Crise au Niger : les soldats français amorcent leur retrait «dans la semaine»

Crise au Niger : les soldats français amorcent leur retrait «dans la semaine»


CARTE – Suite au coup d’État du 26 juillet, Emmanuel Macron avait annoncé que le retrait des 1400 militaires français aurait lieu «d’ici la fin de l’année».

Les troupes françaises déployées au Niger vont amorcer leur retrait du pays «dans la semaine», dans un contexte de relations toujours tendues avec le régime militaire issu du coup d’État du 26 juillet, selon l’état-major des armées. «Nous allons lancer l’opération de désengagement dans la semaine, en bon ordre, en sécurité et en coordination avec les Nigériens», a indiqué l’état-major.

Le président français Emmanuel Macron avait annoncé le 24 septembre la fin de la coopération militaire avec le Niger et le départ progressif des 1400 militaires français présents dans le pays sahélien, «d’ici la fin de l’année», se conformant ainsi à la volonté des nouvelles autorités ayant renversé le président Mohamed Bazoum, qui ont dénoncé les accords de défense liant Niamey à Paris.

«Nous ferons ce qui est planifié, cela se déroulera conformément à la planification», assure l’état-major français, alors que le régime militaire a accusé la France de ne pas être «dans une logique de quitter le Niger» et semble peu encline à laisser manœuvrer librement les militaires en partance.

 

Quelque 1000 soldats et aviateurs français sont déployés sur la base aérienne française de Niamey et 400 à Ouallam et Ayorou (nord-ouest), aux côtés des Nigériens, dans la zone dite des «trois frontières» entre le Niger, le Burkina Faso et le Mali, sanctuaire du groupe État islamique.

Les militaires déployés sur les bases avancées devraient être les premiers à se désengager. Un schéma similaire à celui du Mali, où le retrait français avait commencé par les trois emprises les plus au nord du pays.

«Nous prenons les dispositions pour assurer la sécurité des gens engagés dans la manœuvre», a précisé l’état-major, en particulier sur la route qui relie les bases avancées à la capitale, ce qui pourrait nécessiter un appui aérien, sur fond de dégradation sécuritaire dans le pays après plusieurs attaques ayant fait des dizaines de morts.

Opération logistique complexe

L’opération s’annonce complexe : le Niger servait depuis 2013 de plateforme de transit pour les opérations antiterroristes menées au Mali, avant de devenir le cœur du dispositif français dans la région après le retrait forcé des troupes françaises du Mali et du Burkina Faso, depuis l’été 2022.

Pour les militaires, ce retrait exigé par la junte met fin à une situation incertaine depuis deux mois, avec des ravitaillements aléatoires et des manifestations antifrançaises régulièrement organisées devant leurs portes à Niamey.

À Niamey, l’enceinte française, située au sein d’une emprise nigérienne, accueille des centaines de bureaux en préfabriqués, des hangars et abris modulaires pour les aéronefs, des tentes sur la base de vie, des cabines de pilotage pour les drones, des bulldozers du génie…

Après la conclusion d’un partenariat de combat à la demande du Niger, la France avait étoffé sa présence dans la capitale avec des blindés et des hélicoptères, venus renforcer les cinq drones Reaper et au moins trois avions de chasse.

Les destinations des matériels ne sont pas encore arrêtées et plusieurs options sont évoquées : le territoire national en priorité, le Tchad voisin qui accueille l’état-major des forces françaises au Sahel, ou encore d’autres théâtres.

120 millions d’euros d’aide publique au Niger en 2022

Les militaires n’ont pas d’autre choix que d’utiliser la voie terrestre, soit par le Bénin – une option que refuse le régime militaire nigérien – soit vers le Tchad, ce qui impliquerait ensuite d’acheminer les containers rentrant en France vers le port de Douala, au Cameroun, selon une source proche du dossier.

L’option d’un pont aérien semble compromise pour l’heure car jusqu’à nouvel ordre, les Nigériens interdisent le survol de leur territoire par des avions français. Au Mali, le désengagement avait mobilisé 400 logisticiens envoyés en renfort. Pour le démantèlement de Gao, la plus grande emprise française du pays, 6000 containers avaient été nécessaires.

Paris, qui ne reconnaît pas les nouvelles autorités, a limité la délivrance de visa pour les Nigériens et mis fin à sa coopération dans le pays, un des plus pauvres au monde. Le Niger a bénéficié en 2022 de 120 millions d’euros d’aide publique au développement de la part de la France et fait actuellement l’objet de sanctions de la part de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) depuis fin juillet.

Défaite !

Défaite !

par Michael BRENNER -CF2R – publié en septembre 2023

https://cf2r.org/tribune/defaite/

Professeur émérite d’affaires internationales à l’Université de Pittsburgh et membre du Center for Transatlantic Relations à SAIS/Johns Hopkins. Michael Brenner a été directeur du programme de relations internationales et d’études mondiales à l’université du Texas. Il a également travaillé au Foreign Service Institute, au ministère américain de la Défense et à Westinghouse. Il est l’auteur de nombreux livres et articles portant sur la politique étrangère américaine, la théorie des relations internationales, l’économie politique internationale et la sécurité nationale.

 

 

Caesar, EFA et robots de déminage: victoire commerciale française en Ukraine mais la guerre n’est pas gagnée

Caesar, EFA et robots de déminage: victoire commerciale française en Ukraine mais la guerre n’est pas gagnée

 

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par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 30 septembre 2023

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


La visite à Kiev de Sébastien Lecornu et d’une délégation d’industriels de la Défense français, jeudi, s’est soldée par la signature de plusieurs contrats et accords. A Kiev, le ministre français venu défendre des partenariats avec des industriels ukrainiens, a rencontré le ministre Oleksandr Kamychine, chargé des industries stratégiques (photo ci-dessus. Les photos de ce post sont de moi), et Rustem Umerov, le nouveau ministre de la Défense. 

Sa visite a précédé l’ouverture par le président Zelensky du premier forum international consacré à l’industrie de la défense, qui veut attirer des fabricants étrangers capables de produire des armes en Ukraine et de lui « construire un arsenal » face à la Russie. « Nous sommes intéressés par la localisation de la production des équipements nécessaires à notre défense et des systèmes de défense avancés utilisés par nos soldats », a résumé Zelensky dans son discours d’introduction, diffusé ce samedi.

Voici la liste  des accords et contrats signés vendredi (c’est moi qui souligne):
Coopération DGA / DPA
La direction générale pour l’armement (DGA) et son homologue ukrainienne, la Defense Procurement Agency (DPA) ont signé un accord pour favoriser la coopération en matière d’armement entre les deux pays.

Coopération industrielle
Le GICAT a signé deux accords, avec les Ministère de la Défense et Ministères de l’Industrie Stratégique ukrainiens sur le développement de la coopération en matière d’industrie de défense entre la France et l’Ukraine.

Artillerie
Fourniture de 6 systèmes d’artillerie supplémentaires. Au-delà des canons Caesar déjà fournis, que ce soit au titre des cessions par l’armée françaises (18) ou au titre des acquisitions par le ministère ukrainien directement auprès de KNDS (12), KNDS va fournir 6 canons Caesar supplémentaires.
MCO (maintien en conditions opérationnelles) des systèmes Caesar fournis. Le MCO des systèmes CAESAR est d’ores et déjà assuré par KNDS via un flux de pièces de rechanges. Par ailleurs, KNDS a signé un accord avec une société ukrainienne pour assurer le MCO des Caesar dans la durée sur le territoire ukrainien, comprenant la production de pièces localement. Cet accord prend également en compte le MCO des AMX 10 cédés par l’Armée de Terre.

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Véhicules terrestres
Intégration d’armements : La société KNDS a signé un accord avec une société industrielle ukrainienne pour l’intégration en Ukraine d’armements sur les véhicules des Forces Armées Ukrainiennes.
MCO des véhicules fournis : ARQUUS, fabriquant de VAB (Véhicules de l’avant blindé), s’est engagé, au travers d’un accord signé avec une société ukrainienne, à soutenir les véhicules cédés par les Armées françaises – notamment à travers de la production locale de pièces – et à étudier la mise en place d’un partenariat avec des entreprises ukrainiennes afin de produire des VAB neufs dans le pays.
Fabrication additive : La société Vistory a signé un accord avec une société ukrainienne pour des solutions de fabrication additive de pièces de rechange. Ce sujet est très prometteur pour autonomiser les Ukrainiens, y compris potentiellement pour déployer des solutions mobiles de fabrication de pièces de rechange sur le théâtre d’opérations.
Fourniture d’engins amphibie : La société CEFA va fournir 8 engins amphibie qui permettent le franchissement de cours d’eau.

Drones
Drones Delair : Au-delà du premier contrat de drones, et dont les premiers exemplaires sont en cours de livraison auprès des Ukrainiens, la société Delair a signé un nouveau contrat avec le MOD ukrainien pour la fourniture de drones supplémentaires, ainsi qu’un accord portant sur la maintenance des drones livrés et ouvrant la voie à une production locale.
Partenariats industriels : les sociétés Thales d’une part et Turgis & Gaillard d’autre part ont chacune signé un accord avec des sociétés ukrainiennes pour co-développer des drones, avec comme perspective une fabrication locale de drones.

Déminage
L’entreprise CEFA a signé un contrat pour la fourniture de 8 premiers robots SDZ de déminage. C’est un moins qu’espéré (10 unités) mais le résultat témoigne de la confiance des Ukrainiens dans ce matériel. 

Quelques remarques personnelles:

Ces bons résultats et ses bonnes perspectives sont dus aux efforts conjoints des équipementiers français, du ministère des Armées et du GICAT qui a organisé du 18 au 20 septembre, à Kiev, un premier séminaire de coopération industrielle franco-ukrainien. 

En termes de fournitures, on notera les drones Delair (type non spécifié), les 6 Caesar supplémentaires mais surtout les 8 robots de déminage SDZ de l’entreprise CEFA (deux livrables à l’armée de Terre française pourraient être déviés vers l’Ukraine). En matière de déminage, la France s’avère malgré tout en retrait d’autres pays dont les entreprises spécialisées ont capté une partie du marché il y a déjà plusieurs mois (je reviendrai sur ce sujet dans un prochain post).

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Cette même entreprise va aussi livrer 8 EFA (engins de franchissement de l’avant. Photo ci-dessus prise lors d’Orion 4); ces systèmes d’occasion issus de l’ex-parc du génie pourront être livrés très rapidement. 

Léo Péria-Peigné : « L’armée allemande a une stratégie claire, contrairement à la France »

Léo Péria-Peigné : « L’armée allemande a une stratégie claire, contrairement à la France »

 

par Léo PÉRIA-PEIGNÉ, interviewé par Clément Daniez pour L’Express– IFRI _ publié le 29 septembre 2023

https://www.ifri.org/fr/espace-media/lifri-medias/leo-peria-peigne-larmee-allemande-une-strategie-claire-contrairement


La montée en puissance de l’armée allemande rebat les cartes en Europe, explique Léo Péria-Peigné, qui vient de publier une étude sur le sujet pour l’Ifri.

Laissée en déshérence pendant des années, l’armée allemande, la Bundeswehr, remonte en puissance. La décision a été prise juste après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, un événement menant, pour l’Allemagne, à un nécessaire « changement d’époque » (« Zeitenwende »), comme l’a qualifié le chancelier Olaf Scholz. Grâce à un fonds de 100 milliards d’euros, Berlin multiplie les commandes, dans le cadre d’un programme de rééquipement destiné à en faire la « première armée d’Europe ».

Dans un rapport invitant la France à mieux appréhender la révolution en cours de l’autre côté du Rhin – « La Bundeswehr face au Zeitenwende » –, Elie Tenenbaum et Léo Péria-Peigné, du centre des études de sécurité de l’Institut français des relations internationales (Ifri), auscultent la transformation de l’outil militaire allemand. « L’Allemagne a un but stratégique unique et clair, quand la France, elle, court trois lièvres à la fois : être une alliée crédible en Europe, ne pas lâcher sa présence en Afrique et être présente dans l’espace indo-pacifique », explique Léo Péria-Peigné à L’Express. Entretien.

L’Express : Le gouvernement allemand a annoncé qu’il disposerait bientôt de la première armée d’Europe. En prend-elle vraiment le chemin ? 

Oui, mais pas de la façon dont on l’imagine d’un premier abord. La Pologne est l’autre pays qui a l’ambition d’être la première armée de terre d’Europe. Mais elle pense d’abord à elle-même, alors que l’Allemagne ambitionne cela de manière européenne. Elle se dote de moyens de commandements, de communications, de supports logistiques, qui vont permettre à d’autres nations de brancher leur armée sur ce système, pour amplifier les synergies dans le cadre de l’Otan. L’Allemagne pourrait ainsi devenir la première, en devenant la base d’une « armée européenne », pas forcément en nombre de chars. 

Beaucoup d’experts, en Allemagne, soulignent que les 100 milliards du fonds spécial serviront surtout à combler les retards accumulés… 

 Oui, un peu comme l’augmentation du budget pour la France selon sa loi de programmation militaire (LPM, 413 milliards d’euros de 2024 à 2030). Le fonds de 100 milliards est un plan de restauration, pour faire fonctionner ce qui existe et redensifier certaines capacités perdues. Ils ne dureront que quelques années, mais permettront d’atteindre l’objectif de l’équivalent de 2% du PIB consacré à la défense, comme le préconise l’OTAN. L’idée est ensuite qu’en 2027, les 2% seront assurés par le seul budget, sans un fonds complémentaire. Pour le prochain gouvernement allemand, il faudra cependant que ce soit politiquement acceptable. Pour cela, il faudra que le « Zeitenwende » atteigne les consciences. 

Jusqu’à quand la Bundeswehr va-t-elle rester « à sec », avec très peu de disponibilité de matériel, comme la dit le chef de son armée de terre ? 

La situation s’améliore déjà et cela devrait continuer. Par exemple, il y avait un gros problème de disponibilité dans la marine allemande, lié à l’encombrement des chantiers navals civils. En 2017, aucun des six sous-marins allemands n’était disponible. La marine a acheté des infrastructures existantes qui lui sont maintenant dédiées pour résoudre ce problème. Les améliorations vont s’amplifier, mais jusqu’à un certain seuil. Car il faut que les ressources humaines suivent. Il faut des spécialistes et des volontaires pour utiliser les nouveaux équipements. 

L’Allemagne n’ayant plus le service militaire, elle doit attirer des talents, des jeunes, avec des compétences de plus en plus pointues. Dans un pays plus vieillissant – bien plus que la France –, c’est déjà un problème. A cela s’ajoute le fait que le marché du travail civil est plus attractif. Si les Allemands n’arrivent pas attirer de nouveaux soldats, l’effet de la revitalisation restera limité. Il y a un travail à mener pour rendre la fonction militaire plus attirante pour les jeunes. 

Pourquoi ce Zeitenwende renforcent-ils plus le partenariat de l’Allemagne avec les Etats-Unis qu’avec la France ? 

Le Zeitenwende va servir à renforcer non seulement le partenariat avec les USA, très important pour l’Allemagne [achat de nombreux appareils américains, en particulier des avions et des hélicoptères], très attachée à l’Otan. Mais il va aussi lui servir à renforcer son partenariat avec l’Europe, plus qu’avec la France. Pour une raison très importante : si, en Europe, l’Allemagne est le principal partenaire de la France, l’inverse n’est pas vrai. Son principal partenaire, ce sont les Pays-Bas. A l’heure actuelle, les trois brigades qui composent l’armée de terre néerlandaise sont intégrées dans les trois divisions de l’armée allemande.  

L’Allemagne développe des partenariats avec d’autre pays européens pour les intégrer dans son modèle de force et constituer une plateforme commune. D’autres pourraient se monter avec la Hongrie, ou au niveau des différentes armées de la Baltique, en particulier les marines. Celui lui vaut certaines critiques, à Paris, comme quoi l’Allemagne fournit les fonctions non-combattantes pour envoyer les autres Européens sur le front à leur place.   Mais la France pourrait tenter de faire la même chose avec la Belgique, comme elle a commencé à le faire avec son partenariat stratégique sur les capacités motorisées CaMo. Une unité luxembourgeoise pourrait aussi être intégré au sein des divisions françaises. 

En quoi, les deux pays veulent se constituer deux armées différentes ? 

L’armée française se perçoit comme une armée d’emploi, qui peut faire la guerre et intervenir là où on a besoin d’elle, même loin. Après la fin de l’URSS et la réunification, l’Allemagne s’est lancée elle aussi dans une logique d’interventions internationales, comme en Afghanistan, mais cela n’a pas vraiment bien marché. Depuis, elle est revenue à sa culture d’armée d’avant la chute du mur : une armée conventionnelle, qui doit maintenir un niveau de puissance suffisant pour dissuader tout agresseur potentiel, axé sur la haute intensité. La France, elle court trois lièvres à la fois : être un allié crédible en Europe, ne pas lâcher sa présence en Afrique et être présent en Indopacifique, avec un budget en grande partie consacré à la dissuasion nucléaire. La LPM a acté cette absence de choix.  

Peut-on être sûr que les deux grands programmes franco-allemands phare, le SCAF (l’avion du futur) et le MGCS (le char du futur), se feront ? 

Ces projets ont été lancés pour des raisons politiques et avancent lentement et de manière chaotique. Mais ils ont du mal à avancer sur le plan militaire et industriel. Les armées ne veulent pas la même chose. Concernant le SCAF, les Français veulent qu’il puisse atterrir sur un porte-avion et porter les futurs missiles nucléaires ASM4G. Les Allemands ne sont pas forcément prêts à payer pour ces capacités-là, dont ils se fichent. Sur le plan industriel, Airbus et Dassault, en plus d’être rivaux, se détestent, car Airbus a essayé de racheter Dassault au début des années 2000. 

Du côté du MGCS, le projet devait associer le français Nexter, très bon dans la fabrication de canons, et KMW, le concepteur de la caisse du Leopard 2. Mais le Bundestag a exigé qu’on ajoute Rheinmetall, une entreprise de défense beaucoup plus grosse que les deux autres. Or KMW craint de se faire racheter par Rheinmetall, dont le canon de 130 est en concurrence avec celui de 140 de Nexter pour équiper le MGCS…. 

Que faudrait-il faire pour relancer un partenariat franco-allemand dans la défense ? 

Il faudrait que les structures qui existent soient revitalisées et qu’on leur redonne une pertinence. Qu’on sache ce qu’on pourrait faire de la brigade franco-allemande. Pour la Marine, il y avait la Force navale Franco-Allemande (FNFA), une structure d’entrainement commun, tombée en désuétude.

[…]

> Lire l’interview intégrale sur le site de L’Express (réservé aux abonnés)

Un sous-marin nucléaire d’attaque français fait une escale remarquée en Norvège

Un sous-marin nucléaire d’attaque français fait une escale remarquée en Norvège

 

https://www.opex360.com/2023/09/27/un-sous-marin-nucleaire-dattaque-francais-fait-une-escale-remarquee-en-norvege/


 

Ainsi, en est-il avec le SNA Suffren, récemment admis au service actif. Ces derniers mois, on a pu suivre son déploiement en Méditerranée, au sein du groupe aéronaval formé autour du porte-avions Charles de Gaulle, ainsi que, plus récemment, son périple dans l’océan Indien, avec une escale médiatisée aux Émirats arabes unis et sa participation, au côté de la frégate multimissions [FREMM] Languedoc, à plusieurs manoeuvres navales, dont l’exercice Varuna 23.2, organisé par la marine indienne. En prime, des photographies le montrant avec son hangar de pont amovible [qui permet au Commando Hubert d’utiliser ses Propulseurs sous-marin de 3e génération – PSM3G, ndlr] ont été publiées.

Mais, le 26 septembre, ce n’est pas le Suffren qui a fait l’objet d’une communication de la part de la Marine nationale [ou, plus précisément, de l’État-major des armées]… mais l’un des trois derniers SNA de la classe Rubis encore en service au sein de la Force océanique stratégique [FOST].

« Les déploiements réguliers des bâtiments de la Marine nationale dans le grand Nord revêtent un caractère stratégique du fait des enjeux géopolitiques et environnementaux de cette zone. Ils garantissent à la France une capacité d’intervention et d’appréciation autonome de la situation », a en effet expliqué l’EMA, dans un commentaire accompagnant plusieurs photographies d’un SNA et d’un Bâtiment de soutien et d’assistance métropolitain [BSAM].

« Déployés en eaux glaciales, BSAM et SNA témoignent par leur endurance et leurs performances, de la capacité de la Marine nationale à se déployer sur toutes les mers du monde », a enchéri la Marine nationale, sans plus de précision.

Étant donné que l’on peut voir le pavillon norvégien au niveau du kiosque du SNA, il est facile d’en déduire que les deux navires français ont fait une escale en Norvège, plus précisément à Tromsø [nord de la Norvège]. Ce qu’a confirmé la presse locale, selon laquelle la présence d’un sous-marin nucléaire français dans cette base navale est « inédite ».

 

« Le sous-marin nucléaire français a accosté la semaine dernière dans le port de Grøtsund, juste au nord de la ville de Tromsø. C’est la première fois qu’un sous-marin français visite ce port », a en effet avancé le journal indépendant novégien High North News, qui a identifié le BSAM comme étant la « Garonne ». Or, jusqu’à présent, et dans le cadre de l’Otan, les SNA américains et, dans une moindre mesure, britanniques, étaient les seuls à régulièrement faire escale dans cette partie de la Norvège.

Si le nom du SNA envoyé à Tromsø n’a pas été précisé, les photographies publiées par l’État-major des armées suggèrent qu’il s’agit de l’Améthyste. Du moins, c’est ce qu’indique le numéro de coque [ou « pennant number »] S605, que l’on devine sur l’une d’entre elles. D’ailleurs, ce détail peut intriguer étant donné que la Marine nationale a récemment décidé d’effacer les marques de ses navires afin de compliquer leur identification.

À noter que la présence du SNA français dans les eaux norvégiennes coïncide avec celle du porte-avions britannique HMS Queen Elizabeth, dans le cadre de l’opération Firedrake. D’ailleurs, pour High North News, il n’est pas impossible que le SNA et le BSAM Garonne fassent partie, « du côté français », des « unités participantes » à ce déploiement du navire de la Royal Navy, laquelle semble avoir quelques soucis de disponibilité avec ses sous-marins d’attaque.

Quoi qu’il en soit, durant la Guerre Froide, le Grand Nord était stratégiquement important pour les deux blocs qui se faisaient face. Et c’est sans doute encore plus le cas actuellement… dans la mesure où la compétition stratégique a été relancée, tandis que les dérèglements climatiques ouvrent de nouvelles perspectives économiques qui ne laissent pas indifférents les États de la région… et même ceux qui en sont éloignés géographiquement, comme la Chine.

En tout cas, résume le Centre d’études stratégiques de la Marine, « le Grand Nord est toujours d’une importance capitale pour la dissuasion nucléaire de la Russie et des États-Unis. Les patrouilles des forces sous-marines y sont nombreuses, ce qui génère une compétition sur l’accès aux fonds marins, notamment pour la dilution des sous-marins. »

Que pense l’armée russe de sa guerre en Ukraine ? Critiques, recommandations, adaptations Russie.Eurasie.Reports, n° 44, Ifri, septembre 2023

Que pense l’armée russe de sa guerre en Ukraine ? Critiques, recommandations, adaptations Russie.Eurasie.Reports, n° 44, Ifri, septembre 2023

 

par Dimitri Minic – IFRI – publié le 21 septembre 2023

https://www.ifri.org/fr/publications/etudes-de-lifri/russieeurasiereports/pense-larmee-russe-de-guerre-ukraine-critiques


L’armée russe est très critique de sa guerre en Ukraine. Non seulement de la première phase de l’opération militaire spéciale (SVO) ratée et inspirée par la théorisation du contournement, mais aussi de la phase de dissuasion stratégique qui l’a précédée.

Le constat d’un manque profond de préparation à la SVO rejoint celui d’une impréparation – et ce dans beaucoup de domaines – à conduire la guerre hétérotélique sur laquelle a découlé la SVO.

Les faiblesses de l’armée russe par rapport à l’armée ukrainienne sont globalement, et parfois assez directement, reconnues. Les élites militaires russes ont fait de nombreuses recommandations pour améliorer la conduite russe de la guerre, et se sont principalement concentrées sur les forces terrestres et les forces aérospatiales. Parallèlement, l’armée russe s’est largement adaptée (avec plus ou moins de succès) aux difficultés rencontrées depuis un an et demi en Ukraine.

Si le régime poutinien est autoritaire et s’est évertué à réduire les espaces de liberté d’expression au sein de la société, l’existence et la tolérance de certains discours de vérité à ce niveau de l’appareil militaire montrent que l’armée et l’État russes ont un potentiel d’adaptation qui ne doit pas être sous-estimé.

Dimitri Minic est chercheur au Centre Russie/Eurasie de l’Ifri. Il est docteur en histoire des relations internationales de Sorbonne Université (2021). Il est l’auteur de Pensée et culture stratégiques russes : du contournement de la lutte armée à la guerre en Ukraine (Paris, Maison des sciences de l’homme, avril 2023), pour lequel il a reçu le Prix Thibaudet.

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Lire et  Télécharger : Que pense l’armée russe de sa guerre en Ukraine Critiques, recommandations, adaptations – Retex_sept2023

Fin de la présence militaire française au Niger : ce qu’il faut savoir de cette annonce de Macron

Fin de la présence militaire française au Niger : ce qu’il faut savoir de cette annonce de Macron

Le président français a annoncé ce dimanche 24 septembre 2023 la fin de la présence militaire française au Niger « d’ici à la fin de l’année ». Une annonce qui doit conduire au rapatriement de 1 500 soldats déployés sur les bases françaises au Niger, et rapprocher un peu plus la France de la fin de son engagement contre le terrorisme au Sahel. Voici ce qu’il faut savoir sur cette annonce.

Des soldats français du 2e Régiment Étranger de Parachutistes (2eREP) et des soldats nigériens se préparent à une mission sur la base aérienne française BAP, à Niamey, le 14 mai 2023.
Des soldats français du 2e Régiment Étranger de Parachutistes (2eREP) et des soldats nigériens se préparent à une mission sur la base aérienne française BAP, à Niamey, le 14 mai 2023. | ALAIN JOCARD / AFP

Voici ce qu’il faut comprendre des annonces d’Emmanuel Macron concernant le départ de la présence française du Niger.

1 500 militaires à rapatrier

Après avoir annoncé que la France allait rapatrier son ambassadeur au Niger, Sylvain Itté, retenu à Niamey, Emmanuel Macron a annoncé le départ des troupes françaises du Niger « d’ici à la fin de l’année ».

« Nous mettrons fin à notre coopération militaire avec les autorités de fait du Niger, car elles ne veulent plus lutter contre le terrorisme », a annoncé le président.

Cette annonce devrait donc engendrer le retour de tous les militaires stationnés au Niger, environ 1 500.

Trois bases françaises au Niger

Ils seraient aujourd’hui environ 1 500 soldats, principalement sur la base aérienne projetée située près de l’aéroport de Niamey. D’autres étaient déployés sur des bases à Ouallam, au nord de la capitale Niamey, et Ayorou, à la frontière du Mali.

Comme l’indique le site de la BBC, la base de Niamey, située sur le site de l’aéroport international Hamani Diori, servait de base de départ pour les drones Reaper qui effectuent des missions de renseignement et de reconnaissance dans le cadre de l’opération Barkhane au Sahel.

Après le coup d’État du 26 juillet dernier, qui a vu la junte prendre le pouvoir et une hausse des tensions entre le Niger et la France, les soldats étaient confinés dans leurs bases, où les conditions se font de plus en plus précaires.

La fin de dix ans d’opération militaire antiterroriste au Sahel

L’annonce du départ français du Niger n’est pas vraiment une surprise. Après leur coup d’État du 26 juillet, les putschistes avaient rompu les accords de coopération militaire qui liaient jusqu’ici Paris à Niamey et avaient donné un mois à la France pour se retirer militairement et diplomatiquement du territoire nigérien.

Thierry Vircoulon, chercheur associé au Centre Afrique subsaharienne de l’Institut français de relations internationales (Ifri), interrogé dans nos colonnes au début du mois de septembre, affirmait que le départ des troupes françaises signerait « la fin de la guerre de la France contre le djihadisme au Sahel ».

L’engagement militaire français au Sahel contre le djihadisme avait commencé en 2013, « avec l’opération Serval », précisait Thierry Vircoulon. Le départ met donc fin à dix ans d’opération contre le terrorisme au Sahel.

Après le Mali et la Burkina Faso, la France voit donc son engagement en Afrique être stoppé dans un troisième pays parmi ceux « qui constituaient le champ de bataille de la lutte contre le djihadisme au Sahel ».

Dans la région, la France disposerait alors uniquement d’une présence au Tchad. Aucun redéploiement de forces françaises vers ce pays n’a pour l’instant été annoncé. Pour Thierry Vircoulon, les troupes « vont très probablement rentrer en France ».

L’ambassadeur également rapatrié

Il « fait partie du package » déclarait encore Thierry Vircoulon dans nos colonnes le 6 septembre. Sylvain Itté, ambassadeur de la France au Niger, était, selon Emmanuel Macron « retenu en otage » à l’ambassade à Niamey.

Après la hausse des tensions diplomatiques entre le Niger et la France, successive au coup d’État, et à des manifestations « anti-France » devant l’ambassade à Niamey, les putschistes avaient annoncé, le vendredi 25 août 2023, l’expulsion de l’ambassadeur de France au Niger. La France avait considéré que les « putschistes n’ont pas autorité pour faire cette demande, l’agrément de l’ambassadeur émanant des seules autorités légitimes nigériennes élues », à savoir le gouvernement renversé de Mohamed Bazoum, considéré comme légitime par Paris.

Ce dimanche, le président Emmanuel Macron a confirmé que l’ambassadeur français au Niger serait bien rapatrié.

Guerre en Ukraine : « Ce que fait le commandement russe relève de l’improvisation »

Guerre en Ukraine : « Ce que fait le commandement russe relève de l’improvisation »

                               Le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgu lors du défilé militaire à la Place Rouge, Moscou, 9 mai 2023.

 
 
Dimitri MINIC, interviewé par Clément Daniez pour L’Express
publié l’IFRI le 21 septembre 2023

Il n’y a pas que les forces ukrainiennes, actuellement en pleine contre-offensive, qui s’adaptent à leur adversaire. Depuis le début de la guerre, l’armée russe se révèle capable d’autocritique, pour faire évoluer ses dispositifs de combat. C’est ce que confirme Que pense l’armée russe de sa guerre en Ukraine ?, une nouvelle étude de Dimitri Minic, du centre Russie-Eurasie de l’Institut français des relations internationales.

« Plutôt qu’une guerre de mouvements, l’armée russe s’est vue contrainte de mener une lutte armée de haute intensité et d’usure », résume le chercheur, auteur de Pensée et culture stratégiques russes. Du contournement de la lutte armée à la guerre en Ukraine (Editions de la Maison des sciences de l’homme). Entretien.

L’Express : Quelles leçons les Russes ont-ils tirées de leurs échecs en Ukraine ?

Dimitri Minic : Les élites militaires russes ont discuté de quelques domaines liés aux actions de combat : l’artillerie, les formations tactiques terrestres et la capacité à les manœuvrer efficacement, les drones, ainsi que les forces aérospatiales. Plusieurs inquiétudes remontent : le gaspillage et la pénurie de ressources matérielles et humaines, la difficulté à les mobiliser, et enfin la disparition des personnels qualifiés pour employer des équipements complexes et modernes.

Ces élites en sont venues à prodiguer des conseils élémentaires, comme le fait de ne pas masser des troupes en mouvement sur des petits espaces ou de disposer d’informations cartographiques fiables. Il en ressort deux recommandations pour le champ de bataille : le développement des moyens de renseignement, surveillance et reconnaissance, combinés aux frappes, en insistant sur l’importance des drones tactiques et de leur utilisation en « essaim » ; ensuite, la prise en compte de la « transparence » du champ de bataille, nécessitant des unités dispersées, plus petites, plus mobiles et décentralisées que l’organisation précédente.

Justement, depuis le début de cette guerre, l’armée russe a pu donner l’image de forces inadaptées aux combats du moment. A quel point a-t-elle fait son autocritique ?

L’armée russe n’avait pas été réformée ni préparée à la conduite d’une telle guerre. La pensée stratégique russe était en effet axée, depuis la chute de l’URSS, sur le contournement de la lutte armée. Cependant, les élites militaires comme les dirigeants russes ont surestimé à la fois l’efficacité du contournement et leur propre capacité à le mettre en œuvre. La mise en oeuvre de cette pensée, combinée aux spécificités de la culture stratégique russe, ont conduit à l’échec initial de l' »opération militaire spéciale ». Moscou a dû, dès les premiers jours, intensifier son effort conventionnel et finira par changer de stratégie quelques semaines plus tard. Plutôt qu’une guerre de mouvements, l’armée russe s’est vue contrainte de mener une lutte armée de haute intensité et d’usure, où la puissance de destruction et l’artillerie sont devenus centrales. Tout cela a été identifié et critiqué par les élites militaires, qui ont produit des analyses sur les défaillances de la prévision et du renseignement, le manque de planification, la préparation inadéquate des troupes ou encore l’emploi médiocre des troupes aéroportées (VDV).

L’armée ukrainienne a du mal à percer sur le front de Zaporijia. Sur quelle pensée stratégique l’armée russe s’est-elle fondée pour préparer et tenir ses lignes de défense ?

Il faut d’abord rappeler que l’armée russe ne s’attendait pas et n’était pas préparée à livrer ce type d’opérations ni de combats. Dans le plan de « l’opération militaire spéciale », le rôle joué par les actions indirectes (dissuasion stratégique, actions subversives armées et non armées, actions psychologico-informationnelles et cybernétiques…) était censé surpasser celui des forces armées, lequel devait être final et limité. Mais cela a largement échoué, dès le 24 février. Depuis, ce que fait le commandement russe relève de l’improvisation, avec plus ou moins de succès.

La défense mise en place par l’armée russe dans l’oblast de Zaporijia date de l’ère Sourovikine, qui fut le plus compétent des commandants des troupes russes en Ukraine [d’octobre 2022 à janvier 2023]. Cette défense relativement efficace est profonde et assez traditionnelle avec une première zone saturée de mines, de moyens de reconnaissance et des frappes associées, très difficile à franchir, même si l’armée ukrainienne y est parvenue à Robotyne. Cependant, des développements théoriques sur la défense, produits avant la contre-attaque ukrainienne de l’été 2023, ont révélé deux sentiments grandissants chez les élites militaires russes : la pénurie d’hommes et de moyens.

Les dernières analyses se montrent également lucides sur l’aspect contreproductif de la cruauté et des crimes de guerre, sans visiblement être écoutées…

Personne ne défend, dans les sources que j’ai lues, la cruauté de l’armée. Reste que la responsabilité de l’armée russe dans certains crimes de guerre et exactions, comme à Boutcha, n’est pas directement pointée du doigt. Quand il est mentionné, ce massacre est présenté comme une savante mise en scène des « scénaristes » occidentaux en Ukraine. Il a même pu arriver que la stratégie russe d’intimidation et de menace de destruction des infrastructures (y compris nucléaires) et de la population ukrainienne soit louée.

Dans tous les cas, depuis le 24 février, dans leurs écrits, les élites militaires ont invité à la modération et expliqué l’importance pour une armée d’invasion d’adopter une attitude bienveillante à l’égard de la population, et de la protéger des affres de la guerre. La destruction des villes et des infrastructures, et la cruauté envers la population sont jugées contre-productives car elles nuisent aux objectifs fixés, l’argument moral étant absent. Les faibles dispositions psychologiques et morales des soldats russes (mais aussi de la population russe), dont il est reconnu qu’ils n’ont pas été préparés à mener l’opération militaire spéciale, et encore moins la guerre qui en a découlé, ont aussi intéressé les élites militaires russes.

Vous notez dans les publications stratégiques une réflexion tardive sur l’utilisation des chars…

La question des chars de combat a d’abord été abordée de façon indirecte, en soulignant notamment l’importance de protéger leur tourelle contre les armes antichars portatives et les munitions rôdeuses, via des solutions rudimentaires tels des cages et écrans métalliques. Il a fallu attendre juillet pour voir la parution du premier article à traiter de la question. Le constat est sans appel : l’opération militaire spéciale a modifié la façon d’employer les chars de combat, dans un espace saturé de troupes équipées d’armes antichars portatives modernes (Javelin, NLAW), passés à un rôle d’appui feu à l’infanterie. Diverses adaptations sont cependant louées chez les tankistes : quantité minimale requise d’obus dans le coffre à munitions, conduite systématique de la reconnaissance via des drones…

Une guerre longue se mène avec un soutien industriel. Que recommandent les cercles stratégiques ?

Bien qu’elle soit affaiblie par les sanctions, l’industrie d’armement russe ne s’est pas effondrée. Pourtant, la production russe reste très dépendante des technologies de pointe occidentales – qu’elle continue de se procurer dans une certaine mesure – et l’Etat privilégie des produits chinois de moindre qualité, y compris des drones de petite taille. Les élites militaires brossent un portrait pessimiste de cet ensemble et sont pleinement conscientes de l’impact délétère des sanctions occidentales sur le complexe militaro-industriel russe. Certains acteurs gravitant à l’intersection des communautés militaires et industrielles russes y voient aussi l’opportunité de proposer leurs solutions et projets particuliers (simulateurs tactiques, systèmes de lutte anti-drone, drones, service logistique), et, peut-être, d’en tirer des bénéfices.

[…]

 

> Lire l’interview sur le site de L’Express

Aperçu historique et juridique du conflit arméno-azerbaïdjanais

Aperçu historique et juridique du conflit arméno-azerbaïdjanais

 

par Laurent Leylekian – CF2R – publié le 30 août 2023

Analyste politique

L’Azerbaïdjan a déclenché l’assaut en sachant que les Russes ne mettront pas de feu rouge

par Tigrane Yegavian* – CF2R – publié le 19 septembre 2023

https://cf2r.org/presse/lazerbaidjan-a-declenche-lassaut-en-sachant-que-les-russes-ne-mettront-pas-de-feu-rouge/

*Chercheur (Moyen-Orient, monde lusophone)

New Delhi veut accroitre le format de la Marine indienne de 30 % d’ici à 2030 pour faire face à la Chine

New Delhi veut accroitre le format de la Marine indienne de 30 % d’ici à 2030 pour faire face à la Chine


Indian Navy INS Nilgiri News Photo Video Constructions Navales militaires | Contrats et Appels d'offre Défense | Coopération internationale technologique Défense

New Delhi veut accroitre le format de la Marine indienne de 30 % d’ici à 2030 pour faire face à la Chine


La Marine indienne a entrepris, depuis une vingtaine d’années, un vaste effort pour se moderniser et étendre son format. Plusieurs programmes emblématiques ont ainsi été lancés durant cette période, comme P75 pour 6 sous-marins conventionnels de la classe Kalvari dérivés du Scorpène de Naval Group, le porte-avions de 45.000 tonnes INS Vikrant ou encore les destroyers du projet 15A de la classe Kolkata.

Si les efforts et les budgets ont été incontestablement croissants, l’Indian Navy souffre toutefois de deux handicaps importants. Le premier est lié à la difficulté dans le pays pour faire avancer rapidement des programmes majeurs, mobilisant d’importants crédits.

Les obstacles qui freinent la progression de la Marine indienne

De nombreux obstacles, qu’ils soient politiques ou industriels, viennent, en effet, souvent retarder, voire faire dérailler, des programmes de défense pourtant critiques. C’est ainsi que le programme P-75i, censé permettre la construction de six nouveaux sous-marins à propulsion anaérobie, n’a toujours pas sélectionné son prestataire principal, alors qu’il a été lancé il y a quatre ans.

Le second des handicaps n’est autre que la croissance fulgurante, et pour le coup maitrisé, de la flotte chinoise, bien plus rapidement qu’elle ne peut, elle-même, progresser. Cela crée un évident effet de loupe sur ses propres difficultés, et tend à accroitre les tensions politiques qui entourent ces enjeux de sécurité.

INS Kalvari sent to the dock for setting afloat to Naval Dockyard Mumbai e1634215958315 Constructions Navales militaires | Contrats et Appels d'offre Défense | Coopération internationale technologique Défense
Lancement de l’INS Kalvari, premier sous-marin de la classe éponyme construit par les chantiers navals Mazagon en coopération avec Naval Group.

En effet, bien que fréquemment présentée comme alignée sur la Chine au sein des BRICS, New Delhi est surtout directement menacée par la montée en puissance de l’Armée Populaire de Libération, que ce soit sur les haut-plateaux Himalayens, lieux de tensions récurrentes entre les deux pays, qu’au sujet du soutien militaire intensif de Pékin à Islamabad, l’ennemie juré de l’Inde depuis sa création.

Le défi des marines chinoises et pakistanaises

La Marine indienne, elle, se voit directement menacé par une Marine chinoise dont le format évolue aussi rapidement que sa modernisation, et qui par ailleurs fait activement profiter son allié pakistanais de ses propres avancées.

C’est ainsi que, ces dernières années, la Marine Pakistanaise a commandé, outre les quatre corvettes de la classe Barbur dérivées des Ada Turques, huit sous-marins AIP Type 039A formant la classe Hangor, ainsi que quatre frégates anti-sous-marines Type 054 AP formant la classe Tughril.

De fait, les navires de combat formant aujourd’hui la Marine indienne, sont bien insuffisants pour répondre aux enjeux sécuritaires dans le golfe du Bengale face à la Chine et en Mer d’Oman face au Pakistan.

Porte-avions Liaoning et son escorte
La Marine chinoise est passée en deux décennies d’une flotte de défense côtière à la rivale directe de l’US Navy sur les océans de la planète.

C’est ainsi que le format actuel de 127 navires, doit être porté d’ici à 2030 à 160 navires, soit une augmentation du 25 % planifiée pour les sept années à venir, et d’atteindre 175 unités navales, voire 200, en 2035.

68 navires militaires en commande à ce jour

Pour y parvenir, les chantiers navals indiens peuvent aujourd’hui s’appuyer sur un carnet de commande particulièrement bien rempli, avec 68 unités navales officiellement en commande à ce jour.

Il va du destroyer de 7.400 tonnes de la classe Visakhapatnam (2 unités livrées, 2 en construction) aux corvettes anti-sous-marines du programme AntiSubmarine Warfare Shallow Water Craft (ASW-SWC) de 700 tonnes (16 unités), en passant par les 7 frégates furtives de 6.500 tonnes de la classe Nilgiri, et les 5 grands navires de soutien de 44.000 tonnes pour l’heure désignés sous le nom de classe HSL.

Pour autant, la plupart de ces navires ne permettront que de remplacer les unités déjà en service et ayant atteint leurs limites, comme les destroyers de la classe Raiput ou les 7 corvettes lance-missiles de la classe Veer, entrés en service dans les années 80.

destroyer INS Visakhapatnam
Construction du premier destroyer de la classe Visakhapatnam – 2 navires ont déjà été livrés, deux autres le seront dans les années à venir.

Il est donc aujourd’hui indispensable, pour l’Indian Navy, de lancer rapidement certains programmes critiques, comme le programme de sous-marins AIP P75i, mais aussi les programmes de destroyers, frégates, corvettes et OPV devant prendre la suite des classes actuellement commandées.

 

Sous-marins classe Kalvari et porte-avions classe Vikrant supplémentaires

Cet écart entre nécessité opérationnelle et réalité programmatique, est à ce titre au cœur de la future commande 3 sous-marins Scorpene supplémentaires annoncée par Narendra Modi à l’occasion de sa visite officielle en France pour les célébrations du 14 juillet.C’est cette pression qui, en partie, pèse aujourd’hui sur l’avenir du nouveau porte-avions indien, l’amirauté préférant construire un nouveau navire de la classe de l’INS Vikrant de 45.000 tonnes, plutôt qu’un nouveau, donc long et onéreux, porte-avions de 65.000 tonnes équipés de catapultes, comme précédemment évoqué.C’est aussi la raison qui pousse l’Indian Navy à privilégier, parmi l’ensemble des programmes à venir, la construction d’une flotte de sous-marins nucléaires d’attaque, domaine dans lequel l’aide de la France a été sollicité semble-t-il, ceci ayant pesé dans la commande des 3 Scorpene supplémentaires à venir.

 

Marine indienne INS Vikrant
La Marine indienne privilégie la construction d’un second porte-avions de la classe Vikrant de 45.000 tonnes, à celle d’un nouveau porte-avions de 65.000 tonnes équipés de catapultes.

Quoi qu’il en soit, si la Marine Indienne veut effectivement relever le défi chinois, et sa flotte de plus de 360 navires aujourd’hui, de plus de 500 en 2035, elle devra trouver les moyens de lever toutes les difficultés, notamment politique et industrielle, qui entravent considérablement son développement.

On notera, à ce titre, que ces mêmes difficultés touchent aussi les forces aériennes et terrestres indiennes, l’ensemble des armées étant engagées dans une course contre-la-montre pour ne pas se laisser distancer face à Pékin et Islamabad qui, eux, avancent à marche forcée.