Le commandement de l’Espace aux avant-postes de la haute intensité

Le commandement de l’Espace aux avant-postes de la haute intensité


 

Par Murielle Delaporte – Entretien avec le général de division aérienne Philippe Adam, Commandant de l’Espace

Etape charnière de sa montée en puissance, le commandement de l’Espace (CDE) s’apprête à rejoindre d’ici quelques mois un tout nouveau bâtiment localisé sur le site du Centre national d’études spatiales à Toulouse (CNES). De la même façon, la stratégie spatiale de défense de la France se trouve, elle aussi, à la croisée des chemins, alors que l’espace est aujourd’hui devenu un lieu où « la guerre est déjà présente », ainsi que l’explique le général Adam qui commande le CDE depuis l’été 2022.

Le CDE à la croisée des chemins : une bascule tant géographique qu’opérationnelle

« Même s’il est difficile de démontrer de façon tangible les progrès accomplis au cours de ces dernières années – car le défaut de l’espace est bien son manque de visibilité -, la montée en puissance du CDE est un des indicateurs de la bonne avancée de la stratégie spatiale de défense de la France, tandis que le contexte actuel pourrait être porteur d’opportunités d’accélération », commence le général Adam, qui souligne une progression importante au niveau de l’organisation interne – en particulier en matière de recrutement et de formation -, mais aussi en termes d’actions concrètes au niveau national et en coopération avec les partenaires internationaux de la France.

La bascule du CDE (à l’exception de son État-major qui demeurera à Balard) à Toulouse, actuellement en cours, est pour lui symbolique à deux niveaux :

  • Au niveau géographique, d’une part, avec la création d’un écosystème spatial complet qu’illustre le regroupement de tous les moyens du CDE en un seul endroit : c’est ainsi que, pour n’en citer que quelques-uns, le C3OS (centre de commandement et de contrôle des opérations spatiales) va quitter Paris pour devenir le C4OS (centre de calcul, de commandement et de conduite des opérations spatiales), que le CMOS (centre militaire d’observation par satellites) va déménager de Creil et que le COSMOS (centre opérationnel de surveillance militaire des objets spatiaux) a déjà quitté la base de Lyon-Mont Verdun[1],avec le transfert du système d’exploitation des données GRAVES réalisée avec succès en juin dernier[2]. Ces unités de l’armée de l’Air et de l’Espace (AAE) sont ainsi en train de rejoindre, les unes après les autres, la FA101, formation administrative 101, mise en place en 2019 comme organisme de préfiguration du CDE version 2025 et colocalisée sur le site du Centre spatial toulousain (CST) du Centre national d’études spatiales (Cnes). Se trouvent également déjà à Toulouse le laboratoire d’innovation spatiale des Armées (LISA), ainsi que le centre d’excellence spatiale (CoE) de l’OTAN officiellement accrédité en 2023[3]. La FA101 devient donc cette année la première base aérienne à vocation spatiale (BAVS) et retrouve symboliquement (dès le 2 juillet prochain) l’appellation de BA101, qui fut la toute première base aérienne française (elle fut en effet créée en 1934 à Toulouse-Francazal et sacrifiée sur l’autel des RGPP et du Plan Air 2010[4]).

 

  • Au niveau opérationnel, d’autre part, avec la capacité opérationnelle initiale (IOC pour « Initial Operational Capacity») que la Brigade aérienne des opérations spatiales (BAOS) est en passe d’atteindre cette année comme prévu : 2025 est ainsi un jalon essentiel et une année charnière avec l’installation d’un véritable système de combat intégré à Toulouse doté de 470 personnels (par rapport à 226 lors la création du CDE en 2019). Une véritable capacité de défense active dans l’espace est ainsi en train de prendre forme, l’Escadron de conduite des actions spatiales (ECAS) devant mettre en œuvre le système expérimental de protection satellitaire YODA, pour « yeux en orbite pour un démonstrateur agile », en attendant sa version opérationnelle dite Egide pour « engin géodérivant d’intervention et de découragement ».

« Beaucoup de choses vont pouvoir se faire une fois à Toulouse (…) et l’une des parties visibles de ce système d’arme est effectivement le C4OS. Ce centre est le cerveau de tout ce qui se passe, une ruche concentrant tous les efforts et assurant la coordination nécessaire pour agir au profit de la manœuvre spatiale », détaille le général Adam, pour lequel le bilan de ces presque trois ans de commandement se caractérise par un changement de logique et de perception de cette manœuvre spatiale et, plus généralement, de la présence militaire dans l’espace.

« Autrefois notre politique spatiale consistait à mettre des satellites d’observation et de communication en l’air, d’en assurer le suivi et de les entretenir. Aujourd’hui la logique est différente : nous devons assurer la protection de nos capacités spatiales contre des attaques et sommes donc entrés dans une logique où nous devons nous battre pour préserver la paix, à mesure que les activités spatiales se multiplient en nombre et en type. »

Reflet de la confirmation de cette évolution, « les questions ont beaucoup changé : il y a deux ans et demi, le grand public s’interrogeait sur le rôle des militaires dans l’espace perçu avant tout comme un milieu d’exploration scientifique et pacifique pour l’ensemble de l’humanité. Aujourd’hui, l’enjeu stratégique est bien compris et les questions portent sur la façon de procéder, avec quelles capacités et quel encadrement juridique », l’une des grosses difficultés pour mettre en œuvre une politique spatiale dite de « défense active » étant la nature intrinsèquement duale, justement, des activités spatiales.

L’espace, zone grise par excellence

« Tout dans l’espace est de plus en plus dual, car c’est l’utilisation que l’on fait des moyens et non les moyens en eux-mêmes qui détermine si l’objectif est civil ou militaire. Qu’il s’agisse de satellites militaires ou civils, les missions d’observation, communication et/ou de recherche peuvent être interchangeables – l’exemple de Starlink étant particulièrement caractéristique de cet état de fait ou encore l’emploi d’un satellite militaire d’observation en cas de catastrophe naturelle – », rappelle le Commandant de l’espace.

La frontière entre les deux domaines s’avère ainsi très difficile à différencier, tandis que l’identification d’une action hostile ou d’un agresseur dans ce qui est devenu un nouveau milieu de conflictualité à part entière s’avère très complexe. Ce milieu se prête ainsi particulièrement bien à la guerre hybride, et ce pour au moins quatre raisons :

  • Une observation télécommandée et donc difficile : « il s’agit d’un monde de drones et de robots : à part une dizaine d’astronautes, tout est télécommandé et piloté à partir de stations au sol, le souci étant que les capteurs n’observent qu’une partie du ciel. Il faut donc avoir recours à une mécanique de calculs et de simulation pour reconstituer la trajectoire de l’objet suivi ».
  • Un monde en perpétuel mouvement : ce qui rend cette observation d’autant plus difficile est le fait que « sauf pour l’orbite géostationnaire qui apparaît fixe, la représentation de la situation est très complexe, surtout à partir d’observations très parcellaires, même avec l’aide de nos partenaires».
  • Une absence de contraintes règlementaires : « à l’exception de l’interdiction de la mise sur orbite d’armes de destruction massive statuée par le Traité de 1967, tout est autorisé», les négociations visant à un encadrement juridique au sein des Nations Unies, n’ayant pour le moment rien produit, en raison de l’opposition de ceux ayant justement intérêt à ce que cette zone demeure la plus grise possible. Ainsi que le conflit en Ukraine l’a bien montré, « tout conflit de haute intensité commencera dans les zones grises telles l’espace et le cyber, dans lesquelles les agressions sont justement difficiles à caractériser et à attribuer ».
  • L’absence de frontières : « dans l’espace exo-atmosphérique, chaque utilisateur croise tout le monde, alliés autant qu’adversaires, et il n’existe pas d’espace exo-atmosphérique national.» L’espace est international par nature et c’est ce qui en limite la maîtrise. Si des parallèles sont possible avec la Haute mer, le trafic dans cette dernière est régi malgré tout par un certain nombre de règles délimitant les modes opératoires et les priorités en cas de manœuvres dangereuses.

Accroître la prévisibilité des manœuvres et des intentions est précisément la mission première du CDE et ce que le général Adam appelle de ses vœux au niveau international, à mesure que le nombre d’acteurs et de satellites ne cesse de croître exponentiellement : « pour moi ce qui compte aujourd’hui est que l’on parvienne ne serait-ce qu’à un accord incrémental, car l’augmentation du trafic – nous sommes passés d’environ 3 000 satellites il y a cinq ans à plus de 13 000 aujourd’hui – fait que l’on va se faire de plus en plus peur… ».

Alors que les systèmes automatiques anti-collisions ne sont pas encore opérationnels et que certaines prévisions font état de 30 000 voire près de 60 000 satellites à l’horizon 2030[5], il est donc indispensable de se préparer à des missions de protection devenant de plus en plus complexes, et ce en raison d’une difficulté supplémentaire que le commandant de l’Espace décrit de la façon suivante :

« Si aujourd’hui la situation est gérable grâce à un système automatique de préalerte et de tri efficace qui fait que nous devons intervenir pour modifier la trajectoire d’un de nos satellites moins de dix fois par an, l’accroissement du nombre d’objets dans l’espace, mais aussi le caractère moins prévisible des trajectoires des satellites à mesure que leur capacité de manœuvre augmente également, rendent ce type d’opérations spatiales de plus en plus délicates ».

La conjonction d’une visibilité « à plusieurs milliers de kilomètres » et d’une grande vitesse (« environ 7 km/s en orbite basse ») fait que l’opérateur ne dispose littéralement que de « quelques dixièmes de secondes pour réagir s’il ne se repose que sur un système de détection embarqué », tandis que si les manœuvres demeurent rares, nombreux sont les satellites se croisant d’« assez près »…

Les solutions actuellement mises en œuvre reposent ainsi sur deux axes majeurs :

  1. Développer l’observation spatiale et sa bonne compréhension – ce que l’on appelle en langage otanien la « Space Situational Awareness » – et donc mettre en œuvre les moyens adéquats pour ce faire.
  2. Développer l’interopérabilité interalliée par le biais d’exercices, tels AsterX – seul exercice spatial européen à caractère international dont la cinquième édition a eu lieu du 17 au 28 mars 2025[6] -, mais aussi d’autres exercices à thèmes, tels Global Sentinel, Sprint Advanced Concept Training ou encore le Schriever Wargame, lequel réunit les pays Five Eyes, ainsi que la France, l’Allemagne, le Japon, la Norvège et l’Italie. La plupart de ces exercices consistent à « s’entraîner à travailler ensemble (…). Etre interopérable au niveau équipement ne veut en effet pas forcément dire être interopérable au niveau procédures. Et ce sont surtout cette capacité technique à pouvoir échanger rapidement les données en cas de problème et les procédures à suivre (TTPs pour « Tactics, Techniques and Procedures ») mises au point ensemble que nous travaillons dans le cadre de ces exercices.» Cette connaissance mutuelle permet également de mener des opérations conjointes telles Olympic Defender (OOD), une opération multinationale permanente créée en 2013 par StratCom aux Etats-Unis pour protéger la liberté d’accès et d’action dans l’espace et qu’a rejointe la France en octobre dernier[7].

L’inclusion depuis juillet 2024 pour la première fois d’un officier étranger au sein du commandement de l’espace américain, en l’occurrence le général de corps aérien Paul Godfrey, ancien commandant de l’Espace au Royaume Uni, en vue de l’élaboration d’une nouvelle stratégie de partenariat international illustre cette volonté et conscience communes au sein des alliés de pouvoir s’appuyer les uns sur les autres. L’espace est par nature international et par essence « Allied by Design »[8], ne serait-ce qu’en raison de la capacité d’observation partielle inhérente à la nature du milieu qui nécessite de pouvoir se relayer et s’entraider entre alliés. Pour le général Adam, cette nouvelle étape vers une coopération internationale accrue est la « reconnaissance formelle que dans l’espace, on n’est jamais seuls et que pour faire quelque chose d’efficace, il faut le faire avec ses partenaires… »

 

 

De l’appui spatial aux opérations aux opérations spatiales per se : le CDE, sentinelle de la haute intensité ?

L’espace est similaire aux autres milieux, en ce sens qu’une interpellation en cas d’action hostile va se dérouler de la même façon. Celle-ci va consister à essayer de « savoir qui est l’auteur des anomalies remarquées, puis quelles sont les intentions derrière ces dernières. C’est l’objectif de la défense active que d’organiser ce jeu de piste pour aboutir à une éventuelle levée de doute. Nous avons la capacité de le faire, mais c’est plus difficile techniquement, car c’est plus loin et que se rendre sur place est bien-sûr plus complexe », explique le général Adam. Une telle surveillance spatiale est cruciale pour que le CDE puisse accomplir la double-mission qui est la sienne, à savoir d’une part assurer un appui permanent aux autres armées et milieux en fournissant données et moyens de communication et d’autre part être en mesure de se protéger et de combattre dans l’espace.

Les exercices d’entraînement et dialogues au sol ont pour objectif de mettre en relation les méthodes de recherche et d’action avec les autres partenaires, mais aussi de plus en plus avec les autres milieux dans une approche multi-milieux, multi-champs (M2MC) caractéristique des menaces actuelles. C’est ce qui est fait depuis Orion 2023 dans les différents exercices AsterX et le sera pendant Orion 2026, mais aussi au travers de missions et d’exercices au sein desquels le CDE est présent à part entière : « nous participons par exemple à la mission Clémenceau25 dans la région indopacifique et fournissons à la Marine des moyens d’appui au quotidien. Nous apprenons les uns des autres et notre réactivité – en conjonction avec nos partenaires en interarmées, interalliés, mais aussi interministériel – constitue en elle-même un facteur de dissuasion pour décourager un éventuel adversaire. » Que ce soit en vue de l’appui aux opérations ou pour faire face aux effets d’actions réalisées dans – et par -d’autres milieux, la gestion de l’escalade en haute intensité commence ainsi par la capacité de réaction du CDE.

Il existe ainsi une véritable continuité entre le « milieu Air » et le « milieu Espace ». Jouissant d’un  « ADN commun – les premiers astronautes étant de fait, et dans tous les pays, issus de l’armée de l’Air – », et partageant « le même esprit pionnier », les frontières d’action entre les deux milieux sont bien définies, ne serait-ce qu’en raison des différences de mécaniques de vol : orbitale dans l’espace, celle-ci est aérobie en dessous d’une ligne située à cent kilomètres d’altitude, laquelle englobe donc la zone dite THA pour « Très Haute Altitude », une zone qui « a beaucoup d’affinités avec l’espace aérien ». Il est donc logique, comme le souligne le général Adam, que l’on « étende plutôt les concepts aériens vers la THA et non l’inverse ».

Ce qui fait que l’Espace s’avère cependant un milieu particulier – en plus de l’absence de frontières et des différences de mécaniques de vol déjà évoquées – relève de la permanence de ses missions, puisque les moyens déployés sont constamment en vol, comme le rappelle le général Adam : « le CDE est en permanence en opération, car il est bien-sûr impossible de faire redescendre nos capacités une fois celles-ci en l’air. »

Cette caractéristique, associée à la nature hybride des conflits et menaces spatiales émergentes, fait que l’Espace se situe de facto – et de façon croissante – aux avant- postes de la menace, le commandement de l’Espace jouant le rôle de sentinelle de la haute intensité.


Notes & références : 

[1] Voir par exemple sur ce sujet :

[2]Ainsi que l’expliquait le ministère des Armées en juin dernier, « le radar GRAVES permet la veille des objets en orbite basse, de 200 à 2000 km. Ce démonstrateur ONERA, livré à l’Armée de l’air en 1994, est réparti sur 3 sites : le centre émission près de Dijon, le centre réception près d’Orange, et le centre d’exploitation désormais à Toulouse. Les deux rénovations majeures qu’a connues le système lui permettent, 24h/24, 7j/7, de détecter et de déterminer les orbites des satellites qui traversent sa zone de couverture. » (Voir : https://www.defense.gouv.fr/cde/actualites/donnees-graves-sont-desormais-exploitees-toulouse« )

[3] Voir sur ce sujet >>> https://www.defense.gouv.fr/air/actualites/lotan-lance-son-nouveau-centre-dexcellence-dedie-au-spatial

[4]https://www.opex360.com/2024/07/28/larmee-de-lair-et-de-lespace-va-creer-une-base-aerienne-a-vocation-spatiale-a-toulouse/ ; https://www.defense.gouv.fr/actualites/il-y-cinq-ans-france-lancait-son-commandement-lespace

[5] Voir par exemple sur ce sujet >>>

[6]Voir :

[7]Voir :

[8]https://breakingdefense.com/2024/12/new-space-force-international-partnership-strategy-coming-next-year/

 

Photo 1 : Le général Adam pendant l’exercice AsterX 2023 © https://www.defense.gouv.fr/actualites/general-adam-commandant-lespace-france-est-prete-se-defendre-orbite

Photo 2 : AsterX 2025 © AAE

Mystère résolu : les scientifiques confirment ce que cache l’intérieur de la Lune

Mystère résolu : les scientifiques confirment ce que cache l’intérieur de la Lune

Les profondeurs de la Lune ne sont plus un mystère. Des chercheurs viennent de confirmer la composition du cœur lunaire, révélant des similitudes inattendues avec notre propre planète. Ces découvertes apportent un éclairage nouveau sur l’histoire et l’évolution du Système solaire.

Par Laurène Meghe – armees.com –  Publié le 7 septembre 2024

Mystere Resolu Les Scientifiques Confirment Ce Que Cache Linterieur De La Lune
Mystère résolu : les scientifiques confirment ce que cache l’intérieur de la Lune – © Armees.com

 

La Lune, cet astre familier qui éclaire nos nuits, cache encore bien des secrets sous sa surface grise et criblée de cratères. Mais une nouvelle étude vient de lever le voile sur l’un de ses mystères les plus profonds : la composition de son cœur. Grâce à des données récentes et des techniques de modélisation avancées, des scientifiques ont confirmé que le cœur de la Lune ressemble étonnamment à celui de la Terre, avec un noyau solide entouré d’une couche fluide.

En bref :

  • Noyau lunaire : Le cœur de la Lune est constitué d’un noyau interne solide d’environ 258 kilomètres de rayon et d’un noyau externe fluide, similaire à celui de la Terre.
  • Densité du noyau : Le noyau interne présente une densité proche de celle du fer, renforçant les hypothèses sur la composition métallique de la Lune.
  • Méthodes de recherche : Les scientifiques ont utilisé des données sismiques des missions Apollo et des expériences de télémétrie laser pour modéliser la structure interne de la Lune.
  • Impact sur le champ magnétique : La composition du noyau explique en partie la disparition du champ magnétique lunaire il y a 3,2 milliards d’années.
  • Implications pour le Système solaire : Ces résultats aident à comprendre les processus de formation et d’évolution de la Lune et des autres corps célestes du Système solaire.

Mystere Resolu Les Scientifiques Confirment Ce Que Cache Linterieur De La Lune 2

Un cœur solide, presque aussi dense que le fer

Les chercheurs, menés par Arthur Briaud du Centre national de la recherche scientifique en France, ont découvert que le noyau interne de la Lune est une boule solide d’environ 258 kilomètres de rayon, soit environ 15 % du rayon total de la Lune. Sa densité, proche de celle du fer (environ 7 822 kilogrammes par mètre cube), confirme les hypothèses formulées par les études antérieures, notamment celles menées par la NASA en 2011. Cette nouvelle découverte met fin à un long débat sur la nature du noyau lunaire et ouvre de nouvelles perspectives sur l’histoire et l’évolution de notre satellite.

Une structure interne complexe révélée par des ondes sismiques

Pour percer les mystères de l’intérieur de la Lune, les scientifiques se sont appuyés sur des données sismiques recueillies par les missions Apollo, ainsi que sur des expériences de télémétrie laser lunaire. En analysant la manière dont les ondes sismiques traversent les différentes couches de la Lune, ils ont pu modéliser sa structure interne avec une précision inédite. Le résultat ? Un modèle montrant un noyau interne solide entouré d’une couche externe fluide, similaire à celui de la Terre, mais avec une dynamique unique qui pourrait expliquer l’évolution du champ magnétique lunaire disparu il y a environ 3,2 milliards d’années.

Des implications pour comprendre l’histoire du Système solaire

Cette découverte ne se limite pas à la Lune. Elle apporte également des éléments cruciaux pour comprendre l’évolution du Système solaire. Le noyau solide et le phénomène de « retournement du manteau », où les matériaux plus denses se déplacent vers le centre tandis que les matériaux plus légers remontent, pourraient avoir joué un rôle clé dans l’histoire des bombardements météoritiques intenses durant le premier milliard d’années du Système solaire. Cela pourrait également expliquer la présence de certains éléments dans les régions volcaniques de la Lune.

Un avenir prometteur pour l’exploration lunaire

Avec la confirmation de la structure interne de la Lune, l’exploration lunaire entre dans une nouvelle ère. Des missions à venir, telles que celles planifiées par la NASA avec Artemis II ou par des entreprises privées, pourraient fournir des données encore plus détaillées sur le cœur de notre satellite. De nouveaux séismomètres et instruments de mesure permettront de vérifier ces découvertes sur place, renforçant ainsi notre compréhension de la Lune et, par extension, de la Terre et de ses propres origines.

En attendant, le mystère du cœur de la Lune, autrefois réservé aux spéculations, est désormais une histoire solidement ancrée dans la réalité scientifique.

Source : https://www.nature.com/articles/s41586-023-05935-7


Laurène Meghe

Rédactrice spécialisée en économie et défense armées. Je couvre également les domaines des enjeux industriels et politique, y compris les relations entre les entreprises et leurs partenaires financiers.

Pour prévenir la “guerre spatiale”, le Royaume-Uni prévoit de déployer un réseau de radars capable de surveiller l’activité dans l’espace

Pour prévenir la “guerre spatiale”, le Royaume-Uni prévoit de déployer un réseau de radars capable de surveiller l’activité dans l’espace

Par Antoine Ducarre – Science et vie – Publié le 8 août 2024

design sans titre - 2024-08-08t101337.049


La guerre de demain se passera vraisemblablement dans l’espace. Ou du moins elle pourrait en être originaire. C’est en tout cas ce que croit le Royaume-Uni qui a récemment décidé de faire construire, au Pays de Galles, un champ de 27 antennes radar dirigées vers l’espace lointain. Avec pour but de repérer les potentielles menaces qui pourraient s’abattre sur le pays ou sur des installations spatiales anglaises. 

Des antennes capables de traquer de tous petits objets dans l’espace

La guerre est l’occasion pour les pays de démontrer leur savoir faire quant à la mise en place de certaines technologies militaires. Ainsi, il n’est plus forcément question d’afficher des équipements gigantesques, criants et donc repérables à des kilomètres. Non, la tendance serait en revanche à la miniaturisation, comme on peut le voir avec les drones par exemple. 

Eh bien face à des petits objets pouvant provenir de l’espace lointain, le Deep Space Advanced Radar Capability (Darc), le réseau de 27 antennes, serait en mesure de repérer et de traquer des objets de la taille d’un ballon de football. 

Et ce, à des distances très éloignées. En effet, le quotidien britannique The Guardian fait état de la possibilité de surveiller de tels petits objets, mais aussi des biens plus gros depuis l’orbite géostationnaire de la Terre soit à 36 000 kilomètres. 

Ce réseau d’antennes prend place dans le cadre du partenariat international AUKUS entre l’Australie (A), le Royaume-Uni (UK) et les États-Unis (US) qui était décrit en décembre 2023 comme un moyen de protection contre la “guerre spatiale” d’après John Healey, secrétaire de la Défense (Ministre de la Défense en France)

Nous avons besoin de plus d’yeux rivés sur le ciel

Bien que le projet d’installation de 27 antennes radar dans le Pembrokeshire au Sud-Ouest du Pays de Galles fasse des mécontents parmi la population locale, il est soutenu par le gouvernement et par des universitaires. 

Pour défendre son projet, John Healey parle du rôle important que tient l’espace dans le quotidien des anglais, mais aussi de l’importance de l’intégrer dans un programme de défense spatiale. 

L’espace est utilisé partout, de nos téléphones portables aux services bancaires. Il est aussi utilisé par la défense britannique pour effectuer des tâches vitales telles que le soutien des opérations militaires, la navigation des forces et la collecte de renseignements.” peut-on lire dans The Guardian

De son côté, le docteur Mark Hilborne du King’s College London et appartenant au Department of Defence Studies (Département des études de défense), prône le fait qu’une menace spatiale pèse sur le monde et qu’il faut que le Royaume-Uni soit prêt à y répondre. 

L’augmentation de l’activité militaire et de la belligérance dans l’espace suscite des inquiétudes. Nous avons besoin de plus d’yeux rivés vers le ciel.” rapporte The Guardian

60 000 satellites en orbite en 2030

L’une des raisons qui pousse également le Royaume-Uni à se doter rapidement d’un système de repérage dans l’espace lointain, c’est le nombre croissant de satellites en orbite terrestre. 

En effet, en se basant sur un rapport du gouvernement publié le 16 mai 2024, on apprend que le nombre de satellites actifs dans l’espace va vivre une explosion. Si en 2020, il y avait 3256 satellites en orbite, en avril 2024, on en comptait plus de 9000. D’après les estimations, à l’horizon 2030, le nombre de satellites actifs pour être multiplié par plus de 6 et atteindre les 60 000. 

Et savez-vous à qui appartiennent plus de 6000 satellites sur tous ceux présents actuellement en orbite ? Elon Musk, enfin à son entreprise Starlink plus précisément, d’après Ouest France. Le milliardaire tient à honorer sa promesse de délivrer un internet mondial haut débit partout dans le monde. Cela demande donc beaucoup d’appareils en orbite terrestre. 

Source : The Guardian

Intérêt commercial, nécessité stratégique… Pourquoi l’Europe a besoin d’Ariane 6

Intérêt commercial, nécessité stratégique… Pourquoi l’Europe a besoin d’Ariane 6

                                                                        Fusée spatiale EADS Ariane, Le Bourget – France
                                                                            Credits: Alexandra Lande/Shutterstock

par Paul Wohrer, cité par Manon Minaca – IFRI- dans 20 Minutes

https://www.ifri.org/fr/espace-media/lifri-medias/interet-commercial-necessite-strategique-leurope-besoin-dariane-6


L’Europe sur orbite : le nouveau lanceur européen, qui doit décoller pour la première fois ce mardi soir, doit permettre à l’Europe de retrouver un accès indépendant à l’espace, une capacité aux enjeux multiples.

20minutes-blue-512.png

«Nous sommes en train de marquer une page importante de l’histoire de l’accès à l’espace. » C’est par ces mots que Carine Leveau, directrice du transport spatial au Cnes, résumait, en conférence de presse le 25 juin, les semaines précédant le lancement d’Ariane 6, prévu ce mardi. Un vol historique très attendu après dix ans de travail, mais aussi et surtout au regard des enjeux commerciaux et stratégiques de cette nouvelle fusée pour l’Agence spatiale européenne (ESA).

Sur le plan commercial, Ariane 6 prend la relève de sa sœur Ariane 5, qui a volé pour la dernière fois il y a un an, en juillet 2023. En service depuis son premier vol opérationnel en 1997, la dernière fusée européenne « était arrivée au bout de ses capacités », « avec une chaîne de production qui vieillissait beaucoup », explique Pier Domenico Resta, responsable de l’ingénierie du système de lancement d’Ariane 6 à l’ESA. Le lanceur, avec ses « contraintes », « n’aurait pas [non plus] satisfait les besoins de constellations [de satellites] qui se développent aujourd’hui ».

[…]

Retrouver un accès indépendant à l’espace

Mais, surtout, Ariane 6 permet à l’Europe de disposer d’un accès indépendant à l’espace, car celle-ci « restait sans lanceur de la classe d’Ariane 5 » depuis son dernier vol. Mais aussi et surtout depuis la fin brutale du partenariat avec la Russie, qui assurait certains lancements européens depuis la Guyane française avec sa fusée Soyouz, après l’invasion de l’Ukraine en février 2022.
 

Une situation de dépendance qui a laissé l’Europe, « pendant une petite année, sans capacité de lancer des satellites, notamment certains satellites militaires ou institutionnels », et qui a « vraiment freiné le programme spatial européen », appuie Paul Wohrer, chercheur à l’Institut français des relations internationales spécialiste de la géopolitique et des stratégies des puissances spatiales.

Et, « quand on n’a plus de porte d’entrée dans l’espace », poursuit le chercheur, les risques sont grands : « On risque de se soumettre soit aux conditions [d’utilisation des satellites] d’une autre puissance, soit éventuellement à ses prix. » Être capable de fabriquer des fusées, de les lancer et de décider du calendrier « en toute souveraineté » est donc « fondamental pour l’Europe aujourd’hui ».

 

L’espace toujours plus stratégique
 

D’autant que les capacités spatiales sont stratégiques, car « absolument essentielles pour garantir le bon fonctionnement de la société et de la vie civile », complète Paul Wohrer. C’est notamment le cas de la constellation de satellites Galileo, le « GPS européen », en cours de déploiement : « On peut utiliser le GPS américain, mais c’est une infrastructure militaire par nature, gérée par les militaires américains, et dont l’Europe n’a jamais eu envie de dépendre », précise le chercheur.

 

« Comment définir ça autrement qu’un intérêt stratégique ? » confirme Pier Domenico Resta. Il en va de même pour le programme d’observation de la Terre de la Commission européenne, Copernicus, utilisé entre autres dans l’agriculture, la gestion des forêts ou des catastrophes naturelles ou l’urbanisme, ainsi que pour la météorologie, « indispensable à de très nombreuses activités », expose Paul Wohrer.

Entretenir le prestige

Plus stratégique encore, disposer d’un accès indépendant à l’espace est primordial pour ce qu’on pourrait appeler le « service public de la sécurité et de la défense », développe le chercheur, « puisque les activités militaires et de sécurité utilisent énormément les informations fournies par les satellites ». Sans oublier que tout ce qui peut être utilisé pour des fonctions civiles peut généralement l’être pour des fonctions militaires : « On peut observer la Terre pour suivre le climat, mais on peut aussi observer ses adversaires. On peut guider sa voiture pour éviter les embouteillages, mais on peut aussi guider des missiles, des bombes intelligentes vers leur cible. En ce qui concerne la communication par satellites, c’est typiquement la télévision, même si c’est un modèle économique en déclin, mais ça marche aussi pour faire ce qu’on appelle du “commande et contrôle” des troupes au sol. »

Enfin, dans une logique de coopération, une fusée comme Ariane 6 et les capacités de lancement qui lui sont associées « favorisent les rapprochements avec les alliés, évoque Paul Wohrer. Ça nous permet, notamment dans le cadre du programme [de retour sur la Lune] Artemis, de fournir des capacités qui sont importantes, et donc d’avoir une coopération continue avec les Américains de très haut niveau ».

Écartant toute idée de concurrence avec les États-Unis, notamment avec SpaceX, Pier Domenico Resta confirme : « Rivaliser avec des acteurs non-européens est très utile pour l’ESA, pour pouvoir proposer des projets de coopération avec d’autres agences comme la Jaxa [l’agence spatiale japonaise]. »

De quoi favoriser, selon Paul Wohrer, « le prestige » de l’Europe, et « montrer que son modèle fonctionne ». Rien que ça… Ariane 6 a le poids du Vieux Continent sur les boosters.

> Voir l’article sur le site de 20 Minutes

Pour protéger Ariane 6, l’armée française déploie des avions de combat Rafale

Pour protéger Ariane 6, l’armée française déploie des avions de combat Rafale

Prêts à faire feu

Le vol inaugural d’Ariane 6, prévu le 9 juillet, va bénéficier d’une protection militaire accrue. L’opération Titan que l’armée française déploie en Guyane a été renforcée par trois avions de chasse Rafale. Un déploiement exceptionnel.

À décollage exceptionnel, dispositif exceptionnel. La France va accueillir le vol inaugural de la fusée Ariane 6 le 9 juillet 2024. Pour cette grande première, qui aura lieu en Guyane, une protection militaire renforcée est déployée près de Kourou, avec de sécuriser davantage le port spatial européen. Et cela inclut la présence d’avions de chasse, entre autres.

En l’espèce, ce sont trois chasseurs Rafale qui sont sur zone depuis le 1er juillet, avec l’appui d’un avion ravitailleur A330 Phénix MRTT — nécessaire pour assurer la traversée de l’océan Atlantique et les quelque 7 000 km qui séparent la métropole de la Guyane. Les avions Rafale pourront être armés si jamais une menace concrète se manifestait.

Rafale
Source : Bernardo Fernandez copado

Une bulle de protection militaire au profit du port spatial européen

Le centre spatial bénéficie tout au long de l’année d’une protection de l’armée française, qui inclut un radar d’une portée de 470 km. Cela permet de couvrir toute la superficie de la Guyane française, mais aussi une très large partie du Suriname (un pays limitrophe) et de suivre ce qui se passe du côté du Brésil, également frontalier.

Ce radar, qui est en place depuis 2015 et qui remplace un vieux modèle, est utilisé dans le cadre de l’opération Titan, nom donné à la mission menée par les forces armées pour protéger le site. En général, cela mobilise des unités au sol (notamment des légionnaires) et des navires de faible tonnage — une vedette et un patrouilleur.

Pour la partie aérienne, ce sont des hélicoptères (Puma, Fennec) qui sont mis en œuvre, avec des tireurs à bord pour pouvoir intercepter d’éventuels hélicoptères, avions de tourisme, drones ou ULM. Les avions de chasse, eux, n’interviennent que pour les missions jugées très sensibles. C’était le cas en 2018, par exemple, pour sécuriser un satellite militaire.

Les nouvelles ambitions spatiales de l’OTAN Briefings de l’Ifri, 4 avril 2024

Les nouvelles ambitions spatiales de l’OTAN Briefings de l’Ifri, 4 avril 2024

 

Emblème de l’OTAN – Credits: TSV-art/shutterstock

par Brigitte Hainaut – IFRI – publié le 5 avril 2024

https://www.ifri.org/fr/publications/briefings-de-lifri/nouvelles-ambitions-spatiales-de-lotan


Avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, une cyberattaque dévastatrice cible les communications de l’armée ukrainienne, exposant la dépendance et la vulnérabilité occidentales aux technologies spatiales, et remettant en question la posture défensive de l’OTAN.

La pérennité de l’organisation, qui célèbre en 2024 ses 75 années d’existence, tient en partie de sa capacité à s’adapter au contexte international. La guerre en Ukraine a sans aucun doute renforcé sa légitimité et son attractivité.

L’utilisation massive des applications spatiales en Ukraine pose la question du rôle de l’Alliance atlantique dans la mise à disposition de données et de services spatiaux à ses États membres : elle ne dispose pas de capacités spatiales en propre, mais sa posture de dissuasion inclut l’espace.

En se dotant d’un solide corpus documentaire, de centres dédiés à l’espace et d’un accès à des capacités nationales, l’Alliance cherche à mettre en œuvre sa vision de l’espace comme milieu d’opérations.

Le milieu d’opérations vise l’intégration et l’interopérabilité des moyens spatiaux des différents États membres. Pour le moment, il s’agit essentiellement de capacités américaines.

L’ambition spatiale otanienne pose alors aux États la question de la mobilisation de moyens financiers et humains. Par ailleurs, une coopération plus approfondie entre l’OTAN et l’UE permettrait a priori de mutualiser les efforts.

Lier et télécharger – Les nouvelles ambitions spatiales de l’OTAN : IFRI_Hainaut_ambitions_spatiales_otan_2024

SpaceX lance un drone spatial militaire pour une mission “top secret”

SpaceX lance un drone spatial militaire pour une mission “top secret”

La méga fusée Falcon Heavy de SpaceX a lancé avec succès le drone spatial militaire américain X-37B dans la nuit de jeudi à vendredi. La mystérieuse navette, mise en service en 2010, est en route pour sa septième mission “top secret”.

Le drone spatial X-37B lors de son atterrissage au Kennedy Space Center de Cap Canaveral (Floride), `a l’issue de sa 4e mission, le 7 mai 2017. (U.S. Air Force/Handout via REUTERS)
Le drone spatial X-37B lors de son atterrissage au Kennedy Space Center de Cap Canaveral (Floride), `a l’issue de sa 4e mission, le 7 mai 2017. (U.S. Air Force/Handout via REUTERS) Handout . / REUTERS

Ressemblant à une navette spatiale miniature de la Nasa, le X-37B est un drone réutilisable et entièrement autonome de neuf mètres de long et 4,5 mètres d’envergure, alimenté en énergie par des panneaux solaires.

On sait fort peu de choses sur ses recherches passées – si ce n’est quelques expériences sur le transport de l’énergie solaire ou l’étude de l’effet des radiations sur les graines – “et cette mission s’annonce encore plus mystérieuse que les précédentes”, prévient la chaîne américaine.

Le Pentagone est en effet resté très vague sur la septième mission de son drone spatial, évoquant en des termes vagues “l’expérimentation de technologies d’avenir sur la connaissance du domaine spatial et l’étude des effets des radiations sur des matériaux fournis par la Nasa”.

Mais son lancement via le Falcon Heavy – l’une des plus puissantes en activité – “pourrait indiquer que le X-37B est destiné à des orbites plus lointaines”, comme “la Lune ou Mars”, suggère CNN. Le X-37B a effectué son premier vol en 2010 et a passé plus de dix ans dans l’espace au cours de ses six premières missions – la sixième s’étant achevée en novembre 2022.

La Chine, que le gouvernement américain considère comme son principal concurrent dans la course à l’espace moderne, a lancé son propre drone spatial le 14 décembre dernier, précise la chaîne américaine. Les informations sur l’engin chinois sont encore plus rares, mais “certains observateurs pensent qu’il s’agit d’une copie conforme du X-37B”.

Les forces françaises auront-elles bientôt la capacité d’aveugler les satellites adverses avec des lasers?

Les forces françaises auront-elles bientôt la capacité d’aveugler les satellites adverses avec des lasers?

 

https://www.opex360.com/2023/02/06/les-forces-francaises-auront-elles-bientot-la-capacite-daveugler-les-satellites-adverses-avec-des-lasers/


 

« Les lasers peuvent également être une arme de guerre spatiale opérée depuis les bateaux : ils peuvent ainsi aveugler des satellites d’observation pour assurer la dissimulation de forces navales en situation de conflit », avait-il en effet développé lors d’une audition parlementaire.

Une telle capacité pourrait effectivement avoir un intérêt pour une opération aéronavale ou amphibie, ce qui éviterait, par exemple, de calculer l’heure des raids ou d’un débarquement en fonction des fauchées des satellites, ce qui complique évidemment la tâche.

Visiblement, la Direction générale de l’armement [DGA] y travaille, comme l’a indiqué Emmanuel Chiva, son patron, à l’occasion d’une audition au Sénat [le compte-rendu vient d’être rendu public].

« Nous avons […] prévu ce que nous pouvons appeler de grands démonstrateurs signaux, consistant en des capacités au sol d’illumination laser de satellites adverses. », a en effet confié le Délégué général pour l’armement [DGA]. « Je pense que nous n’en sommes pas très loin », a-t-il précisé.

Cela étant, la DGA ne part pas d’une feuille blanche en la matière, notamment grâce aux travaux de l’Office national d’études et de recherches aérospatiales [ONERA] qui, dans les années 1990, mena des « essais grandeur nature de neutralisation de satellites en fin contractuelle de vie opérationnelle », ce qui lui permit de recueillir des données, en particulier sur les niveaux d’énergie nécessaires.

« Nous travaillons sur une technologie dite d’optique adaptative. L’effet recherché n’est pas de détruire l’objet, mais de l’empêcher d’effectuer sa mission. En concentrant l’énergie sur la cible, on pourrait endommager les panneaux solaires d’un satellite ennemi, ou pénétrer par ses fenêtres optiques et l’éblouir », avait par ailleurs expliqué un responsable de l’ONERA dans les pages de l’hebdomadaire Challenges, en 2019.

Par ailleurs, et compte-tenu du risque d’interception des communications par satellite, la DGA conduit également le projet Keraunos, dont l’objectif est d’expérimenter une liaison de communication optique, à base de laser haut débit, entre un nano-satellite en orbite basse et une station sol sur Terre.

« Les liaisons laser sont, par définition, difficiles à intercepter et parce qu’avec ce type de technologie, la station au sol pourra être mobile et embarquée dans un véhicule. Cela nous donne des capacités considérables, résilientes à un certain nombre d’actions que pourraient tenter nos compétiteurs », a expliqué M. Chiva, en évoquant ce projet sans le nommer.

Reste à voir l’effort qui sera consenti en faveur des capacités spatiales dans le cadre de la prochaine Loi de programmation militaire. Celle qui est encore en cours avait prévu un investissement de 4 milliards d’euros, afin de renouveler une partie des capacités des forces françaises.

« L’enjeu de la prochaine LPM sera de confirmer cet effort dans la durée et de garantir une cohérence dans les différents programmes, puisque beaucoup ont un lien avec le domaine du spatial », a seulement dit M. Chiva… Mais au moment de son audition par les sénateurs, tous les grands arbitrages n’avaient pas encore été rendus.

Doctrine spatiale française : pas de tirs antisatellites mais plus d’« ambiguïté stratégique » ?

Doctrine spatiale française : pas de tirs antisatellites mais plus d’« ambiguïté stratégique » ?

Débris de satellite autour de la Terre, vue d'artiste
La destruction d’un satellite situé en orbite provoque de nombreux débris. C’est l’une des raisons invoquées par la France pour expliquer sa décision de ne pas procéder à des tirs anti-satellites. Frame Stock Footage/Shutterstock

Fin novembre 2022, le ministère des Armées s’est formellement engagé à ne pas conduire de tirs de missiles antisatellites.

Pourtant, la stratégie spatiale française de 2019 ne s’interdit pas de « durcir » les capacités d’action de la France dans l’espace.

À trois ans d’intervalle, la posture spatiale militaire française se contredit-elle ?

Une décision aussi historique que surprenante ?

Après avoir coparrainé la résolution A/C.1/77/L.62 (adoptée par la première Commission de l’Assemblée générale des Nations unies en octobre 2022), la France joint la parole aux actes et s’est engagée à ne pas procéder à des tirs de missiles antisatellites destructifs à ascension directe, c’est-à-dire tirés depuis la surface ou les airs. La France n’a jamais formellement disposé d’une telle capacité, même si elle possède l’expertise technique nécessaire pour la développer.

Le communiqué français, publié le 29 novembre 2022, utilise des éléments de langage forts. Il qualifie de tels tirs de « déstabilisateurs et irresponsables », rappelle que la France n’en a jamais effectué, et s’alarme des risques de débris spatiaux et des conséquences pour l’intégrité des satellites en activité et de l’ensemble du domaine spatial. La décision française suit celle des États-Unis adoptée le 9 avril 2022. La France avait d’ailleurs salué l’engagement américain.

La détermination du ministère des Armées est d’autant plus historique que la France est l’un des rares pays à avoir développé une « triade stratégique » comprenant missiles intercontinentaux, arme atomique et capacités aérospatiales. Son programme balistique se poursuit notamment dans le cadre du renouvellement de la dissuasion nucléaire, de la modernisation du missile balistique mer-sol M51 d’Ariane Group, et du développement du missile air-sol nucléaire de 4ᵉ génération (ASN4G) et d’un planeur hypersonique V-Max. Cet effort de modernisation, même s’il n’est pas directement lié à la question de la destruction des satellites, témoigne néanmoins de l’importance portée au développement des capacités balistiques françaises.

En parallèle, le programme Syracuse est destiné à doter les armées de satellites militaires de nouvelle génération pour leur permettre de communiquer à haut débit depuis n’importe quel relais (terrestre, aérien, marin et sous-marin). Ces satellites sont d’ailleurs équipés de moyens de surveillance de leur environnement immédiat (leur permettant de se déplacer pour éviter toute attaque). Avec les satellites CSO et CERES, ils représentent les yeux, oreilles, et porte-voix de la Défense française dans et depuis l’espace et seront suivis des programmes « Céleste » (renseignement d’origine électromagnétique) et « Iris » (capacités d’observation optique) (dont le lancement est contrarié par la guerre en Ukraine, les retards d’Ariane 6, et le Covid-19).

L’espace extra-atmosphérique figure enfin et surtout dans les chantiers consacrés comme prioritaires par Emmanuel Macron le 9 novembre 2022 en vue de la prochaine Loi de Programmation militaire 2024-2030.

Dans ce contexte, il était possible d’envisager que la France développe un jour ou l’autre un missile antisatellite (par exemple, une version lourde et très haute altitude du missile antibalistique Aster 30 ?) et procède à un « tir de démonstration » sur un ancien satellite non fonctionnel (et dans une orbite limitant l’impact des débris).

Les tirs antisatellites ont en effet ponctué l’histoire spatiale et sont de forts marqueurs de puissance militaire. La Secure World Foundation recense d’ailleurs plus de 70 tests antisatellites depuis 1959, dont plus de 20 tirs depuis 2005. Les plus importants incluent le tir chinois de janvier 2007, la réponse américaine de février 2008, le tir indien de mars 2019, et le tir russe de novembre 2021 (dont la NASA rappelle dans un point presse du 24 octobre 2022 qu’il est toujours à l’origine de manœuvres d’évitement de débris de la station spatiale internationale).

Un essai de missile anti-satellite russe met en danger l’équipage de l’ISS • France 24, 16 novembre 2021.

 

Notons d’ailleurs que la décision américaine constitue elle-même un revirement par rapport au renouveau nationaliste spatial américain d’après-guerre froide et la création de l’U.S. Space Force en 2020 sous les forts accents offensifs de Donald Trump.

Bien que la tendance d’ensemble des dernières décennies ait été à la recherche de normes de comportement dans l’espace (ce à quoi la France participe activement), cette recherche ne va pas de soi. L’histoire spatiale est en effet caractérisée par une alternance entre vision militariste et « retenue stratégique », et le « nouvel âge spatial », malgré son ouverture grandissante aux acteurs privés et aux logiques de commercialisation, reste marqué par la dimension militaire.

« Affermir » la doctrine spatiale française : vers une approche plus offensive ?

La France a connu une forte montée en puissance du spatial de défense, voire un véritable sursaut sous le premier quinquennat d’Emmanuel Macron et le mandat de la ministre des Armées Florence Parly.

La création du Commandement de l’Espace en septembre 2019, concomitante de l’élaboration d’une doctrine spatiale de défense, a représenté un point d’inflexion (qui sera suivi de la transformation de l’Armée de l’Air française en « Armée de l’Air et de l’Espace » en septembre 2020). Des députés avaient alors appelé à allier « défensif » et « offensif », usant d’une dichotomie qui n’en finit plus de caractériser les activités spatiales sur fond d’« astroculture ». À la croisée des chemins entre science-fiction et realpolitik, la technologie militaire (et les visions de puissance qu’elle porte) demeure indissociable de la « modernité spatiale » et façonne notre rapport à l’espace.

Maîtriser l’espace, le nouveau défi des armées, Ministère des Armées, 25 mai 2021.

Il est vrai que la stratégie spatiale française présente néanmoins le souci de la mesure et du respect du droit international. Elle affirme clairement comme buts premiers l’appui aux opérations et la protection des moyens spatiaux français pour « décourager nos adversaires d’y porter atteinte » (p. 4). Elle considère donc l’espace avant tout comme un « multiplicateur de force » adossé aux autres champs (et non pas distinct d’eux) et souligne l’enjeu de la surveillance spatiale.

Comment protéger les satellites français ?

Cependant, si l’on poursuit le raisonnement, développer des capacités de protection nécessite deux éléments : une capacité d’action technique et un cadre d’emploi.

Du point de vue technique d’abord, à l’image des États-Unis, de la Russie, ou de la Chine, la France développe elle aussi les technologies à énergie dirigée afin d’aveugler ou de « brûler » des éléments critiques de satellites hostiles. En juin 2019, dans la revue Challenges, l’Office national d’Études et de Recherches aérospatiales (ONERA) explique travailler sur de futures armes laser antisatellites. Dans une note de mai 2019, le laboratoire public précise que « des essais grandeur nature de neutralisation de satellites en fin contractuelle de vie opérationnelle ont été menés ». Ces essais se distinguent difficilement des tirs antisatellites si ce n’est pour les débris générés. Les lasers font eux-mêmes partie d’un éventail de moyens spatiaux (entourés d’un certain silence aux États-Unis comme en France) comprenant également les attaques cyber et autres brouillages sur les satellites, des satellites « tueurs de satellites », ainsi que des drones spatiaux.

Du point de vue du cadre d’emploi, ensuite, la stratégie française ouvre une brèche vers une forme d’« ambiguïté stratégique » (une notion réactivée par la guerre en Ukraine), que vient paradoxalement renforcer la décision de pas conduire de tirs antisatellites. La France se réserve ainsi « le droit de prendre des mesures de rétorsion » face à « un acte inamical dans l’espace » (p. 28), de déployer des « contre-mesures » en réponse « à un fait illicite commis à son égard » (p. 29), et de « faire usage de son droit de légitime défense » en cas « d’agression armée dans l’espace » (p. 29).

Nul doute que les termes employés gardent une souplesse d’interprétation à même d’entretenir un certain flou sur la caractérisation d’une agression tout comme sur la nature de la riposte. Cette ambiguïté est une règle de base du lexique stratégique pour ainsi garantir l’efficacité de la « dissuasion spatiale » française. (Elle permet aussi de répondre à agressions menées « sous le seuil » de déclenchement d’un conflit).

En cela, la stratégie française semble s’inscrire dans une recherche de l’équilibre « psychotechnique » cher au réalisme aronien (voir Raymond Aron, Paix et Guerre, 1962, p. 669) : la détermination (et sa perception dans le champ psychologique) importe autant que la crédibilité technologique et la capacité technique à « frapper » (cette dernière a d’ailleurs pu être mise à mal dans l’histoire de la dissuasion française).

En s’interdisant les tirs antisatellites, la France renonce à une possibilité de la grammaire stratégique spatiale mais laisse d’autres possibilités d’action ouvertes, sans toutefois bien les spécifier (les modalités de réponse exactes à une agression dans l’espace ne sont pas publiques). Il reste donc à voir dans quelle mesure la doctrine spatiale française sera amenée à évoluer (et avec quel discours public). En l’état, rien n’exclut une possible forme de convergence (voire une intersection) avec la doctrine française cyber (en majeure partie secrète également), pour laquelle le Commandement de la Cyberdéfense créé en 2017 affiche une posture plus offensive, tournée vers la supériorité opérationnelle, et prévoit une montée en puissance du cyber militaire.

Espace : Pourquoi l’avenir de la dissuasion française est lié à la santé d’ArianeGroup

Espace : Pourquoi l’avenir de la dissuasion française est lié à la santé d’ArianeGroup