Le général Schill s’interroge : « Sommes nous collectivement prêts » à supporter le coût d’une guerre?

Le général Schill s’interroge : « Sommes nous collectivement prêts » à supporter le coût d’une guerre?

 

https://www.opex360.com/2023/09/24/le-general-schill-sinterroge-sommes-nous-collectivement-prets-a-supporter-le-cout-dune-guerre/


Puis, la chute du Mur de Berlin et la disparition de l’Union soviétique ouvrirent une ère nouvelle, au point que certains estimèrent que le temps était venu de récolter les « dividendes de la paix ». Mais c’était sans doute aller trop vite en besogne, comme le montrèrent par la suite les interventions militaires menées en ex-Yougoslavie [Bosnie, Kosovo], en Afrique ou encore en Irak et en Afghanistan.

Cela étant, le spectre d’une guerre entre adversaires à parité s’était éloigné… Mais pas pour longtemps, puisqu’il est de retour depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Et, désormais, la question qui se pose est de savoir si les sociétés occidentales sont prêtes à affronter cette réalité.

Un article [.pdf] récemment publié par l’US Army War College en doute… notamment en raison des difficultés que rencontre l’armée américaine pour recruter. « Chaque soldat que nous ne recrutons pas aujourd’hui est un atout de mobilisation que nous n’aurons pas en 2031 », avance-t-il. D’autant plus que, au regard des pertes subies par les belligérants en Ukraine, elle pourrait perdre jusqu’à 3600 hommes [tués ou blessés] par jour dans un engagement ayant le même niveau d’intensité. D’où les interrogations sur sa capacité à se régénérer…

« Le concept d’une force composée exclusivement de volontaires […] ne correspond pas à l’environnement opérationnel actuel. […] Les besoins en troupes pour les opérations de combat à grande échelle pourraient bien nécessiter […] une évolution vers une conscription partielle », explique cet article… qui a été repris par le général Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], sur Linkedin.

L’article de l’US Army War College « trace des parallèles entre le conflit en Ukraine et un potentiel engagement similaire de l’US Army, évoquant des niveaux de pertes allant jusqu’à 3600 tués ou blessés par jour », résume d’abord le général Schill, qui, visiblement, entend lancer un débat sur son contenu.

« On peut, certes, discuter des modalités d’un engagement qui verrait l’armée française opposée à un ennemi à parité ou quasi-parité, notamment sous la protection du parapluie nucléaire », poursuit le CEMAT. Or, selon lui, malgré la dissuasion, une telle « occurrence reste possible, sans que les intérêts vitaux de la Nation soient directement menacés ».

Aussi, le niveau des pertes avancé par l’article de l’US Army War College l’interpelle. « Ce chiffre interroge la résilience de notre outil de défense ainsi que sa capacité de régénération » et « pose surtout une question ancienne mais pourtant terriblement actuelle : sommes-nous collectivement prêts à un tel sacrifice? », demande le général Schill.

« Nos sociétés occidentales, dont les dernières générations n’envisageaient jusqu’à récemment la guerre qu’au travers des livres d’Histoire, sont-elles prêtes à voir leurs fils et filles mourir en nombre pour un plus grand bien? Et en élargissant encore la focale, conçoit-on encore la guerre et ce qu’elle implique? », s’interroge encore le CEMAT, pour qui il s’agit « simplement d’ouvrir le débat sur ce qu’on attend d’un soldat français aujourd’hui, ce que la Nation exige de lui et ce qu’elle est prête à faire pour que cette exigence, librement formulée, soit comprise et endossée ».

Général Schill : L’armée de Terre attire « à peine plus d’un candidat pour un poste » de militaire du rang

Général Schill : L’armée de Terre attire « à peine plus d’un candidat pour un poste » de militaire du rang

 


Selon la dernière revue publiée par le Haut comité d’évaluation de la condition militaire, la sélectivité du recrutement des militaires du rang s’est améliorée en 2021, avec une moyenne de 1,5 candidat pour un poste. « Cette amélioration est commune à toutes les armées [+ 0,2 point pour l’armée de Terre, + 0,4 point pour la marine nationale et + 0,2 point pour l’armée de l’Air et de l’Espace]. Elle résulte de la hausse de 13 % du nombre de postulants au recrutement associée à une baisse de 3,4 % du volume de recrutés », est-il avancé dans ce document.

Seulement, cette amélioration est loin d’être suffisante… En tout cas, ce taux de sélectivité n’a pas retrouvé le niveau qui était le sien en 2015 [2,2 candidats pour un poste]. Dans un avis budgétaire publié 2020, les sénateurs Joël Guerriau et Marie-Arlette Carlotti avaient même avancé qu’il s’approchait des « planchers […] constatés au début des années 2000, au moment de la professionnalisation ». Et cela d’autant plus que le « vivier » des recrues tend à s’amenuiser, avec une baisse du nombre de candidats médicalement aptes, en raison d’un « mode de vie de plus en plus sédentaire » et d’une « surconsommation d’écrans susceptible de favoriser surpoids et myopie ». Enfin, les aspects démographiques sont aussi à prendre en considération.

Or, pour qu’un recrutement soit optimal, il faut réunir au moins deux conditions : un taux de sélectivité élevé [ce qui suppose d’être attractif] et un taux de dénonciation de contrat durant la période probatoire le plus bas possible. Pour l’armée de Terre, celui-ci s’élève en moyenne à environ 30% par an.

Quoi qu’il en soit, recruter sera un défi pour l’armée de Terre au cours des prochaines années. C’est en effet ce qu’a admis le général Schill, son chef d’état-major, lors d’une audition au Sénat dont le compte rendu vient d’être publié [soit plus de trois mois après!]. Et, s’agissant des militaires du rang, le taux de sélectivité s’est effondré.

« Le recrutement de nos militaires du rang est correct. Nous avons fini l’année 2022 à l’effectif qui nous était accordé. Il n’empêche qu’il existe une vraie difficulté de recrutement et de fidélisation, avec à peine plus d’un candidat pour un poste. Nous devons donc renforcer notre attractivité pour recruter davantage de militaires du rang mais aussi de sous-officiers », a en effet déclaré le général Schill.

Et encore, en 2024, l’armée de Terre ne bénéficiera pas de postes supplémentaires.

« Dans la loi de programmation militaire qui s’achève, nous avions un certain nombre de créations de postes. Nous avions choisi de les cibler sur les postes à plus haute valeur ajoutée. Nous voulions notamment créer des postes dans les nouvelles capacités cyber et du renseignement. Nous avons créé ces postes par transfert depuis d’autres fonctions opérationnelles », a expliqué le CEMAT.

Quoi qu’il en soit, pour le général Schill, « l’impératif de jeunesse doit être conservé » car « nous avons besoin d’une armée jeune ». Actuellement, a-t-il précisé, les régiments ont une moyenne d’âge de 28 ans, « cadres compris ».

« Nos jeunes s’engagent à 20 ans en moyenne. Ils passent 6 à 7 ans dans les armées. Nos militaires du rang ont une moyenne d’âge de 26 ans. C’est un atout, même si j’aimerais que la moyenne d’âge des militaires du rang soit un peu plus élevée. Cette réalité globale doit être maintenue », a ajouté le général Schill.

Par ailleurs, commentant, via Linkedin, la récente note de Bruno Tertrais sur l’évolution de la démographie en France, publiée par l’Institut Montaigne, le CEMAT a estimé que « l’adaptation » du recrutement de l’armée de Terre « doit être poursuivie afin de prendre en compte le vieillissement de la population », par exemple « en changeant les critères d’âge pour servir sous l’uniforme ou en modifiant les conditions d’accès à la réserve ».

Le général Schill a aussi considéré que la « chute de la natalité impacte directement le volume des classes d’âge, et donc le vivier de recrutement de 14’000 jeunes que l’armée de Terre accueille annuellement ». Or, a-t-il ajouté, si celle-ci « demeure un vecteur dynamique d’insertion de la jeunesse, sa capacité opérationnelle dépendra demain de l’attractivité du métier des armes ». Enfin, elle aura également à renforcer « rôle de creuset intégrateur » à l’heure « où le seuil symbolique des 10% de Français d’origine immigrée a été relevé par l’INSEE ».

Un nouveau standard du blindé de reconnaissance et de combat « Jaguar » sera livré à l’armée de Terre en 2024

Un nouveau standard du blindé de reconnaissance et de combat « Jaguar » sera livré à l’armée de Terre en 2024

 

https://www.opex360.com/2023/09/19/un-nouveau-standard-du-blinde-de-reconnaissance-et-de-combat-jaguar-sera-livre-a-larmee-de-terre-en-2024/


 

Pourtant, quelques semaines plutôt, lors de l’examen de la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 à l’Assemblée nationale, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait confié être « inquiet pour la livraisons des Jaguar », après avoir évoqué, sans donner de détails, des aléas affectant ce programme. « Ce n’est pas une critique, c’est la réalité : il va falloir qu’on mette les bouts pour tenir les délais », avait-il dit.

Cela étant, le magazine spécialisé DSI avait expliqué, en mars, que la tourelle du Jaguar n’était « pas stabilisée ». D’où des « retards importants » pour équiper le Régiment d’Infanterie Chars de Marine [RICM] afin de lui permettre de remplacer ses AMX-10RC, à l’instar du 1er Régiment Étranger de Cavalerie [REC].

Mais lors d’une audition au Sénat [dont le compte rendu s’est fait attendre durant plus de trois mois], le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, a livré quelques détails sur ces « aléas » évoqués par le ministre.

« Concernant le Jaguar, je suis convaincu qu’il est un très bon équipement. […] Des ajustements sont encore nécessaires pour qu’il soit pleinement opérationnel. Les industriels ont bien intégré cet aspect », a fit le général Schill. Et d’annoncer qu’un « nouveau standard du Jaguar, doté d’un nouveau logiciel, sera livré par l’industriel mi-2024 ».

Pour rappel, le Jaguar est équipé d’une tourelle dotée d’un canon de 40 mm télescopé, d’une mitrailleuse téléopérée de 7,62 mm et de missiles Akeron MP [ex-MMP, fournis par MBDA, ndlr] qui, actuellement associés au viseur PASEO d’Optrolead, sont susceptibles de lui donner une capacité de tir au-delà de la vue directe, leur portée pouvant atteindre les 5 km. Mais celle-ci ne sera pas encore disponible sur le prochain standard de cet engin.

« Il ne fera pas encore du tir au-delà de la vue directe, mais il fera du tir en mouvement sur des cibles en mouvement. Si cette conduite de tir est performante, nous poursuivrons la transformation des régiments », a en effet expliqué le CEMAT.

Photo : armée de Terre

La transformation de l’armée de Terre enclenchée mais à préciser, décliner et mettre en œuvre

La transformation de l’armée de Terre enclenchée mais à préciser, décliner et mettre en œuvre

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par Philippe Chapleau – Lignes de défense – publié le 11 septembre 2023

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2023/09/09/la-transformation-de-l-armee-de-terre-enclanchee-24095.html


L’ordre à l’armée de Terre du 20 juillet, signé par le général d’armée Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre, constitue le point de départ de la fameuse transformation de l’armée de Terre.

Cette transformation, pilotée par commandement du combat futur (CCF, ex-CDEC); se fonde sur la modernisation des équipements, la refonte de l’organisation (simplification) et l’adaptation du fonctionnement (avec un nouveau style de commandement axé sur une plus grande autonomie des échelons tactiques et la subsidiarité).

Cette transformation a une finalité opérationnelle. En termes de tempo, voici les étapes de  l’ambition affichée:

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C’est sur la période 2024-2027 que la réussite de l’effort entrepris va être impératif. Cette réussite passe, entre autres mais inévitablement, sur “la préservation de l’attractivité et l’amélioration de la fidélisation”. En clair, il faut recruter et garder les militaires dont la formation va s’avérer plus exigeante et plus coûteuse. Dans ce domaine, on attend la directive de préservation des effectifs à paraître sous timbre EMAT ;

Plus précisément, comme l’a annoncé le CEMA (c’est moi qui souligne), “les principaux mouvements du C2 devront débuter :
• dès le plan annuel de mutation 2024 imposant de facto une description précise dans les travaux REO A+1 qui seront finalisés début octobre 2023 ;
sur la deuxième partie de LPM pour la manœuvre de stationnement associée dont le tempo impose de disposer d’expressions de besoins consolidées, en lien avec les organismes interarmées et ministériels, pour le comité exécutif ministériel infrastructure de décembre 2023.

C’est donc sur le C2 (commandement et contrôle) que va porter l’effort initial, avec des mouvements liés à la transformation.  L’armée de Terre assure que “la transformation modifiera marginalement le plan de stationnement de l’armée de Terre, sans abandon de garnisons, et en s’appuyant majoritairement sur les infrastructures existantes”. 

Par exemple, dans l’ouest, les mouvements (créations et changements de subordination) suivants sont attendus:
1) le ComCyber de Cesson-Sévigné (35) changera de nom avant le 1er août 2024 pour devenir le CTNC (commandement Terre du numérique et du cyber)
– sera créé, à Cesson-Sévigné et aussi le 1er août 2024, le BANC ( brigade d’appui numérique et cyber
– un bataillon cyber sera stationné à Cesson-Sévigné (date de création à préciser) 
– la 808e compagnie de transmissions sera créée en 2025 à Saint-Jacques de la Lande (35) pour être opérationnelle en 2028. Cette unité occupera les locaux de la 807e CT et ceux de la 785e CGE qui quittera la région rennaise pour Strasbourg au plus tôt à compter de 2027.
Dans ce domaine, on attend la feuille de route “ambition Cyber” à paraître sous timbre EMAT ;

2) A Angers va s’installer l’état-major de la future brigade du génie dont la création est prévue le 1er août 2024 autour d’un noyau clef. Voir mon post du 25 juillet. 
Cette unité va intégrer le 132e RIC et le 19e RG de la 1re division, le 31e RG et le 2e RD de la 3e division, le 25e RGA et le 28e GG du COMRENS.

3) Le 5e RIAOM de Djibouti rejoindra la 9e BIMa en janvier 2024.

Pour l’armée de Terre, s’entraîner avec des drones « ne doit pas être plus compliqué qu’une séance de tir »

Pour l’armée de Terre, s’entraîner avec des drones « ne doit pas être plus compliqué qu’une séance de tir »

https://www.opex360.com/2023/09/03/pour-larmee-de-terre-sentrainer-avec-des-drones-ne-doit-pas-etre-plus-complique-quune-seance-de-tir/


Et ils participent à la « transparence du champ de bataille » qui, associée à « l’hyper-destructivité assurée par la quantité disponible, la précision et la létalité des armements de tout type » que possèdent les forces ukrainiennes et russes, expliquerait en partie le « blocage tactique » que l’on observe en Ukraine depuis plusieurs mois. En tout cas, telle est l’appréciation de la situation que le général Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], a livrée via Linkedin.

« L’association de ces deux effets, schématiquement d’une détection simplifiée et d’une destruction facilitée, génère des pertes élevées au moindre mouvement, incitant les belligérants à privilégier la défensive », a expliqué le CEMAT. Aussi, a-t-il continué, « pour les limiter, les combattants recherchent une protection accrue via la dispersion tactique et le recours aux fortifications de campagne ». Ce qui fait que les « gains territoriaux sont rares » et que la « progression tactique est très lente ».

Quelques semaines plus tôt, le général Schill avait estimé que « si l’hélicoptère et le drone ne sont pas l’alpha et l’oméga du combat aéroterrestre », faire l’impasse sur de telles capacités serait « rédhibitoire ». Et que, par conséquent, une « armée de Terre de premier rang » se devait d’être « à la pointe de leur développement et de leur intégration dans la manœuvre ».

Seulement, l’armée de Terre a encore du chemin à faire pour s’approprier pleinement les capacités offertes par les drones, même si elle en comptera environ 4000 à l’horizon 2025 [SDT Patroller, SMDR, Anafi, NX-70, Black Hornet 3, etc.]. En effet, le retour d’expérience du récent exercice interarmées Orion, a révélé « d’importantes disparités d’utilisation » de ces appareils « entre les régiments ».

C’est en effet le constat que le général Schill a fait dans une lettre adressée en juillet aux commandeurs de l’armée de Terre pour y détailler ses priorités pour le second semestre 2023. Aussi leur demande-t-il d’accentuer la préparation opérationnelle en matière d’utilisation des drones. « Le virage de leur emploi régulier par nos unités, en exercice comme en mission, doit être pris sans délai au risque d’un retard qu’il deviendra difficile de combler », écrit-il.

Seulement, la réglementation en matière de sécurité aérienne ne facilite pas forcément les choses.

« Les aspects de la procédure ou de formation sont parfois contraignants mais ne peuvent constituer des obstacles rédhibitoires », estime le CEMAT, qui dit avoir « rappelé l’impératif de lever les freins inutiles dès lors qu’il ne sont pas directement liés à la sécurité », lors d’assises dédiées à cette question, le 5 juin dernier.

« Faire voler des drones ne doit pas être plus compliqué qu’une sortie terrain ou une séance de tir » et les « drones doivent voler dans les unités en 2023 », a conclu le général Schill.

Photo : Novadem

Pour l’armée de Terre, il devient « impératif » d’utiliser tous les leviers pour enrayer la baisse de ses effectifs

Pour l’armée de Terre, il devient « impératif » d’utiliser tous les leviers pour enrayer la baisse de ses effectifs

 

https://www.opex360.com/2023/08/27/pour-larmee-de-terre-il-devient-imperatif-dutiliser-tous-les-leviers-pour-enrayer-la-baisse-de-ses-effectifs/


 

Et, visiblement, cette tendance n’est pas en train de s’inverser… au point que le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Pierre Schill, a sonné le tocsin dans une lettre adressée le mois derniers « aux commandeurs et aux brigadiers », c’est à dire aux généraux à la tête des commandements spécialisés et des brigades.

« La priorité absolue concerne les effectifs. Jusqu’à l’an dernier, l’armée de Terre pouvait se targuer d’atteindre ses objectifs […] au prix d’efforts que je connais et que je salue », écrit le général Schill. Mais, poursuit-il, « les premiers mois de 2023 montrent une baisse inhabituelle des effectifs globaux de l’armée de Terre. En l’état actuel, les projections d’effectifs prévisionnels pour la fin de l’année sont mauvais ». Et effectivement, il serait question d’un « déficit » de 2’500 militaires…

« Cette inflexion peut s’expliquer par des raisons conjoncturelles comme structurelles que nous traiterons dans la durée » mais les « effectifs à terminaison de l’année 2023 constitueront néanmoins la base de départ des droits qui seront ouverts à l’armée de Terre en LPM [Loi de programmation militaire] 24-30 », rappelle le CEMAT.

Aussi, il n’y a pas de temps à perdre. Et, pour le général Schill, « il est donc impératif d’utiliser tous les leviers » dont disposent les « commandeurs » et « brigadiers » pour « corriger à la hausse les prévisions actuelles » de leurs unités car « chaque recrutement, chaque engagement, chaque renouvellement de contrat, chaque réengagement sera une victoire ».

En juillet, Europe 1 avait fait état de difficultés concernant le recrutement des trois armées. « À la fin de l’année, entre 1500 à 2000 jeunes n’auront pas été recrutés, par rapport aux objectifs fixés », avait affirmé la radio, avant d’évoquer des soucis de « fidélisation », avec « trop » de sous-officiers et de militaires du rang ayant tendance « à quitter l’institution pour rejoindre le privé ».

Et d’ajouter que, pour « sauver les meubles pour l’année 2023 », il était demandé, dans les régiments, aux partants de « prolonger de quelques mois pour étaler les départs sur 2024″… Ce qui ne ferait que décaler le problème sans le régler.

Ces difficultés concernent aussi la réserve opérationnelle de l’armée de Terre. Dans sa lettre, le général Schill a également demandé un effort « à la fois sur le recrutement et l’emploi » des réservistes, alors que, selon la LPM 2024-30, leur nombre est appelé à doubler d’ici 2030.

Aussi, écrit le CEMAT, « en 2023, les crédits d’activité des réserves » des unités « devront être intégralement employés et les effectifs de réservistes cesser leur décrue, voire entamer une hausse ». Et de conclure : « Il est impératif que la réserve opérationnelle de l’armée de Terre se sente intégrée et utile ».

Décès accidentel d’un militaire français en Irak

Décès accidentel d’un militaire français en Irak

 

https://www.opex360.com/2023/08/19/deces-accidentel-dun-militaire-francais-en-irak/


Malheureusement, et malgré une prise en charge par les secours, le sergent Baptiste Gauchot, du 19e Régiment de Génie, a succombé à ses blessures alors qu’il était opéré en urgence à l’hôpital d’Erbil. Quand au second militaire qui se trouvait dans le même véhicule, il a été transféré dans un état grave vers un hôpital militaire à Bagdad.

« Le sergent Baptiste Gauchot était déployé en opération extérieure depuis le 21 mai 2023 au sein de l’opération Chammal et contribuait à la formation de nos partenaires irakiens dans les domaines de combat d’infanterie et du secourisme au combat », précise l’État-major des armées, via un communiqué.

Le général Thierry Burkhard, chef d’état-major des armées, « s’incline avec une profonde tristesse devant la mémoire de ce militaire mort en opération dans l’accomplissement de sa mission. Ses pensées accompagnent sa famille, ses frères d’armes, ainsi que tous ses proches », poursuit le texte.

Ayant appris « avec une vive émotion le décès en Irak dans un accident de la circulation du sergent Baptiste Gauchot », le président Macron a dit s’associer à « la douleur de sa famille et de ses proches ». Puis il a réaffirmé son « soutien au peuple et aux autorités irakiennes et la détermination de la France à continuer d’œuvrer à leurs côtés pour l’instruction de leurs forces de sécurité qui luttent contre le terrorisme ».

Pour rappel, la force Chammal a déjà été endeuillée avec le décès accidentel du caporal-chef Bogusz Pochylski, du 2e Régiment Étranger d’Infanterie [REI], lors d’une séance d’entraînement menée au profit des forces de sécurité irakienne, en mars 2018. Et, en septembre 2017, l’adjudant-chef Stéphane Grenier, de la « Task Force » Hydra, avait été mortellement touché lors d’un accrochage avec l’État islamique [EI ou Daesh] en Syrie.

L’armée de Terre veut donner plus d’autonomie à ses brigades et à ses régiments

L’armée de Terre veut donner plus d’autonomie à ses brigades et à ses régiments

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En clair, il s’agit de revenir sur le modèle mis en place lors des réformes du ministère des Armées menées au tournant des années 2010, dans un contexte de contrainte budgétaire. Réformes qui ont été, comme eut l’occasion de le souligner le général François Lecointre, quand il était encore chef d’état-major des armées [CEMA], menées selon une « approche fonctionnelle » aux dépens d’une « approche organique » et « sans égard suffisant pour la singularité du fonctionnement des armées ».

Selon plusieurs rapports du Haut Comité d’Évaluation de la Condition Militaire [HCECM], ces réformes se sont traduites par une dégradation du soutien administratif ainsi que par un effritement de la cohésion, en raison d’une « interarmisation » alors justifiée par le souci de rationalisation. En outre, elles ont amoindri le concept « un chef, une mission, des moyens ».

Cela étant, et conformément aux directives du chef de l’État, l’armée de Terre a déjà adopté un « plan de transformation », appelé « Une armée de Terre de combat ». Et les mesures qu’il propose seront progressivement en œuvre selon des modalités précisées dans un document interne, intitulé « Ordre général à l’armée de Terre 2023-30 ».

Celui-ci prévoit quatre grands commandements : le CFOT [commandement de la force opérationnelle terrestre], la DRHAT [Direction des ressources humaines de l’armée de Terre], la DCSIMMT [Direction centrale de la Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres] et le CCF [Commandement du combat futur]. Chacun d’entre eux aura à se concentrer sur une priorité précise, dont les opérations, les forces morales, l’économie de guerre [avec le maintien en condition opérationnelle] et l’innovation.

Ce document prévoit des mesures visant à faciliter le « fonctionnement quotidien » des unités de l’armée de Terre, les objectifs étant de « libérer les énergies des échelons subordonnés » et de « chercher l’amélioration des conditions de vie du métier militaire dans un équilibre assumé avec l’exigence d’une armée d’emploi durcie ».

Parmi ces mesures, il est question « d’adapter le style de commandement » du CFOT en passant de la culture de la norme à celle de l’intention, de la responsabilité et du résultat ».

Concrètement, il s’agira de « renforcer l’esprit d’initiative au combat », de développer la subsidiarité au quotidien », de « responsabiliser le commandement » et de « passer de la culture du contrôle de conformité à la mesure de l’efficacité ». Et cela se traduira par une autonomie plus grande laissée aux brigades et aux « autorités immédiatement supérieures » [AIS] des régiments.

Ainsi, l’armée de Terre veut « établir les brigades et les AIS des régiments comme l’échelon de synthèse des domaines ‘opérations’, ‘programmation des activités de préparation opérationnelle’, ‘ressources humaines’, ‘organisation’, ‘capacitaire’, ‘infrastructure’, ‘sécurité’ et ‘rayonnement’ ».

Plus généralement, le document explique que l’autonomie des brigades « constitue une ligne directrice forte de la transformation de l’armée de Terre.

« Certains freins à cette autonomie relèvent de notre organisation interne : ils doivent être levés par tous les chefs en mesure de le faire, chacun à son niveau. Certains freins relèvent de l’organisation interarmées : il nous incombe de les identifier, d’en limiter les effets et de formuler des propositions pour les lever à moyen terme », poursuit-il.

En outre, il reviendra à chaque brigade de déterminer la meilleure façon d’atteindre ses objectifs et de « valider les propositions de leurs régiments subordonnés selon ce prisme, dans le respect des directives et du cadre fixé par les contrats opérationnels ».

Enfin, il s’agira aussi de « créer les conditions de la liberté d’action des chefs de corps en leur redonnant des leviers d’action concrets », grâce à la mise en œuvre d’un « plan de subsidiarité budgétaire » visant à « accroître la déconcentration des crédits et donner aux formations les capacités et moyens d’agir conformément aux responsabilités qui leur sont confiées ».

Le CEMAT britannique “se lache”

Le CEMAT britannique “se lache

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C’est à l’occasion de La Land Warfare Conference organisée par le Royal United Services Institut que le Chef d’Etat-Major de l’Armée de Terre (CEMAT) britannique est revenu en détail sur les principaux enseignements de la guerre en Ukraine et leur impact sur les forces britanniques. Cette intervention a permis au CEMAT britannique de revenir sur quelques enseignements et de dresser un tableau plutôt sombre des capacités de l’armée de terre. Bien que centrés sur les problématiques inhérentes à cette dernière, les propos du General Sanders  peuvent également être lus au-delà du Channel !

Le Général Sanders a ouvert son propos en rappelant que la notion de masse de manœuvre constituait une des leçons les plus importantes du conflit ukrainien, avant d’adresser une mise en garde appuyée à ceux qui souhaitent réduire les capacités de l’armée britannique dans ce domaine et diminuer les financements.

Pour le CEMAT britannique, le Royaume-Uni a besoin d’une capacité de combat nationale et ne doit pas se cacher derrière les armées des autre pays de l’Otan. Ces propos interviennent au moment où un débat sur sa capacité à mener de façon indépendante des opérations de haute intensité à grande échelle, anime l’armée britannique. Ce débat a été récemment relancé par la publication d’informations selon lesquelles l’Allemagne pourrait conserver pour une année supplémentaire le contrôle de la VJTF (Very High Readiness Joint Task Force) en lieu et place du Royaume-Uni prévu pour assurer cette mission à compter du 1er janvier 2024. Le secrétaire d’Etat à la Défense, Ben Wallace a démenti ces informations et a déclaré être engagé dans la prise de commandement de la VJTF en 2024. Ce dernier avait affirmé en janvier dernier que l’armée britannique était incapable de déployer une division de 10 000 prête au combat. Cette situation ne devrait pas connaitre d’amélioration en raison du format proposé par la Revue intégrée, qui fixe à 72500 les effectifs de l’armée de terre pour 2025. L’officier général a également souligné la nécessité de considérer les enseignements de la guerre en Ukraine avec toute la distance nécessaire, se demandant ce qu’il serait advenu si l’armée britannique dans les premières semaines du conflit avait décidé d’abandonner ses chars pour investir dans l’acquisition de drones tels que le TB2 Bayraktar produit par la Turquie.
A propos des équipements, le Général Sanders a déploré l’état de l’armée britannique rappelant qu’un écrasante majorité (35 sur 38) des engins en service était dépassée et inaptes à remplir les missions prévues, comparant leur utilisation à celles de téléphones à cadran dont les militaires britanniques seraient obligés de se servir à l’heure des smartphones ! Le CEMAT britannique a appelé à une accélération du renouvellement des capacités de l’armée de terre, qui devrait disposer d’un budget de 51,4 milliards d’euros destinés à l’acquisition de nouveaux équipements d’ici la fin de la décennie. Le futur Defence Command Paper dont la publication est prévue le 21 juillet pourrait permettre de réviser certains projets en cours, afin de mieux adapter les futures acquisitions aux priorités formulées à la lecture des enseignements de la guerre en Ukraine. Le Général Sanders doit quitter le service actif l’année prochaine à moins que ses propos fortement critiqués par le Gouvernement ne le contraignent à anticiper son départ. 

Dans le domaine des blindés, les difficultés de l’armée britannique en matière d’équipement restent symbolisées par le déroulement heurté et maintes fois retardé du programme Ajax ainsi que par le faible nombre de chars Challenger 2 devant être portés au standard 3 par Rheinmetall. Ce choix soulignant au passage l’absence d’industriel britannique capable de mener à bien cette opération. Les enseignements de la guerre en Ukraine pourraient modifier la situation de l’armée britannique et permettre au RAC (Royal Armoured Corps) de retrouver quelques couleurs assez rapidement. On peut faire confiance au pragmatisme britannique !

Plus de 10 000 postes seront « transformés » dans l’armée de Terre

Plus de 10 000 postes seront « transformés » dans l’armée de Terre

par – Forces opérations Blog – publié le

Le fantassin et le cavalier d’aujourd’hui sont peut-être le combattant cyber ou le télépilote de demain. D’ici la fin de la décennie, plus de 10 000 postes seront en effet « transformés » au sein de l’armée de Terre pour rééquilibrer les fonctions opérationnelles, accompagner la montée en puissance de certaines capacités et gagner en réactivité face aux nouvelles menaces. 

« L’armée de Terre est à la veille d’une évolution d’ampleur pour demeurer en action avec réactivité et puissance », annonçait le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Pierre Schill, mi-avril en audition parlementaire. Exit le modèle « Au contact », place à une « armée de Terre de combat » dont l’organisation orientée vers les fonctions opérationnelles exige notamment un rééquilibrage au sein des unités et entre unités. 

Pour parvenir à cet équilibre, 10 500 postes, soit près d’un sixième de la force opérationnelle terrestre, seront transformés. Une mutation réalisée sans réelle variation des effectifs. Si la LPM prévoit la création de 700 postes dans l’armée de Terre, le format de la force opérationnelle terrestre restera figé à 77 000 militaires. « C’est celui qui avait été acté après les attentats de 2015 et qui a vu une remontée en puissance, essentiellement, des régiments d’infanterie et de cavalerie », nous rappelait ce vendredi le cabinet du ministre des Armées. 

La transition engagée requiert dès lors un double effort, à la fois de formation et de mouvements internes. Ainsi, l’effectif du BTS cyberdéfense du lycée de Saint-Cyr-l’École, aujourd’hui d’une trentaine d’élèves, sera doublé dès la rentrée 2023, indique le CEMAT. Dans les régiments concernés, une centaine, « voire un peu plus », de militaires seront « transformés » par reconversion professionnelle ou remplacés à leur départ par de nouveaux engagés dotés de compétences spécialisées relevant de la guerre électronique, du cyber au contact, des drones.

« Dans la continuité de ce qui a déjà été initié, les régiments seront massivement équipés de drones allant des nano-drones aux drones opératifs qui seront armés, tout en étant progressivement dotés de munitions télé opérées  dont nous voyons déjà le potentiel opérationnel dans les conflits en cours », annonçait le CEMAT. Environ 3000 drones sont attendus dans l’armée de Terre à l’horizon 2025, dont 90% de nano et micro-drones et 10% de drones spécialisés. 

« Nous aurons également, dans les régiments d’infanterie, le retour des mortiers de 120 mm. C’est une chose qui avait disparu au cours des vingt dernières années », confirme l’entourage ministériel. Chaque régiment récupérera une section de mortiers lourds, de quoi permettre aux régiments d’artillerie de se concentrer sur l’intégration de nouveaux matériels, tels que les GRIFFON MEPAC perçus dès l’an prochain et munitions téléopérées (MTO) Larinae livrées à compter de 2028. 

La recherche de cohérence suppose également un meilleur ratio entre unités de mêlée et capacités de commandement, d’appui et de soutien. « Quelques soldats vont quitter les régiments d’infanterie et de cavalerie pour rejoindre le génie et l’artillerie sur des compétences nouvelles », explique le cabinet. Parce qu’il est réalisé à effectifs presque inchangés, ce renforcement des moyens de franchissement, des feux longue portée ou des moyens d’acquisition nécessitera d’aller puiser dans les forces existantes. Après avoir été rehaussés pour atteindre le millier de combattants, les régiments d’infanterie auront donc « une taille plus ramassée » tout en étant sensiblement densifiés.

Cette densification est en réalité déjà visible dans certaines unités. Il y a dix jours, le 2ème régiment étranger d’infanterie (2e REI) a ainsi dissous sa 5ème compagnie, réaffectations internes ou externes à la clef pour ses légionnaires. Certains pourront intégrer la section de reconnaissance et de renseignement créée en décembre dernier au sein de la compagnie d’appui. La même logique sera adoptée pour les futures sections de mortiers et autres unités d’appui électronique et de MTO. 

Crédits image : armée de Terre