable. Il opérera depuis le trottoir d’en face. Nos services de renseignement extérieurs et intérieurs pensent déjà aux contre-mesures. Comme en 1946, l’après-guerre risque d’être violent.

Les drones comme les satellites qui peuvent en coordonner les essaims sont par ailleurs un enjeu de la guerre économique comme nous le verrons plus loin.[20] En décembre 2024, la Chine réduit le volume de ses exportations de métaux précieux comme le gallium, l’antimoine ou le germanium vers les États-Unis. Pékin d’attire l’attention de la Maison Blanche sur le rapport de force des deux géants dans le domaine des technologies à double usage, militaire et civil. En cette occasion, le ministère du Commerce annonce que les livraisons de graphite à usage civil, notamment dans les batteries, feront l’objet de contrôles stricts.

 

Le renseignement, arme déterminante

Dans un article du New York Times paru le 25 février, 2024 on apprend ce que l’on savait déjà. La CIA est largement impliquée en Ukraine. Après plus de 200 entretiens avec d’actuels ou anciens fonctionnaires ukrainiens, américains et européens, deux journalistes dressent le tableau d’une collaboration des agences de renseignement ukrainiennes et américaines depuis la révolution de Maïdan en février 2014.

La « Compagnie » compte officiellement 12 bases le long de la frontière russe, et elle n’est pas le seul service de renseignement américain. On sait que la NSA est venu « durcir » les communications ukrainiennes avant le 24 février 2024, dans l’optique d’une reconquête de la Crimée et du Dombass.

La cohabitation des services occidentaux avec leurs homologues ukrainiens n’a jamais été un fleuve tranquille. Des complications surviendront lorsque le président Donald Trump demandera à son homologue Zelensky une enquête sur Hunter Biden, le fils de Joe Biden, lors de son premier mandat. Il n’en reste pas moins que le renseignement occidental fournit à l’Ukraine de précieuses informations permettant la réalisation de frappes dans une profondeur limitée…

A la suite de l’invasion russe, Joe Biden autorise les agences américaines à abandonner les anciennes règles. Elles sont autorisées à soutenir des opérations létales visant les troupes russes présentes sur le territoire ukrainien. La CIA avertit ses alliés d’un couloir humanitaire déployé à Marioupol risquant de se transformer en piège mortel. Elle permet de déjouer un complot qui menaçait le président ukrainien. Les services américains ne sont pas les seuls sur place. Tous les pays membres de l’Union européenne ont leurs « observateurs ».

La collaboration n’exclut pas la méfiance. Jusqu’à la destitution par le parlement du président Viktor Ianoukovytch les services de Kiev collaboraient avec leurs homologues russes civils et militaires. Il reste des sympathies inavouées au sein de l’appareil ukrainien pour le grand frère russe. Cela explique les ciblages, les attentats contre les sergents recruteurs,[21] les sabotages sur les lignes logistiques, et les dépôts d’armes. Emerge à l’ouest du Dniepr une résistance qui ne peut survivre sans la complicité d’une partie du renseignement ukrainien.

Les entreprises occidentales impliquées dans les guerres d’Ukraine disposent de compétences en matière de renseignement privé. Les cellules bien équipées sont animées par des anciens des services officiels. Les investisseurs céréaliers ou miniers animent des réseaux qui s’étendent bien au-delà des frontières ukrainiennes. Depuis le Moyen-Âge et la Ligue hanséatique, l’Allemagne, l’Angleterre et les Pays-Bas ont des intérêts en Ukraine et en Russie. Leurs entreprises, banques et compagnies d’assurance sont en mesure d’éclairer le gouvernement de Kiev à partir d’entrelacements commerciaux, philanthropiques, philosophiques, religieux. Bien des ONG sont les avatars de ces traditions. Il en va de même d’Israël dont les services civils et militaires, les start-ups dans le domaine de la cybersécurité ont des clients des deux côtés de la frontière.

Rien cependant ne laissait prévoir le rôle prépondérant de Starlink. « Sans lui nous aurions perdu la guerre » commentent les officiers ukrainiens. Sur le front, le système de satellites d’Elon Musk est un outil-clé pour Kiev. Il permet des liaisons en principe sécurisées et joue un rôle dans le pilotage des drones. Une entreprise privée devient belligérante, pèse sur le cours des opérations militaires.[22] La médaille a cependant son revers. Le propriétaire de SpaceX a empêché son utilisation pour frapper une base de la marine russe afin d’éviter, dit-il, un « mini Pearl Harbor. »

Le diable, se situe dans les détails. La couverture de l’Ukraine en septembre 2023, selon la carte officielle sur le site web de Starlink « oublie » les zones situées le long des frontières biélorusses et russes. La Crimée et certaines parties du Donbass ne sont pas protégées. Elon Musk sait dès le 24 février 2022 que les États-Unis ne combattront pas. La guerre économique suffira à faire tomber le gouvernement russe. Par la même occasion, il montre à la Chine où il possède des intérêts et qu’il n’est pas un jusqu’au-boutiste. Inutile d’insulter l’avenir. La participation du réseau privé de communication ouvre un chapitre peu connu des guerres d’Ukraine : la cyberguerre.

 

La cyberguerre au centre de toutes les autres

L’interception du signal, le brouillage des fréquences, l’interprétation des captations par le cerveau humain ou l’intelligence artificielle atteignent des niveaux de sophistication jamais vus auparavant. Les drones dont nous venons de voir l’efficacité sont désormais pilotés par fibre optique, tel autrefois le célèbre Milan, arme antichar française filoguidée. Les images en direct des impacts transforment le conflit en « spectacle ». Dans les deux camps, chaque unité se déplace avec ses brouilleurs et ses dronistes. Les groupes d’assaut, de plus en plus petits pour limiter les pertes, « reniflent » l’ennemi, le rendent visibles à l’artillerie, aux bombes planantes, aux lance-flammes.

Les belligérants développent des politiques de souveraineté numérique. Celles-ci se déclinent en trois chapitres, la maîtrise du hardware, les installations lourdes, le software, les logiciels et le cloud, la maîtrise des données. L’Europe et la Russie cherchent par tous les moyens à bâtir une industrie du cyber avec l’aide de nombreux partenaires de manière à anticiper les risques et saisir les opportunités d’affaires.

A Moscou, les semaines de la cybersécurité ressemblent à des écosystèmes rassemblant des milliers de participants à l’échelle des BRICS. Des administrations, des entreprises privées chinoises ou indiennes y côtoient des militaires mais aussi les directeurs de système d’information de grandes entreprises.

Il en va de même dans l’Union européenne. Le NIS2[23] qui fait suite au règlement général sur la protection des données (RGPD) prépare nos administrations et organismes d’intérêts vitaux à toutes les éventualités. La vulnérabilité du système Internet, notamment les câbles par lesquels transitent 99% des données, préoccupe nos services qui disposent d’un département cyberguerre important. L’ANSSI[24] anime un écosystème de souveraineté numérique à l’image de celui de Moscou. Des rencontres de praticiens telles que les « Lundi de la cybersécurité », ou des associations comme l’ARCSI[25] sont des lieux d’échanges entre spécialistes. Comme les autres, la cyberguerre a besoin d’idées.

Sur le champ de bataille elle brouille les vecteurs de l’ennemi. C’est ainsi que la guerre électronique rend aveugle certains missiles de croisière qui n’atteignent plus leurs cibles. L’obus de 155 mm Excalibur guidé par GPS n’est plus aussi performant qu’au début du conflit. Des corsaires ou mercenaires apparaissent dans le cyberespace. Ils traversent les frontières, menacent les souverainetés des États. A l’Est comme à l’Ouest des groupes informels tels que Conti[26] en Russie ou IT Ukrainian Army, préfigurent des guerres étonnantes, inattendues.

Encore limitée, la cyberguerre peut devenir cataclysmique. Entre la dissuasion nucléaire et la dissuasion conventionnelle existe désormais une dissuasion informatique tout aussi terrifiante. Après « la nuit du noisetier » celle de Chronos menace tous les belligérants.

Au XXIe siècles, avoir l’heure exacte est critique pour de grands pans de l’industrie et des transports. En mer Baltique, notamment depuis l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN, la navigation commerciale est rendue plus difficile. L’heure est diffusée de plusieurs façons : par des émetteurs radio, par les satellites GNSS (GPS, Galileo, etc.), par Internet avec le protocole NTP, par des fibres optiques dédiées, etc.

Toutes les méthodes actuelles posent de gros problème de sécurité : les GNSS, très précis, utilisés absolument partout, sont très sensibles au brouillage, qui empêche la localisation, et au leurrage, qui vous transporte n’importe où. Or le brouillage, nous l’avons vu est une spécialité russe. Le protocole NTP, qui distribue l’heure sur Internet avec une précision bien moins grande, est facilement attaquable. Et les conséquences des attaques de plus en plus nombreuses peuvent être très graves[27].

En cas d’aggravation du conflit, des pirates pourraient modifier l’heure affichée sur des serveurs de temps, entraînant des désynchronisations massives et des dysfonctionnements dans les systèmes qui s’y réfèrent. Des attaques par déni de service pourraient rendre inaccessibles les serveurs de temps, paralysant les systèmes qui en dépendent. Les conséquences de la cyberguerre pourraient être catastrophiques. Les systèmes d’exploitation, les bases de données et leurs applications dépendent d’une horloge précise pour fonctionner correctement. Une heure erronée pourrait entraîner des pertes de données, des plantages et des dysfonctionnements généralisés.

Les réseaux de télécommunications s’appuient sur la synchronisation horaire pour router les paquets de données de manière efficace. Une heure inexacte pourrait entraîner des retards, des pertes de paquets et une dégradation de la qualité des communications. Les marchés financiers fonctionnent en temps réel et s’appuient sur des horloges précises pour exécuter les transactions. Une heure erronée pourrait entraîner des erreurs de calcul, des pertes financières et une perte de confiance dans les marchés. Les réseaux électriques, les systèmes de transport et les systèmes de contrôle industriels dépendent tous d’une synchronisation horaire précise. Une heure erronée pourrait entraîner des pannes, des accidents et des perturbations majeures. Le professeur Gérard Berry auteur de L’Hyperpuissance de l’informatique, Algorithmes, données, machines,réseaux[28] trace les grandes lignes d’un conflit généralisé.

La cyberguerre ne se limite pas au terrain militaire. Elle facilite le développement de technologies qui contournent les sanctions, bâtissent une souveraineté numérique partagée entre les BRICS. C’est sur elles que s’appuieront les réponses russes à la guerre économique occidentale.

 

La guerre économique occidentale

La guerre économique devait vaincre la Russie grâce aux sanctions économiques et financières. Il était inutile et risqué comme nous venons de le voir d’engager l’OTAN le 24 février 2022. L’Ukraine, forte d’une armée rééquipée, aux effectifs trois fois supérieurs à ceux de la force d’invasion russe, devait obliger cette dernière à l’envahir pour éviter la reconquête de la Crimée et du Donbass. Excellent prétexte pour lancer les sanctions finales. Tout était prêt, rien n’était caché puisque visible, écouté, par les service de renseignement des uns et des autres.

Le projet de guerre économique contre la Russie est une vielle idée anglo-saxonne qui prend ses racines après le congrès de Vienne de 1815. L’Angleterre ne pardonne pas au Tsar d’avoir ménagé la France. Tout au long du XIXe siècle, ce sont les milieux libéraux britanniques pour des motifs coloniaux qui inventeront le terme russophobie. Celui-ci ne fera pas toujours l’unanimité au sein de cette famille de pensée. Les États-Unis prennent le relais avec des géopoliticiens tels que Alfred Mahan, qui développe le concept de puissance maritime, John Mackinder[29], qui voit dans le Heartland eurasiatique une menace existentielle pour l’Amérique, ou Nicolas Spikman, qui, avec la théorie de l’anneau, est à l’origine de la politique de Containment de la Russie soviétique puis de la Chine.

C’est dans la continuité de ces auteurs que se situe Le Grand échiquier de Zbigniew Brzezinski et l’émergence des néo-conservateurs américains au sein du Parti démocrate et de son concurrent républicain. Madame Victoria Nuland, sous-secrétaire d’Etat à l’Eurasies en sera l’une des figures politiques. On remarquera la filiation « polonaise » de cette école jusqu’au président Duda qui, en juin 2024, parlait de la nécessaire décolonisation de la Russie. Bien avant le 24 février, un axe Washington-Varsovie émerge. Il joue maintenant un rôle diplomatique et militaire au sein même de l’Union européenne…

En 2019, un rapport intitulé Overextending and Unbalancing Russia de la Rand Corporation[30], sous l’administration Trump I, décrit les mesures à prendre pour ruiner la Russie. Sont abordés les chapitres suivants : Economie – Géopolitique – Système informationnel et idéologique – Dimension aérienne et spatiale – Dimension maritime – Dimension terrestre et multi-domaines. Ce rapport s’inscrit dans le contexte des sanctions communes aux États-Unis et à l’Union européenne qui depuis la sécession des oblasts russophones sont censées affaiblir la Russie. On notera que les rédacteurs envisageaient déjà la possibilité d’une victoire militaire russe.

L’attaque économique décisive est déclenchée au lendemain du 24 février 2024. Bruno Le Maire déclare le 3 mars 2022 : « Nous allons mettre l’économie russe à genoux ». Le 23 mars au sommet de l’OTAN, le président Macron annonce : « Au moment où je vous parle la Russie est en état de cessation de paiement. Nous allons l’isoler sur la scène mondiale ». La déclaration de guerre de la France s’inscrit dans celle plus globale de l’Occident. Les banques russes, exceptions faites de certaines qui négocient les hydrocarbures, sont déconnectées du système SWIFT. La Russie plie, le rouble chute lourdement, mais le pays résiste.

Le 26 septembre 2022, en mer Baltique, deux explosions occasionnent d’importantes fuites de gaz. La première, sur Nord Stream 2 est découverte au sud-est de l’île danoise de Bornholm. Plusieurs heures plus tard, deux autres fuites sont décelées sur Nord Stream 1 au nord-est de l’île. Ces actes de guerre sanctionnent les économies allemandes et françaises. On mesure mieux aujourd’hui le désastre subi. Engie, partenaire de Gazprom avec des sociétés allemandes et hollandaises, perd 900 millions d’euros d’investissement[31]. Le gaz revendu en Europe ne peut plus l’être.

Trois pays bénéficient de cette agression. La Russie libère des stocks importants qu’elle peut écouler en direction des BRICS. Elle profite de l’affaiblissement européen. Les États- Unis rentabilisent leur industrie des gaz de schiste. Ils le vendent aux Européens qui le boudaient pour des raisons environnementales. Un troisième pays tire son épingle du jeu : la Norvège[32] qui vend son gaz plus cher elle aussi. La question demeure de savoir qui a commis cette destruction stratégique, mais il est évident que le grand perdant demeure l’Union européenne.

En septembre 2024, le rapport Draghi tire un bilan provisoire des conséquences de la guerre économique. Il annonce un lent appauvrissement de l’Europe occidentale. Selon le FMI (octobre 2024) la croissance est plus forte dans les BRICS qu’au G7. En termes de pouvoir d’achat du consommateur, la Russie dépasse l’Allemagne et la France. Après la défaite militaire, l’Europe enregistre une défaite économique. Comment la Russie a-t-elle surmonté les sanctions ? Comment les a-t-elle utilisées ?

 

La guerre économique russe

L’échec des sanctions occidentales a pour cause première leur publicité. Bien avant 2014, les « trains » de sanctions commentés, discutés dans les assemblées et les chancelleries, décrivent par le menu toutes les attaques dont l’économie russe sera la cible. La discrétion n’est pas une arme occidentale. Depuis longtemps, la Russie maîtrise l’art de se taire. Cet avantage nous est étranger. Souffrant d’un climat rude, d’un espace immense, de conditions de vie difficiles, le peuple russe développe des capacités de résilience étonnantes. Judoka dans l’âme, le président Poutine a profité des sanctions pour « secouer » l’intelligence économique et technologique de ses concitoyens.

Comme aurait dit le général de Gaulle, la paresse et le renoncement menacent les Russes autant que les autres. Les sanctions occidentales renforcent l’idée d’encerclement autant que les Léopard dans les plaines d’Ukraine ou les bases de l’OTAN autour de la Rodina. La Russie est le pays de la TRIZ (acronyme de Théorie de Résolution des Problèmes Inventifs[33]). Chaque sanction, chaque retrait de fournisseur, chaque rupture d’approvisionnement de pièce détachée devient un problème appelant une innovation, souvent par simplification ou alliance iconoclaste de technologies séparées par des préjugés[34]. La démarche est une approche heuristique destinée à résoudre des problèmes d’inventivité technique. Comme lors du siège de Leningrad, l’intelligence russe collective va retourner les sanctions contre l’ennemi.

Dotée d’une mémoire séculaire, la diplomatie russe puise des idées dans l’histoire de l’URSS. Celle-ci commerçait en rouble et en roupies avec l’Inde dans le domaine des hydrocarbures. L’expérience cessa avec le régime communiste. Avant même les guerres d’Ukraine, la vielle idée reprend du service. Lorsque les BRICS apparaissent, l’envie d’échapper à de nouvelles sanctions se confond avec celle d’ajouter aux FMI et à la Banque mondiales des institutions financières plus souples, mieux adaptées au désir du Sud de commercer avec le Sud, sans risquer l’extraterritorialité judiciaire du dollar.

Pour madame Anuradha Chenoy analyste financière indienne, le programme des BRICS pour une dédollarisation prendra du temps. Le dollar représente encore 80% des échanges mondiaux, l’euro 16%, devant les monnaies chinoises et indiennes. La monnaie de remplacement n’existe pas encore. Cependant le manque de crédibilité militaire et diplomatique de l’Union européenne pourrait entraîner la chute de l’euro avant celle du dollar, qui a encore de beaux jours devant lui.

Lors du 16e forum de Kazan[35] les BRICS se définissent comme un club d’affaires non occidental mais pas anti-occidental. La plupart des pays membres, y compris la Russie, souhaitent entretenir des relations commerciales voire culturelles avec l’Occident. Cependant les BRICS opposent la notion d’état civilisationnel à celle d’universalisme occidental. Beau sujet de thèse pour nos étudiants en géopolitique.

Malgré la domination du dollar, le forum de Kazan réaffirme les fondements d’un projet financier calqué sur les institutions de Bretton Woods, mais plus souples, plus « technologiques ». Les BRICS envisagent la création d’une unité de compte commune basée sur la blockchain.[36] L’exercice est ardu car il faut concilier une technologie par essence décentralisée avec une nécessaire centralisation. La nouvelle unité de compte pourrait intégrer des devises mais aussi de l’or ou des matières premières.

Un système d’assurance mondial pourrait compléter le tableau de façon classique. Il est encore au stade des idées. La création d’une agence de notation mondiale indépendante posera des problèmes politiques. La Banque de développement de Shanghai, faiblement dotée (100 milliards en dollars), reste un nain. En revanche l’idée d’un dépositaire de règlement, chambre de compensation, est stratégique. Une grande partie du commerce mondial échappera aux regards des statistiques occidentales. Le monde commercera sans nous.

Les BRICS sont un animal diplomatique qui interroge les ministres des Affaires étrangères occidentaux. Le forum de Kazan acte la fin de l’anthropocène à l’instar d’un nombre croissant de scientifiques, géologues, physiciens ou climatologues. La transition climatique est ajournée. Les conclusions du GIEC sur le CO2 sont soupçonnées de favoriser les études accusant le dioxyde de carbone au détriment de celles qui relient le changement climatique à des phénomènes complexes, voire aux nanoparticules de plastique, aux évolutions du système solaire. Une telle politique remet en cause les réglementations européennes. L’industrie du Vieux continent, basée sur la « protection de la planète », est prise à revers.

Outre l’extraterritorialité juridique du dollar, les BRICS dénoncent les sanctions unilatérales. Selon Anuradha Chenoy, 15 entreprises indiennes ont récemment été sanctionnées par les États-Unis. Ce qui ulcère New Delhi. La politique du genre et l’étude de la transsexualité à l’école primaire choquent ses valeurs de société qui reconnaissent le masculin et le féminin. Les BRICS ont permis un gel du conflit frontalier de l’Himalaya entre la Chine et l’Inde. Ces deux pays ont reculé leurs troupes. L’Iran et l’Arabie saoudite mènent des manœuvres militaires conjointes. Pour les spécialistes du Moyen-Orient, la chose était inconcevable.

Ces développements diplomatiques sont pour la Russie une source d’influence. Ils sont dus à la compétence de fonctionnaires travaillant depuis plusieurs décennies sous les ordres du même ministre. Sergueï Viktorovitch Lavrov associe son pays à un regroupement planétaire dont le PIB dépasse celui du G7. Ce diplomate est en passe d’isoler l’Union européenne. Celle-ci, confrontée à la signature le 6 décembre 2024 du traité de libre-échange avec le Mercosur[37], doit gérer le mécontentement d’agriculteurs hostiles à l’importation de produit alimentaires et céréaliers ukrainiens ne respectant pas nos normes sanitaires.

Le souvenir, du bombardement de la Serbie en 1999 par les États-Unis hante les guerres d’Ukraine. L’annulation du premier tour des élections présidentielle en Roumanie[38] le 6 décembre 2024 par la Cour constitutionnelle empêche M Calin Georgescu, pro-russe opposé au maintien de la Roumanie dans l’OTAN, d’accéder au second tour. La condamnation par son challenger, madame Elena Lasconi, de cette décision constitutionnelle ouvre une crise politique. Dans les derniers sondages, Georgescu était crédité de 63% des voix le 8 décembre 2024. Ce séisme politique concerne la France qui dispose de troupes[39]au camp de Cincu.

La Hongrie, la Slovaquie, la Roumanie – pays frontaliers de l’Ukraine – et la Serbie sont le théâtre d’évolutions hostiles au gouvernement de Kiev. La Moldavie, grâce à l’apport controversé des Moldaves de l’étranger, échappe de justesse à un gouvernement pro-russe. En Allemagne les élections partielles et la crise économique favorisent à droite comme à gauche un courant hostile à l’OTAN et à Kiev. La Géorgie souhaite une politique d’apaisement avec Moscou.

Le retrait partiel des États-Unis, renforce la tendance. Dans une Ukraine en paix, rien ne garantit un résultat électoral favorable à l’Union européenne. Le ressentiment gagne du terrain parmi la population. L’Occident est accusé de ne pas avoir été à la hauteur des promesses. L’image de la Russie s’améliore, malgré les cimetières qui s’étendent à perte de vue. La langue russe se parle à nouveau dans certains milieux. L’opposition à la guerre en France[40] affaiblit notre « soutien indéfectible » au gouvernement de Kiev. Pourquoi envoyer des jeunes Français mourir à la place des Ukrainiens, accueillis chez nous ?

Le 7 décembre 2024, à l’occasion de la réouverture de Notre Dame, Ursula Van der Layen était absente. C’est plus qu’un symbole. C’est un avertissement. L’Union européenne incapable de gagner la guerre commence à perdre une paix qu’elle n’a pas anticipée[41]. Sa dislocation devient une possibilité.

 

Intelligence économique et stratégique

Les guerres d’Ukraine obligent la France à voir le monde tel qu’il est. La proposition de loi du Sénat[42] du 25 mars 2021 portant sur une politique d’intelligence économique et stratégique, est une réponse à la hauteur de la menace. Il faut féliciter les sénateurs qui ont conçu un système innovant inspiré des actions de monsieur Alain Juillet, premier Haut responsable à l’Intelligence économique de 2003 à 2009. Les fondements doctrinaux, législatifs, réglementaires, existent. Il est inutile de refaire un énième rapport. Il faut passer à l’acte…Difficulté française.

Sans intelligence nationale il est impossible de lire et conduire la guerre économique[43] qui ne s’arrêtera jamais. Cette ambition, source de cohérence nationale, mobilise les élus, les chefs d’entreprises, les territoires, les métiers, les ingénieurs et les scientifiques. Elle nécessite une formation des dirigeants et des cadres aux éléments fondamentaux de la discipline.[44]

Elle nous oblige à une réflexion sur les temps qui viennent. Des milliers de questions nécessiteront des réponses. En voici quelques-unes parmi une immensité :

– La Russie voudra-t-elle nous envahir ? En a-t-elle les moyens ? Le veut-elle ?

– Sommes-nous si appétissants ? Qu’avons-nous à part du charbon, du granit et de la neige l’hiver ? L’Europe occidentale a toujours été un continent pauvre…

– Quid de la Roumanie après l’annulation de la présidentielle ?

– Qui assumera la dette ukrainienne ?

– Quid de l’Ukraine dans l’Union européenne ?

– Quid des terrorismes nés de l’après-guerre ?

– Nos intérêts sont-ils compatibles avec ceux de l’Union européenne ?

– Une défense européenne est-elle crédible ?

– Nos « alliés » sont-ils nos alliés, nos « ennemis » sont-ils nos ennemis ?

– Comment rétablir nos positions en Afrique ?

– Quelles énergies pour demain ?

– Quelles valeurs compatibles avec celles des autres ?

– Pourquoi les autres ne pensent-ils pas comme nous ?

– Interactions entre le conflit ukrainien et celui du Moyen Orient ?

– Le Sud Global est déjà parmi nous, quelle approche ?

L’intelligence économique nationale travaille en collaboration avec les entreprises, car celles-ci sont déjà des intelligences économiques. La fiabilité des sources et la véracité de l’information sont prioritaires. Le présent article s’inspire à 90% de sources ouvertes facilement accessibles dont on trouvera une liste non exhaustive ci-dessous.

Beaucoup de médias ont traité le sujet conformément à la charte de Munich régissant la profession de journaliste et dont l’article premier stipule : « Respecter la vérité, quelles qu’en puissent être les conséquences pour lui-même, et ce, en raison du droit que le public a de connaître la vérité ».


Nota

Les analystes et les media dont les noms suivent ont été validés par les faits, la pertinence des commentaires, malgré des divergences d’opinions. Utiles pour comprendre la guerre, ils le sont pour anticiper l’après-guerre.

Idriss Aberkane, essayiste, Agence internationale de l’énergie, Frédéric Aigouy, journaliste, Brainlesspartisans X, Jacques Baud, analyste militaire, Espoir et Dignité, George Beebe, analyste, Bloomberg News, BFMTV.Cyril Gloagen, militaire-géopoliticien. Karine Bechet-Golovko, juriste, Anne-Laure Bonnel, journaliste, Fabien Bouglé, énergéticien. André Bercoff journaliste. Hervé Carresse analyste militaire, Tucker Carlson, journaliste, Régis de Castelnau, avocat. Consortium international des journalistes d’investigation, Eric Denécé, analyste, CF2R, CNEWS, Grillard Eric X. Dialogue franco-russe, Glenn Diesen, universitaire, Donbass insider, Diploweb, Sylvain Ferreira, historien, Chas W Freeman, analyste, JacquesFrèreX. Vladimir Fédorovski, écrivain, The Economist. FMI news, Fulguradvenit, Caroline Galactéros, géopolitologue, Géopolitique profonde, Géopragma, Charles Gave, économiste, Jacques Hogard, militaire, François Hollande ex-président. Intelligence online, Jean-Loup Izambert, écrivain, Alain Juillet, Sergueï Alexandrovitch Karaganov, politique, Olivier Kempf, militaire, Kyiv Post, Régis Le Sommier, journaliste. Le courrier des stratèges, Pascal Lottaz, universitaire, LCI, Ligne droite, Thierry Mariani, député, Dimitri Marckenko, militaire, Jack Matlock, diplomate, Le nouveau Conservateur. Mediazona, Viktor Medvedchuk, politicien, Alexander Mercouris, avocat, Angela Merkel, ex-chancelière. Military Summary Chanel. Nikola Mirkovic, écrivain, Arta Moeini, analyste Xavier Moreau, entrepreneur, Camille Moscow blogueuse, Omerta, Vasyl Muravytskyi, journaliste.Christelle Néant, journaliste, Open Box TV, New York Times, Victoria Nuland, ministre, Renard Paty, Jean-Pierre Petit, scientifique, Jean Bernard Pinatel, général, Politico, Piotr Olegovitch Tolstoï, député.  Markus Reisner, universitaire, Jeff Rich, analyste, Fabrice Ribère, analyste. Rand Corporation Scott Ritter analyste, Alexandre Robert analyste, Henri Roure, analyste militaire, RussiaToday Jeffrey Sachs, économiste, Jacques Sapir économiste, Sputnik, Sud Radio. TerciosdelsolX, Sanevox, Stratpol, Tocsin, Emmanuel Todd essayiste, SitRepInternational Reporter, TVlibertés, Veille stratégique, Dominique de Villepin, politique.


[1] La Défaite de l’Occident Emmanuel Todd, Gallimard janvier 2024. L’auteur qui avait prévu de manière détaillée et documentée la fin de l’empire communiste réitère l’exercice avec l’Occident et en particulier l’OTAN.

[2] CF. Liste des guerres des États-Unis (Wikipédia). Le bombardement de l’OTAN sur la Serbie en 1999 pendant 78 jours a marqué les esprits en Europe balkanique. Voir plus loin.

[3] Le Format Normandie est une discussion diplomatique impliquant quatre pays : Russie, Ukraine, Allemagne et France, visant à régler la guerre du Donbass. Cette configuration des rencontres diplomatiques à quatre pays a été adoptée pendant la guerre civile opposant de 2014 à 2022 l’armée ukrainienne aux deux républiques séparatistes de Donetsk et de Lougansk

[4] Dans un entretien au Kyiv Independent (12 décembre 2022), François Hollande a revendiqué que les accords de Minsk avaient amené la Russie sur le terrain diplomatique, laissant à l’armée de Kiev le temps de se renforcer. Un aveu contredisant les déclarations pacifiques d’alors.

[5] Guerre en Ukraine : après des pourparlers « substantiels » à Istanbul, Moscou promet de « réduire radicalement » son offensive vers Kiev (Le Monde 29 mars 20).

[6] Poutine et Zelensky “voulaient un cessez-le-feu” mais les négociations ont été rompues par les pays occidentaux a expliqu » Naftali Bennett (France soir, 6 février 2023).

[7] Site de Jean Pierre Petit. Le missile tiré le 21 novembre 2024 était un MRBM Oreshnik volant à Mach 10 (3km/s). Sur ce sujet on se réfèrera aux explications de Cyril Gloagen cité plus loin. Quant à Jean Pierre Petit sa connaissance intime du milieu scientifique russe en fait un expert également très écouté. Spécialiste des problèmes liés à l’hypervélocité, il traite de l’apparition de ces technologies dans l’industrie aérospatiale.

[8] La paternité de cette décision n’est pour l’instant pas clairement établie. La » profondeur » toute relative n’excède pas 300 km. Le tir fut d’une efficacité réduite : 5 missiles abattus, le 6edestabilisé. On peut dire que l’OTAN malgré ses fermes déclarations soutient l’Ukraine comme la corde soutient le pendu.

[9] 1962, roman de Bernard Besson, Odile Jacob, 2015. A cette époque déjà (crise des missiles de Cuba), les ambassadeurs des deux puissances jouèrent un rôle stratégique de premier plan. Aujourd’hui encore, des personnalités comme William Burns et Serguei Naryshkin qui se connaissent bien, reproduisent le dialogue de 1962, équilibre de la terreur oblige.

[10] Cyril Gloagen, « Portrait possible du missile russe Oreshnik », Diploweb, 8 décembre 2024. Ce spécialiste détaille longuement les défauts et qualités du missile, son histoire technologique.

[11] Les États-Unis retirent le porte-avions Eisenhower de la mer Rouge en raison de l’intensification des attaques des Houthis (Jade, 24 juin 2024).

[12] Site de Jean Pierre Petit.

[13] Le Russie revendique une première vente à l’export pour son nouveau chasseur Sukhoi Su-57. Le pays acheteur n’a pas été nommé mais il pourrait s’agir de l’Algérie ou de l’Iran (Frédéric Lert, Aéro Buzz, 18 novembre 2024). On écoutera avec intérêt l’analyse d’Hervé Carresse le 24 novembre 2024 sur TVL.

[14] Jacques Baud, L’Art de la guerre russe, Max Milo, 2023. Ancien expert militaire de l’ONU, r ex officier de renseignement suisse, il a travaillé en Ukraine et en Russie dans le cadre du Format Normandie. Ses analyses de terrain ont été confirmées par les faits à de nombreuses reprises.

[15] Statista 202,3 Statista Research Department, 21 mai 2024.

[16] Dès 2026, la version F4 du Rafale de Dassault va utiliser l’IA pour désigner des cibles au sol

Après huit ans de travaux de recherche, Thales est parvenu à injecter une dose d’intelligence artificielle dans le pod Talios de la nouvelle version du Rafale. Cet équipement sert à la reconnaissance des objets et à la désignation laser. Cette innovation va équiper la future version F4 du chasseur-bombardier français, prévue pour 2026 (L’Usine Digitale, IA Insider, 10 décembre 2026)

[17] Yves Pagot, « Les déboires du programme F-35 ou le paradoxe de Zénon », Aviation militaire, août 2018.

[18] Sergueï Vladimirovitch Sourovikine concepteur et réalisateur d’une « défense active », un des vainqueurs de cette guerre.

[19] Confidence d’un engagé français dans la Légioni ayant combattu du côté ukrainien. Cette relation est confirmée par le grand reporter Régis le Sommier sur la chaîne Omerta. Celui-ci a passé plusieurs semaines des deux côtés du front notamment dans le saillant de Soudja. Où il a fréquenté les « dronistes ».

[20]  Harold Thibault, Le Monde,4 décembre 2024 La Chine a annoncé, mardi 3 décembre, bloquer ses exportations de certains métaux stratégiques vers les États-Unis, au lendemain de nouvelles restrictions américaines à son encontre, dans une accélération de la guerre technologique entre les deux premières puissances de la planète. Le ministère du commerce chinois, accusant Washington d’avoir « politisé les questions commerciales et technologiques », explique dans un communiqué qu’il ne délivrera plus de licences d’exportation de gallium, de germanium, d’antimoine et d’autres matériaux vers les États-Unis dès lors qu’ils peuvent avoir un double usage civil et militaire.

[21] Des centaines de milliers de jeunes ukrainiens ont fui leur pays dès 2014 pour rejoindre les États-Unis, l’Union européenne ou la Russie. L’armée de Kiev manque cruellement d’hommes. L’argument, repris par des officiers américains, pèse dans la politique de retrait des États-Unis. Côté russe, des centaines de volontaires affluent chaque jour, motivés par des primes, de bons salaires et un patriotisme évident.

[22] Elise Vincent, Alexandre Piquard et Cédric Pietralunga Le Monde, 15 décembre 2022

[23] Securityhttps://waterfall-security.com/guides/nis2 NIS2 Directive Guide NIS2 Compliance Guide

[24] Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (https://cyber.gouv.fr). Clé de voute de la souveraineté numérique française, l’Agence mettra en œuvre les recommandations de NIS2. Les esprits critiques pour ne pas dire chagrins, remarqueront que l’Europe réglemente, la Fédération de Russie agit, les États-Unis achètent…

[25] Association des réservistes du chiffre et de la sécurité de l’information (https://www.arcsi.fr). La cybersécurité est également enseignée à l’Ecole européenne d’intelligence économique de Versailles (EEIE).

[26] « Ransomware : le groupe pro-russe Conti pratique volontiers un terrorisme numérique », Le Monde Informatique(https://www.lemondeinformatique.fr/ac).

[27] Gérard Berry, ancien élève de l’École polytechnique, ingénieur général du corps des Mines, membre de l’Académie des sciences, de l’Académie des technologies est titulaire de la médaille d’or du CNRS qu’il a reçue en 2014. Il est professeur émérite (au mérite) au Collège de France, ex-chaire Algorithmes, machines et langages (Gérard Berry Le Temps vu autrement, Odile jacob, 2025).

[28] Odile Jacob, 2017.

[29] D’après sa théorie du Heartland, il estime que pour dominer le monde, il faut tenir la plaine s’étendant de l’Europe centrale à la Sibérie occidentale, qui rayonne sur la mer Méditerranée, le Moyen-Orient, l’Asie du Sud et la Chine.

[30] « Le rapport de la Rand Corporation pour déstabiliser la Russie », 31 octobre 2022 (https://www.francesoir.fr/politique-monde/le-rapport-de-la-rand). La Rand Corporation semble quelque peu embarrassée par ces preuves qui montrent que les États-Unis ont cherché à déstabiliser la Russie.

[31] Alors que l’enquête de la police allemande avance à petits pas, le flou demeure sur les commanditaires du sabotage des gazoducs Nord Stream survenu il y a deux ans. Les actionnaires européens et leur partenaire russe Gazprom restent dans le noir (Intelligence online, 05/12/2024). Ce média laisse clairement entendre que tout est fait pour masquer les preuves…Cette affaire marque les esprits en Allemagne ; elle jouera un rôle dans les évolutions politiques du pays.

[32] Seymour Hersh, “How America Took Out The Nord Stream Pipeline”, (https://seymourhersh.substack.com/p/how-amer). L’auteur très connu outre-Atlantique pour son sérieux, avoue ne pas apporter de preuve évidente. Mais la thèse qui accuse les Russes ou les Ukrainiens ne prouve rien non plus.

[33] Teorija Reshenija Izobretateliskih Zadatch (Теория Решения Изобретательских Задач – ТРИЗ).

[34] L’utilisation de GPS sur de vielles bombes héritées de la Seconde Guerre mondiale en est un exemple.

[35] Sommet des BRICS : 24 dirigeants étrangers et le secrétaire général de l’ONU attendus en Russie. Ce sommet revêt une importance particulière pour la Russie, qui y voit l’opportunité de briser son isolement diplomatique consécutif au conflit en Ukraine (i24News, Kazan Russian Federation, 23 october 2024).

[36] La blockchain est une technologie numérique de stockage et de transmission d’informations sans autorité centrale. Elle fonctionne comme une base de données sécurisée par des moyens cryptographiques, répertoriant les transactions dans un ordre chronologique. La validation et l’authentification des transactions se font par un réseau décentralisé et de pair à pair, sans intermédiaire ou tiers de confiance. La blockchain permet de minimiser les coûts et les retards liés à l’utilisation d’intermédiaires tiers pour les transactions financières.

[37] « L’UE et le Mercosur annoncent avoir conclu les négociations pour un accord de libre-échange », Africanews.

[38] https://www.lemonde.fr/international/article/2024/12/06/roumanie.

[39] Ministère des Armées, 12 juillet 2022. Depuis le début de la guerre en Ukraine, 800 soldats français sont déployés en Roumanie pour consolider la défense du flanc Est de l’Europe.

[40] « Sondage : 68% des Français opposés à une intervention militaire » (www.cnews.fr/france/2024-11-28).

[41]« L’ancien chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, dans une interview au journal El Diario le 11 décembre 2024, reconnait que les sanctions économiques de l’Union européenne ont été rendues inefficaces du fait de la solidarité des BRICS. Il s’interroge également sur la capacité de l’Union européenne à remplacer l’effort militaire américain si celui-ci s’arrête.

[42] Proposition de loi, Texte n° 489 (2020-2021) de Mme Marie-Noëlle Lienemann, M. Fabien Gay et plusieurs de leurs collègues, déposé au Sénat le 25 mars 2021

[43] Bernard Besson,4 mai 2022 (https://www.diploweb.com/Ukraine-Comment-lire-et-conduire-la-guerre). L’auteur du présent article approuvait la nécessité d’arrêter cette guerre par la négociation comme lors des rencontres diplomatiques du format Normandie. La nation ukrainienne a été brisée par ce conflit. Lorsque les pertes humaines seront comptabilisées de part et d’autre, l’Europe et la Russie prendront conscience d’une faillite morale et politique sans précédent depuis 1945.

[44] https://www.iesf.fr/752_p_43175/comite-intelligence-economique. Le MOOC-IESF-UNIT sur l’intelligence économique propose des outils pédagogiques, une certification des personnels, une évaluation de l’intelligence économique déjà présente à partir du TEST 1000 et un Questionnement stratégique. Cet enseignement en ligne s’appuie sur les retours d’expérience en France et dans le monde de nos ingénieurs confrontés à la concurrence loyale autant qu’à la guerre économique. Ce programme est supporté par L’Université numérique ingénierie et technologie (UNIT) qui est l’une des sept universités numériques thématiques nationales (UNT) créées à l’initiative d’universités, de grandes écoles et du ministère chargé de l’Enseignement supérieur. Le badge IESF-MOOC -UNIT certifie les compétences de celui ou celle qui obtient une moyenne de 14/20 en répondant au Quiz du MOOC intelligence économique. Il n’est d’ailleurs pas interdit d’obtenir 20/20…

La dissuasion nucléaire française peut-elle devenir européenne ?

La dissuasion nucléaire française peut-elle devenir européenne ?

Alors que les États-Unis pourraient réduire leur engagement en Europe, la dissuasion nucléaire française apparaît comme une solution.

Par Clément Machecourt – Le Point –

https://www.lepoint.fr/politique/la-dissuasion-nucleaire-francaise-peut-elle-devenir-europeenne-01-03-2025-2583611_20.php


Le 24 février, un article du Telegraph jette le trouble. Le quotidien britannique annonce que le bouclier nucléaire français pourrait s’étendre à toute l’Europe, avec le stationnement d’avions Rafale, porteurs de l’arme nucléaire, en Allemagne. Aucune déclaration officielle ne vient confirmer les propos d’une source anonyme française. L’information tombe alors qu’Emmanuel Macron est en visite à Washington pour faire entendre raison à Donald Trump sur le règlement du conflit ukrainien.

Plus récemment, le futur chancelier allemand, Friedrich Merz, s’est dit prêt à se placer sous la dissuasion nucléaire française. Un signe supplémentaire montrant que les chancelleries européennes considèrent le scénario d’un désengagement militaire des États-Unis du Vieux Continent.

« Les pays européens se sont rendu compte que les États-Unis ne risqueraient jamais un conflit nucléaire avec la Russie pour un pays européen », analyse Étienne Marcuz, spécialiste des systèmes balistiques et ancien membre du ministère des Armées. Une situation qui pousse à repenser le rôle de l’arsenal français en Europe.

Dès 2020, dans un discours prononcé à l’École de guerre, Emmanuel Macron avait bien souligné que « les intérêts vitaux de la France ont désormais une dimension européenne ». « Dans cet esprit, je souhaite que se développe un dialogue stratégique avec nos partenaires européens qui y sont prêts, sur le rôle de la dissuasion nucléaire française dans notre sécurité collective. »Un message en partie brouillé en octobre 2022 quand le président avait affirmé que les intérêts vitaux de la France ne seraient pas menacés en cas d’attaque balistique nucléaire en Ukraine ou dans la région.

« C’est français et ça restera français »

Désormais, « il faudrait avoir des déclarations bilatérales fortes, au moins avec les Allemands, éventuellement les Polonais, peut-être les Suédois, comme celle faite avec les Britanniques à l’époque de Jacques Chirac », suggère Héloïse Fayet, chercheuse en prolifération nucléaire et balistique à l’Ifri. En 1995, Paris et Londres avaient déclaré ne pas imaginer « de situation dans laquelle les intérêts vitaux de l’un de nos deux pays, la France et le Royaume-Uni, pourraient être menacés sans que les intérêts vitaux de l’autre le soient aussi ».

Sur le plan opérationnel, l’intégration européenne pourrait passer par des exercices conjoints. Jusqu’ici, seul un avion ravitailleur italien a participé en 2022 aux exercices français « Poker » de simulation de frappe nucléaire. « On pourrait très bien faire un équivalent de Poker à l’échelle européenne, avec des tactiques dégradées », propose Étienne Marcuz, c’est-à-dire sans partager toutes les procédures sensibles. La dissuasion pourrait-elle être un jour partagée ? « C’est français et ça restera français », a réaffirmé sur France Info le ministre des Armées, Sébastien Lecornu. Le message est clair : le président de la République restera le seul à pouvoir déclencher le feu nucléaire.

Mais la France aurait-elle les épaules assez solides pour assumer seule la défense de ses intérêts vitaux sur l’ensemble du continent européen ? Face aux 300 armes nucléaires françaises, représentant la « stricte suffisance » d’un arsenal au caractère avant tout défensif, Les États-Unis alignent 3 700 têtes nucléaires, la Russie près de 6 000 ogives. Le Royaume-Uni, bien que n’étant plus membre de l’Union européenne, dispose de 225 têtes, mais sa dissuasion repose principalement sur la technologie américaine.

Un manque de capacités conventionnelles

« Ce n’est pas tant une question de nombre que de flexibilité de l’arsenal », souligne Étienne Marcuz, qui plaide pour une approche combinant capacités nucléaires et conventionnelles. « Il faut réussir à dissuader les attaques qui ne relèvent pas de nos intérêts vitaux. Dans ce cas-là, c’est aux forces conventionnelles de le faire », renchérit Héloïse Fayet. Le projet européen Elsa (European Long-Range Strike Approach) initié par la France pour développer conjointement un ou des missiles capables de frappes longue portée et de précision, en est un exemple. Une capacité permettant de rester « sous le seuil » et qui manque cruellement dans les armées européennes, pourtant conscientes de son importance dans le conflit en Ukraine.

Mais cette européanisation de la dissuasion française ne viserait pas, pour le moment, à remplacer la dissuasion élargie américaine, estime Héloïse Fayet : « C’est donner des garanties supplémentaires au cas où la dissuasion américaine soit moins crédible. » D’autant que le retrait des armes nucléaires américaines d’Europe, une centaine de bombes à gravité B61 réparties en Belgique, aux Pays-Bas, en Italie, en Allemagne et en Turquie, semble peu probable à court terme. Ces dernières jouant aussi un rôle dans la lutte contre la prolifération nucléaire au sein même de l’Europe.

Et hormis la Turquie, tous les autres pays qui accueillent des B61 achètent le F-35A américain pour remplacer leurs anciens avions. Un marché représentant plusieurs milliards de dollars de contrat pour la base industrielle et technologique de défense américaine.

L’échange entre Trump et Zelensky : texte intégral

L’échange entre Trump et Zelensky : texte intégral

Dans une scène d’une violence verbale sans précédent, le président des États-Unis Donald Trump et son vice-président J.D. Vance ont repris les éléments de langage de Vladimir Poutine pour chercher à humilier en direct à la télévision leur allié, le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche.

Nous publions la transcription intégrale de cet échange — un tournant historique.

Auteur : Le Grand Continent – publié le 1er mars 2025
https://legrandcontinent.eu/fr/2025/02/28/lechange-entre-trump-et-zelensky-transcription-integrale/

Dans le Bureau ovale, le 28 février 2025. © Shutterstock

Alors que le président ukrainien rappelait que l’invasion russe remontait à l’annexion de la Crimée en 2014 et que l’Ukraine a déjà signé un cessez-le-feu que la Russie n’a pas respecté, le vice-président américain J.D. Vance l’a violemment interrompu, lui reprochant de plaider sa cause devant les médias américains, exigeant qu’il remercie Trump pour son soutien et insistant sur le fait que l’Ukraine manquait de soldats.

La forme est choquante.

L’objet du débat n’a pourtant rien de trivial.

Il est crucial pour l’Ukraine et pour l’Europe : un cessez-le-feu — que Donald Trump veut obtenir au plus vite — doit-il être précédé de garanties de sécurité ?

Du côté ukrainien et européen, on craint que tout accord qui ne serait qu’un gel des lignes de front — une sorte de Minsk — ne serve qu’à permettre à la Russie de se réarmer et regrouper dans un moment où son économie montre des signes de faiblesse.

Cette séquence, assez visiblement orchestrée, intervient alors que, dans les dix derniers jours, Donald Trump a traité Zelensky de dictateur et que les États-Unis ont voté aux Nations Unies avec la Russie et la Corée du Nord contre une résolution demandant la fin des hostilités ainsi qu’une résolution pacifique du conflit et réaffirmant l’engagement de l’organisation pour l’intégrité territoriale du pays.

Elle a fait réagir la plupart des chancelleries européennes en soutien à l’Ukraine dans la soirée.

Un haut fonctionnaire européen a déclaré au Grand Continent dans la soirée qu’il s’agissait « d’une embuscade pour les caméras ».

En diplomatie, chaque mot compte — ils comptent même double lorsqu’ils sont prononcés face caméra. Pour que chacun puisse avoir connaissance de ceux qui viennent d’être prononcés à Washington, de leur brutalité mais aussi de leur portée, nous publions une transcription non altérée, non éditée des échanges.

Donald Trump 

(répondant à un journaliste) Je ne suis pas aligné avec Poutine. Je ne suis aligné avec personne. Je suis aligné avec les États-Unis d’Amérique. Et pour le bien du monde. Je suis aligné avec le monde. Et je veux en finir avec cette histoire. Vous voyez la haine qu’il a pour Poutine. C’est très difficile pour moi de conclure un accord avec un tel niveau de haine. Il a une haine immense. Et je comprends cela. Mais je peux vous dire que l’autre camp ne l’aime pas non plus.

Donc, ce n’est pas une question d’alignement. Je suis aligné avec le monde. Je veux régler ce problème. Je suis aligné avec l’Europe. Je veux voir si nous pouvons trouver une solution. Vous voulez que je sois dur ? Je peux être plus dur que n’importe quel être humain que vous ayez jamais vu. Je serais si dur. Mais vous n’obtiendrez jamais d’accord comme ça. Voilà comment ça fonctionne.

J.D. Vance

Je vais répondre à cela. Écoutez, pendant quatre ans aux États-Unis, nous avons eu un président qui se montrait dur avec Vladimir Poutine lors des conférences de presse. Et ensuite, Poutine a envahi l’Ukraine et a détruit une grande partie du pays. Le chemin vers la paix et la prospérité passe peut-être par la diplomatie. Nous avons essayé la voie de Joe Biden, celle de bomber le torse et de faire comme si les paroles du président des États-Unis comptaient plus que ses actions.

Ce qui fait des États-Unis un grand pays, c’est leur engagement dans la diplomatie. C’est ce que fait le président Trump.

Volodymyr Zelensky

D’accord. Il a occupé des territoires, nos territoires. De grandes parties de l’Ukraine. L’est et la Crimée. Il les a occupés en 2014. Pendant de nombreuses années, et je ne parle pas seulement de Biden. À cette époque, c’était Obama, puis le président Obama, puis le président Trump, puis le président Biden, et maintenant le président Trump. Que Dieu bénisse : maintenant, le président Trump va l’arrêter. Mais depuis 2014, personne ne l’a arrêté. Il a simplement occupé et pris. Il a tué des gens.

Donald Trump

2015.

Volodymyr Zelensky

2014.

J.D. Vance

2014 et 2015.

Donald Trump

2014. Je n’étais pas là.

Volodymyr Zelensky

Mais de 2014 à 2022 (…) personne ne l’a arrêté. Vous savez que nous avons eu des discussions avec lui, beaucoup de discussions. Mes discussions bilatérales. Et nous avons signé avec lui. Moi, en tant que nouveau président, en 2019, j’ai signé avec lui un accord, j’ai signé avec lui, Macron et Merkel. Nous avons signé un cessez-le-feu. Un cessez-le-feu. Tous m’ont dit qu’il ne bougerait jamais. Nous avons signé avec lui un contrat sur le gaz. Mais après, il a rompu le cessez-le-feu. Il a tué notre peuple et il n’a pas échangé les prisonniers. Nous avons signé un échange de prisonniers, mais il ne l’a pas respecté. De quelle diplomatie, J.D., parlez-vous ? Que voulez-vous dire ?

J.D. Vance

Je parle de la diplomatie qui mettra fin à la destruction de votre pays.

Monsieur le Président, avec tout le respect, je pense que c’est irrespectueux de venir dans le Bureau Ovale et d’essayer de débattre de cela devant les médias américains. En ce moment, vous envoyez de force des conscrits sur le front parce que vous manquez d’hommes. Vous devriez remercier le président d’essayer de mettre fin à ce conflit.

Volodymyr Zelensky

Êtes-vous déjà allé en Ukraine ? Vous parlez de nos problèmes.

J.D. Vance

J’y suis allé…

Volodymyr Zelensky

Venez une fois.

J.D. Vance

J’ai regardé et vu les reportages, et je sais que vous emmenez des gens en tournée de propagande, Monsieur le Président. N’êtes-vous pas d’accord pour dire que vous avez des difficultés à recruter des soldats ?

Volodymyr Zelensky

Nous avons des problèmes. Je vais répondre.

J.D. Vance

Et pensez-vous qu’il soit respectueux de venir dans le Bureau Ovale des États-Unis d’Amérique et d’attaquer l’administration qui essaie de prévenir la destruction de votre pays ?

Volodymyr Zelensky

Beaucoup de questions. Commençons par le début.

J.D. Vance

D’accord.

Volodymyr Zelensky

Tout d’abord, en temps de guerre, tout le monde a des problèmes, même vous. Mais vous avez un bel océan et ne ressentez pas cela pour l’instant, mais vous le sentirez à l’avenir.

Donald Trump

Vous n’en savez rien.

Volodymyr Zelensky

Que Dieu vous bénisse, vous n’aurez pas de guerre.

Donald Trump

Ne nous dites pas ce que nous allons ressentir. Nous essayons de résoudre un problème. Ne nous dites pas ce que nous allons ressentir.

Volodymyr Zelensky

Je ne vous dis pas…

Donald Trump

Parce que vous n’êtes pas en position de nous dicter cela. Rappelez-vous ceci : vous n’êtes pas en position de nous dicter ce que nous allons ressentir. Nous allons nous sentir très bien.

Volodymyr Zelensky

Vous en ressentirez l’influence. Je vous le dis.

Donald Trump

Nous allons nous sentir très bien et très forts.

Volodymyr Zelensky

Vous en ressentirez l’influence.

Donald Trump

Vous n’êtes pas en bonne position en ce moment.

Vous vous êtes placé dans une très mauvaise position. Et il a raison à ce sujet. Vous n’êtes pas en bonne position. Vous n’avez pas les cartes en main pour le moment. Avec nous, vous commencez à en avoir.

Volodymyr Zelensky

Je ne joue pas aux cartes. Je suis très sérieux, Monsieur le Président. Je suis un président en temps de guerre…

Donald Trump

Vous jouez aux cartes. Vous jouez aux cartes. Vous jouez avec la vie de millions de personnes. Vous jouez avec la Troisième Guerre mondiale. Vous jouez avec la Troisième Guerre mondiale. Et ce que vous faites est très irrespectueux envers ce pays, ce pays qui vous a soutenu bien plus que ce que beaucoup de gens ont dit qu’il aurait dû faire.

J.D. Vance

Avez-vous dit « merci » une seule fois pendant toute cette réunion ? Non. Pendant toute cette réunion, avez-vous dit « merci » ? Vous êtes allé en Pennsylvanie et avez fait campagne pour l’opposition en octobre. Offrez quelques mots d’appréciation aux États-Unis et au président qui essaie de sauver votre pays.

Volodymyr Zelensky

S’il vous plaît. Vous pensez que si vous parlez très fort de la guerre, vous…

Donald Trump

Il ne parle pas fort. Il ne parle pas fort. Votre pays est en grande difficulté. Attendez une minute.

Volodymyr Zelensky

Puis-je répondre ?

Donald Trump

Non. Non. Vous avez beaucoup parlé. Votre pays est en grande difficulté.

Volodymyr Zelensky

Je sais. Je sais.

Donald Trump

Vous n’êtes pas en train de gagner. Vous ne gagnez pas cette guerre. Vous avez une sacrée chance de vous en sortir grâce à nous.

Volodymyr Zelensky 

Monsieur le Président, nous restons dans notre pays, nous restons forts. Depuis le début de la guerre, nous avons été seuls, et nous sommes reconnaissants. J’ai dit merci dans ce cabinet, et seulement dans ce cabinet.

Donald Trump

Vous n’avez pas été seuls. Nous vous avons donné, par l’intermédiaire de ce président stupide, 350 milliards de dollars. Nous vous avons fourni du matériel militaire. Et vos hommes sont courageux. Mais ils ont dû utiliser notre matériel militaire. Si vous n’aviez pas eu notre équipement militaire…

Volodymyr Zelensky

Vous m’avez invité…

Donald Trump

Si vous n’aviez pas eu notre équipement militaire, cette guerre aurait été terminée en deux semaines.

Volodymyr Zelensky

En trois jours. Je l’ai entendu de la bouche de Poutine : en trois jours.

Donald Trump

Peut-être moins.

Volodymyr Zelensky

C’est quelque chose, en deux semaines. Bien sûr. Oui.

Donald Trump

Ça va être très difficile de faire affaire dans ces conditions, je vous le dis.

J.D. Vance

Dites juste merci.

Volodymyr Zelensky

Je l’ai dit de nombreuses fois, merci au peuple américain.

J.D. Vance

Acceptez qu’il y ait des désaccords. Allons débattre de ces désaccords au lieu d’essayer de les exposer aux médias américains alors que vous avez tort. Nous savons que vous avez tort.

Donald Trump

Mais vous voyez, je pense qu’il est important pour le peuple américain de voir ce qui se passe. Je pense que c’est très important. C’est pourquoi j’ai laissé cette discussion durer si longtemps. Vous devez être reconnaissant.

Volodymyr Zelensky

Je suis reconnaissant.

Donald Trump

Vous n’avez pas les cartes en main. Vous êtes acculé là-bas, votre peuple meurt. Vous manquez de soldats.

Volodymyr Zelensky

Non, s’il vous plaît, Monsieur le Président.

Donald Trump

Écoutez. Vous manquez de soldats. Ce serait une sacrée bonne chose. Ensuite, vous nous dites : « Je ne veux pas de cessez-le-feu. Je ne veux pas de cessez-le-feu. Je veux continuer et obtenir ceci. » Écoutez, si vous pouviez obtenir un cessez-le-feu maintenant, je vous dirais de le prendre. Ainsi, les balles cesseraient de voler et vos hommes cesseraient de mourir.

Volodymyr Zelensky

Bien sûr que nous voulons arrêter la guerre.

Donald Trump

Mais vous dites que vous ne voulez pas de cessez-le-feu.

Volodymyr Zelensky

Mais je vous ai dit, avec des garanties.

Donald Trump

Je veux un cessez-le-feu, parce que vous obtiendrez un cessez-le-feu plus rapidement qu’un accord de paix.

Volodymyr Zelensky

Demandez à notre peuple ce qu’il pense du cessez-le-feu—

Donald Trump

Ce n’était pas avec moi. Ce n’était pas avec moi. C’était avec un type nommé Biden, qui n’était pas une personne intelligente. C’était avec Obama.

Volodymyr Zelensky

C’était votre président.

Donald Trump

Excusez-moi. C’était avec Obama, qui vous a donné des draps, et moi, je vous ai donné des Javelins.

Volodymyr Zelensky

Oui.

Donald Trump

Je vous ai donné des Javelins pour détruire tous ces chars. Obama vous a donné des draps. En fait, l’expression est : Obama a donné des draps, et Trump a donné des Javelins. Vous devez être plus reconnaissant parce que, laissez-moi vous dire, vous n’avez pas les cartes en main. Avec nous, vous avez des cartes. Mais sans nous, vous n’avez aucune carte.

Ce sera un accord difficile à conclure, car les attitudes doivent changer.

Une journaliste

Et si la Russie viole le cessez-le-feu ? Et si la Russie rompt les négociations de paix ? Que ferez-vous dans ce cas ? Je comprends que la conversation est tendue.

Donald Trump

Que dites-vous ?

J.D. Vance

Elle demande : et si la Russie viole le cessez-le-feu ?

Donald Trump

Et si quoi que ce soit ? Et si une bombe tombait sur votre tête maintenant ? OK ? Et s’ils le violaient ? Je ne sais pas, ils l’ont fait avec Biden, parce qu’ils ne le respectaient pas. Ils ne respectaient pas Obama. Ils me respectent.

Laissez-moi vous dire, Poutine en a bavé avec moi. Il a traversé une fausse chasse aux sorcières où ils l’ont utilisé, ainsi que la Russie, la Russie, la Russie, la Russie. Vous avez déjà entendu parler de cette affaire ? C’était un mensonge. C’était une arnaque impliquant Hunter Biden et Joe Biden. Hillary Clinton, le sournois Adam Schiff. C’était une arnaque des démocrates. Et il a dû traverser cela. Et il l’a fait. Nous n’avons pas fini en guerre. Et il a dû le supporter. Il était accusé de toutes ces choses. Il n’avait rien à voir avec ça. C’était sorti de la chambre à coucher de Hunter Biden. Ça venait de la chambre à coucher de Hunter Biden. C’était dégoûtant. Et puis ils ont dit : « Oh, l’ordinateur portable de l’enfer a été fabriqué par la Russie ». Les 51 agents. Tout cela n’était qu’une escroquerie. Et il a dû supporter tout cela.

On l’accusait de toutes ces choses. Tout ce que je peux dire, c’est ceci : il a peut-être rompu des accords avec Obama et Bush, et peut-être avec Biden. Il l’a fait. Peut-être. Peut-être qu’il ne l’a pas fait. Je ne sais pas ce qui s’est passé. Mais il ne les a pas rompus avec moi. Il veut conclure un accord. Je ne sais pas s’il peut conclure un accord.

Le problème, c’est que je vous ai donné du pouvoir pour être un dur à cuire, et je ne pense pas que vous auriez été un dur à cuire sans les États-Unis. Et votre peuple est très courageux.

Volodymyr Zelensky

Merci.

Donald Trump

Mais soit vous concluez un accord, soit nous nous retirons. Et si nous nous retirons, vous devrez vous battre. Je ne pense pas que ce sera joli, mais vous devrez vous battre.

Mais vous n’avez pas les cartes en main. Une fois que nous signerons cet accord, vous serez dans une bien meilleure position. Mais vous ne montrez aucun signe de gratitude. Et ce n’est pas une bonne chose. Honnêtement, ce n’est pas une bonne chose.

Très bien. Je pense que nous en avons assez vu. Qu’en pensez-vous, hein ? Ça va faire de la très bonne télévision. Je peux vous le dire. Très bien. Nous verrons ce que nous pouvons faire pour arranger cela. Merci.

L’armée de Terre française crée un régiment de cybersécurité, une unité d’élite dédiée à la guerre numérique

L’armée de Terre française crée un régiment de cybersécurité, une unité d’élite dédiée à la guerre numérique

Par Alexandre Boero, Journaliste-reporter, responsable de l’actu. – Clubic – Publié le 28 février 2025

La France, l’armée de Terre plus particulièrement, a annoncé jeudi la création d’un régiment de cyberdéfense, qui sera à terme, d’ici 2030, garni de 400 experts de la cybersécurité.

Voici le premier chef de corps du nouveau régiment cyberdéfense armée de Terre, le lieutenant-colonel Caverne © Armée de Terre
Voici le premier chef de corps du nouveau régiment cyberdéfense armée de Terre, le lieutenant-colonel Caverne © Armée de Terre

C’est à la fin de ce mois de février 2025 que s’est déroulée la cérémonie de prise de commandement du nouveau régiment de cyberdéfense, officialisé le jeudi 27 février. Celle-ci marque l’entrée de l’armée de Terre française dans une nouvelle dimension de la défense nationale. L’unité inédite, basée en Bretagne et dirigée par le lieutenant-colonel Caverne, rassemblera des spécialistes hautement qualifiés pour faire face aux défis numériques. Entrons un peu plus dans les détails.

Un centre technique d’excellence pour sécuriser les systèmes d’armes français

Le régiment s’appuie sur les 807ᵉ et 808ᵉ compagnies de transmissions et le bureau cyber de la brigade d’appui numérique et cyber (BANC). Cette architecture permettra de déployer rapidement des Security Operation Centers (SOC) tactiques et des groupes d’intervention cyber, qui seront capables d’opérer dans des conditions variées et de protéger les infrastructures numériques critiques des forces armées.

Parmi ses missions principales figure la connaissance approfondie de l’espace numérique aussi bien ami qu’ennemi. Le régiment sera également responsable de la lutte informatique adaptée aux systèmes d’armes et de la fonction audit pour l’ensemble de l’armée de Terre. Voilà qui devrait renforcer la résilience des infrastructures militaires face aux cyberattaques.

Un centre technique cyber vient compléter le dispositif, avec l’ambition de jouer un rôle central dans la lutte informatique défensive. Ce pôle d’expertise offrira un appui technique aux autres entités du régiment. Il mutualisera aussi les compétences spécialisées, et visera à garantir une réponse coordonnée et efficace face aux menaces numériques émergentes.

Un aperçu de la cérémonie création du régiment cyberdéfense de l'armée de Terre © Armée de Terre
Un aperçu de la cérémonie création du régiment cyberdéfense de l’armée de Terre © Armée de Terre

Une approche interarmées qui vient renforcer l’expertise cyber militaire du pays

Ce nouveau régiment positionne en tout cas l’armée de Terre comme un acteur clé de la sécurité numérique des forces armées françaises. Le ministère compte sur lui pour répondre à l’évolution des conflits modernes, où le cyberespace est devenu un domaine d’affrontement nécessitant des capacités spécifiques mais également une expertise en constante évolution. Le ministère explique bien que les personnes qui seront rattachées au régiment devront être « hautement qualifiées ».

L’une des forces, l’un des atouts du régiment sera d’ailleurs sa composition interarmées, qui lui offrira forcément une certaine efficacité opérationnelle. Dans le détail, l’unité rassemblera très vite des experts issus des trois armées (Terre, Air et Marine). Ces diverses perspectives paraissaient indispensables pour comprendre et contrer des menaces numériques de plus en plus sophistiquées.

À l’horizon 2030, le régiment comptera autour de 400 spécialistes, qui devront incarner la montée en puissance des capacités cyber françaises. Et dans ce contexte géopolitique tendu, ne ce sera forcément pas de trop. Plus globalement, la création de ce régiment, qui a officiellement vu le jour le 1er janvier, s’inscrit dans la modernisation globale des forces armées, où la maîtrise des technologies numériques devient un facteur déterminant pour la souveraineté nationale et la crédibilité militaire internationale.