2022, une “année charnière” pour le futur siège de la DGSE

2022, une “année charnière” pour le futur siège de la DGSE

– Forces opérations Blog – publié le


L’année 2022 sera une année charnière pour le projet de transfert du siège de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) avec, notamment, l’attribution du marché principal. Le projet s’étalera sur deux lois de programmation militaire alors, pour les parlementaires, l’enjeu n’est pas seulement technique mais aussi budgétaire et calendaire.

Un budget étalé sur deux LPM

Exit la « piscine » du boulevard Mortier, le siège de la DGSE va déménager au Fort Neuf de Vincennes. Officialisée le 6 mai dernier par le président de la République, l’opération se justifie notamment par l’accroissement des effectifs, le déploiement de nouvelles capacités techniques et le renforcement des synergies entre la DGSE et les autres services de renseignement français.

Selon le calendrier prévisionnel, ces nouveaux locaux seront livrés en 2028. Les renseignements extérieurs disposeront alors de 160 000 m2 de surface permettant d’accueillir 6000 postes de travail. Ce transfert coûtera au total 1,348 Md€, dont 1,116 Md€ assurés par la DGSE et le reste par l’état-major des Armées (EMA), relève le député Fabien Gouttefarde (LREM), rapporteur pour avis du programme 144 pour le projet de loi de finances 2022.

Cette contribution de l’EMA se justifie de deux manières. D’une part, par l’évacuation du site et la conduite des travaux sur le quart nord-ouest pour conserver l’emprise nécessaire à « la menée de l’opération Sentinelle sur le territoire nationale jusqu’en 2031 ». Et d’autre part, par l’emménagement d’une partie du personnel de l’EMA sur une des emprises actuelles de la DGSE située sur le boulevard Mortier.

Après plus de deux ans d’étude de faisabilité, la DGSE a lancé un marché de type CCAEM (Conception, Construction, Aménagement, Entretien et Maintenance). La première phase de consultation est en cours, et la DGSE espère pouvoir notifier le marché principal au troisième trimestre 2022. Plus de 800 M€ en autorisations d’engagement sont fléchés pour ce contrat dans le PLF 2022.

Étant donné sa dimension, le volet budgétaire sera étalé sur deux lois de programmation militaire. L’effort principal portera sur la prochaine LPM, donc au-delà de 2025. Le bon octroi des ressources financières est donc un point de vigilance pour Fabien Gouttefarde, qui « veillera à ce que le projet, au coût déjà conséquent, ne souffre ni retards, ni surcoûts ». 

Crédits : DGSE

Lancement des travaux, au mieux, en 2024

Le marché notifié, il faudra encore attendre au moins deux ans avant la dépose de la première pierre. « Les deux années entre 2022 et 2024 laisseront à la DGSE le temps de traiter les contentieux éventuels et de mettre au point les détails techniques relatifs aux travaux, qui débuteront fin 2024 », précisaient ses représentants lors d’une audition relative au PLF 2022.

La DGSE devra également compiler avec l’occupant actuel. Les militaires continueront en effet d’occuper « une bonne partie » du Fort Neuf, l’emplacement étant « nécessaire pour la menée de l’opération Sentinelle, en particulier en prévision des Jeux olympiques de 2024 ». Ce rendez-vous impliquera la réalisation de constructions temporaires qui, bien que n’ayant aucun lien avec le futur siège, sont rendues nécessaires pour des raisons logistiques. La libération totale de l’emprise dévolue à la DGSE ne démarrera qu’une fois clôturé le grand raout sportif, au troisième trimestre 2024.

Reste enfin à solutionner les dimensions urbanistique et environnementale, liées à la qualification de « projet d’intérêt général » sollicitée par la direction de la DGSE. Conféré grâce à un décret adopté le 13 juillet 2021, ce statut l’autorise à « contourner la difficulté relative aux règles de protection des zones naturelles et forestières, dans une desquelles se trouve le Fort Neuf de Vincennes ».  

L’installation dans le 12e arrondissement, qui n’a rencontré aucune objection à l’issue de la consultation publique achevée en septembre, nécessitera donc de modifier le plan local d’urbanisme (PLU) de la ville de Paris, qui empêche tout nouvelle construction ou adaptation du site. La mise en conformité du PLU est attendue pour octobre ou novembre 2022.

« Cette modification pourrait évidemment faire l’objet d’un contentieux devant le juge administratif », rappelle le rapporteur. Un scénario que la DGSE « a anticipé en travaillant dès maintenant avec la direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère des Armées », conclut-il.

Préparation opérationnelle : les déficits ne seront pas résorbés avant fin 2023

Préparation opérationnelle : les déficits ne seront pas résorbés avant fin 2023


par – Forces opérations blog – publié le

L’armée de Terre peine toujours à atteindre ses objectifs annuels en matière de préparation opérationnelle, révèle un récent rapport parlementaire. Si le contrat opérationnel est rempli année après année, le déficit d’entraînement s’est encore aggravé en raison de la crise sanitaire et de Sentinelle, avec à la clef de nouveaux décalages qui ne seront pas rattrapés avant fin 2023.

Un enjeu brûlant pour les armées françaises

La préparation opérationnelle constitue « l’un des enjeux brûlants pour les armées françaises, dès maintenant mais surtout pour les années à venir », rappelait la députée LREM Aude Bono-Vandorme dans un rapport consacré au budget opérationnel des armées pour l’exercice 2020. Cet enjeu ira croissant au vu des défis imposés par un retour aux engagements de haute intensité, synonymes de réappropriation des compétences du haut du spectre et donc d’entraînements plus complexes, plus longs et plus « durcis ».

Or, que ce soit pour l’armée de Terre, l’Armée de l’Air et de l’Espace ou la Marine nationale, le compte n’y est pas encore. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Pour les forces terrestres, l’indicateur de performance « Journées de formation et d’entraînement » (JFE), introduit en 2020, s’élève à 118 jours. Celui relatif aux « Journées de préparation opérationnelle » (JPO) plafonne à 79 jours. C’est, dans les deux cas, deux jours en deçà de la cible 2020. Et si celui des JFE est proche de l’objectif, manquent 11 points de JPO pour parvenir à la norme fixée par la loi de programmation militaire 2019-2025 (LPM).

L’écart se creuse davantage pour les taux d’entraînement des équipages sur les matériels terrestres, dont les cibles ont été revues à la baisse en 2020. Là aussi, certains chiffres sont en baisse. Il était ainsi de 49 pour un VBCI, quatre points en dessous de l’objectif établi pour 2020. Et loin, très loin de la norme à atteindre en fin de LPM, 130. Idem pour le CAESAR, en recul de cinq points à 63 et loin du niveau exigé de la LPM, 110.

Conséquence parmi d’autres du renforcement provisoire de Sentinelle, un quart des passages par les centre d’entraînements spécialisés ont dû être annulés (Crédits : armée de Terre)

Pas de rattrapage avant fin 2023

Plusieurs facteurs expliquent ces tensions apparues dès 2015 dans le cas de l’armée de Terre. Aux déficit de disponibilité de matériels (DTO), stocks de munition limités et niveau engagement particulièrement élevé sont venus se superposer la crise du Covid-19 et, plus récemment, le renforcement provisoire de Sentinelle.

Les soucis de DTO et de munitions sont connus. Les véhicules sont rincés suite à un niveau d’engagement élevé, attrition renforcée par l’âge de certains parcs et par les conditions climatiques difficiles rencontrées au Sahel. Les coûts de maintien partent donc à la hausse, à l’inverse de la disponibilité. Certains stocks de munitions, essentiellement relatifs aux matériels anciens, sont quant à eux si faibles que « parfois, lors d’une journée de préparation opérationnelle, un seul tir est effectué », pointe le rapport.

Les mesures de confinement drastiques prises l’an dernier ont elles-aussi eu un impact négatif, obligeant l’armée de Terre « à réorienter la préparation opérationnelle interarmes et interarmées vers la préparation opérationnelle métier en garnison, pour garantir l’atteinte des objectifs de préparation opérationnelle tout en limitant les déplacements », souligne madame Bono-Vandorme.

Le déclenchement de Sentinelle s’était d’emblée traduit par « une forte baisse » des passages par les centres d’entraînement spécialisés, pourtant à forte valeur ajoutée. Les adaptations successives du dispositif n’auront fait qu’accroître la pression. Ainsi, le renforcement opéré entre novembre 2020 et avril 2021, qui avaient vu les effectifs de la mission passer de 3000 à 7000, aura conduit à l’annulation d’un quart des rotations en centre d’entraînement spécialisé. Résultat : une dette complémentaire qui ne sera pas résorbée avant fin 2023.

Même son de cloche pour les activités bilatérales et internationales, cette fois en raison du Covid-19. Fermeture des frontières oblige, 13 exercices internationaux ont été annulés en 2020. En résulte une diminution de 30% des activités planifiées qui ne devrait pas être rattrapée avant le second semestre de 2023, année durant laquelle se tiendra l’exercice interalliés majeur Orion souhaité par l’ex-CEMAT et nouveau CEMA, le général Thierry Burkhard.

La préparation au cœur de l’actualisation de la LPM

Alors CEMAT, le général Burkhard avait donné le ton dans sa Vision stratégique, jugeant impératif de « renforcer la préparation opérationnelle de nos armées, afin qu’elles puissent s’entraîner mieux pour faire face de manière plus complète et plus agile à l’ensemble du spectre des menaces y compris dans la perspective de conflit de plus haute intensité ».

Une ligne reprise quelques mois plus tard par la ministre des Armées, Florence Parly. Le sujet est à ce point sensible qu’il est devenu l’un des trois principaux axes d’ajustement de la LPM évoqués en mai dernier. Selon celle-ci, les armées ont en effet besoin « d’un entraînement plus conséquent et plus sophistiqué, notamment dans les nouveaux espaces de conflictualité. »

Et la ministre des Armées d’énumérer les points d’attention rassemblés au sein d’un axe baptisé « mieux se préparer ». « L’effort en cours sur la disponibilité des matériels doit être poursuivi, afin de permettre de multiplier les entraînements au quotidien et perfectionner les scénarios de préparation. Il nous faudra renforcer le recours à la simulation. Cela passera par un investissement dans les centres de préparation à la simulation. »

Des marsouins du 1er régiment de marche du Tchad en patrouille Sentinelle, mission dont le renforcement temporaire a contribué à accentuer le déficit de préparation de l’armée de Terre (Crédits : armée de Terre)

Chantiers en cours et nécessaire appoint budgétaire

Côté DTO, la dynamique engagée par le projet MCO-T 2025 commence à porter ses fruits. De nouveaux modèles de contractualisation ont déjà donné satisfaction. Le marché de soutien en service du Leclerc (MSS XL), par exemple, a ainsi permis d’augmenter significativement la disponibilité du parc. Le marché MSS 2, entré en vigueur le 1er avril, apporte des exigences renforcées. Des gains supplémentaires sont attendus dans les années à venir.

À cette nouvelle politique s’ajoutent des travaux d’actualisation de la LPM concrétisés en 2022 et 2023 pour compenser une partie du décrochage occasionné l’an dernier. Les gains d’activité seraient de +20% pour les chars Leclerc, de +22% pour les AMX-10RC et de +41% pour les VAB, indique la députée Bono-Vandorme.

Qu’il s’agisse de la DTO ou des munitions, infléchir la trajectoire d’activité nécessiterait d’injecter plusieurs centaines de millions d’euros supplémentaires sur la période 2022 à 2025. D’après le rapport, la facture serait de 129 M€ pour l’entretien programmé des matériels terrestres, 75 M€ pour l’entretien programmé des matériels aéronautiques et 78 M€ en munitions. Les chars Leclerc, VAB et AMX-10RC en seraient les premiers bénéficiaires.

Les armées font par ailleurs état d’un besoin croissant pour des outils de simulation. Une simulation de meilleure qualité, en sus de la préparation classique sur terrain et non pas en remplacement de celle-ci. Cela tombe bien, le programme Scorpion est conçu pour moderniser le segment simulation et l’amener au plus près de l’utilisateur. Ce sont, hormis de nouvelles cabines et la construction d’infrastructures dédiées dans chaque régiment, le système SEMBA, qui embarquera la simulation dans le véhicule Scorpion.

La députée Bono-Vandorme propose d’aller bien au-delà avec l’allocation de moyens adéquats « pour le développement d’un écosystème de simulation partagée interarmes mais aussi interarmées. Ce système permettra d’opérer un bond qualitatif par rapport aux capacités actuelles de préparation simulée. »

Des recommandations pour Sentinelle

Quant aux modalités de mise en œuvre de Sentinelle, la question semble aujourd’hui en suspens au sein du ministère des Armées. Dans les rangs parlementaires par contre, on se veut force de propositions. Dans l’immédiat, la députée Bono-Vandorme suggère d’établir une durée maximale dans la réquisition d’un renfort Sentinelle. Passée cette durée, la diminution de l’engagement se ferait automatiquement et éviterait une incertitude dommageable, notamment lorsqu’il s’agit du passage des unités en centre d’entraînement spécialisé.

À moyen terme, une solution plus ambitieuse serait « d’accélérer l’évolution de Sentinelle vers une capacité d’action rapide de certaines unités de l’armée de Terre en remplacement de la pratique actuelle de la patrouille ». Cette transformation contribuerait à soutenir une « culture de l’alerte et de la défense du territoire national » tout en libérant des moyens humains et budgétaires pour la préparation opérationnelle.

D’autres propositions pourraient émerger d’une mission d’information parlementaire consacrée à la préparation à la haute intensité, mission dont les travaux ont démarré le mois dernier. Les conclusions et éventuelles recommandations sont attendues pour l’automne prochain.

Budget des armées, des renoncements majeurs sur fond de démission.

Budget des armées, des renoncements majeurs sur fond de démission.

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par Roland Pietrini – Athéna – publié le 26 juin 2021

https://www.athena-vostok.com/budget-des-armees-des-renoncements-majeurs-sur-fond-de-demission


Contrairement à l’Assemblée nationale, le Sénat n’a pas accordé sa confiance à la poursuite de la LPM (loi de programmation militaire) 2019-2025.

Le quinquennat de Monsieur Macron s’achève donc, dans le domaine de la défense, dans la confusion et sur une nouvelle démission d’un Chef d’Etat-major des Armées qui semblait jusqu’alors se réjouir de la tenue d’un budget qui respectait pour la première fois depuis 20 ans les objectifs fixés par la loi de programmation.

Or, celle-ci, en réalité, souffre de nombreux aléas et reporte après 2025 l’essentiel des efforts, c’est à dire, et ce n’est pas un hasard, après l’élection présidentielle de 2022.

Par ailleurs, la « gouvernance » de la ministre des armées, simple porte-voix du chef de l’Etat, est marquée par un autoritarisme sans précédent. Si l’autorité est une valeur lorsqu’elle est autorité de compétence, l’autoritarisme est un système qui pour survivre est condamné à mettre au silence les contradicteurs.

Lorsqu’on a des d’arguments faibles, on attaque plus facilement le messager que le message qu’il porte.

Les faits sont têtus.  Le bruit court que la décision de retrait partiel du Mali a été prise sans que le général Lecointre, chef d’état-major des Armées, en ait été informé au préalable. Par ailleurs, l’épisode de la tribune dite des généraux et les réactions outrancières qui ont suivi, a laissé des traces. 

Si cela devait se confirmer, alors, nous aurions un exemple de plus du mépris de ce pourvoir envers ses plus fidèles serviteurs.

Par ailleurs, le non-respect de l’article 7 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense (LPM 2019-2025) prévoyait expressément qu’elle ferait « l’objet d’actualisations, dont l’une sera mise en œuvre avant la fin de l’année 2021 ».  Cette disposition, issue du texte initial du projet de loi, correspondait à un engagement du Gouvernement qui ne sera pas tenu. C’est une forme de trahison. Ceci ajouté au fait que le plan de relance n’a quasiment pas concerné les Armées démontre, en dépit des apparences, que la politique menée en faveur de notre défense continue à subir des fluctuations négatives.

Le tableau, ci-dessous, intitulé écart entre l’actualisation et la cible, montre que d’ores et déjà des cibles de programmation ne seront pas atteintes en 2025.

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Pire, aucune de nos faiblesses capacitaires ne pourra être comblée à l’horizon 2030, notamment dans les domaines des appuis, de la logistique, de l’artillerie, de la défense sol-air totalement sacrifiée, de l’absence de conception d’un engin blindé chenillé indispensable à l’accompagnement des chars. Ces capacités ne sont même pas évoquées.  

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Pour la Marine, la commande avancée d’une FDI (1) ne traduit en réalité que le désastre de la réduction du nombre de FREMM.  Quant à l’AAE, notre capacité de projection et de combat est sensiblement diminuée, nos escadres équipées de Rafale étant devenues le réservoir à exportation pour des pays qui n’auraient pu, sans la garantie de l’état français, financer de telles acquisitions.

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FDI frégates de défense et d’intervention.

Le surcoût de ce choix pour le budget défense est bien réel. Il est estimé par les sénateurs à 960 millions. Mais, en réalité, le surcoût estimé pour atteindre les objectifs de la LPM se chiffrent déjà à 8 milliards 600 millions. Le bilan du président Macron est du même niveau que celui de ses prédécesseurs. Mais Florence Parly signale que la commande d’une troisième frégate de défense et d’intervention pour 750 M€, seul mouvement « positif » consigné par les sénateurs, n’est pas à considérer comme un surcoût mais comme l’anticipation d’un achat déjà fixé dans le périmètre de la LPM. Pas un mot cependant sur les décalages de livraison, pourtant a priori confirmés et l’oubli d’une commande de 12 Rafale afin de compenser ceux d’occasion cédés à la Croatie !

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Bref, ce n’est pas après moi le déluge, mais avec ou sans moi l’assurance de notre déclin et l’affirmation de notre faiblesse.

Par ailleurs, les choix dogmatiques, censés renforcer l’Europe de la défense, qui se traduisent par une coopération renforcée avec l’Allemagne concernant les deux projets majeurs le SCAF et le MGCS dépendent en réalité du bon vouloir du Bundestag. Notre politique de défense est liée désormais à celle de l’Allemagne, ce qui met en péril notre sécurité future.  Le dogmatisme pour une Europe de la défense sans discernement fera des ravages dans des domaines où nous avons de très hautes compétences.

Or lors de sa dernière audition au Sénat en tant que Chef d’Etat-major des Armées, le général Lecointre déclare: « Nous cherchons actuellement à éviter une coopération étendue tous azimuts à des partenaires notamment tchèques, polonais ou autres, avant d’avoir réussi à bien construire le partenariat franco-allemand » et « Nous sommes soumis à des impératifs industriels de notre partenaire allemand ».  Cette lucidité est à saluer, est-elle l’un des éléments qui l’a mené aussi à présenter sa démission ? 

La loi de programmation sera, comme toutes les autres lois de programmation, non respectée.  « Seules les 5 premières annuités de 2019 à 2023 ont été votées pour un montant global de 197,8 Mds €, renvoyant les 2 dernières annuités 2024-2025 à un arbitrage ultérieur prenant en compte la situation macroéconomique à la date de l’actualisation et l’objectif de porter l’effort de défense à 2 % du PIB en 2025 ». Or, cette situation macroéconomique justifiera une fois de plus tous les ajustements et renoncements. (avec une chute du PIB de 8% en 2020, nous avons, d’ores et déjà, atteints les 2%)  

Cet état de fait, que j’avais dénoncé dès 2019 traduit en réalité la mauvaise foi de nos gouvernants et leur inconsistance.

Le prochain chef de l’Etat aura une responsabilité majeure pour réparer l’outil défense dans la perspective désormais possible d’un conflit de haute intensité pour lequel nous sommes dans l’impréparation absolue. Et dans l’hypothèse où Monsieur Macron serait réélu, compte tenu du bilan de son premier mandat, il ne fera qu’aggraver les manquements du premier.

L’exécution de la LPM n’est conforme qu’en apparence.

Il faut changer de paradigme. (2)  Les échecs de la programmation militaire depuis une quinzaine d’année devraient nous faire réfléchir, nous avons une armée de façade, sans réelle capacité offensive de haut niveau, sans capacité de résilience et sous-équipée.  

Une armée comparable à celle de 1870, (3) qui ; jusqu’en 1866, était considérée comme la plus forte d’Europe. Elle avait achevé la conquête de l’Algérie, battu l’armée russe en Crimée et pris Sébastopol, gagné la guerre de libération de l’Italie septentrionale contre les Autrichiens en 1859. Engagée de 1862 à 1867 dans la stérile et inutile expédition du Mexique.  

Cela donnait aux Français un sentiment de supériorité évidente, mais nos grands chefs avaient oublié qu’en Europe les conflits pouvaient être différents. Alors que toute l’Europe recréait une armée de conscriptionle système français, toujours régi par la loi de 1832, ne prévoyait pas le service militaire obligatoire. Il organisait en fait une armée de métier, composée de volontaires, complétés par des hommes du contingent. L’organisation militaire de l’Allemagne était, elle, supérieure à celle de la FranceTous les corps d’armée étaient constitués dès le temps de paix. Ce n’était pas le cas de la France.

Aujourd’hui nos régiments ne possèdent pas la totalité de leurs matériels ; ceux-ci sont en majorité stockés. Pour les régiments de chars, par exemple, cela est un non-sens, l’équipage a besoin de s’identifier à un char, le connaitre, l’entretenir, le bichonner, l’apprivoiser, nous risquerions de le payer très cher si nous devions nous engager dans un conflit. Cet exemple, parmi tant d’autres, démontre que nous avons aujourd’hui une armée expéditionnaire sans capacité de résilience, une armée où l’on puise de ci de là des hommes pour les projeter, dans des conflits de basse intensité qui tuent, qui nous épuisent, mais qui ne sont rien par rapport à ceux qui eurent lieu en Géorgie, au Donbass, au haut Karabakh…  

Nous aurions aujourd’hui bien du mal à projeter en Europe, ne serait-ce qu’une brigade blindée complète, alors qu’elle est sous-appuyée, sous-protégée en moyen sol air, incapable de franchir des coupures sous le feu, sans munitions rodeuses, sans drones terrestres armées, avec une aviation qui risque de perdre très vite sa supériorité aérienne supposée.

Quant aux alliés européens, ils sont tout autant démunis. Reste l’Otan sous commandement américain, au mieux, nous ne serions comme dans la guerre du golfe avec nos 40 AMX30B2, et encore avec une réelle DAM à l’époque, que des supplétifs, contraints de demander des moyens supplémentaires à nos alliés….

L’armée de terre française c’est 140 Leclerc en ligne, 500 VBCI, à peine mieux armés que des BTR 70 des années 80 et en 2025, 150 blindés de reconnaissance Jaguar, 109 pièces d’artillerie et 67 hélicoptères Tigre en parc. De quoi équiper à peine sérieusement deux brigades blindée type OTAN, mais incomparablement sous-équipée par comparaison avec une brigade étalon de type russe.

À titre de comparaison l’Algérie possède  572 T90, 550 T 72, 300 BMP-T, 14 brigades S300… Certes l’Algérie n’a pas l’intention d’envahir la France militairement, elle a une autre stratégie bien plus efficace.  Mais lorsqu’on veut siéger efficacement  au conseil de sécurité, parler au nom de l’Europe, orienter la politique de l’OTAN, la moindre des choses est de mettre en adéquation ses désirs avec les réalités. La puissance repose sur la réalité de sa puissance, pas sur ses fantasmes.  La faillite de notre diplomatie repose sur cet état de fait, l’illusion de puissance est la traduction de sa propre impuissance.  

Le constat est le même pour la Marine sous équipée et l’Armée de l’Air et de l’Espace sous-calibrée en raison du contrat opérationnel. 

La confusion entre la stratégie, la technique et la programmation est un mal bien français.

La revue stratégique doit décrire une état des lieux à la fois des menaces et des objectifs a atteindre dans les grandes lignes pour y répondre à court et moyen terme et devrait être menée par un organisme indépendant composé d’experts en économie, en géopolitique, en spécialistes des affaires industrielles et sociales et devrait inclure des parlementaires, des militaires, des diplomates et des sociologues, afin de déterminer quel effort la nation doit consentir en raison des menaces.  Elle doit s’inscrire dans une réflexion sur le moyen et le long terme.

Le Livre blanc devrait être rédigé par un autre comité d’experts composé en majorité d’hommes et de femmes de l’art, afin de répondre aux constats posés par la première,  en définissant les moyens nécessaires aux Armées en hommes et en équipement afin de contrer les menaces tant intérieures qu’extérieures compte tenu de notre volonté à la fois de défendre notre Nation dans l’ensemble de son implication régalienne dans le monde et dans le respect de nos accords.

Enfin, la programmation devrait être, après arbitrages politiques un cadre contraignant de mesures, sur lesquels le parlement ne pourrait revenir, et pour cela peut-être qu’une modification de la constitution serait nécessaire.

C’est à ce prix que nous reconstruirons un état- puissance et redonnerons à nos citoyens le sentiment d’être protégés afin de faire Nation.

Le Sénat, qui dans notre constitution ne peut avoir le dernier mot, constate et recommande sans capacité à modifier les effets d’une gestion insincère.

Je crains que la prochaine mandature, sauf en raison d’une crise majeure mettant en danger notre intégrité même, ne transgresse une nouvelle fois l’impérieuse nécessité de s’engager vers une réelle montée en puissance de notre défense dont le volet intérieur ne saurait être négligé.

La politique et la stratégie de la guerre ne sont qu’une perpétuelle concurrence entre le bon sens et l’erreur.  Charles De Gaulle

Roland Pietrini

 

(1)  FDI : Les frégates de défense et d’intervention, ou FDI, sont de futures frégates de premier rang de la marine nationale française, d’un déplacement unitaire de 4 460 tonnes à pleine charge2. Le programme porte sur cinq exemplaires, dont le premier doit être livré en 2024. Les frégates sont construites à Lorient par la société Naval Group.

(2)  Armées : et si on changeait de paradigme ? – Défense actualités geopolitique (athena-vostok.com)

(3)  LES RESPONSABILITÉS DE LA DÉFAITE MILITAIRE DE 1870  Les responsabilités de la défaite militaire de 1870 – napoleon.org

Source de l’article : le rapport d’information L’ACTUALISATION DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE 2019-2025 du Sénat. Essentiel (senat.fr)

 

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Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées http://www.senat.fr/commission/etr/index.html

Le consensus politique autour de la Loi de programmation militaire 2019-25 s’est fissuré

Le consensus politique autour de la Loi de programmation militaire 2019-25 s’est fissuré

http://www.opex360.com/2021/07/03/le-consensus-politique-autour-de-la-loi-de-programmation-militaire-2019-25-sest-fissure/

Faut-il remettre en cause la deuxième section des officiers généraux? [MàJ]

Faut-il remettre en cause la deuxième section des officiers généraux? [MàJ]

http://www.opex360.com/2021/05/16/faut-il-remettre-en-cause-la-deuxieme-section-des-officiers-generaux/

L’ajustement de la LPM 2019-25 va renforcer la capacité des Armées à « mieux détecter et contrer » les menaces

L’ajustement de la LPM 2019-25 va renforcer la capacité des Armées à « mieux détecter et contrer » les menaces


http://www.opex360.com/2021/05/05/lajustement-de-la-lpm-2019-25-va-renforcer-la-capacite-des-armees-a-mieux-detecter-et-contrer-les-menaces/

Audition de Florence Parly, Ministre des Armées devant la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale – 4 mai 2021

Audition de Florence Parly, Ministre des Armées devant la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale – 4 mai 2021

 

Mardi 4 mai 2021 après-midi, la commission a auditionné Florence Parly, ministre des Armées, sur les perspectives de la loi de programmation militaire 2019-2025.

https://www2.assemblee-nationale.fr/15/commissions-permanentes/commission-de-la-defense

 

Mardi 4 mai 2021 après-midi, la commission a auditionné Florence Parly, ministre des Armées, sur les perspectives de la loi de programmation militaire 2019-2025.

voir la vidéo :

http://event.assemblee-nationale.fr/video.10714743_60916e0daa026?timecode=584290

Lire et télécharger le texte de son allocution :

Florence Parly – Perspectives de la LPM – Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale 04 05 2021

 

 

Pas de passage par la case législative pour l’actualisation de la LPM

Pas de passage par la case législative pour l’actualisation de la LPM


L’actualisation de la loi de programmation militaire 2019-2025 ne devrait pas passer par la case législative, annonçait la ministre des Armées Florence Parly, vendredi dernier face à la Commission défense de l’Assemblée nationale. Une perspective qui n’aura pas provoqué d’opposition particulière de la part des députés, ceux-ci souhaitant néanmoins rester force de proposition.

« Il n’est pour l’instant pas prévu de procéder à une actualisation législative de la loi de programmation militaire » telle que prévue à l’article 7 du texte de loi, annonçait Florence Parly. La raison invoquée est le manque de temps, l’agenda étant déjà très chargé et ne permettant donc pas d’envisager un débat parlementaire sur le sujet.

« Toutefois », ajoute la ministre des Armées, « nous procéderons à des ajustements en accélérant nos efforts sur certaines ambitions qui sont portées par la loi de programmation militaire ». Si aborder la trajectoire budgétaire pour 2024 et 2025 est prématuré, Florence Parly est revenue sur plusieurs futurs axes d’effort.

Pour la ministre, il s’agira avant tout d’améliorer la capacité des forces armées à détecter les menaces et à attribuer les agressions, notamment dans les nouveaux espaces de conflictualité. « Cela passe par un renforcement de nos capacités à collecter et à exploiter la multitude de données à des fins de cyberdéfense ou bien encore de renseignement ». Pour ce faire, les Armées auront besoin d’infrastructures de stockage sécurisées et d’algorithmes performants basés sur l’intelligence artificielle, détaillait Mme Parly.

L’effort portera aussi sur l’accélération de la protection des forces, du territoire et des populations dans le domaine des risques NRBC « ou bien encore de la lutte anti-drones ». « Nous allons, enfin, renforcer la préparation opérationnelle de nos Armées afin qu’elles puissent s’entraîner mieux pour faire face de manière plus complète et plus agile à l’ensemble du spectre des menaces, y compris dans la perspective de conflits de plus haute intensité. »

Autre enjeu : la consolidation de la BITD, qui représente aujourd’hui « 10% de l’industrie et 20% de la recherche et développement en France. Elle fait travailler 4000 entreprises de toutes tailles et génère 200 000 emplois directs et indirects ». De la poursuite d’une LPM ambitieuse dépendent aussi la relance d’un secteur touché par la crise, la sauvegarde des emplois et le maintien des compétences. « Nous allons donc poursuivre les adaptations capacitaires et les programmes d’avenir en cours », a réaffirmé la ministre des Armées.

Cette annonce n’a pas suscité de réelle inquiétude dans les rangs parlementaires. Tout au plus, quelques membres de la majorité ont invité l’exécutif à conserver un canal d’écoute. « Je prends note que le gouvernement n’envisage pas de texte législatif spécifique dans le cadre de l’actualisation de la LPM », commentait ainsi la présidente de la Commission défense, la députée LREM Françoise Dumas.

« Je note que ce travail d’actualisation n’a pas fait l’objet d’une réelle co-construction avec le Parlement. (…) Et je le regrette, de même que cette actualisation ne fasse pas l’objet d’un passage par la loi, par la transcription législative », relevait à son tour le député d’Agir Ensemble Jean-Charles Larsonneur.

Ce choix du gouvernement, « qui n’est pas une surprise eu égard à la période actuelle », ne doit cependant pas conduire à exclure totalement le Parlement de la réflexion. « Diverses voies restent possibles pour cette association et il y a déjà un petit moment que nous anticipons, nous aussi, un certains nombre d’évolutions législatives et de travaux. Nous allons évidemment, avec l’ensemble du bureau de notre Commission et de la Commission, y réfléchir », ajoutait Mme Dumas. Parmi les pistes à l’étude, la Commission défense prévoit le lancement de nouvelles missions d’information relatives aux drones et à la préparation aux conflits de haute intensité.

Image : armée de Terre

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