Brève histoire des Renseignements généraux (RG)

20/02/2025

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Les Renseignements généraux (RG) ont joué un rôle clé dans la collecte et l’analyse d’informations sur la vie institutionnelle, économique et sociale en France. Depuis leur origine sous Napoléon Ier jusqu’à leur intégration dans le renseignement territorial moderne, leur mission a évolué au gré des menaces et des enjeux de sécurité nationale. Retour sur l’histoire d’un service central à la fois discret et stratégique.

Avec pour lignes directrices la recherche de renseignement sur la vie institutionnelle, économique et sociale et les phénomènes susceptibles de porter atteinte à l’ordre public et à la sûreté générale, les Renseignements généraux ont vu leur périmètre d’action et leur organisation fluctuer au fil des temps.

La chute de la monarchie française en 1792 ouvre une période agitée, durant laquelle l’activité de police fait l’objet de nombreuses réorganisations. En février 1800, Bonaparte créé la Préfecture de police de Paris et sa division « Sûreté générale et police secrète », prémices du premier service organisé pour prendre en compte les activités de renseignement en France.  
En 1811, des « commissaires spéciaux [1] » sont attachés à la surveillance de l’opinion, des opérations de commerce, des mouvements des ports, des communications avec l’étranger, des associations politiques et religieuses.

Sous le Second Empire, Napoléon III édicte un décret qui place 30 commissaires spéciaux de police [2] sous la tutelle des préfets et du ministère de l’Intérieur. Outre la répression des infractions de droit commun, ils sont chargés du suivi de l’état de l’opinion publique. En 1861, de nouvelles directives viennent élargir leurs prérogatives, notamment en ce qui concerne la police des ressortissants étrangers et celle des ports et des frontières. Ces commissaires spéciaux constituent la première implantation territoriale durable de l’activité de renseignement.

La structuration progressive des RG

Confrontée aux mouvements anarchistes et aux attentats qu’elle ne parvient pas à endiguer seule, la police française commence à s’engager pleinement dans la coopération internationale, après l’assassinat de l’impératrice d’Autriche en 1898.

En 1907, une vaste réforme de l’organisation policière est engagée par Georges Clémenceau, alors Président du conseil et ministre de l’Intérieur. Ce dernier instaure des brigades régionales mobiles, plus connues sous le nom de « Brigades du Tigre », qui sont principalement chargées de lutter contre le crime organisé.  

En parallèle, il crée une autre brigade en charge de la police judiciaire et des renseignements généraux, placée au sein de la Sûreté générale. Le dispositif est complété, en 1911, par le nouveau service des renseignements généraux de police administrative qui a pour mission de prévenir les troubles à l’ordre public. 
Par ailleurs, le gouvernement encourage le développement à Paris d’un service de renseignement possédant des attributions similaires. Les Renseignements généraux de la préfecture de police (RGPP), ainsi que le service des renseignements généraux et des jeux, sont ainsi créés en 1913.

En avril 1937 sous le Front Populaire, le président du Conseil Léon Blum et le ministre de l’Intérieur Max Dormoy expérimentent une nouvelle Commission interministérielle du renseignement, réunie chaque semaine autour du président du Conseil, pour faciliter l’échange d’informations au plus haut niveau.

L’après-guerre impose de nouvelles missions

Dès novembre 1944, le Général de Gaulle restructure les services de renseignement et de contre-espionnage. Il crée la direction de la surveillance du territoire (DST) et confirme dans leurs missions les Renseignements généraux, placés au sein de la sûreté nationale. Le suivi de la vie politique, économique et sociale, ainsi que la surveillance des hippodromes et des établissements de jeux, leur sont confiés. 

L’appellation historique de « direction centrale des renseignements généraux » (DCRG) apparait en octobre 1968. Peu après, la DCRG intègre la nouvelle direction générale de la police nationale (DGPN) qui succède à la Sûreté nationale.

Au cours des années 70, les RG sont chargés de missions de recherche de renseignement concernant les phénomènes terroristes. Ils contribuent à l’identification des réseaux terroristes et notamment islamistes, en lien étroit avec la direction de la surveillance du territoire (DST) et les renseignements généraux de la préfecture de police (RGPP) à Paris.

Dans les années 90, les RG doivent également faire face aux phénomènes de violence urbaine, aux dérives sectaires ou au hooliganisme, qui ont une incidence sur la sécurité et l’ordre public. Ils s’intéressent aussi aux nouvelles formes de contestation sociale. Ils surveillent les groupements à risque ou les individus susceptibles de se livrer à des actions violentes, prônant des idéologies extrémistes, séparatistes (basques, corses), ou portant atteinte aux principes démocratiques. 
Le suivi de l’activité et du fonctionnement interne des partis politiques lui est retiré.

En dépit des activités et des cultures complémentaires des RG et de la DST, le contexte sécuritaire du début des années 2000 fait apparaître un besoin d’intensification de la coopération entre les services de renseignement du ministère de l’Intérieur. Une refonte des services de renseignement policier est décidée au plus haut niveau en 2007. La DCRG est alors supprimée par le décret n°2008-609 du 27 juin 2008.

Ses attributions sont en partie transférées à la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), qui deviendra l’actuelle DGSI en 2014. À l’inverse, ses missions relatives à la vie institutionnelle, économique et sociale, et aux phénomènes de violence urbaine susceptibles d’intéresser l’ordre public sont confiées à la sous-direction de l’information générale (SDIG) de la DGPN. Ce service forme l’ossature de l’actuel service central du renseignement territorial (SCRT), créé en 2014. Simultanément, l’activité de contrôle des établissements de jeux et de courses est définitivement transférée à la police judiciaire (DCPJ).

[1] Créés par décret impérial du 25 mars 1811
[2] Créés par décret du 22 février 1855

Source : DGSI

La chance de l’Europe pour déjouer la vassalisation de l’Ukraine

La chance de l’Europe pour déjouer la vassalisation de l’Ukraine

Poutine et Trump voudraient vassaliser l’Ukraine sans les Européens.
Mais l’Union détient encore l’une des cartes les plus fortes de la table des négociations.
Si elle tarde trop à la jouer, elle pourrait perdre la partie.Lee Buchheit, l’une des sommités mondiales sur la question des dettes souveraines, formule une proposition simple et claire pour éviter de laisser les Empires se partager la mise.
James Gillray, « The Plumb-pudding in danger; — or — State Epicures taking un Petit Souper », 1805. Domaine public

En 1805, le caricaturiste anglais James Gillray publiait une illustration célèbre intitulée The Plumb-pudding in danger ; — or — State Epicures taking un Petit Souper. Le dessin représente le Premier ministre britannique, William Pitt, et l’Empereur des Français, Napoléon Bonaparte, assis à une table en train de se partager un énorme pudding aux prunes en forme de globe. Le Premier ministre Pitt tient fermement l’hémisphère occidental en place à l’aide d’un trident et se découpe proprement le Nouveau Monde. L’Empereur semble de son côté satisfait de se trancher une part qui comprend toute l’Europe à l’est des îles britanniques.

C’est une caricature devant laquelle aucun Ukrainien, ni d’ailleurs aucun Européen, ne peut rester indifférent en février 2025.

La semaine dernière, le président américain Donald Trump a annoncé qu’il s’était entretenu près d’une heure et demie au téléphone avec le président russe Vladimir Poutine. Ils ont notamment discuté de la fin de la guerre en Ukraine. À Bruxelles, le même jour, le nouveau secrétaire à la Défense de Donald Trump a publiquement qualifié d’« irréalistes » les principales conditions que l’Ukraine est susceptible de demander dans le cadre d’un règlement négocié du conflit. Il s’agit notamment de la restitution des territoires ukrainiens  occupés par les forces russes et de solides garanties de sécurité, y compris  l’adhésion à l’OTAN, ou du moins la participation active des États-Unis, afin de s’assurer que la Russie ne tente pas de répéter l’expérience une fois que son armée aura eu le temps de se regrouper et de se réarmer. Il est inconcevable que ces évaluations des conditions de paix ukrainiennes « irréalistes » n’aient pas été partagées avec Vladimir Poutine lors d’une conversation téléphonique de 90 minutes.

Il est apparu par la suite que Poutine et Trump prévoyaient de se rencontrer en Arabie Saoudite en l’absence de l’Ukraine et des représentants des alliés européens de Kiev afin de régler les conditions  de l’accord de paix. Après celle entre Marco Rubio et Sergueï Lavrov du 18 février à Ryiad, il y a de fortes probabilités qu’une telle rencontre permettrait aux deux participants de se mettre d’accord. Les chances de parvenir à un « deal » sont généralement meilleures lorsque l’on concède à son adversaire ses principales demandes avant même le début des négociations.

Tout cela rappelle de manière inquiétante la géopolitique du XIXe siècle. De grandes puissances, ou de « grands hommes », s’assoient autour d’une table, au-dessus d’une carte, et se répartissent le stylo à la main les territoires et les sphères d’influence sans tenir compte — ou très peu — de l’avis de ceux qui y habitent.

Pour l’Ukraine, le pire des scénarios, ou du moins l’un des plus mauvais, pourrait se dérouler de la manière suivante :

  • Poutine et Trump conviennent d’un accord prévoyant que la Russie conserve ou étende ses gains territoriaux en Ukraine et laisse le reste d’une Ukraine indépendante sans garantie de sécurité américaine solide. 
  • Les autorités ukrainiennes devraient alors : soit accepter ces conditions sans sourciller ; soit risquer de passer aux yeux de Donald Trump pour des ingrats. Or dans le deuxième cas, la sanction pour avoir rejeté un accord négocié par Donald Trump lui-même risquerait tout simplement de se traduire par la fin du soutien financier américain. 

Cela poserait deux problèmes aux alliés européens de l’Ukraine :

  • Tout d’abord, sont-ils prêts sans la participation des États-Unis à fournir à l’Ukraine des garanties de sécurité qui, si elles étaient déclenchées, risqueraient de faire de faire d’eux des co-belligérants dans une guerre avec le deuxième plus grand arsenal nucléaire du monde ?
  • Deuxièmement, sont-ils  prêts à fournir à l’Ukraine, là encore sans l’appui de Washington, les fonds nécessaires pour continuer à résister à l’invasion russe  plutôt que de capituler devant un règlement défavorable du conflit ?

Bien sûr, les événements pourraient ne pas se dérouler de cette façon.

Poutine pourrait se présenter à la table des négociations en Arabie saoudite avec des exigences supplémentaires — telles que le  retrait de toutes les troupes de l’OTAN d’Europe de l’Est — que même Trump  aurait du mal à accepter. Autre possibilité : le contrecoup politique aux États-Unis de l’abandon d’un allié américain « aussi longtemps qu’il le faudra » pourrait devenir trop  inconfortable, même sous cette administration. 

Cela étant dit, les événements pourraient tout aussi bien se dérouler de cette façon.

Face à ces changements spectaculaires de la politique américaine, les alliés de l’Ukraine ne peuvent pas rester comme des lapins paralysés par la lumière des phares. Une mesure pourrait être prise rapidement pour atténuer la menace américaine d’un retrait du soutien financier si l’Ukraine ne se soumettait pas à des conditions de règlement inacceptables : utiliser les actifs russes gelés depuis 2022 pour soutenir une ligne de crédit au bénéfice de Kiev. Une proposition allant dans ce sens, baptisée « prêt en réparation », a été lancée l’année dernière 1.

Le mécanisme juridique qui la sous-tend est d’une grande simplicité. Les pays détenant des actifs russes gelés prêteraient jusqu’à 300 milliards de dollars à l’Ukraine, garantis par l’engagement de Kiev à réclamer des dommages et intérêts à la Russie pour les dommages causés par l’invasion. Cette demande, en droit, est indubitable. Cela placerait ces  pays dans une position où ils ont une créance sur la Russie (la demande en  réparation héritée de l’Ukraine) correspondant exactement à leur dette envers la Russie  (les avoirs gelés), l’équilibre de ce mécanisme reposant sur la compensation des créances réciproques.

Pour les alliés de l’Ukraine, cette option présenterait les avantages suivants : 

  • Le maintien du financement de l’Ukraine serait assuré même en cas de retrait du soutien américain.
  • Ce financement ne proviendrait pas des contribuables des pays alliés mais, indirectement, des contribuables russes.
  • Dotée d’une source de financement sûre, non soumise aux caprices des politiciens américains, l’Ukraine retrouverait un poids considérable dans le processus de paix. Les inquiétudes qui semblent avoir provoqué une paralysie de la part des pays européens détenant les avoirs gelés — de vagues préoccupations concernant le droit international et les dommages potentiels à la réputation de l’Union en tant que garant de la sécurité des avoirs d’États étrangers — semblent dérisoires par rapport au risque qu’un pays européen soit contraint de céder à la fois son territoire et son indépendance politique à un voisin détenteur de l’arme nucléaire.
  • Les alliés de l’Ukraine détiendraient un privilège sur les actifs gelés de la Russie et une garantie sur la demande de réparation de l’Ukraine contre la Russie. En d’autres termes : la mise en place d’un tel mécanisme garantirait que personne à la table des négociations ne puisse céder sur les actifs ou la demande de réparation sans le consentement de ces pays.
  • Enfin, cela démontrerait que l’Europe a encore en main des cartes très fortes — et qu’elle est prête à les jouer.

Sources
  1. Hugo Dixon, Lee Buchheit et Daleep Singh, Ukrainian Reparation Loan : How it Would Work, 20 février 2024. SSRN : https://ssrn.com/abstract=4733340

 

JD Vance accuse l’UE de bâillonner les opinions qui dérangent les élites

JD Vance accuse l’UE de bâillonner les opinions qui dérangent les élites

Mandatory Credit: Photo by dts News Agency Germany/Shutterstock (15150588as)
Munich Security Conference 2025: James David « JD » Vance, Vice President of the United States, delivers a speech
Munich Security Conference 2025, Hotel Bayerischer Hof, Germany – 14 Feb 2025/shutterstock

par Samuele Furfari – Revue Conflits – publié le 18 février 2025

https://www.revueconflits.com/jd-vance-accuse-lue-de-baillonner-les-opinions-qui-derangent-les-elites/


JD. Vance, le vice-président des États-Unis, lors de la conférence de Munich sur la sécurité, a vivement critiqué l’élite européenne, visiblement mal préparée à entendre ses propres contradictions. Cette dernière est habituée depuis des années à ne rencontrer aucune opposition. Vance a osé exprimer publiquement ce que les exclus des médias et de l’élite affirment également depuis longtemps, mais pour lesquels ils sont marginalisés et tournés en dérision. Ce n’est pas étonnant qu’il y ait eu très peu d’applaudissements.

Dernier livre paru de Samuel Furfari : Dernier livre « Énergie, mensonges d’état. La destruction organisée de la compétitivité de l’UE » | L’artilleur

Vance à Munich, un discours qui dérange

On a pu presque entendre en fond sonore la célèbre chanson de Guy Béart, « Le premier qui dit la vérité, il doit être exécuté », tant la réaction outrée des dirigeants européens illustre à merveille ce refrain. Vance, en fidèle shérif adjoint du « nouveau shérif en ville » comme il a nommé Trump, est venu faire la leçon aux Européens. Force est de constater que les habitués du cercle Bruxelles-Strasbourg n’ont pas apprécié que la tornade Vance, avec un discours calme et, argumenté, sans aucune note tant il maîtrise son sujet, ait évoqué sans détour les attentats liés à une immigration mal maîtrisée, les restrictions à la liberté d’expression au nom de la lutte contre la « désinformation », l’énergie chère, et même les velléités d’annulation d’élections qui ne conviendraient pas à certains. Toutes ces choses, les médias non subventionnés les dénoncent, mais elles restent inaudibles pour la prétendue élite.

L’ironie de la situation n’échappe à personne. L’irritation des dirigeants européens, telle celle d’Olaf Scholz et de Boris Pistorius (le ministre allemand de la Défense ayant utilisé deux fois le mot « inacceptable »), confirme le diagnostic de Vance. À son appel à laisser libre cours à la parole, ils ont répondu qu’il n’avait pas le droit de dire cela. Pendant que l’UE se drape dans sa vertu prétendument morale et ses valeurs supposément inébranlables, mais dont une grande part de la population européenne ne supporte plus, la tornade Vance a eu l’audace de pointer du doigt les failles béantes dans leur discours.

Le réveil brutal : les critiques de Vance à l’égard de l’UE

L’establishment européen, pris de court par la tornade Trump-Vance, se retrouve dans la position inconfortable de devoir justifier l’injustifiable. Habitués à prêcher la bonne parole à des auditoires et médias acquis, ils se sont retrouvés déstabilisés et humiliés par un discours qui brise leurs codes et remet en question leur narratif bien huilé. Ils ne pouvaient que le rejeter.

Peut-être est-il temps pour l’Europe de descendre de son piédestal moral et d’écouter réellement les critiques, aussi dérangeantes soient-elles. Car comme le suggère la chanson de Béart, tenter d’exécuter le messager ne fera pas disparaître le message pour autant.

La liberté d’expression en question : exemples de censure en UE

Malgré les déclarations de Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, qui a réagi au discours de Munich en affirmant que « la liberté d’expression est garantie en UE », la réalité montre une tout autre image. Autrefois considérée comme un pilier de la liberté d’expression, l’UE emprunte désormais une voie qui soulève des questions quant à sa gestion de l’information et de la liberté d’expression.

Prenons l’exemple de la RTBF, la chaîne de télévision publique belge qui s’est permis de diffuser le discours d’investiture de Donald Trump en « léger » différé le 20 janvier 2025. Sous prétexte de « prendre le temps de l’analyse », la chaîne s’est arrogé le droit de filtrer les propos du président américain, instaurant de facto une forme de censure préventive. Cette décision, justifiée par un soi-disant « cordon sanitaire médiatique », n’est rien d’autre qu’une atteinte à la liberté d’information des citoyens belges.

En France, la situation n’est guère plus reluisante. La fermeture de C8 et la mise sous tutelle de CNews par l’Arcom illustrent une volonté manifeste de museler les voix dissidentes. Ces chaînes offraient une alternative au discours dominant. Leur disparition ou leur contrôle étroit par l’autorité de régulation représente un appauvrissement du débat public et une atteinte à la pluralité des opinions.

Mon cas personnel est également révélateur de cette dérive. En tant que professeur à l’Université Libre de Bruxelles et expert en énergie, j’ai été marginalisé dans ma propre université et privé de parole dans les médias belges pour avoir osé remettre en question l’utilité des éoliennes pour lutte contre le changement climatique. Cette mise au ban académique et médiatique démontre l’intolérance croissante envers les opinions qui ne s’alignent pas sur le consensus décrété par le pouvoir profond comme l’appelle Donald Trump.

Il est grand temps de reconnaître que l’UE, malgré ses prétentions, est en train de bafouer l’un de ses principes fondamentaux : la liberté d’expression, et parfois même la liberté académique. La chanson de Guy Béart, « Le premier qui dit la vérité », n’a jamais été aussi pertinente. Aujourd’hui, dans l’UE, celui qui ose dire une vérité qui dérange risque effectivement d’être « exécuté » médiatiquement et professionnellement.

Cette tendance à la censure et à l’uniformisation de la pensée est non seulement dangereuse pour nos démocraties, mais elle nourrit également le ressentiment et la méfiance envers les institutions européennes. Il est crucial de revenir aux fondamentaux de la liberté d’expression, même si cela implique d’entendre des opinions qui dérangent ou qui remettent en question le statu quo. C’est à ce prix seulement que l’UE aura le droit de prétendre être un véritable espace de liberté et de démocratie.

Financements opaques et contrôle de l’opinion : le scandale révélé

Il est impossible de comprendre le discours de Munich et l’opposition féroce qu’il a suscité si l’on ignore le contrôle de l’opinion publique par des financements de la part des gouvernements qui ont façonné la politique occidentale. Le scandale actuel à Bruxelles expose des pratiques troublantes de la Commission européenne concernant le financement d’ONG et de médias pour promouvoir son Pacte vert. Des documents révèlent qu’elle aurait financé des ONG environnementales pour faire pression sur les eurodéputés et les États membres en faveur de ce pacte, une pratique qualifiée d’« inappropriée » par Piotr Serafin, le nouveau commissaire au Budget.

J’ai expliqué ce processus d’endogamie dans un article récent. Il se manifeste à travers des programmes officiels qui financent des ONG écologistes dans une chaîne sans fin de projets. À leur terme, ces projets nécessitent de nouvelles études, mais toujours avec les mêmes bénéficiaires.

Des ONG financées par les Etats pour lutter contre la science

MCC-Europe vient de publier un rapport marquant qui dévoile l’utilisation abusive des fonds publics par la Commission européenne, ayant consacré des milliards d’euros à un réseau opaque d’ONG et de groupes de réflexion pour promouvoir son programme politique tout en étouffant les voix dissidentes. Ce vaste système de propagande UE-ONG porte atteinte à la démocratie et constitue une trahison majeure envers les citoyens européens. J’ai expliqué un processus d’endogamie dans un article récent sur le site Science-Climat-Énergie. Il se manifeste à travers des programmes officiels qui financent des ONG écologistes dans une chaîne sans fin de projets. À leur terme, ces projets nécessitent de nouvelles études, toujours réalisées par les mêmes bénéficiaires, créant une collusion qui conduit à une monoculture de la pensée.

Parmi les ONG écologistes impliquées figurent le Bureau européen de l’environnement et des bénéficiaires du programme Life. Ces contrats visaient explicitement à influencer certains députés pour soutenir les initiatives de Frans Timmermans, l’ancien premier vice-président de la Commission européenne responsable de la doctrine verte. Certaines ONG subventionnées, comme Friends of the Earth Europe (1,5 million d’euros) et Climate Action Network, ont des lignes d’actions politiques marquées, notamment contre le nucléaire.

Grâce à l’action du nouveau Department of Governmental Efficiency (DOGE) créé par le binôme Trump-Musk, il a été découvert que des médias prestigieux comme Politico et Reuters ont été financés par Washington. Ils auraient perçu des subventions totalisant 8,2 millions de dollars entre 2016 et 2025 au titre des actions humanitaires de l’USAid. Cet organisme officiel, qui finance 47 % de l’aide humanitaire dans le monde, est évidemment essentiel pour soulager les souffrances dans de nombreux pays, mais il est déplorable de constater qu’une partie des fonds a été détournée pour manipuler l’opinion publique. En Ukraine, 80 % des médias auraient collaboré avec l’agence, favorisant une dépendance accrue à Washington. Tous les fonctionnaires européens peuvent recevoir gratuitement sur leur bureau une copie de l’hebdomadaire Politico, qui ne manque pas de les formater à la pensée unique promue par la Commission européenne et l’administration Biden.

Des manipulations de l’opinion publique au sein même de l’UE

Cette affaire remet en question l’intégrité démocratique de l’UE, dénoncée par des eurodéputés comme une manipulation de l’opinion publique et une atteinte à la confiance dans les institutions. Elle souligne un besoin urgent de transparence dans les relations entre la Commission, les ONG et la paléopresse comme l’appelle le philosophe Drieu Godefridi. Ce que fait l’UE avec le contrôle des médias est — a dit Vance — « le moyen le plus sûr de détruire la démocratie ». À l’instar de ce qu’a fait la tornade Trump, l’UE a besoin d’un « EU Department of Governmental Efficiency (EU DOGE) » pour mettre fin à la dilapidation de nos taxes à des fins partisanes.

Malgré les défis actuels, des acteurs persistent à défendre l’éthique et la transparence, en particulier au sein des médias non conventionnels. C’est grâce à leur vigilance et à leur indépendance que l’espoir demeure de voir un retour à des pratiques plus intègres et responsables, essentielles pour rétablir la confiance des citoyens envers les institutions européennes et les médias en général.

Greta Thunberg et l’endoctrinement climatique : un rappel de Vance

JD. Vance a voulu faire rire en disant que : « Si la démocratie américaine peut survivre à dix ans de sermons de Greta Thunberg, vous pouvez survivre à quelques mois d’Elon Musk. » Mais personne n’a ri et les médias subventionnés se sont empressé de se moquer de J. D. Vance sans se rendre compte que c’est précisément pour cela qu’il l’a dit.

La militante pour le climat avait rapidement acquis une notoriété mondiale disproportionnée au regard de son jeune âge et de son manque d’expertise. L’accueil que lui a réservé Ursula von der Leyen a été choquant : elle a été reçue à la table de la Commission européenne avec les honneurs habituellement réservés aux chefs d’État. Les Universités de Mons et d’Helsinki sont allées jusqu’à lui décerner un doctorat honoris causa. Le mouvement « Youth for Climate », initié par Thunberg en 2018, soulève des questions quant à son origine et sa propagation rapide. Cette expansion fulgurante suggère un soutien coordonné de la part des institutions européennes et des médias grand public.

Des commissaires européens comme Maroš Šefčovič, étrangement en poste depuis 2009, ont activement participé à des initiatives impliquant des jeunes et le climat, financées par des programmes aux liens étroits. Ces actions révèlent une volonté manifeste de l’establishment européen d’influencer la jeunesse sur les questions climatiques.

L’attention médiatique disproportionnée accordée à Greta Thunberg, notamment sa désignation comme personnalité de l’année 2019 par le Time Magazine, révèle l’ampleur de la manipulation orchestrée par l’État profond aux États-Unis comme dans l’UE. L’endoctrinement a conduit à une jeunesse européenne largement influencée par cette idéologie climatique. Bien que le site officiel de Youth for Climate semble moins actif depuis 2022, l’impact de ce mouvement sur la sensibilisation des jeunes Européens aux enjeux climatiques reste significatif et continue d’influencer les politiques européennes.

Ce n’est donc pas par hasard que le vice-président des États-Unis a rappelé aux élites européennes leur admiration béate, pourtant totalement injustifiée, de cette égérie. Il a souligné que ce type de contrôle des médias et de manipulation de l’opinion publique représente « le moyen le plus sûr de détruire la démocratie ». Il est crucial de remettre en question ces narratifs imposés et de promouvoir un débat ouvert et équilibré sur les questions climatiques et énergétiques.

Notons en passant qu’en mentionnant Elon Musk dans sa comparaison, Vance semble suggérer que l’influence de Musk, bien que significative, pourrait être transitoire. Cette remarque peut être interprétée comme une tentative de relativiser l’importance accordée à certaines figures médiatiques dans le débat public.

L’entêtement de la Commission européenne : vers une destruction économique ?

En fin de compte, le discours de Vance aura eu le mérite de mettre en lumière le fossé grandissant entre les élites européennes et les réalités du terrain. Alors que ces dernières persistent dans leur déni, refusant d’admettre leurs erreurs et leurs contradictions, Vance a joué le rôle du grain de sable dans la machine bien rodée du politiquement correct européen.

La Commission européenne a fait savoir qu’elle travaille sur un paquet législatif appelé « omnibus » dans lequel elle prévoit une réduction de 90 % des émissions de CO₂ d’ici 2040. C’est de l’entêtement, c’est se moquer d’une large partie de l’opinion publique qui ne veut plus entendre parler de ces réductions inutiles et coûteuses. Rappelons que dans le monde, les émissions de CO₂ ont augmenté de 65 % depuis l’adoption de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et que l’Europe ne représente que 7 % de ces émissions. Si l’on veut détruire l’économie européenne plus rapidement, c’est exactement ce qu’il faut faire. Trump ou pas Trump, Vance ou pas Vance, on ne peut pas continuer à mentir sur des questions aussi cruciales pour notre avenir. Nous ne pouvons pas permettre à l’UE de poursuivre la destruction organisée de notre économie, comme je le démontre dans mon livre « Énergie, mensonges d’État ».

Un appel au courage et à l’écoute

Vance, l’ancien Marine, le catholique pratiquant, aura fait son devoir en suivant le très vieux précepte biblique « tu ne manqueras pas de reprendre ton prochain pour ne pas te charger d’un péché » (Lévitique 19,17). Lui a fait son devoir ; nos dirigeants vont-ils avoir le courage de l’écouter ?

USA-EUROPE ? La dette et les haches

HUMEURS

USA-EUROPE ? La dette et les haches

Denis Jacquet (*) – Esprit Surcouf – publié le 25 janvier 2025
Entrepreneur fondateur de Top Cream

https://espritsurcouf.fr/humeurs-usa-europe-la-dette-et-les-haches-par-denis-jacquet_240125/


L’auteur, au regard de ce qui prévaut outre-Atlantique, estime que la dynamique argentine et l’influence trumpiste ouvrent la voie à des politiques de réduction drastique des rouages onéreux de l’Etat…y compris en France.

Le mouvement est lancé. Il est massif. Il est convergent. Il est multiple. Un populisme de droite, anticentralisateur, anti-dette et privilèges, décidé à « dégraisser le mammouth façon puzzle », une façon d’allier la formule qui a valu sa place à Claude Allègre et en référence au maître du mot qui fusille, Audiard. Le mot qui circule est simple, ces technocrates s’engraissent à votre détriment, ils pillent la bête pendant que vous tirez la langue et mangez parfois difficilement à votre faim. Ils donnent à l’Ukraine par milliards et rien pour vous. Ils sont déconnectés ? Alors déconnectons les définitivement afin de les rendre à un emploi enfin utile pour la société. Pour faire simple.

À l’heure des populismes

Ce mouvement est qualifié de populiste. C’est vrai. Mais nous sommes manipulés par un jargon journalistique et intellectuel (ou pseudo intello) qui aime à labéliser les idées et mouvements qui ne conviennent pas à leur référentiel, celui qui garantit leur situation et leur rente, pour mieux les disqualifier. Ceux qui questionnent les problèmes liés à l’immigration sont forcément des « xénophobes » et bien entendu « d’extrême droite », bien que les barbares les plus dangereux sont pourtant désormais, bien à gauche, et trônent à l’assemblée quand leur place serait ailleurs (20 de leurs élus sont en cours d’instruction pour harcèlement sexuel, d’autres pour apologie du terrorisme raison pour laquelle ils ont voulu amender la loi qui punit ce type de crime ou simplement fichés S..le gratin !!). On appelle cela la LFI. Ils sont membres d’un front dit Républicain, alors que la LFI est tout sauf républicaine, ou alors Républicaine Islamique, tant sa passion pour les frères musulmans la distingue de nombre de forces d’extrême gauche d’autres pays. Ceux qui sont un peu ou beaucoup Souverainistes sont forcément de dangereux « fachistes », ce qui fait rire un homme pourtant de gauche, qui dénonce ces supercheries, le philosophe Michel Onfray. Ce qui est rassurant.

Le problème c’est que les « gens » votent pour eux. Et massivement. Partout. Si l’on faisait un tant soit peu preuve de jugement, de tolérance, ou simplement d’intelligence on devrait quand même se poser la question de savoir pourquoi. Ce ne sont pas de pauvres décérébrés, des inutiles nocifs de droite, qui remplaceraient les idiots utiles de gauche. D’ailleurs, pour ce qui concerne la France, ce sont des ouvriers qui votaient à gauche de père en fils depuis 3 générations et qui votent désormais pour le RN. Ils sont passés d’une force devenue nocive et dangereuse (extrême gauche) à une force devenue puissante malgré son incompétence (extrême droite).

Pourquoi votent-ils ainsi et pourquoi le discours qui s’appuie sur la gabegie, l’anti-centralisme, trouve-t-il aussi facilement son chemin ?

Ils vivent dans des villes petites et moyennes, abandonnées par tous. USA ou Europe, France, même combat. Plus d’entreprises, plus d’emplois, plus d’écoles, plus d’hôpitaux, plus de services publics. Le désert et pas seulement médical. Les communautés de communes et métropole, une supercherie suprême inventée par ceux qui anticipaient la disparition des départements, et l’allègement du mille-feuille administratif à la Française, ont ainsi inventé 2 échelons pour remplacer celui que l’on pourrait leur « voler ».

Ils voient disparaître les derniers emplois qui leur restaient, notamment depuis cette folle politique française du Covid qui vient, comme c’était prévisible (et que j’avais annoncé en 2021), voler la vie, un record en 30 ans, la vie à 40 000 PME, du jamais vu dans notre pays d’origine. Chiffre qui va encore s’aggraver du fait du crime en bande organisée que les députés de la LFI et du RN associés s’amusent à commettre et va coûter des années de croissance à notre pays, avec la complicité d’un PS qui n’a définitivement plus de consistance et de LR abasourdis par sa propre impuissance.

Ils se retrouvent au Resto du Cœur qui devient leur seul espoir de manger à leur faim, des fruits, légumes, poissons, devenus des produits de luxe, grâce, à nouveau à la politique folle d’une partie de l’Europe, des USA, du Canada ou encore de l’Australie pendant le Covid. Les seuls pays qui échappent à ce marasme (ou Etats comme la Floride ou le Texas) sont ceux qui n’ont pas cédé aux sirènes du confinement intensif. Les autres sont au fonds du trou, sans voir sauvé plus de vies que les « non confinants ». Beau résultat !

Toutes ces femmes et ces hommes sont désespérés, et il faut vraiment vivre à NYC ou Paris, pour ne pas le réaliser. Trump, qu’il puisse ou non leur apporter une solution réelle, ou Milei en Argentine, l’ont compris. Et ils ont décidé de leur livrer la bête à dépecer, afin de prouver qu’elle vivait de trop de gras, sans intérêt pour quiconque sauf eux-mêmes. C’est ainsi que le mouvement s’est lancé. Si l’on veut avoir un aperçu de ce que cela peut donner, il faut regarder l’Argentine.

Le bilan argentin : un exemple à suivre pour les Etats-Unis ?


Les champions du prêt à penser, les olympiens de la bienpensance, se sont empressés de moquer ce terroriste de la dépense publique et ennemi du tout État. Il allait échouer, c’est certain. Les mêmes annonçaient d’ailleurs, en France comme aux USA, la victoire de Harris face à Trump. Avec le succès que l’on sait.

Bilan argentin. État dégonflé. Excédent budgétaire. Inflation passée de 17% à moins de 3%. Du jamais vu en 40 ans en Argentine. Cela questionne malgré des effets à priori temporaire sur la pauvreté. Mais la véritable pauvreté n’est-elle pas de n’avoir aucun avenir ?

La méthode Milei est assez simple et néanmoins différente à certains égards, de la proposition de Trump. Notamment sur le sujet de l’impôt. Milei n’a pas pour méthode, ni pour objectif de baisser massivement les impôts comme Trump l’a fait pendant son premier mandat et pourrait le faire à nouveau. Notamment sur les pourboires, qu’il avait proposé de défiscaliser. Idem sur les cryptos dont Trump veut se faire le champion. Pas de traces identiques en Argentine.

Milei c’est moins d’État. Les agences inutiles, les subventions trop nombreuses, les dépenses non productives, les emplois non justifiés et toujours plus nombreux. Sabrées à la hache. Sans trop d’égard pour les effets sur la pauvreté, mais on ne peut pas guérir tous les maux à la fois. Il est à observer, que la pauvreté semblerait commencer à baisser.

Désormais cela va être le tour des USA. Elon Musk le champion du déshabillage/rhabillage des process, génie de la réussite sur base de coût amoindris et de process super efficaces, va tester sa capacité à faire au niveau d’un État, ce qu’il a su faire brillamment dans ses entreprises. La question reste ouverte. Sa mission c’est essentiellement de mettre fin à la gabegie hallucinante que représente le surpoids de l’État, mais surtout de remédier à son inefficacité. Tout à fait dans les cordes de Musk. Bien entendu, à la dernière minute, il y aura des arbitrages politiques. La décision en politique dépend de nombreux facteurs et souvent l’efficacité n’est pas son critère de choix principal.

La façon de le gérer sur X est d’ailleurs perturbante, mais compréhensible. En annonçant sur twitter les cibles à abattre ou mettre au régime, on rassemble ainsi le camp qui a voté Trump, autour d’une cible terrorisée qui hésitera à se battre aussi ostensiblement pour ses privilèges. On n’imaginait pas, il y a 15 ans qu’une partie de la gestion présidentielle pourrait ainsi se dérouler sur Twitter ou tout autre réseau social plutôt que dans les enceintes de la république ou de l’État. Il y a un côté indécent et un côté intéressant à cette gestion. L’indécence est de gérer des idées et projets en 140 caractères. L’intérêt est de voir comment le monde entier s’est immédiatement mis au garde à vous, ou à minima en ordre de réaction à ces annonces un peu X…

En revanche Musk semble ne plus avoir de limites, et le fait de considérer que le parti allemand (AFD) serait celui sur lequel il faudrait se reposer pour redonner du lustre à l’Allemagne, alors qu’une partie de ses rangs sont des néo nazis, commence à inquiéter à juste titre. Créer un anti-Soros, n’apportera pas plus d’équilibre, il en rajoutera.

Quelle voie pour la France ?

Il nous faudrait la même chose dans notre bonne République. Cette vingtaine d’agences inutiles que nous connaissons toutes et tous, qui coûtent sans bénéfices pour la nation. Ces agences de santé ARS, dénoncées par tous pour leur inutilité quasi-totale et leurs décisions désastreuses. Les CNIL et autres agences qui, au final, augmentent leur budget chaque année, sans être comptables de leurs résultats.

Ce ministère de l’agriculture qui a vu son nombre de fonctionnaires multiplié par 2 pendant que ses bénéficiaires et ses montants distribués ont été diminués par deux. Plus de 40 000 jobs injustifiables quand des centaines d’agriculteurs à la retraite, qui nous ont nourri, reçoivent eux 600€ par mois et se suicident massivement pour échapper à leur détresse. Et je ne compte pas ces postes fantaisistes (Ségolène Royal ambassadeur pour l’antarctique pour un salaire et des avantages que je n’ose écrire ici par honte pour la France, ou Rama Yade à Washington. Jack Lang à l’institut du monde arabe que la France renfloue.). Les frais des membres du conseil constitutionnel. La retraite des députés obtenues en 2 mandats quand il faut toute une vie pour un salarié du privé, autrement utile à la société. Etc.

Le rapport Perotin, que le gouvernement de l’époque avait interdit d’accès, dénonçait également ces dizaines de milliers de fonctionnaires fantômes, qui en réalité étaient des « syndicalistes » recasés pour s’attirer les faveurs de leur syndicat d’origine qui n’avais pas les moyens de les entretenir. Ils sont toujours là pour la plupart. On pourrait également parler des centaines de fonctionnaires « hors cadres », qui, déplaisant à tel ou tel pouvoir politique, sont mis au « placard », payés à ne rien faire alors que les Consulats et Ambassades manquent de bras pour assumer leurs tâches partout dans le monde.

Mais ce n’est rien à côté de la dérive de la sécu, une santé gérée contre tout bon sens et surtout, surtout, l’inflation des collectivités territoriales, en pleine dérive salariale, multipliant le clientélisme qui ferait rougir Cuba ou certains États Africains (et dieu sait que j’aime l’Afrique), de la Mairie de Paris, qui achète sa réélection coup d’emplois « fictifs », destinés à gagner leur vote futur de tous, y compris à droite. La part de ces dépenses dans le budget de l’État a plus que doublé dans les 10 dernières années, représentant une charge in supportable pour l’État.

Tout cela représente une gabegie et aboutit à un millefeuille de type cloaque, qui promettait des regroupements et moins de coûts, et a accouché de poignées d’amour et d’obésité. En effet, le jour où l’on a évoqué la disparition du Département, les Maires des grandes villes et députés (souvent ils cumulaient les 2 fonctions), se sont empressés de créer les communautés de communes et les métropoles, empilant au passage des dépenses pharaoniques supplémentaires.

Il faut, malheureusement, y aller à la tronçonneuse, dégraisser le mammouth, Allègre avait raison, mais il ne fait pas bon le dire en France, mais cela va changer.

Plus vite que nous ne l’imaginons.   A suivre.

 

* Denis Jacquet est diplômé d’HEC (89) et titulaire d’un Maîtrise de Droit des Affaires. Il a été jusqu’en 1992 avocat fiscaliste chez Baker & Mac Kenzie, dirigé par Christine Lagarde.

Il est depuis l’âge de 25 ans, Entrepreneur et a développé plusieurs entreprises qu’il a revendues. Il est le fondateur et CEO de Top Cream, un service B2B, sorte de Netflix des meilleures conférences mondiales. Par ailleurs, il est chairman (USA) de la principale ONG Sahélienne, SOS SAHEL, dédiée à l’Afrique sahélienne et son développement économique pour le recul du désert www.sossahel.org.

En 2018, il a fondé le Mouvement Day One (2018), guide mondial pour la vision technologique positive, ainsi qu’en 2016, une fondation dédiée à l’impact de l’IA sur les jobs et la société, l’observatoire de l’Ubérisation . Il a été en 2013 l’un des initiateurs du mouvement des Pigeons contre les mesures fiscales de François Hollande et porte-parole des Assises de l’Entrepreneuriat.
Il est chroniqueur chez Atlantico et un habitué de CNews, Europe1, BFM business, RCF…
Il est également l’auteur de livres à succès « Ubérisation : Un Ennemi qui vous veut du bien ? » (Dunod) et « Pourquoi votre prochain patron sera Chinois » (Eyrolles).

Son dernier livre « COVID : Début de la Peur, fin d’une démocratie » a été publié, en 2021, aux éditions Eyrolles.

 

Sur quoi le chantage algérien repose-t-il ? Editorial de Bernard Lugan

Sur quoi le chantage algérien repose-t-il ?

Editorial de Bernard Lugan – février 2025

Le jusqu’auboutisme algérien se manifeste par des errements diplomatiques apparentés à une fuite en avant. 
En plus de l’état de quasi-guerre que l’Algérie entretient avec le Maroc, de ses provocations à l’égard de la France, de sa rupture avec le Mali et des sanctions commerciales qu’elle vient de décider contre la Colombie et le Panama qui ont reconnu la marocanité du Sahara occidental, voilà que les gérontes au pouvoir à Alger viennent de provoquer une grave crise avec la Turquie (voir page 17 de ce numéro).
L’amateurisme-fanatisme d’Alger est le reflet d’un régime aux abois qui se raidit et se crispe au lieu de tenter d’acheter sa survie par une profonde remise en cause. La situation de l’Algérie est en effet dramatique à deux grands titres :
– L’État meurt de l’intérieur, écrasé par ses propres contradictions et ruiné par les prévarications de sa nomenklatura.
– Cette agonie de l’État provoque l’isolement de l’Algérie, sa perte de crédibilité et sa marginalisation sur la scène internationale. Ce qui conduit à une crispation débouchant aujourd’hui sur une impasse répressive qui va finir par faire exploser le pays.
Le pire est que les dirigeants algériens semblent se comporter comme des suicidaires cherchant névrotiquement à se rapprocher du pire. 
A y regarder de près le pouvoir en place à Alger parait en effet avoir clairement décidé de s’auto-détruire et de précipiter le pays dans l’abîme. Comme si, seule la politique du pire pouvait lui fournir une ultime bouffée d’oxygène avant de trépasser. Après avoir dilapidé ses ressources humaines et financières, l’Algérie est aujourd’hui exsangue.
Or, au lieu de profiter de la situation pour enfin mettre à plat le contentieux qui oppose la France et l’Algérie, les dirigeants français vont une fois de plus composer. 
Et pourquoi ? 
Ce n’est pas une pression économique que peut exercer l’Algérie puisque le gaz et le pétrole ne représentent respectivement que 8% et 9% de la consommation française. Quant au commerce de la France avec l’Algérie, il ne compte pas puisqu’il n’est en moyenne que de 12 milliards d’euros pour un commerce extérieur français global moyen de 770 milliards d’euros. 
– Ce n’est pas davantage le poids d’une cinquième colonne immigrée dont les éventuels agissements illégaux pourraient être facilement réglés par de fermes mesures de simple police…
Alors ? Là est en effet toute la question…

Un préalable, restaurer la Nation (CMF – Dossier 31)

Un préalable, restaurer la Nation (CMF – Dossier 31)


Le général (2S) Olivier de Becdelièvre attire notre attention sur la fragilité de notre société. Elle souffre de maux qu’il convient d’affronter pour restaurer une Nation qui doit être en mesure d’affronter les périls qui nous guettent.

 * * * 

Si l’on en croit les sondages, les armées jouissent, parmi les institutions de notre pays, d’un haut degré de popularité. Les actions de communication conduites à l’occasion d’événements nationaux ou locaux semblent le confirmer. Les militaires français sont, dans l’ensemble, bien perçus et les armées sont l’objet d’un large soutien de la population.

Au-delà de ce consensus encourageant, l’évolution des perspectives stratégiques depuis une quinzaine d’années, révélée par l’intervention russe en Ukraine et par les rebondissements du conflit au Moyen-Orient, pose la question de notre capacité à faire face à des situations susceptibles de remettre en cause les fondements de notre société. Qu’en serait-il si la France était impliquée dans un conflit de haute intensité en Europe ou devait affronter une déstabilisation majeure de sa situation intérieure ? Faire face à de tels défis nécessite une volonté commune et une adhésion profonde du corps social.

Il s’agit donc de déterminer si notre société marquée par une montée de l’individualisme, la remise en cause de ses fondements et une mixité sociale croissante demeure capable de « former Nation » et de trouver en elle-même les ressorts d’une défense crédible parce que fondée sur une volonté commune. L’efficacité des armements dont nous nous dotons doit s’accompagner d’un regain de l’esprit de défense, étroitement lié à la cohésion et au moral de la Nation. Il convient alors de s’interroger sur la nature des moyens à employer pour le conforter.

Individualisme et remises en cause

L’individualisme comme forme extrême de la liberté individuelle, écartant d’emblée les contraintes extérieures, et en premier lieu les préceptes moraux, semble caractériser l’évolution de nos sociétés occidentales, et parmi elles de la société française, qui, pour reprendre l’expression de Jérôme Fourquet[1], s’est « archipélisée ».

Entendons par là que l’organisation sociale de jadis, articulée autour de grands pôles, parfois antagonistes, tels que la défense de l’État laïc et républicain, le soutien à l’Église catholique et aux valeurs chrétiennes, l’affrontement entre le capitalisme et le prolétariat orchestré par le Parti communiste et ses soutiens, s’est aujourd’hui comme disloquée. Est en cause l’influence de facteurs divers, parfois liés, mais pas nécessairement, tels que l’effacement progressif des références chrétiennes, l’émancipation des mœurs, la remise en cause de l’État, la perte de crédit des partis politiques traditionnels, mais également la transition d’une économie de production vers une économie de services.

L’on constate en effet l’émergence de générations beaucoup plus individualistes que leurs aînées, et généralement réticentes à s’engager, que ce soit pour une cause collective, au service d’une Église, d’un parti ou d’un corps de l’État, ou pour fonder une famille. À la « crise des vocations », en particulier religieuses, répondent le déclin généralisé de l’institution matrimoniale et le recul de la natalité, tendances lourdes constatées en Europe occidentale depuis le milieu du XXe siècle. Simultanément, pour s’en tenir au domaine de la défense, le Service national, perçu comme inégalitaire et attentatoire à la liberté individuelle des garçons, est de plus en plus mal accepté de la jeunesse[2]. L’annonce de la suspension de la conscription par le Président Chirac, en février 1996, rendue possible par le contexte international, est ainsi accueillie avec soulagement par une société soucieuse de toucher les « dividendes de la paix », une paix supposée durable, sinon perpétuelle.

Un autre signe de la démobilisation de notre société est le désintérêt de la population pour la chose publique, en tout cas pour sa forme institutionnelle. Ainsi le taux de participation aux élections s’effrite-t-il régulièrement, abstraction faite de sursauts inattendus, dont celui des législatives de 2024, encore que de manière différenciée selon les types de scrutin[3]. Cette évolution préoccupante pose naturellement la question de la représentativité des élus, voire de leur légitimité vis-à-vis de l’opinion publique, et ce d’autant plus qu’elle s’accompagne d’une défiance croissante vis-à-vis d’institutions dans lesquelles nombre de nos concitoyens ne se retrouvent plus. Les épisodes électoraux de l’été 2024 et la difficulté à former un gouvernement acceptable par des factions revendiquant une victoire électorale aussitôt contestée par leurs adversaires n’ont rien amélioré, ni surtout résolu les questions qui préoccupent et, souvent, divisent nos concitoyens. L’organisation sans faille et le déroulement sans faute des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, soutenus par un engagement massif de bénévoles, ont certes témoigné d’un vif intérêt national, mais n’ont, semble-t-il, constitué qu’une trêve.

Une société « écartelée » ?

La désaffection constatée pour la politique au sens large, celui du « soin de la cité » semble révélatrice d’une fragmentation de la société, dont on peut s’interroger sur sa volonté de construire un avenir commun.

Cette fragmentation est, pour une part, ethnique en raison de la présence sur le sol national d’une population d’origine immigrée de plus en plus nombreuse et dont l’assimilation demeure problématique, à supposer qu’elle soit souhaitée par les intéressés eux-mêmes. Son importance numérique est difficile à évaluer en l’absence de statistiques ethniques. Sans tenir compte de l’immigration illégale, la population récente d’origine immigrée sur le sol national est de l’ordre de 7,3 millions de personnes sur une population de 68,1 millions d’habitants (10,7 %), dont 2,5 millions ont acquis la nationalité française, tandis que 1,7 million de personnes de nationalité française sont nées à l’étranger. Selon que l’on inclut ou pas les personnes nées de nationalité française à l’étranger, la population considérée comme « immigrée », pour près de la moitié d’origine africaine[4], compte pour 10,7 % à 13,1 % de la population nationale.

À l’inverse des enfants de la population d’origine polonaise, italienne ou ibérique installée au long du XXe siècle, une partie des immigrés récents, le plus souvent de culture musulmane, cherche peu à s’intégrer à la population autochtone, ayant au contraire tendance à se rassembler en communautés. Souvent regroupée dans de grands ensembles immobiliers, vivant en vase clos en périphérie des villes, cette population tend à développer une vie sociale propre, conforme à leur culture d’origine. Sans généraliser force est de constater que, sous la coupe violente d’une petite minorité organisée en bandes, certaines cités sont devenues de modernes ghettos souvent synonymes de zones de non-droit et d‘insécurité, vivant de trafics illicites, dont celui des stupéfiants n’est pas le moindre. Repliée sur elle-même, en marge des lois de la République, cette population devient ainsi un vivier à la disposition d’agitateurs de tous ordres, propre à alimenter le terrorisme. Les symboles de la puissance publique que sont policiers, pompiers, enseignants ou simplement édifices publics y sont sporadiquement pris à partie au cours d’épisodes de violences urbaines devenus répétitifs.

À cette fracture vient s’ajouter une fracture économique et sociale, en raison notamment de la forte régression des activités de production au profit de celles de services. À une activité structurée par l’existence de groupes animés peu ou prou par un esprit d’entreprise a succédé une économie de distribution où coexistent structures logistiques centralisées et agents d’exécution de tâches élémentaires ne nécessitant pas ou peu de qualification. Ainsi viennent à s’opposer en quelque sorte les « gagnants » et les « perdants » des transformations économiques des dernières décennies. Une élite culturelle qui, globalement, profite, ou a profité, de l’essor économique des dernières décennies, de l’ouverture des frontières, et de la mondialisation, constitue une « France d’en-haut », disposant de revenus confortables et plutôt optimiste, qui s’éloigne de plus en plus de ceux de nos concitoyens qui, au contraire, ont subi le choc de la désindustrialisation. Souvent déclassés, sans perspective d’évolution professionnelle ou sociale, ou se jugeant défavorisés à des titres divers, notamment par leur isolement dans la France des « territoires », loin des centres de décision, ils forment « la France d’en-bas », celle des « gilets jaunes » après avoir été celle des « bonnets rouges », ou celle des agriculteurs s’estimant trahis par le pouvoir. Cette partie de la population se considère peu ou prou comme exclue d’un système dont elle vient à dénier la légitimité.

L’évolution de cette société aux facettes multiples, souvent divisée contre elle-même, pose la question de sa capacité à « faire Nation », à se donner ou à retrouver les valeurs capables de mobiliser ses efforts, de surmonter l’individualisme ambiant comme les fractures constatées, en d’autres termes de reforger un esprit de défense.

Restaurer la Nation

Un esprit de défense ne saurait en effet exister et se développer sans un minimum de consensus autour de ce que nous voulons défendre, de manière concrète. Au-delà de l’invocation des « valeurs de la République », il s’agit pour nous de revenir à la question fondamentale de la Nation. « Qu’est-ce qu’une Nation ? » interrogeait déjà Ernest Renan en 1882[5], dans une conférence en Sorbonne demeurée célèbre et toujours considérée comme une référence pour nos diplomates. Si nous partageons en effet une « Patrie », héritage tant matériel qu’immatériel reçu de nos pères, si nous vivons en société au sein d’un même « État », organisation politique et sociale, la « Nation » peut se définir comme une communauté d’héritiers organisée en société et partageant de ce fait un certain nombre de valeurs, un projet commun, a minima une volonté de vivre ensemble, et autant que possible une vision partagée de l’avenir, le sien propre et celui des générations à venir. C’est ce que Renan lui-même exprime par « la volonté de continuer à faire valoir ensemble l’héritage qu’on a reçu indivis ». C’est à cette volonté de vivre et surtout de construire ensemble que l’on peut mesurer le « moral » d’une Nation, et c’est d’elle que procède, en grande partie, l’esprit de défense.

Il s’agit donc de traduire cette volonté de « continuer à faire valoir l’héritage » dans la réalité d’aujourd’hui, en s’attaquant aux facteurs de délitement de notre société, tant dans le domaine de la politique générale que dans celui de l’éducation individuelle et collective. Aussi nous faut-il réduire autant que faire se peut les facteurs de faiblesse de notre société parmi lesquels nous avons identifié la menace d’un flot migratoire mal maîtrisé et l’affaiblissement de la cohésion nationale due à la détérioration du lien social.

La maîtrise de l’immigration, légale ou non, est une question récurrente et les gouvernements successifs se sont efforcés depuis un demi-siècle de trouver un équilibre entre accueil des populations allochtones, intégration et « vivre ensemble », ce dont témoignent les « politiques de la ville » successives. On notera sur ce point une inflexion de la position de nos voisins européens, non plus seulement de la Hongrie, mais également du Danemark, de la Pologne et de l’Allemagne. Alors que l’Union européenne a, depuis 2015, plutôt facilité l’arrivée de populations extérieures, entre autres pour lutter contre les effets d’une démographie en berne,  la Commission européenne tient désormais un discours plus restrictif visant à durcir les conditions d’immigration au sein de l’UE.

Sans doute est-ce nécessaire, mais le problème immédiat semble davantage d’intégrer les populations d’origine étrangère déjà présentes sur notre sol et plus particulièrement nos concitoyens de fraîche date. Il s’agit de les faire participer davantage à la vie de la Nation, par un engagement personnel et collectif dans la vie de la cité. La jeunesse est concernée au premier chef et l’Éducation nationale contribue de manière méritoire à cette tâche. Elle doit être relayée par les différentes formes d’engagement que sont les clubs sportifs, les mouvements inspirés du scoutisme ou autres, en veillant naturellement à ce que ces structures ne contribuent à isoler les jeunes en renforçant les particularismes et en créant par-là de nouveaux ghettos. Il est surtout indispensable que les familles s’engagent en ce sens, tant l’environnement social et familial demeure prégnant.

S’attacher à limiter les conséquences de la fracture sociale est également une priorité, à défaut de pouvoir s’attaquer à ses causes qui sont à chercher dans l’évolution de nos sociétés tournées vers les activités de services au détriment de celles de production qui nécessitaient naguère des structures parfois lourdes, ou ressenties comme telles, mais souvent protectrices et encourageant souvent en leur sein le sens de l’effort collectif. Le « paternalisme » souvent critiqué des grandes entreprises, dont Michelin est resté un témoin emblématique, est souvent tombé en désuétude, sans avoir trouvé de successeur dans nos modernes sociétés de services qui s’y sont substituées.

Celles-ci ont en effet développé des métiers de la logistique, et souvent ceux de sa partie terminale, la distribution, générant des emplois souvent peu ou pas qualifiés, souvent instables et sans grandes perspectives de progression. Pour compenser l’effet déstabilisant de cette précarité, il parait nécessaire de développer les structures permettant aux individus un minimum d’épanouissement et de perspectives, et recréant un lien social générateur de motivation. Cet épanouissement peut être recherché dans une activité sportive, culturelle ou artistique, mais aussi par l’engagement personnel au service de la communauté, association locale ou corps de l’État. Le candidat à l’engagement dans les armées qui se présente au CIRFA est, bien souvent, un jeune en quête de repères et de motivations.

Les tentatives visant à remotiver la société et particulièrement la jeunesse, souvent accompagnées de leur sensibilisation aux questions de défense n’ont pas manqué, depuis la création du service civique en 2007 jusqu’à, plus récemment, l’institution du Service national universel. En dépit des critiques et des lenteurs de sa mise en œuvre, voire de sa remise en cause en raison de son coût, il s’est bien agi, dans l’intention du gouvernement, de « permettre la mise en œuvre du service national universel afin de renforcer l’engagement de nos concitoyens les plus jeunes dans la vie de la cité »[6].              La renonciation, par le Président de la République en mars 2023, à rendre obligatoire le SNU, puis sa disparition des priorités au cours de l’automne 2024 n’enlèvent rien à la pertinence d’un projet salué en son temps (octobre 2018) par Gabriel Attal,                     alors secrétaire d’État auprès du ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse et chargé à ce titre de sa mise en place, comme « la plus grande réforme de société du quinquennat ».

C’est en effet par une restauration du lien social et par une volonté de « vivre et construire ensemble » que passe l’esprit de défense, si nous entendons par là la manifestation collective des citoyens que nous sommes de construire la cohésion de la Nation face à des risques et menaces de plus en plus diversifiés, sachant que nous ne pourrons défendre collectivement que ce que nous partageons… et aimons.

Au-delà du travail de formation, d’éducation, de cohésion sociale auquel la communauté nationale doit s’astreindre, il est à notre sens nécessaire de s’attaquer également aux défis que sont l’évolution de la démographie et la mise en question de la cellule de base de la société qu’est la famille. Forger un avenir commun nécessite d’abord d’exister par-delà les générations et il parait hasardeux sur ce point de s’en remettre pour y parvenir à des populations allochtones porteuses d’autres valeurs que les nôtres. Sans renouvellement des générations, une Nation n’a pas d’avenir et, à la base de la construction sociale, il revient aux cellules familiales de jouer leur rôle fondamental de foyers d’éducation et de transmission des valeurs fondatrices de la vie en société.

Développer ces perspectives dépasse évidemment le cadre de cet article, mais il n’en demeure pas moins que l’avenir de la Nation dépend, au-delà de mesures ponctuelles indispensables, de choix de société allant pour une part à l’encontre de tendances bien ancrées dans l’air du temps. En aurons-nous, en tant que communauté, le courage ?

Conclusion

Alors que la perspective d’un engagement de nos forces armées dans un conflit de haute intensité n’est plus un simple cas d’école, et que le pays pourrait être déstabilisé par une montée de la violence sur fond de conflit social ou ethnique, il convient de s’attaquer aux fragilités de notre société que sont l’individualisme généralisé et les diverses fractures qui affectent le corps social. Ces maux sont connus, identifiés, et le plus souvent déjà combattus par les gouvernements successifs, avec des succès divers. La question qui se pose est celle du courage dont la communauté nationale doit ou devra faire preuve pour reconstruire, sinon « refonder » la Nation, autrement dit la question de « la volonté de continuer à faire valoir ensemble l’héritage qu’on a reçu indivis », condition nécessaire à notre défense comme à notre survie.


NOTES :

  1. Jérôme Fourquet, L’archipel français, Naissance d’une Nation multiple et divisée, Seuil, 2019.
  2. Manifestations contre la Loi Debré (1973) et la réforme des sursis, comités de soldats (milieu des années 70), opposition à l’extension du camp du Larzac (1975).
  3. Le taux d’abstention au premier tour des élections présidentielles est ainsi passé de 15,2 % à 26,31 % entre 1965 et 2022, celui des législatives de 22,8 % en 1958 à 52,49 % en 2022. Peut-être faut-il y voir une certaine défiance vis-à-vis du type de scrutin adopté pour les législatives, l’abstention au scrutin du 16 mars 1986, à la proportionnelle, ayant marqué un « point bas » relatif avec 21,5 %, mais les taux d’abstention mesurés pour l’ensemble des scrutins suivent la même tendance, y compris pour les élections municipales dont on pourrait supposer qu’elles touchent davantage les citoyens du fait des enjeux en cause : de 25,2 % en 1959, l’abstention reste relativement stable jusqu’en 1989 (27,2 %), puis augmente régulièrement jusqu’en 2014 (36,45 %) et fait un « saut » en 2020 avec 55,25 %.
  4. Données INSEE 2023.
  5. Conférence en Sorbonne du 11 mars 1882, publiée la même année chez Calmann-Lévy.
  6. Projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie démocratique présenté en conseil des ministres le 28 août 2019.

CERCLE MARÉCHAL FOCH

CERCLE MARÉCHAL FOCH

Le Cercle Maréchal Foch est une association d’officiers généraux en 2e section de l’armée de Terre, fidèles à notre volonté de contribuer de manière aussi objective et équilibrée que possible à la réflexion nationale sur les enjeux de sécurité et de défense. Nous proposons de mettre en commun notre expérience et notre expertise des problématiques de Défense, incluant leurs aspects stratégiques et économiques, afin de vous faire partager notre vision des perspectives d’évolution souhaitables. Le CMF est partenaire du site THEATRUM BELLI depuis 2017. (Nous contacter : Cercle Maréchal Foch – 1, place Joffre – BP 23 – 75700 Paris SP 07).

Géopolitique : En Nouvelle-Calédonie, réfléchir et travailler sur le long terme

par Eric Descheemaeker -AASSDN – publié en janvier 2025

https://aassdn.org/amicale/en-nouvelle-caledonie-reflechir-et-travailler-sur-le-long-terme/


Commentaire AASSDN : Les évènements qui se déroulent en Nouvelle-Calédonie et plus généralement la situation fragile de nos DROM-COM (1) révèlent que les 2,5 millions de compatriotes ultra-marins qui habitent sur les 120 000 km2 de terre et les 10 millions de km2 de ZEE qui leur sont rattachés –  sur les 11 millions que possède au total notre pays – ne sont pas véritablement intégrés dans une stratégie générale, c’est-à-dire une politique nationale à vocation mondiale.
C’est donc une France de 670 000 km2, dont le territoire occupe des positions hautement stratégiques, en Europe certes, mais aussi en Amérique, en Afrique et en Asie/Pacifique, c’est-à-dire sur la totalité du globe et disposant de ressources naturelles à la fois immenses mais souvent sous-exploitées, qui doit nous conduire à définir une stratégie nationale ambitieuse d’investissement, de développement et d’influence et de partenariats.
La France est un pays souverain dont le seul horizon ne se limite pas à la seule UE ni aux pays du Sahel. Elle dispose d’un potentiel à la hauteur de sa vocation. Il appartient aux responsables politiques d’en prendre conscience et d’organiser la remontée en puissance de notre pays sur ces réalités géographiques.

(1) DROM COM :
Sont dénommés « départements et régions d’outre-mer » (DROM), les territoires des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, à savoir la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion et Mayotte.
Sont dénommés « collectivités d’outre-mer » (COM), les autres territoires des collectivités relevant de l’article 72-3 de la Constitution, à savoir la Polynésie française, les îles Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, la Nouvelle-Calédonie, ainsi que les Terres australes et antarctiques françaises et l’île de la Passion-Clipperton.

Source : https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c2316

Les gouvernements se succèdent en métropole et en Nouvelle-Calédonie. Déjà huit ministres des outre-mer depuis 2017, ce qui empêche de mener une politique sur le temps long. Or c’est bien de vision à long terme que la Nouvelle-Calédonie a besoin.

Depuis notre dernière tribune, il n’y a pourtant pas un mois de cela, les deux gouvernements qui président aux destinées de la Nouvelle-Calédonie sont tombés : celui de Paris, le 4 décembre, puis celui de Nouméa, le 24. En quelques semaines, nous aurons donc changé de Premier ministre, de ministre de l’Outre-mer – le huitième depuis 2017 – et de président du gouvernement de la collectivité de Nouvelle-Calédonie. Vu la situation politique en métropole, il n’est pas impossible que le gouvernement de M. Bayrou soit lui aussi tombé lorsque sera publié le prochain texte dans cette série ; quant à l’exécutif calédonien, sa durée de vie moyenne est inférieure à 18 mois (17 en 25 ans).

Les indépendantistes travaillent plus que les loyalistes

Pourquoi rappeler ces choses ? Parce que bien trop peu de gens, notamment parmi les partisans de la France, semblent en mesurer l’importance et surtout en tirer les conséquences. Il y a deux erreurs majeures, d’ailleurs liées, qu’ont faites les loyalistes depuis 40 ans : se reposer sur l’État, et se montrer incapables de réfléchir et travailler sur le long terme, le regard fixé non sur la dernière actualité à Nouméa ou Paris, mais sur leur ambition véritable : une Calédonie qui soit française – et qui prospère sous le drapeau français – dans 50, 100, 200 ans. Cela est d’autant plus tragique que les indépendantistes ont, eux, effectué ce travail. Ils ont créé des réseaux, avec la France métropolitaine, avec ses autres outre-mer, avec l’étranger (proche et lointain). Ils ont produit des thèses et des travaux universitaires ; ils ont fait de l’entrisme dans les organisations internationales ; ils ont mobilisé les énergies, les intelligences et les financements. Se focaliser, pour les dénoncer, sur des réalités comme le Groupe d’initiative de Bakou, masque ce qui importe réellement : car s’il est vrai que, parfois, l’activisme peut devenir illégitime, voire illégal, pour l’essentiel, le mouvement indépendantiste en Nouvelle-Calédonie a simplement fait son travail – le travail de ses idées, conjointement avec la mouvance « décolonialiste » mondiale.

Les loyalistes n’ont fait aucun travail sur les idées

Le drame, c’est que personne en face ne lui ait répondu, ou presque. C’est ce qui nous a stupéfait et, d’ailleurs, encouragé à nous engager lorsque, au moment des campagnes référendaires ayant débuté en 2018, nous nous sommes rendu compte que, en dehors de l’archipel, personne ou presque ne travaillait à la défense de la Nouvelle-Calédonie française : ni d’un point de vue universitaire, ni dans le débat public. Face à ceux qui militaient pour l’indépendance, tout juste trouvait-on quelques voix qui auraient défendu une forme d’association, c’est-à-dire… l’indépendance sous une autre forme. On ne peut pas espérer remédier à une situation sans d’abord y apporter de diagnostic : or, ce diagnostic, même si cela est douloureux à entendre, est que l’échec intellectuel des loyalistes est sans appel.

Sans doute y a-t-il des causes diverses à cela. Mais la principale nous apparaît clairement qu’ils se sont appuyés sur l’État et ont trop longtemps cru que c’était son rôle à lui de préparer l’avenir de la « Calédonie française ». Et, certes, on aurait pu croire que ce l’était. Dans un pays autre que la France, la haute administration, travaillant avec les meilleurs universitaires, et après avoir largement consulté les parties prenantes et tenté d’apprendre des expériences étrangères, aurait préparé en amont un projet de statut pérenne de la Nouvelle-Calédonie dans la France. Ce projet aurait été proposé et, dans les faits, imposé dès le 13 décembre 2021, lendemain du troisième référendum d’autodétermination ; et peut-être n’y aurait-il plus, aujourd’hui, ou qu’à peine, de « dossier calédonien ». Mais l’État, il importe que ceux qui ne l’ont pas encore compris s’en persuadent, ne voit pas sa mission comme de préserver la souveraineté de la France sur toutes ses provinces, y compris la Nouvelle-Calédonie, ni d’aider celle-ci à prospérer à l’ombre du drapeau tricolore. Ses intérêts sont autres.

L’État n’a pas de vision

La vérité oblige à dire que la logique du processus politique entamé il y a 40 ans l’y encourage d’ailleurs, puisqu’il a consisté à déléguer la décision politique – et donc inévitablement tout ce qui se trouve derrière – aux parties calédoniennes, indépendantiste et non-indépendantiste. Pour notre part, nous avons toujours douté de la sagesse de pareille logique, dans la mesure où ces parties ne sont d’accord sur rien et ne peuvent donc s’« accorder » qu’au prix de formulations ambiguës permettant à chacun d’y lire ce qu’il souhaite (jusqu’au jour où il faut sortir de ces ambiguïtés et où, alors, elles explosent), et nous pensons d’ailleurs que son fondement juridique a aujourd’hui disparu. Mais le fait demeure qu’elle s’est imposée ; or, les loyalistes n’ont pas compris son implication inévitable, qui de l’extérieur, apparaît pourtant évidente : dans leur défense de la Calédonie française, ils sont seuls.

Ce projet de statut pérenne, c’est eux qui auraient dû le préparer et le proposer. Les réflexions sur les inévitables réformes de l’économie de l’île, son aménagement, son intégration régionale, la manière de faire cohabiter sur une même terre des groupes ethnoculturels profondément différents (autrement que par la revanche du colonisé, devenu figure de l’Opprimé, que proposent les indépendantistes), c’est eux qui auraient dû la mener ou du moins la susciter. Or, comme ils n’ont absolument pas la masse humaine critique pour cela, il leur aurait fallu créer des réseaux, monter des initiatives, aller parler à tous ceux qui, en France ou à l’étranger, étaient en mesure de les aider. Quand on pense à l’impact qu’ont pu avoir certains universitaires ou journalistes qui, depuis des décennies, pilonnent le terrain pour le compte de la cause indépendantiste, on ne peut que rêver à ce qui aurait été possible si, en face, les loyalistes avaient fait de même (avec, certes, davantage de bonne foi et de rigueur intellectuelle, ce qui peut être handicapant à court terme, mais se révèle toujours payant à plus long terme). On ne peut pas dire, bien sûr, que rien n’ait été fait. Mais peu, si peu…

Se lamenter, certes, ne sert à rien. S’il convient de faire un examen de conscience lucide, c’est avant tout pour agir. Les partisans de la Calédonie française ont des décennies de retard à rattraper et semblent – et encore, pas tous – n’avoir commencé à le comprendre qu’au sortir des référendums de 2018-2021. Tout, ou presque, de ce travail de réflexion, d’influence, d’action, reste à construire.

Les loyalistes ont des décennies de retard

Il ne s’agit évidemment pas, en quelques lignes, d’expliquer ou encore moins de dicter ce qu’il convient de faire : en tant que juriste universitaire, que non-calédonien, notre perspective est elle aussi très partielle. Mais il convient urgemment de lancer cette réflexion et surtout d’agir, à tous les niveaux.

Trois axes principaux se dessinent à cet égard.

D’une part, un travail en direction de la France métropolitaine. Il est difficile, hélas, de surestimer l’ignorance dans laquelle la Nouvelle-Calédonie y est tenue, y compris chez les gens qui – du gouvernement et de la haute administration aux juridictions suprêmes que sont le Conseil d’État et la Cour de cassation – déterminent en large mesure son avenir (chez les universitaires, les parlementaires, les acteurs économiques et sociaux aussi). Or, pour ne prendre qu’un exemple qui nous soit proche, si des thèses universitaires devaient être écrites sur la Nouvelle-Calédonie dans une perspective non-indépendantiste, elles le seraient plus vraisemblablement à Paris qu’à Nouméa : mais comment le seraient-elles, si ni les étudiants ni leurs potentiels directeurs de thèse ne connaissent ou ne s’intéressent à ces problématiques ?

Deuxième axe : les autres outre-mer français. Nous sommes stupéfaits de l’absence de coordination, ou simplement d’échanges, entre eux. Certes, ils sont éloignés les uns des autres ; certes aussi ils peuvent être très différents. Mais les problématiques communes sont évidemment nombreuses : tous ceux qui, de Point-à-Pitre à Papeete, et de Fort-de-France à « Port-de-France »[1], sont attachés à la France devraient donc s’unir, sans oublier d’expliquer aux ultramarins qui se croient protégés des visées du Groupe de Bakou qu’eux aussi sont menacés à plus long terme, et que donc ils sont concernés maintenant. Les outre-mer français ont partie liée, et nous sommes convaincus que leur avenir s’écrit de manière commune (ce qui n’empêche en rien, bien au contraire, le respect de la diversité de chacun, ce qui est plus facile à expliquer et mettre en œuvre ensemble).

Enfin, l’environnement régional. Vu d’Australie, la France est souvent perçue comme la dernière des puissances coloniales, et les images de 2024 n’auront rien fait pour démentir cette impression. Bien sûr, il y a derrière cette présentation beaucoup de propagande (souvent inconsciente, d’ailleurs), mais il y a aussi une réalité : celle de la « Franconésie ». Il importe donc de travailler à la fois sur cette réalité, en comprenant que la Nouvelle-Calédonie pourrait être à la fois davantage française et davantage océanienne, pourvu qu’elle comprenne enfin comment articuler ces deux dimensions ; mais aussi sur sa perception, en présentant une alternative au « narratif » décolonialiste (qui est d’ailleurs aujourd’hui très daté et ne comprend pas que le monde de 2025 n’est plus celui de la conférence de Bandung en 1955).

Alors, certes, les gouvernements comptent aussi : il ne s’agit pas de dire qu’il convient de n’accorder aucune importance aux soubresauts de la vie politique, locale ou nationale. En revanche, il importe de se convaincre que celle-ci n’est pas l’essentiel. Des gouvernements calédoniens, des Premiers ministres, des ministres de l’Outre-mer, il y en a eu et il y en aura encore beaucoup. L’essentiel ne se joue pas là ; c’est à beaucoup plus long terme qu’il nous faut réfléchir et travailler, si nous voulons espérer que la Nouvelle-Calédonie reste française et puisse prospérer en tant que telle.


Eric Descheemaeker
Revue Conflits
03/01/2025

Source photo : Google Maps

[1] Port-de-France est l’ancien nom de Nouméa.

Infographie : dissection de la Maison Blanche

Infographie : dissection de la Maison Blanche

par Revue Conflits avec AFP – publié le 20 janvier 2025


La Maison-Blanche, résidence et bureau du président des États-Unis, est un monument emblématique de l’histoire et du pouvoir américain. Mélange de grandeur architecturale et de symbolisme politique, elle incarne l’essence même de la nation américaine.

L’Architecture de la Maison-Blanche : Un symbole de pouvoir et d’histoire

La Maison-Blanche, résidence officielle du président des États-Unis, est bien plus qu’un simple bâtiment : c’est un symbole de l’autorité présidentielle et de l’histoire américaine. Son architecture incarne la grandeur de la nation tout en intégrant des éléments classiques et modernes qui la rendent unique. L’édifice de plus de 5 100 m2, situé au 1600 Pennsylvania Avenue à Washington D.C., est un mélange de style néoclassique, de design pratique et de symbolisme politique.

Les origines architecturales

La conception de la Maison-Blanche débute au XVIIIe siècle, sous la direction de George Washington, premier président des États-Unis. Cependant, c’est l’architecte irlandais James Hoban qui est choisi pour réaliser le projet. Hoban s’inspire des bâtiments palladiens, notamment du Leinster House à Dublin, pour créer une résidence digne du chef de l’État américain. Le style néoclassique, qui reflète les idéaux de la Rome antique, a été choisi pour incarner l’autorité, la rationalité et l’équilibre.

La structure de la Maison-Blanche

La Maison-Blanche est constituée de plusieurs éléments distincts. Le bâtiment principal, avec ses murs en pierre calcaire, présente une façade symétrique, caractéristique du style palladien. Il se compose de trois étages : le rez-de-chaussée, l’étage principal et l’étage supérieur. L’entrée principale, ornée d’un porche à colonnes, est flanquée de chaque côté par des fenêtres en arc de cercle, un autre élément typique du style classique. L’édifice comprend également de nombreux salons et bureaux qui servent aux fonctions politiques et diplomatiques. Le bureau Ovale, situé au premier étage, est l’un des espaces les plus célèbres du bâtiment, un lieu où le président prend ses décisions et accueille des dignitaires étrangers. À proximité, on trouve la salle à manger d’État, la salle de réception diplomatique et les salons de l’Executive Residence.

Les évolutions architecturales

Au fil des siècles, la Maison-Blanche a subi plusieurs modifications et agrandissements. Après l’incendie de 1814, lors de la guerre de 1812, le bâtiment est presque entièrement détruit. La reconstruction permet de conserver le plan initial tout en apportant des améliorations. Les modifications les plus notables au cours du XIXe et du XXe siècle ont été réalisées lors des mandats de Theodore Roosevelt, Franklin D. Roosevelt et Harry S. Truman, ce dernier étant responsable de la rénovation complète de l’intérieur. Les jardins et les terrains environnants ont également évolué. Le plus célèbre d’entre eux est le Jardin de la Rose, situé à l’arrière du bâtiment, qui constitue un espace de détente tout en étant utilisé pour des événements officiels et des cérémonies.

La Maison-Blanche et la symbolique

La Maison-Blanche ne se limite pas à ses fonctions de résidence et de bureau. Elle incarne aussi la représentation du pouvoir exécutif américain. Ses colonnes majestueuses, ses jardins soignés et ses vastes espaces intérieurs sont autant de preuves de la stabilité, de la continuité de la nation américaine. En tant que centre névralgique du pouvoir, la Maison-Blanche est aussi un lieu de visibilité internationale. Chaque modification ou rénovation est scrutée de près et devient un moyen de marquer les changements dans l’histoire politique du pays. La Maison-Blanche est donc bien plus qu’un simple bâtiment : elle est le cœur battant de la politique américaine et un symbole fort de la république.

La paix et l’épée par Michel Goya

La paix et l’épée

par Michel Goya – La Voie de l’épée – publié le 9 janvier 2025

https://lavoiedelepee.blogspot.com/


Tout est affaire de rapport de forces à la guerre. Pour les Ukrainiens en guerre, la seule perspective d’obtenir une « meilleure situation à la fin » est de modifier le rapport de forces militaires en 2025 afin de reprendre l’offensive en fin d’année et de libérer le plus possible de territoire occupé. À défaut de pouvoir modifier ce rapport de force, il n’y aura sans doute pas d’autre option stratégique pour Kiev que de limiter les dégâts en négociant la moins mauvaise paix possible.

Partisan affiché d’un règlement rapide du conflit ou du moins d’un arrêt prolongé des combats, Donald Trump a clairement indiqué son intention de forcer l’exécutif ukrainien à privilégier la mauvaise paix immédiate à la possible victoire lointaine. Les États-Unis fournissant environ la moitié de tous les équipements et munitions qu’utilisent les soldats ukrainiens, il lui suffira de réduire cette aide pour rendre la victoire impossible pour eux. Les États européens, qui tous ensemble ne fournissent qu’environ 30 % de l’aide militaire à l’Ukraine et sans grande possibilité d’en augmenter le volume, sont quant à eux plus ou moins obligés de suivre le mouvement quel qu’il soit. Tout en donnant toujours l’image d’un soutien ferme à l’Ukraine dans la poursuite de son combat, ils anticipent déjà d’avoir à jouer un rôle dans l’application d’une forme de paix possible.

À travers plusieurs déclarations de son entourage, la forme de paix envisagée par le nouveau président des États-Unis semble être un armistice sur les positions actuelles en Ukraine. Il n’est pas du tout évident que Vladimir Poutine accepte cette idée alors que ses troupes ont l’initiative des opérations et que rien ne l’oblige vraiment à s’arrêter là, mais Volodymyr Zelensky a déjà commencé à y préparer son opinion publique en évoquant la fin possible de la « phase chaude » de la guerre, remettant à une phase « diplomatique » (entendre « hypothétique ») la libération des territoires occupés.

Tout en continuant le combat afin au moins d’arrêter l’avancée russe, le président ukrainien s’efforce désormais d’obtenir en échange de l’arrêt éventuel des combats de véritables garanties de sécurité contre la Russie là où Donald Trump et son entourage n’envisagent que des garanties de respect de l’armistice et sans participation américaine. On a vu rétrospectivement la valeur des garanties de sécurité purement théoriques données à l’Ukraine en échange de son renoncement à son arsenal nucléaire dans le mémorandum de Budapest en 1994. Il ne peut y avoir de vraies garanties de sécurité sans soldats présents sur le territoire. Alors même que les éventuelles négociations ne sont pas commencées, on explore donc déjà l’hypothèse d’un déploiement de forces en Ukraine tout de suite après l’arrêt des combats et on voit déjà assez clairement les fortes limites de l’exercice.

Le premier problème est celui du volume de forces nécessaire, sachant que là encore les États-Unis, qui ont fourni 80 % des moyens des coalitions sous leur direction depuis 1990, ne veulent pas en être. L’entourage de Donald Trump évoquait 200 000 soldats déployés le long du front en Ukraine et de la frontière avec la Russie. C’est évidemment irréaliste, mais il faudra sans doute réunir une masse d’environ 40 à 50 000 hommes, compte tenu de l’immensité de l’espace à couvrir, ce qui nécessitera la constitution d’une force coalisée, soit onusienne afin de faire venir des contingents du monde entier, soit européenne avec une large participation des membres de l’Union et peut-être quelques États extérieurs. Le plus important n’est cependant pas de réunir ces hommes mais bien de savoir à quoi ils serviront.

La première idée serait de « maintenir la paix » en s’interposant entre les belligérants, à la manière de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) depuis 1978. Une mission onusienne serait forcément de ce type, avec la formation par exemple d’une Mission des Nations Unies en Ukraine (MINUKR), mais pourrait être également européenne, le point commun étant de toute façon qu’elle ne servirait à rien, comme effectivement toutes les autres missions évoluant dans le cadre du chapitre VI de la Charte des Nations Unies. Quand on n’a pas le droit de combattre sauf en légitime défense, on ne protège rien d’autre que soi-même (au mieux) et une telle force n’empêcherait pas plus les Russes de pénétrer en Ukraine que la FINUL avec les Israéliens au Liban. Cette force inutile pourrait donc recevoir l’aval de la Russie, et de toute façon on n’imagine pas le déploiement d’une force en Ukraine sans l’accord des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies, dont la Russie. Cela pourrait satisfaire aussi les États-Unis, qui de toute façon ne participent jamais à ce genre de force, ainsi que les États européens, comme l’Allemagne ou l’Italie, qui eux au contraire aiment bien y participer lorsqu’ils veulent montrer qu’ils font quelque chose « pour la paix » mais sans prendre de risques, même si tout déploiement militaire prolongé, même le plus inoffensif – à tous les sens du terme – implique des pertes. La mise en place d’une telle force n’offrirait en revanche aucun intérêt pour les Ukrainiens. On ne voit pas dès lors pourquoi ils l’accepteraient.

Les Ukrainiennes préféreraient, et de loin, une force de protection, autrement dit une force qui combattrait en cas d’attaque russe, à la manière des bataillons déployés dans le cadre de la présence avancée renforcée de l’OTAN sur son flanc Est. Notons dans ce cas que les pays volontaires seraient beaucoup moins nombreux. Il s’agirait sensiblement des mêmes qui envisageaient il y a peu d’envoyer éventuellement des soldats en soutien à l’arrière des forces ukrainiennes. On aurait ainsi probablement une brigade française de quelques milliers de soldats, peut-être une britannique et des brigades multinationales avec des bataillons baltes, scandinaves et polonais, peut-être canadiens. Il n’y aurait sans doute pas de quoi réunir 40 000 hommes, mais à la limite peu importe puisque cela signifierait surtout que les États fournisseurs s’engageraient de fait à entrer en guerre avec la Russie si celle-ci attaquait et tuait leurs soldats. Ce serait effectivement pour le coup très dissuasif, et les Ukrainiens ne manqueraient pas de rappeler qu’un tel déploiement réalisé avant février 2022 aurait sans doute empêché la guerre. On imagine cependant les débats internes difficiles dans les pays européens avant de s’engager dans ce qui serait une entrée de l’Ukraine dans l’OTAN de fait, sinon en droit. Inutile de préciser que si l’Ukraine serait sans doute très heureuse de cette solution, il n’en serait pas de même de la Russie et on ne voit pas très bien dans ce cas comment Vladimir Poutine l’accepterait.

En conclusion, on est encore loin d’un armistice quelconque en Ukraine et encore plus loin d’un déploiement de forces étrangères visant à le faire respecter.

Elbridge Colby, le vrai visage de la stratégie Trump ?

Elbridge Colby, le vrai visage de la stratégie Trump ?

par Olivier Chantriaux – Revue Conflits- publié le 2 janvier 2025


Le 22 décembre dernier, Donald Trump a annoncé son intention de nommer Elbridge Colby sous-secrétaire à la Défense chargé des questions politiques. La nouvelle n’a pas retenu outre mesure l’attention des grands médias. Pourtant, la nomination de ce réaliste révèle peut-être la ligne stratégique de Donald Trump lors de son prochain mandat.

Elbridge Colby n’est pas un inconnu. Au cours du premier mandat de Donald Trump, il avait présidé à l’élaboration de la Stratégie de défense nationale de 2018. Constatant l’accroissement du désordre mondial et l’impossibilité d’établir en définitive un ordre international libéral, ce document procédait à un recentrage, reconnaissant que « la compétition stratégique entre États, non le terrorisme [était] désormais la préoccupation première de la sécurité nationale des États-Unis » et désignant la Chine comme principale concurrente. Dans ce contexte, la modernisation de la défense devait assurer aux États-Unis les capacités nécessaires pour assurer sa prépondérance et « maintenir la paix par la force« , « to preserve peace through strength« , formule que Donald Trump se plaît actuellement à répéter, lorsqu’il évoque, par anticipation, la stratégie internationale qu’il compte mettre en œuvre.

 

Elbridge Coby, Deputy Assistant Secretary of Defense, (U.S. Army photo by Monica King/Released)

 

Un réaliste à la Défense

Formé à Harvard et à l’École de droit de Yale, Elbride Colby est avant tout un intellectuel et un penseur réaliste des relations internationales. Après avoir travaillé comme analyste au Center for Naval Analyses (CNA) et au Center for a New American Security (CNAS), Colby avait été pressenti pour jouer un rôle éminent dans la campagne de Jeb Bush, candidat à la primaire présidentielle de 2016, avant d’être finalement éconduit par l’entourage néoconservateur de ce dernier.

Aujourd’hui, si sa désignation comme sous-secrétaire à la Défense peut sembler éclipsée par la nomination à des postes de premier plan de personnalités politiques notoires, comme Michael Waltz ou Marco Rubio, l’influence intellectuelle qu’il exercera pourrait se révéler plus déterminante au fond pour définir le positionnement stratégique des États-Unis, conduisant certains observateurs à considérer, par anticipation, que Colby pourrait être le « cerveau » de la doctrine Trump.

Le cerveau de la doctrine Trump

Cofondateur de L’Initiative de Marathon, association visant à sensibiliser ses compatriotes à la nécessité de repenser la politique internationale des États-Unis dans le contexte d’un retour à la compétition des grandes puissances, Elbridge Colby a pu exposer ses vues les plus constantes dans The Strategy of Denial, publié en 2021. Opposé à la guerre en Irak comme à la multiplication des engagements extérieurs des États-Unis, qui ne peuvent conduire, selon lui, qu’à une déperdition d’énergie et à un surinvestissement vain, il croit primordial de concentrer les efforts américains sur un théâtre central, l’Asie, qui rassemble la moitié de la population mondiale et génère l’essentiel de la croissance globale, en vue d’un objectif principal, empêcher la Chine de bâtir une sphère de prospérité sous son contrôle et de faire ainsi prévaloir son hégémonie.

Faisant sienne, en quelque sorte, la stratégie d’offshore balancing conçue par le réaliste offensif John Mearsheimer, il estime que, pour faire pièce aux ambitions chinoises, qui ne se jouent décisivement ni en Ukraine ni au Proche-Orient, les États-Unis doivent être en mesure de coordonner leur action avec les puissances géographiquement proches de la Chine et peu enclines à accepter son ascension, en l’occurrence l’Inde, le Japon, l’Australie et même le Vietnam.

Tandis que, dans l’espace Indo-Pacifique, l’Amérique se chargerait de dissuader la Chine d’imposer son hégémonie économique, les États européens se trouveraient mécaniquement conduits à prendre davantage de responsabilités au sein de l’Alliance atlantique.

La Chine est le véritable adversaire des États-Unis

Elbridge Colby se démarque enfin d’autres stratèges américains en ce qu’il ne conçoit pas comme inévitable la perspective d’une guerre avec la Chine. Sa lecture de la compétition des grandes puissances n’est pas simplement militaire, comme tendrait à l’affirmer un John Mearsheimer, mais accorde une place primordiale aux enjeux géoéconomiques, dans le sillage du théoricien du changement hégémonique qu’était Robert Gilpin.

Soucieux de préserver la paix et la capacité des États-Unis à négocier avec son compétiteur sans provoquer de guerre majeure, Elbridge Colby affirme que « le moralisme » est, en fait, inférieur à « la moralité d’une politique étrangère réaliste« .