Réservistes de l’armée : voici désormais l’âge maximum pour s’engager dans la défense du pays

Réservistes de l’armée : voici désormais l’âge maximum pour s’engager dans la défense du pays

La France élargit les conditions d’accès à sa réserve militaire en 2025, offrant désormais la possibilité aux citoyens de s’engager jusqu’à 70 ans pour la majorité des fonctions. Cette évolution majeure s’inscrit dans une stratégie nationale de renforcement de la défense et répond aux défis sécuritaires contemporains. Examinons en détail cette transformation qui redéfinit la participation citoyenne à la défense du pays.

Nouvelle limite d’âge pour les réservistes: un bond significatif

Le système de réserve militaire français connaît une transformation historique depuis mars 2025. Auparavant limitée à 62-65 ans pour la plupart des positions, avec une extension de cinq ans pour les anciens militaires selon leur grade, la limite d’âge maximale passe désormais à 70 ans pour la majorité des fonctions au sein de la réserve.

Cette extension représente une augmentation considérable qui permet d’exploiter plus longtemps l’expertise et l’expérience des seniors. Pour certains postes spécialisés nécessitant des compétences particulières, cette limite atteint même 72 ans, reconnaissant ainsi la valeur unique que peuvent apporter ces profils expérimentés.

La réserve citoyenne, composante plus symbolique du dispositif, maintient sa politique d’accessibilité dès 17 ans sans imposer de limite supérieure stricte. Cette branche permet une contribution différente à l’effort de défense nationale, principalement à travers la promotion des valeurs militaires.

Type de réserve Ancienne limite d’âge Nouvelle limite d’âge
Réserve opérationnelle (fonctions standard) 62-65 ans 70 ans
Postes de spécialistes 65-67 ans 72 ans
Réserve citoyenne Sans limite stricte Sans limite stricte

Renforcement stratégique de la défense nationale

Cette révision des critères d’âge s’inscrit dans une vision globale de modernisation des forces armées françaises. Emmanuel Macron a clairement exprimé son ambition de doubler les effectifs de réservistes pour consolider ce qu’il désigne comme la « force morale » de la nation face à un environnement international de plus en plus instable.

L’intégration de citoyens plus âgés permet à l’armée d’accéder à:

  • Des compétences rares issues du monde civil
  • Une expertise approfondie dans des domaines spécialisés comme la cyberdéfense
  • Des savoir-faire précieux en logistique avancée
  • Des capacités étendues dans les fonctions médicales
  • Une diversité d’expériences professionnelles enrichissantes

Cette stratégie s’accompagne d’un investissement financier massif dans la défense nationale. La loi de programmation militaire prévoit un budget de 413 milliards d’euros pour 2024-2030, avec une progression annuelle du budget de 3 à 4 milliards, passant de 43,9 milliards en 2023 à 69 milliards en 2030.

Impacts sur la résilience et la capacité opérationnelle française

L’élargissement du vivier de réservistes potentiels répond à plusieurs objectifs stratégiques cruciaux. Il permet d’abord de renforcer rapidement les effectifs en cas de crise majeure, qu’elle soit d’ordre militaire ou civile comme lors de catastrophes naturelles. Cette flexibilité constitue un atout considérable dans la gestion des situations d’urgence.

En diversifiant les profils intégrés, l’armée française crée une synergie particulièrement efficace entre militaires de carrière et réservistes. Cette complémentarité enrichit les capacités opérationnelles globales des forces armées et répond mieux aux menaces contemporaines comme le terrorisme, les cyberattaques, ou les instabilités régionales.

Les étapes pour devenir réserviste sont désormais accessibles à un plus grand nombre:

  1. Vérification des conditions d’aptitude physique adaptées à l’âge
  2. Formation initiale ajustée selon le profil et l’expérience
  3. Intégration progressive dans les unités selon les compétences
  4. Participation aux activités selon disponibilité et capacités

Cette réforme renforce finalement le lien armée-nation en permettant à davantage de citoyens de contribuer à la défense du pays. Ce rapprochement entre les sphères militaire et civile constitue un pilier essentiel de la résilience nationale face aux défis sécuritaires du 21ème siècle et réaffirme l’engagement collectif dans la protection des valeurs républicaines.

Service militaire : retour d’expérience

Service militaire : retour d’expérience

December 7, 2024, Paris, France.//04SIPA_sipa0151/Credit:Thomas Hubert/SIPA/2412080841

par Florent Hivert* – Revue Conflits – publié le 22 mars 2025

Florent Hivert a été officier dans l’armée de terre. Il est aujourd’hui spécialiste des partenariats militaires.


Le service militaire, une bonne ou une mauvaise chose ? Retour d’expérience et analyse des mythes et des idées reçues au tour du « service ».

La scène se passe en 2006, en fin d’après-midi, dans le métro parisien, la ligne 1, celle qui traverse la capitale d’ouest en est. Je suis assis à rêvasser. Au bout d’un moment, je m’aperçois qu’un type me regarde. Costume, porte-documents… il ressemble à ces milliers de cadres qui peuplent les bureaux de la Défense. Instant de léger malaise lorsqu’il comprend que j’ai vu qu’il me fixait. Il s’avance :

─ Vous êtes le lieutenant Hivert ?

─ Oui réponds-je sans préciser que ça datait un peu.

La conversation s’engage. Militaire du rang appelé, il avait été détaché dans ma section à l’occasion d’un stage commando effectué à Givet en 1995.  Au fil de la conversation, les souvenirs reviennent. Effectivement, un grand type, costaud, intelligent, avec un ascendant certain sur ses camarades. Un peu frondeur, mais sans dépasser certaines limites, avec ce qu’il faut de vanité pour faire comprendre qu’il en avait sous le pied et que s’il l’avait voulu, il aurait pu faire plus, prendre des responsabilités, par exemple, mais avec suffisamment d’amour propre, également, pour arriver au bout d’un stage éprouvant. La conversation tourne autour de Givet. Finalement, il arrive à sa correspondance. Avant qu’il ne franchisse la porte, je l’interroge franchement :

─ Alors ce service ? Bon ou mauvais souvenir ?

La réponse tarde à venir… je vois qu’il est troublé. Pendant ces quelques minutes de discussion, ses souvenirs ont afflué et remué beaucoup d’émotions. La porte s’ouvre, il s’avance vers le quai et, en se retournant, me lance :

─ Oui ! Oui ! Des bons souvenirs !

Cela n’a duré que le temps de passer deux ou trois stations et je crois que cet échange résume assez bien le souvenir qu’ont gardé de nombreux appelés  : une situation subie (pour la plupart), une trajectoire personnelle (ce que j’ai fait, comment j’ai géré cette période…), mais également collective (nous étions si nombreux, on l’a fait, nous) et le souvenir qu’on garde d’une expérience en rupture avec beaucoup de choses : ses études, sa famille, son milieu, sa région… Qu’il en ait gardé finalement un bon souvenir n’était pas surprenant. Affecté en batterie de tir, il avait fait au moins deux manœuvres, dont une en hiver, il avait sué pour obtenir son insigne commando…

Je savais d’expérience que la plupart de ceux qui avaient eu un service actif, sur le terrain, dans une unité qui se tenait, en ramenaient plus de bons souvenirs que ceux qui avaient esquivé. Je savais également que le temps fait son œuvre et qu’au fil des années, cette période se confondrait avec sa jeunesse et que la nostalgie s’installerait : oui je n’avais rien demandé, ça m’a bien fait ch… d’y aller, mais j’ai quand même fait des trucs incroyables !

Appelé moi-même, de la classe 91/10, j’ai suivi un parcours assez classique : préparation militaire parachutiste à 18 ans (puis une par an pour pouvoir sauter chaque été), ensuite préparation militaire supérieure (Valdahon et Bitche) et à 23 ans, formation en tant qu’élève officier de réserve à l’école d’application de l’artillerie à Draguignan. Ensuite aspirant, chef d’équipe d’observation au 2e régiment d’artillerie à Landau in des Pfalz, en Allemagne, volontaire service long, officier de réserve en situation d’activité (ORSA) et finalement activé. J’ai donc commandé du début de ma carrière – avec quelques interruptions où j’ai commandé des engagés volontaires – en 1992 jusqu’à 2001, quand j’ai terminé mon temps de commandant d’unité, des appelés.

De façon parfaitement empirique, sachant que je n’ai jamais servi qu’en batterie de tir, voici ce que j’ai retiré de mon expérience du service national.

FACE À L’EST… ET UN HORIZON DÉGAGÉ

Du service militaire (national), j’ai d’abord connu, de 1991 à 1993, l’époque des gros bataillons d’appelés. Ceux, qui, le dimanche soir, se rassemblaient par milliers en piétinant gare de l’Est, pour rejoindre les garnisons de Champagne, de Lorraine puis d’Allemagne où je servais. J’ai connu cette époque des trains bondés, pas toujours chauffés, qui s’arrêtaient parfois, sans raison apparente, en pleine voie, des heures durant, lâchant leurs chapelets d’appelés de Suippes jusqu’à Landau pour ce qui me concernait. S’il y a quelque chose qui a bien contribué à créer de la cohésion entre militaires appelés et à construire un adversaire générique, c’est d’abord ces conditions de transport.

Nos appelés, à Landau, venaient des régions de Paris et de Lille. Le système d’intégration et de formation était particulièrement bien rodé. Chaque régiment venait chercher ses appelés à Metz. L’occasion d’un premier contrôle de la prévôté pour constater que certains d’entre eux détenaient du shit. Les plus couillons se faisaient attraper, les autres, les chiens les marquaient donc nous savions à qui nous avions affaire pour la suite. Le premier mois, pour leur formation initiale, les appelés n’étaient pas autorisés à quitter le quartier. À l’époque, pas d’internet, pas de téléphone portable… ces jeunes étaient coupés du monde dans tous les sens du terme (et en Allemagne). Cette période était décisive en termes de formation d’un état d’esprit pour l’apparition de ce début de cohésion indispensable pour la suite. Beaucoup de sport, évidemment, et à l’époque, le sport c’était le… footing et le parcours d’obstacles. Le sport était une découverte pour beaucoup de ces jeunes. Du nettoyage de tout : armement, chambres, abords, blindés, zone technique, etc. Par la suite, les gars étaient ventilés en fonction de leurs aptitudes intellectuelles et physiques. On entrait alors dans une nouvelle phase de formation. Ceux à potentiel rejoignaient les équipes de préparation de tir ou de topographie et le bas de l’échelle était celui des munitionnaires. Entre les deux, il y avait les pilotes, les pointeurs, etc. Certains, comme les pilotes chars, quittaient le régiment pour quelques semaines avant d’y revenir.

Je suis volontairement clinique en écrivant cela, mais c’était bien la situation : il fallait rapidement discerner qui serait le plus utile à quel poste et le former, car la montre tournait… Déjà, à l’époque, nous n’avions plus que 10 mois pour qu’à la fin, un régiment d’artillerie puisse manœuvrer au sein de sa division. Donc pas beaucoup de sensiblerie, mais beaucoup de pragmatisme.

La finalité était bien l’efficacité opérationnelle – et rapidement en plus – et certainement pas la recherche de la création du citoyen parfait. Les gars venaient comme ils étaient et nous tâchions d’en faire des individus capables, individuellement, de remplir une tâche et collectivement, de faire un régiment. De cette époque, je ne me souviens déjà pas avoir croisé, dans les batteries de tirs, en dehors des aspirants, des diplômés de l’enseignement supérieur. C’était un milieu exclusivement masculin.

La finalité était bien l’efficacité opérationnelle – et rapidement en plus – et certainement pas la recherche de la création du citoyen parfait

Sans enjoliver la situation, il y avait de la cohésion dans ces unités. Pas forcément celle de l’adhésion aux grandes valeurs, celles qui veulent qu’on accepte de mourir pour de grands principes… mais celle, primaire, du groupe, de la cellule de base d’une unité : l’équipage de l’AUF1, l’équipe munitionnaire… articulée autour de la figure du sous-officier, chef de l’ensemble (le chef de pièce, le chef de l’équipe reconnaissance…). Il y avait des frictions aussi, celles de cadres d’active ou sous contrat qui méprisaient les appelés et les surnommaient les saisonniers, les TUC (travaux d’utilité collective) … mais c’était loin d’être le cas général et ceux, animés de cet état d’esprit, que j’ai croisés, n’étaient pas les meilleurs et ont rarement fait de belles carrières. Quand on est con, c’est souvent pour la vie. Les appelés n’étaient pas tous parfaits non plus. Ils étaient parfois en absence irrégulière ou désertaient, il y avait des vols, des bagarres… mais de vrais pourris (violents, casseurs, etc.) j’en ai peu croisé. La plupart géraient leur situation en tâchant d’éviter les missions qui leur feraient sauter un week-end ou de se mettre en situation d’être sanctionnés, mais ils ne voulaient pas non plus passer pour des crapauds, au moins aux yeux de leur chef direct et de leurs camarades les plus proches. C’était le cas général.

Par ailleurs, les pièces étaient soutenues (les régiments manœuvraient donc à 4 batteries de tir à 24 pièces), les stocks de munitions étaient abondants (les efficacités se faisaient à plusieurs coups pièce) et les périodes de manœuvres nombreuses. Je n’ai plus jamais autant tiré ni autant manœuvré par la suite.  Arrivée en 1992 à Landau, la 3e DB venait d’être dissoute et ses stocks de munitions et ses créneaux de manœuvres avaient été répartis entre les régiments des 1ère et 5e DB qui constituaient alors le gros de nos forces en Allemagne. Chef d’équipe d’observation, en plus des manœuvres d’artillerie, je faisais celles des cavaliers et des fantassins en étant affecté plus particulièrement au 8e groupement de Chasseurs. À cela, il fallait rajouter les périodes d’entraînement divisionnaire à Baumholder, par exemple, consacrée à la lutte antiaérienne ou LATTA où les munitions de petits calibres tirées étaient si nombreuses, qu’officier sécurité sur un GBC 12.7, les étuis m’arrivaient à mi-mollet à la fin de la journée. D’autres périodes d’entraînement en camp sur des thèmes divers rythmaient notre emploi du temps. C’était également l’époque du NBC et des franchissements de coupures humides. Bitche, Suippes, Canjuers… les périodes à l’extérieur se succédaient et au régiment, les permanences et les gardes aussi. Nous courions encore sur notre erre, les exercices de desserrement pour faire face au Pacte de Varsovie s’allégeant et s’espaçant jusqu’à définitivement s’arrêter en 1992, quelques mois après mon arrivée.

Finalement et surtout ! ces unités étaient opérationnelles et aujourd’hui, en y repensant, je suis ébahi par cette performance collective qui permettait, en quelques mois, de créer des unités opérationnelles en sélectionnant, à partir de chaque contingent, le personnel qui serait affecté à tel ou tel poste, en le formant et en l’entraînant. Un mélange de gestion de la ressource humaine extrêmement rationnelle, technocratique, et d’un savoir-faire pédagogique et humain éprouvé qui permettaient d’arriver au résultat : fournir à la France des régiments d’artillerie capables de manœuvrer et tirer.

FACE À… UN HORIZON QUI SE DÉROBE

J’étais à Mostar, en 1996, avec le groupe d’artillerie de marine au sein duquel je vivais ma première opération extérieure (OPEX), lorsque j’ai entendu, sur un petit poste de télévision à la réception faiblarde qui avait été installé dans ce qui nous tenait lieu d’ordinaire, les déclarations du président Jacques Chirac sur la suspension du service national. À l’époque, la déclaration ne m’avait pas marquée plus que ça. On s’y attendait. Je me demandais juste comment la transition appelés engagés allait se passer. Par ailleurs, le 40e RA d’où je venais avait commencé « en avance de phase » sa professionnalisation l’année précédente ; une batterie était déjà « pro » et les autres devaient rapidement l’être.

Pour les régiments, à partir de cette déclaration, la situation devait pourtant rapidement se détériorer avec la conjonction de plusieurs éléments :

  • des appelés de plus en plus rétifs à faire leur service au fur et à mesure que la date de la fin de conscription approchait (et qui aurait pu leur en vouloir ?) ;
  • des engagés qui ne tenaient pas toutes leurs promesses, car à l’époque, les besoins en recrutements, massifs, imposaient que l’on garde chacun de ceux qui poussaient la porte d’un centre de recrutement ; le mot d’ordre était : si vous perdez un poste, ce sera un prétexte pour fermer des unités, alors faites avec ce que vous avez (c’était l’époque des ébouriffantes campagnes de recrutement « avec ce casque vous pouvez devenir comptable, boulanger… » qui ont fourvoyé bien des jeunes) ;
  • une perte en soutien phénoménale et une baisse drastique des allocations en munitions ; en clair, à partir de 1996, je n’ai plus jamais servi au sein d’un régiment capable de manœuvrer avec ses 4 batteries de tir simultanément et j’ai le souvenir pénible d’avoir passé des nuits entières au cul du VAB, pour qu’on ne tire finalement que deux coups pour toute une nuit ;
  • enfin, dans les coupes sombres que vivait notre armée, l’artillerie payait un lourd tribut : la composante nucléaire avait disparu dès 1997 (peu la regrettaient, il est vrai), les régiments sol-air étaient dissous les uns après les autres et les régiments sol-sol canons vivaient un sale moment.

Après l’époque des gros bataillons d’appelés, j’ai donc alors connu celle des bataillons étiques qui a caractérisé les dernières années du service national. Les formes du service national s’étaient multipliées (en entreprise, en ambassade… la seule limite étant l’imagination technocratique) privant encore plus les régiments de jeunes diplômés ; les réformes médicales vidaient les unités à un rythme inégalé ; les dispositifs administratifs, ad hoc, dépoilaient encore plus les batteries (qui se souvient du texte, qui autorisait les appelés originaires des localités polluées par la marée noire de 1999, à se mettre à disposition des mairies touchées ?)… La ventilation des appelés devenait un casse-tête : tel apte à être pilote char, ne l’était finalement plus au moment d’attaquer la formation, tel envoyé à Carpiagne pour être formé pilote char ne revenait pas… ce qui mettait réellement en péril notre capacité à manœuvrer. C’était l’époque où les régiments s’organisaient en montant des unités de bric et de broc, en prélevant une section par ci, une équipe par-là, s’échangeaient des matériels entre batteries…

Je suis encore tout surpris, des années plus tard, que certains de ces appelés ont accepté de jouer le jeu jusqu’au bout tant l’atmosphère était délétère. La mécanique qui permettait de faire des régiments d’appelés opérationnels s’était grippée.

Les contingents qui savaient bien qu’ils seraient les derniers jouaient désormais ouvertement et sans vergogne la carte de l’évitement avec l’appui d’une technostructure qui avait déjà passé pour pertes et profits l’opérationnalité des régiments d’appelés et qui ne pensait plus que réductions d’effectifs, restructurations, encaissement des ventes du patrimoine foncier et bâti des armées… sous couvert de dividendes de la paix. Bref, le système « appelés » se délitait alors que le système « engagés » n’était pas encore rodé.

En ce qui me concerne, l’aventure avec les appelés s’est arrêtée en juin 2001, lorsque je suis revenu d’une mission de quatre mois en Martinique, au sein du 33e régiment d’infanterie de marine. J’étais parti avec une grosse compagnie TTA (beaucoup plus importante que les PROTERRE actuelles) à 4 sections dont une d’appelés et cette section n’avait pas démérité, tant s’en faut.

Après une période de préparation opérationnelle à Bitche, en hiver, un passage au centre d’entraînement de l’infanterie au tir opérationnel (CEITO) au Larzac, un stage au centre d’instruction et d’entraînement au combat en montagne (CIECM) de Barcelonnette et un contrôle d’aptitude opérationnelle de l’unité, ils avaient gagné le droit de rejoindre la Martinique. Marches sur tous les sentiers de l’ile, tirs au champ de tir de Colson, gardes, passage au centre d’aguerrissement des Antilles, projection à Marie Galante et même en Guyane pour certains d’entre eux, la mission avait tenu ses promesses. Si je rentre dans les détails, c’est parce que, comme beaucoup de militaires, c’est d’abord l’appel du large, l’aventure individuelle et collective qui les avait motivés.

ET MAINTENANT ?

Je suis reconnaissant à tous ces jeunes qui ont « fait leur service » et en particulier aux derniers. Ils en ont tiré des conclusions variées, mais ils ont participé, en y consacrant quelques mois de leur existence, à une entreprise collective au service du bien commun. Ils ont contribué à tenir le glaive de la France. Ça en fait pour moi, quel qu’a été leur grade et leur poste, des citoyens éminemment honorables.

Au moment où l’on reparle de « service », de réserve, d’engagement… ils ont certainement quelque chose à transmettre à la Nation, aux nouvelles générations. Il faut y réfléchir.

Lille. Au cœur du CFOT, le « centre névralgique » des forces terrestres de l’armée de Terre

Lille. Au cœur du CFOT, le « centre névralgique » des forces terrestres de l’armée de Terre

Que cachent ses murs épais ? Plongée au cœur du Commandement de la force et des opérations terrestres (CFOT) à Lille, véritable tour de contrôle de l’armée de Terre.

Plongée au cœur du Commandement de la force et des opérations terrestres (CFOT) à Lille, à la limite de La Madeleine (Nord). On y est
Plongée au cœur du Commandement de la force et des opérations terrestres (CFOT) à Lille, à la limite de La Madeleine (Nord). On y est « au cœur du cœur du fonctionnement de l’armée de Terre » française. ©Margot Nicodème



Nul peut se douter, en empruntant la rue du Pont Neuf, qui fait la jonction entre le Vieux-Lille et La Madeleine, de l’ampleur de ce qui se joue derrière les murs gris du très vaste n°35. Les panneaux indiquant un « terrain militaire », avec l’injonction de ne pas « photographier » les lieux, donnent toutefois un indice sur le sérieux des décisions qui s’y opèrent. Il s’agit du Commandement de la force et des opérations terrestres (CFOT), qui n’est autre que la « tour de contrôle » de l’armée de Terre. 80 000 militaires dépendent de cet état-major lillois (sur les 110 000 recensés), dont le chef, le général Barbry, a accepté de nous expliquer l’organisation et le fonctionnement. Immersion.

Au CFOT de Lille, des bâtiments de 1849 et 1984… dont Pierre Mauroy a posé la première pierre

Pour accéder au site, les formalités d’usage s’imposent : remise de badge contre présentation d’une pièce d’identité, et la visite peut commencer. Elle n’est malheureusement jamais autorisée au grand public, pas même lors des Journées européennes du patrimoine, alors que les lieux susciteraient à coup sûr la curiosité de beaucoup.

La localisation lilloise, pour un QG militaire de cette importance, prend sens sur plusieurs aspects. La proximité avec les alliés européens et l'attractivité du territoire, notamment pour les époux des militaires.
La localisation lilloise, pour un QG militaire de cette importance, prend sens sur plusieurs aspects. La proximité avec les alliés européens et l’attractivité du territoire, notamment pour les époux des militaires. ©Margot Nicodème

Le cheminement commence par les bâtiments les plus modernes, érigés à partir de 1984 – Pierre Mauroy en a posé la première pierre, une photo fait foi. Puis vient l’ensemble bâtimentaire historique, construit en 1849. C’est là que se trouve le bureau du général Barbry, chef d’état-major de ce commandement aux ordres du général de corps d’armée Toujouse.

Le CFOT compte 450 militaires, dont « une importante proportion d’encadrants ». C’est le « centre névralgique » de l’armée de Terre, comme le qualifie le général, où sont commandées les unités combattantes de France hexagonale et des Outre-mer. L’équivalent de 80 000 hommes et femmes – le taux de féminisation s’établit à 15%, ce qui contribue à faire de l’armée française « la 4e la plus féminisée au monde ». 

« Former le système d’hommes et de femmes le plus cohérent pour aller combattre »

La gestion de ces effectifs d’envergure s’articule autour d’un « triptyque », qui se résume à « transformer, générer et opérer », renseigne le général Barbry.

Le général Barbry est
Le général Barbry résume les missions qui sont menées au CFOT avec l’image du triptyque, consistant à « transformer, générer et opérer ». ©Margot Nicodème

 

Les missions, dans ce QG de Lille, vont de la répartition, sur le terrain, des nouveaux équipements, notamment des véhicules, à la mobilisation de forces militaires. « Nous nous appuyons sur les différentes brigades, divisions, pour constituer une offre militaire. Il faut former le système d’hommes et de femmes le plus cohérent pour aller combattre. » Puis, vient l’heure d’ »opérer ».

Nous pouvons commander sur le terrain les forces que nous avons générées. Le but, avec nos 450 camarades du CFOT, c’est d’être capable d’assurer le triptyque de ces opérations. 

Le général Barbry, chef d’état-major du CFOT à Lille

À titre d’exemples, le CFOT exerce une autorité sur les forces aux Outre-mer, celles impliquées à l’Est de l’Europe (en Estonie, Pologne, Roumanie) ou encore au Liban et en Irak. C’est là qu’a été générée la force qui a rejoint le conflit armé au Mali en 2013.

Le chef militaire de haut rang tient à ajouter que l’armée de Terre, « c’est plus qu’un système d’armes. C’est avant tout de la fraternité et de la cohésion« .

La partie plus historique, en date du milieu du 19e siècle, où est notamment situé le bureau du général.
La partie plus historique, en date du milieu du 19e siècle, où est notamment situé le bureau du général. ©Margot Nicodème
Ces bâtiments, plus modernes, ont été érigés en 1984, Pierre Mauroy en a posé la première pierre. Ils accueillent aujourd'hui les réservistes, entre autres.
Ces bâtiments, plus modernes, ont été érigés en 1984, Pierre Mauroy en a posé la première pierre. Ils accueillent aujourd’hui les réservistes, entre autres. ©Margot Nicodème

Une localisation à proximité des alliés européens et du siège de l’Otan

La garnison du Nord – entre Lille (le site de la rue du Pont Neuf et la Citadelle) et Douai – a tous les atouts pour être « hyper attractive ». Avec 3000 militaires dans le département, l’armée de Terre y est un acteur économique de premier plan. Les cantines sont notamment alimentées en denrées de producteurs locaux, quand des entreprises nordistes sont en charge de la conception de composants ou matériels indispensables au bon fonctionnement de l’armée, comme pour les chars ou les transmissions. 

La localisation lilloise d’un tel commandement est adaptée, pour plusieurs raisons. « Nous sommes à proximité de nos alliés belges, allemands, néerlandais et des états-majors de l’OTAN à Bruxelles », dit pragmatiquement le général. Mais sur un autre plan, pas nécessairement moins important : « la région est attractive pour les familles », qui doivent suivre le rythme implacable induit par la vie de militaire.

Car le turnover, comme ailleurs, est important au CFOT. Au nom de « l’efficacité opérationnelle », les officiers sont amenés à bouger tous les 4 ans. Le général Barbry, en place depuis l’automne 2024, ne devrait pas, d’ailleurs, rester autant de temps dans la Capitale des Flandres.

« Le soleil ne se couche jamais, sur le CFOT »

En parallèle, il y a celles et ceux qui ont fait le choix de servir l’armée sans être « contraints » par ces changements de cadres de vie récurrents. Ce sont les réservistes ; l’armée de Terre en compte 27 000 (45 000 au total dans toute l’armée), ils sont 150 à l’état-major de Lille.

Le site de la rue du Pont Neuf accueille 450 militaires, dont des encadrants.
Le site de la rue du Pont Neuf accueille 450 militaires, dont des encadrants. ©Margot Nicodème

Ce sont des hommes et femmes aux activités professionnelles « classiques » (il y a des professeurs, des chefs d’entreprises…) qui ont fait le choix de s’engager pour des missions ponctuelles. Leur proportion, à l’échelle nationale, devrait passer de 45 000 à 80 000 en 2030, puis à 105 000 en 2035, conformément aux objectifs fixés par le président de la République. 

Les réservistes ont leurs quartiers au sein du CFOT, contribuant ainsi à la plurifonctionnalité du site. « Nous sommes H24 sur le pont, et au cœur du cœur du fonctionnement de l’Armée de terre. Le soleil ne se couche jamais, sur le CFOT », conclut le général Barbry.

Emmanuel Macron veut relancer son «Service national universel»


Emmanuel Macron prononce un discours devant un Mirage 2000 et un Rafale à la base aérienne de Luxeuil-Saint-Sauveur, France, le 18 mars 2025.

Rarement un discours d’Emmanuel Macron aura suscité autant de réactions immédiates que le dernier en date. C’était le 5 mars dernier, en direct à 20 heures sur France 2. «La patrie a besoin de vous et de votre engagement», a déclaré le président français, en costume et cravate noirs.

En invitant ses concitoyens à ne pas sous-estimer le danger que représente la Russie pour l’Europe et la France dans un monde de plus en plus incertain, le président français a peut-être même déclenché davantage de réactions qu’il ne l’aurait souhaité.

Le peuple semble en tout cas avoir pris l’appel présidentiel au pied de la lettre: 86% des Français, selon un sondage Ipsos, se sont déclarés favorables au rétablissement du service militaire obligatoire. Près de trente ans, donc, après son abolition.

Pas une «option réaliste»

À peine le sondage était-il paru que celui qui est également chef des armées – le plus haut gradé militaire de France est, lui, chef d’état-major des armées (CEMA) – a tenté de freiner la dynamique qu’il avait déclenchée. Le service militaire obligatoire n’est pas une «option réaliste», a-t-il souligné lors d’un entretien accordé en fin de semaine dernière à des titres régionaux.

La France «n’a plus la base, plus la logistique» pour remettre en place une conscription. «À partir du moment où on est allé vers la professionnalisation de nos armées, focalisées sur l’opérationnel, les réemployer pour encadrer 800’000 jeunes […] n’est absolument pas un schéma opérant», a-t-il indiqué.

Mais, a-t-il précisé, il présentera dans les semaines à venir un «grand nouveau projet» de réforme du Service national universel (SNU), «afin de correspondre aux besoins de la nation et aux priorités identifiées». Le SNU est l’un des thèmes favoris d’Emmanuel Macron depuis qu’il est au pouvoir.

Dissuasion nucléaire

Revenons d’abord sur l’option «irréaliste». Jacques Chirac avait mis au rebut le service militaire obligatoire dans les années 90. La loi est entrée en vigueur en 1997. Aujourd’hui âgé de 47 ans, Emmanuel Macron est le premier président de l’Hexagone à ne pas avoir fait son service militaire.

L’abolition de la conscription avait en fait déjà été envisagée sous la présidence de Charles de Gaulle. La puissance de la dissuasion nucléaire acquise à l’époque avait réduit l’importance d’une défense conventionnelle. Jacques Chirac a acté cet état de fait avec la fermeture de bases et la vente de nombreuses casernes.

Le sous-marin nucléaire d’attaque Suffren de classe Barracuda de la marine française, amarré dans le port de Toulon, avec un drapeau français visible à l’arrière-plan.

Quand Emmanuel Macron dit aujourd’hui que la France n’a «pas de base et pas de logistique» pour un retour à la conscription, il dit vrai. Tout manque: infrastructures, instructeurs, matériel… Sans parler de l’argent nécessaire à la reconstruction d’une armée d’un million de membres permanents.

L’armée professionnelle française compte environ 200’000 soldats. Il est prévu d’augmenter quelque peu l’armée de réserve, avec un réserviste pour deux soldats professionnels d’ici à 2035. Le nombre total de réservistes atteindrait alors les 300’000 membres.

Des clivages qui bougent

À la télévision française, on débat désormais pour savoir s’il ne serait pas plus intelligent que chaque jeune Français – et chaque jeune Française qui le souhaite – fasse son service. Les clivages politiques traditionnellement liés à la question sont en train de bouger.

Jusqu’à présent, c’est presque exclusivement la droite bourgeoise et l’extrême droite qui plaidaient en faveur du service militaire obligatoire. Le camp de droite voit dans l’armée une école de la République et – une vision très controversée – le moyen éprouvé d’enseigner les valeurs de la nation aux personnes issues de l’immigration: en position de respect devant le drapeau tricolore, en entonnant la Marseillaise. L’extrême droite parle d’assimilation.

La gauche, elle, a toujours pensé que c’était à l’école et à elle seule de faire des jeunes de toutes origines des citoyens responsables, au fait de leurs droits et devoirs. Mais les frontières idéologiques ne sont plus aussi nettes, comme le prouvent les 86% du sondage. C’est sans aucun doute dû à l’actualité géopolitique brûlante et à ce que le locataire de l’Élysée a qualifié de «menace» le 5 mars dernier.

Une sorte de creuset de la République

Emmanuel Macron veut maintenant redessiner le SNU. Un projet qui avait failli être mis au placard pour des raisons d’économies: alors premier ministre, Michel Barnier avait voulu le sacrifier afin de récupérer quelques milliards d’euros pour son budget d’austérité, faisant dire qu’il démantelait un pilier du macronisme. Mais Michel Barnier est tombé après seulement trois mois de mandat – et le SNU a survécu.

L’idée avait été lancée par Emmanuel Macron avant sa victoire de 2017. C’était même une de ses promesses de campagne: celle d’un lieu où les Français pourraient à nouveau se rencontrer au-delà des classes sociales, une sorte de creuset de la République, et ce pour une durée minimale d’un mois.

Le SNU, qui aurait été effectué dans des établissements militaires ou civils éloignés du lieu d’origine, était prévu pour des jeunes de 15 à 17 ans. Au programme, obligatoire: vie commune, lever matinal, lever du drapeau, hymne national, port de l’uniforme et cours d’instruction civique.


Mais la mise en œuvre s’est vite avérée compliquée et coûteuse, et l’ «obligatoire» s’est rapidement transformé en «facultatif». Même avec des ambitions réduites, la concrétisation n’a cessé d’être repoussée. Comme souvent, une grande annonce n’a pas résisté à la réalité.

Le président français veut donc redéfinir le SNU pour qu’il soit en phase avec son époque. Comment exactement? Ce n’est pas encore clair. La tranche d’âge sera-t-elle élargie? Le SNU sera-t-il à nouveau rendu obligatoire?

Il semble en tout cas que les Français soient désormais prêts à accepter des obligations qu’ils auraient refusées il y a peu.

Devenir réserviste oui, mais pour quelles missions et quel salaire ?

Devenir réserviste oui, mais pour quelles missions et quel salaire ?

« La patrie a besoin de vous, de votre engagement« , a déclaré Emmanuel Macron aux Français lors de son allocution du 5 mars 2025. Une façon d’inciter davantage de citoyens à rejoindre la réserve opérationnelle militaire à l’heure où « la menace [russe] revient à l’est ». Le ministre des Armées évoque lui aussi, régulièrement, l’augmentation du nombre de réservistes dans les armées, la gendarmerie et la police avec un objectif : compter 160 000 réservistes d’ici à 2030, soit deux fois plus que les 84 000 réservistes actuellement engagés.

L’armée de Terre, l’armée de l’Air et la Marine nationale recrutent des réservistes qui, une fois engagés, doivent pouvoir être mobilisés sur des missions diverses listées par le ministère des Armées : des missions de combat opérationnelles sur le territoire national ou hors de France ; des missions de protection et de résilience du territoire national avec la défense de sites militaires et civils lors d’opérations Sentinelle ; des missions de compétence sur un domaine d’expertise ; et des missions de rayonnement pour renforcer le lien entre la nation et les armées.

Des grandes lignes communes aux trois armées, auxquelles s’ajoutent des missions plus spécifiques aux besoins de chaque corps militaire. « L’armée de Terre cherche vraiment des militaires à temps partiel, qui permettent soit d’augmenter des régiments à faible préavis ou remplacer des pertes, là aussi dans un temps très court. La Marine et l’armée de l’Air n’ont pas ces enjeux mais ont besoin de profils plus techniques, de spécialistes« , explique le réserviste Stéphane Audrand au Parisien.

Le recrutement de réservistes et l’attribution des missions se fait donc en fonction du profil de chaque candidat, notamment son niveau d’étude, ses compétences particulières, et un éventuel passé militaire sachant qu’avoir déjà eu une expérience dans les armées n’est pas obligatoire. Des étudiants peuvent enfin être recrutés pour des missions opérationnelles de terrain ou logistique dans les armées de Terre et de l’Air ou membre d’équipage dans la Marine. Les personnes plus qualifiées peuvent obtenir des grades (militaire du rang, sous-officier ou officier) et se voir attribuer des missions correspondantes. Enfin, les personnes présentant des diplômes d’université, de grandes école ou des compétences spécifiques et des expertises peuvent rejoindre des unités particulières comme le renseignement, la communication, l’ingénierie, les ressources humaines, la logistique ou encore le pilotage pour les besoins spécifiques de l’armé de l’Air ou encore la plongée dans la Marine. Chaque armé précise les offres ouvertes aux réservistes en précisant les compétences nécessaires et la durée de l’engagement.

Outre les armées, la gendarmerie et la police recrutent des réservistes. Dans ces secteurs, les missions diffèrent et répondent à trois principales catégories : des missions de sécurisation, de lutte anti-terroriste et de police judiciaire pour appuyer lors des enquêtes.

Des missions rémunérées

Les membres de la réserve opérationnelle militaire sont rémunérés pour leur engagement. Les réservistes signent des contrats pouvant aller de 1 à 3 ans et jusqu’à 5 ans maximum, renouvelables. Ils sont mobilisables sur des activités miliaires pour une durée déterminée avec l’autorité militaire qui les emploie et pour un maximum de 60 jours par an. Un volume qui peut passer à 150 ou 210 jours dans des conditions particulières. En moyenne, les réservistes sont engagés sur des missions 37 jours par an.

Ces missions sont rémunérées selon des barèmes différents en fonction du corps militaire rejoint. L’armée de Terre paye les réservistes entre « 40€ et 200€ par jour en fonction de votre grade« . Une somme à laquelle s’ajoutent des « indemnités particulières en raison des fonctions exercées, des risques courus, du lieu d’exercice du service ou de la qualité des services rendus ». La Marine évoque une rémunération « à partir de 53€ par jour » qui « évolue pendant le contrat d’engagement au gré de votre avancement aux grades supérieurs ». En gendarmerie, la rémunération est d’au moins 60€ par jour selon le niveau du réserviste, en police elle débute à 74€ en région et à 80€ en Ile-de-France. Ces rémunérations sont nettes d’impôts.

A noter que ces rémunérations sont valables uniquement pour les réservistes opérationnels, les membres de la réserve citoyenne de défense et de sécurité étant bénévoles.

Qui peut devenir réserviste ?

Il faut répondre à plusieurs critères pour pouvoir devenir réserviste : être de nationalité française, être âgé d’au moins 17 ans, être en règle au regard des obligations du service national, ne jamais avoir été condamné pour un crime et jouir de ses droits civiques. Il faut présenter une bonne condition physique qui sera évaluée lors d’une visite médicale avec un médecin militaire. A noter que selon les corps militaires un âge maximum peut aussi être un critère moins de 72 ans dans l’armée de Terre, moins de 67 ans dans la police et moins de 45 ans dans la gendarmerie. Une formation militaire n’est pas nécessaire, cette dernière étant prévue lors du processus de recrutement.

Armées : Lecornu veut «une vraie réserve professionnalisée» jusqu’à 100.000 hommes

Armées : Lecornu veut «une vraie réserve professionnalisée» jusqu’à 100.000 hommes

Par John Timsit – Le Figaro  Publié le 13 mars 2025

https://www.lefigaro.fr/politique/armees-lecornu-veut-une-vraie-reserve-professionnalisee-jusqu-a-100-000-hommes-20250313


Invité jeudi soir de France 2, le ministre des Armées a rejeté l’hypothèse d’un retour du service militaire obligatoire : «Combattre est incontestablement un métier.»

Préparer l’armée de demain. Face à la «multiplication des crises en même temps» qui constitue une «fragilité potentielle» pour le paysSébastien Lecornu a appelé jeudi soir sur France 2 à «renforcer considérablement notre réserve». «On a 205.000 militaires avec un objectif à 210.000. L’avenir c’est une vraie réserve professionnalisée, c’est ce que le président de la République m’a demandé. L’idée est d’arriver à 100.000», a fait valoir le ministre des Armées. Qui se projette sur les décennies à venir, bien au-delà donc de 2027, année où prend fin le deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron : «Il y a quelques années, on avait un réserviste pour six militaires d’active. L’objectif, c’est d’avoir un format d’armée où on a un réserviste pour deux militaires d’active. Ça a beaucoup de valeur.»

Alors qu’un retour du service militaire obligatoire, supprimé en 1996 par Jacques Chirac, est plébiscité par une majorité de Français, Sébastien Lecornu remarque que ce sont bien souvent des «arguments sociaux qui sont avancés – la mixité, la capacité à passer son permis de conduire -» par les partisans du dispositif, moins finalement son «utilité militaire». «Aujourd’hui, combattre ou avoir des missions militaires est incontestablement un métier, a martelé le Normand. Mais si on la projette beaucoup, on a besoin de forces de réservistes sur lesquelles il va falloir accélérer».

«Une forme de guerre des étoiles»

Outre l’élargissement de la menace russe dans le contexte de la guerre en Ukraine, Sébastien Lecornu a également mis en garde jeudi soir contre une «militarisation de l’espace». «Nous sommes la génération d’êtres humains qui allons connaître ce qui pourrait être une forme de guerre des étoiles», a alerté le ministre des Armées, citant de possibles «destruction de satellites» par «aveuglement» ou par «armes à énergies dirigées ou laser». «Si nous ne nous réveillons pas sur ces enjeux, nous pouvons décrocher.»

Synthèse de l’article du Figaro sur la réserve militaire

Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a affirmé sur France 2 sa volonté de renforcer la réserve militaire française en la professionnalisant, avec un objectif de 100.000 réservistes. Cette initiative vise à faire face à la multiplication des crises et à renforcer la capacité de réaction de l’armée, qui compte actuellement environ 205.000 militaires d’active. L’objectif est de parvenir à un ratio d’un réserviste pour deux militaires d’active, contre un pour six actuellement.

Rejetant l’idée d’un retour au service militaire obligatoire, Lecornu souligne que combattre est un métier nécessitant une formation et un engagement spécifique, contrairement aux arguments sociaux souvent avancés par les partisans de cette réintroduction.

Le ministre a également alerté sur la militarisation de l’espace, évoquant une possible « guerre des étoiles » impliquant la destruction de satellites par des armes à énergie dirigée ou laser, un enjeu stratégique majeur pour la défense nationale.

Toutefois, un commentaire critique souligne que les moyens alloués à la réserve sont insuffisants, avec des réductions budgétaires impactant la durée des missions et les frais de déplacement. Il remet en question la faisabilité d’une réserve professionnalisée si les réservistes ne sont mobilisés que quelques jours par an, mettant en doute la réelle application de cette ambition.

Six Français sur dix souhaitent le retour du service militaire obligatoire

Six Français sur dix souhaitent le retour du service militaire obligatoire


France Army soldiers uniform. Close up photo with the France flag on a military soldier uniform with the gun next to it. Military industry concept photo.
France Army soldiers uniform. Close up photo with the France flag on a military soldier uniform with the gun next to it. Military industry concept photo. Dragoș Asaftei / stock.adobe.com

 

Une majorité de Français (61%) se dit favorable au retour d’un service militaire obligatoire. L’étude révèle aussi une méfiance croissante envers les États-Unis.

Six Français sur dix (61%) sont «favorables au rétablissement d’une forme de service militaire  obligatoire», avec une proportion très forte à droite, selon un sondage du centre de réflexion Destin commun publié samedi.

Selon cette étude pour le quotidien régional Ouest France, les Républicains (72%) et le Rassemblement national (RN, 77%) sont les plus favorables à cette proposition, la France insoumise (LFI) fermant la marche avec 35% d’opinions favorables. L’hypothèse, qui n’est pas évoquée par le gouvernement, a d’autant plus de partisans que l’âge augmente: 72% des 65 ans et plus sont pour, contre 43% des 18-24 ans.

Le sondage, qui analyse aussi notamment les opinions allemandes, britanniques et polonaises, intervient alors que l’Ukraine, à la peine sur le front contre les Russes, essuie de vives critiques du président américain Donald Trump. Washington a gelé cette semaine son aide militaire et en matière de renseignement. Les Européens se mobilisent en retour pour compenser la chute de l’assistance américaine et mettre en place une défense continentale crédible.

Six Français et Allemands (59%) sur dix qualifieraient Donald Trump de «dictateur», opinion partagée par 50% des sympathisants RN. Ils sont 56% en Grande-Bretagne et 47% en Pologne. Quelque 35% des sondés dans l’Hexagone affichent plus de sympathie pour le président ukrainien Volodymyr Zelensky depuis sa houleuse rencontre à Washington avec Donald Trump fin février. Seuls 9% affirment en éprouver moins.

Seuls un quart des Français considèrent encore les États-Unis comme alliés, et plus de la moitié (57%) «semblent en difficulté pour qualifier la relation, hésitant à acter un potentiel retournement d’alliance». Six Français sur dix (60%) jugent probable l’invasion d’autres pays européens par la Russie dans les années à venir, contre 68% en Grande-Bretagne et en Pologne et 53% en Allemagne. Près de huit Français sur dix (76%) se déclarent inquiets ou très inquiets «d’une extension du conflit en Europe dans les prochaines années».

Polonais et Britanniques sont par ailleurs 66% à vouloir continuer de soutenir l’Ukraine, même sans le soutien des Etats-Unis, contre 57% en France et 54% en Allemagne. Et la possibilité de l’envoi d’une mission de maintien de la paix ne fait pas l’unanimité. Elle recueille 57% d’opinions «plutôt ou tout à fait» favorables en Grande-Bretagne, 44% en France, 41% en Allemagne et 27% seulement en Pologne.

Sondage en ligne effectué en France sur la base de 1503 personnes selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession, niveau de diplôme et région), ainsi que 1093 au Royaume-Uni, 1513 en Allemagne, et 1000 en Pologne.

Qui pourrait être mobilisé si une guerre éclatait sur le territoire français ?

Qui pourrait être mobilisé si une guerre éclatait sur le territoire français ?

Emmanuel Macron a rappelé jeudi le danger que représenterait, pour le reste de l’Europe, une victoire russe en Ukraine. Que se passerait-il si la guerre venait à s’étendre ? On fait le point.

Le président de la République a longuement échangé avec des internautes sur les réseaux sociaux, ce jeudi 20 février 2025.

Il a notamment évoqué «la menace que représente la Russie pour l’Europe et pour la France », indiquant qu’elle allait « nous imposer des choix très forts pour nous-mêmes, pour notre défense et notre sécurité ». Il a également donné des détails sur les arguments qu’il comptait présenter à Donald Trump, le mettant en garde contre toute « faiblesse » face à Vladimir Poutine.

« Si tu laisses l’Ukraine prise » par la Russie, elle sera « inarrêtable pour les Européens », puisqu’elle « récupérerait » l’armée ukrainienne « qui est une des plus grandes d’Europe, avec tous nos équipements, y compris les équipements américains ». Dans ce scénario du pire, en cas d’invasion de la Russie sur le territoire hexagonal, que se passerait-il alors ? Qui serait mobilisé ? On vous explique.

La mobilisation générale quasi impossible

Avec la fin du service militaire, la France possède ce qu’on appelle une armée de métier. On compte environ 200 000 militaires d’active dans l’armée française. Ce sont eux qui seraient envoyés en priorité sur le front. Environ 40 000 volontaires âgés de 17 à 35 ans constituent également ce que l’on appelle la réserve de sécurité nationale.

Dans ses vœux aux armées, en janvier, Emmanuel Macron avait à ce sujet évoqué un projet, encore flou, pour « mobiliser » davantage de jeunes volontaires « en renfort des armées » en cas de besoin. « Aujourd’hui, nous nous contentons d’un recensement, d’une journée défense et citoyenneté », « c’est trop peu », avait-il dit, demandant au gouvernement et à l’état-major des propositions d’ici au mois de mai pour « mieux détecter », « former » et « être capable de mobiliser » des volontaires « le jour venu ».

La France vise ainsi 210 000 militaires d’active et 80 000 réservistes à l’horizon 2030.

La mobilisation générale serait utilisée en dernier recours mais elle n’a quasiment aucune chance d’aboutir en raison de capacités logistiques insuffisantes. La dernière date de 1939, dans le cadre de la Seconde Guerre mondiale. 4,5 millions de Français avaient alors été appelés sous les drapeaux

L’armée française de demain : spécialisation ou conscription ?

L’armée française de demain : spécialisation ou conscription ?

par Martin Anne – Revue Conflits – publié le 1er février 2025

https://www.revueconflits.com/larmee-francaise-de-demain-specialisation-ou-conscription/


Alors que les conflits récents rappellent l’importance des stratégies classiques de terrain, l’armée française entame une mutation profonde pour répondre aux défis de la guerre moderne. Entre la numérisation des systèmes, la montée en puissance des spécialistes et la nécessité de s’intégrer dans des alliances multinationales, les forces terrestres réinventent leur organisation tout en restant attachées à des tactiques éprouvées. Ce paradoxe reflète une constante : si les technologies évoluent, la nature de la guerre, elle, demeure.

L’armée française a hésité longtemps entre un modèle reposant sur la conscription, et un autre bâti sur la professionnalisation. Lorsque de Gaulle publia Vers l’armée de métier (1934), l’état-major et les politiques ont encore en tête la défaite de 1870, quand l’armée était professionnelle, et la victoire de 1918, où la demande d’immenses réserves d’hommes avait imposé la conscription. De l’apparition de la bombe nucléaire naquit la création d’une de force d’action rapide professionnelle au sein de l’armée de conscription jusqu’à la fin de la guerre froide. C’est avec Jacques Chirac et l’abolition du service militaire que la professionnalisation est devenue le modèle de l’armée française. Devant les besoins techniques de la guerre moderne, la multiplication des réservistes ne pourra pas changer ce modèle.

Martin Anne

Une armée de terre en transformation

La modification profonde de l’organisation de l’armée de terre, qui bascule du modèle « au contact » à « l’armée de terre de combat », vise à répondre aux transformations induites par la multiplication des outils numériques. Cette réforme repose sur trois grands axes : une logique d’employabilité des unités, une décentralisation du commandement et une présence accrue de spécialistes au sein des forces terrestres. L’objectif est de répondre aux défis posés par la numérisation, qui exige des profils plus techniques.

La numérisation a refondu les systèmes informatiques et de communication des unités de combat. Désormais, chaque unité est équipée de serveurs informatiques intégrés à leur système de communication radio. Ces systèmes permettent d’obtenir des informations telles que la position GPS, la quantité de munitions tirées et de transmettre des ordres numériques. Le concept de combat collaboratif, développé par Thales, renforcera encore ces capacités en automatisant la transmission de données tactiques grâce à l’intelligence artificielle. Les opérateurs chargés de gérer ces systèmes devront posséder des compétences avancées en informatique pour paramétrer et exploiter ces technologies complexes.

Le renseignement tactique a également gagné en importance. Autrefois concentrés dans deux régiments spécialisés, les moyens de renseignement en images (drones) et en électronique (interception d’émissions électromagnétiques) étaient déployés sur les théâtres d’opérations pour appuyer les groupements tactiques. Désormais, les régiments d’infanterie intégreront des capacités de guerre électronique, tandis que l’utilisation de drones sera généralisée à l’ensemble des armes. Les régiments spécialisés subsistent néanmoins, pour répondre aux besoins en renseignement opératif et stratégique. Cette évolution, réalisée à effectif constant, entraîne une substitution progressive des combattants d’infanterie traditionnels par des spécialistes du renseignement. La mise en œuvre de ces équipements complexes nécessitera également des soldats mieux formés techniquement.

Cependant, l’augmentation des outils de renseignement et de communication entraîne une multiplication des réseaux, et donc des failles potentielles en matière de sécurité. Si le chiffrement des communications est une pratique ancienne, illustrée par des exemples tels que la machine Enigma ou les Windtalkers navajos, les réseaux numériques modernes exigent des solutions de protection toujours plus avancées. La cyberguerre est devenue un enjeu clé, impliquant des actions visant à couper les réseaux de communication ennemis et à accéder à leurs données sensibles. Pour y faire face, l’armée de terre a créé un bataillon cyber, regroupant des unités spécialisées. Cette évolution s’inscrit dans un contexte où les effectifs globaux restent constants, ce qui accroît mécaniquement la proportion de spécialistes dans les rangs.

Ainsi, le nombre de spécialistes augmentera fortement dans l’armée de terre pour relever ces défis technologiques. Intuitivement, on pourrait en conclure que les clés de la victoire résident désormais dans des opérations ciblées, comme la prise de contrôle des réseaux informatiques ennemis, plutôt que dans la conquête traditionnelle de territoires. Pourtant, les conflits récents en Ukraine et au Proche-Orient démontrent que la conquête physique reste un élément central des affrontements.

Des fondamentaux qui demeurent

Dans le conflit ukrainien, le contrôle du terrain demeure un objectif politique central. Vladimir Poutine, en 2014, déclarait que « la Crimée et Sébastopol sont rentrés au port », affirmant ainsi ses visées territoriales. Reflétant l’assertion de Clausewitz selon laquelle « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens », la conquête du terrain constitue l’objectif militaire principal de ce conflit. Celle-ci s’appuie sur le déploiement de troupes au sol, suivant des tactiques classiques.

Par exemple, l’offensive ukrainienne vers Koursk a été menée par des brigades mécanisées dont l’organisation reste comparable à celle de la Deuxième Guerre mondiale. Les chars de bataille y jouent toujours un rôle central, en perçant le front ennemi pour permettre à l’infanterie de progresser. Les appuis en génie et artillerie conservent leur fonction traditionnelle : préparer le terrain en vue de sa prise. Ainsi, un général ukrainien pourrait aujourd’hui, à l’instar du maréchal de Lattre de Tassigny, déclarer au sujet de l’une de ses brigades mécanisées : « C’était mon élément de décision. » La rupture du front, obtenue par une concentration de moyens blindés dans une zone favorable, reste une méthode privilégiée pour remporter la victoire.

Dans cette organisation conventionnelle, les technologies dites « de rupture » sont intégrées au sein des brigades, mais leur utilisation demeure confiée à des unités spécialisées. Ces technologies participent au nouveau combat interarmes sans pour autant remplacer les équipements traditionnels. Par exemple, le drone ne remplace pas le char, comme le char avait autrefois remplacé le cheval. La guerre moderne ne peut donc être menée exclusivement derrière un écran : elle reste un affrontement terrestre, où la quantité d’hommes engagés demeure un facteur clé pour obtenir l’avantage. Une armée négligeant ce rapport de force risquerait rapidement d’être surpassée. En Europe, les armées prises individuellement ne disposent pas des effectifs suffisants pour répondre à ces exigences, à l’exception notable de l’armée américaine, qui combine haute technologie et armée de masse.

La réserve : une alternative à l’armée permanente

Les guerres au Proche-Orient et en Ukraine, bien que différentes — asymétrique pour l’une, symétrique pour l’autre —, ont toutes deux nécessité la mobilisation de réservistes. Tsahal, l’Ukraine et la Russie peuvent compter sur des centaines de milliers de réservistes ayant récemment effectué leur service militaire. Ces derniers possèdent les qualifications nécessaires pour utiliser du matériel moderne, permettant d’augmenter rapidement et efficacement les effectifs des armées régulières.

En comparaison, les forces opérationnelles terrestres françaises comptent 77 000 soldats, et l’armée de terre 120 000, avec 25 000 réservistes. Ces chiffres soulignent les limites du modèle d’une armée réduite. Pour y remédier, la nouvelle loi de programmation militaire (LPM) prévoit une augmentation significative de la réserve opérationnelle, visant le recrutement d’un réserviste pour deux soldats d’active. L’objectif est d’atteindre 100 000 réservistes d’ici 2030.

Cependant, ce modèle présente des faiblesses. Les réservistes français, formés comme généralistes, ne reçoivent pas de formation spécialisée. Par exemple, un réserviste d’un régiment de cavalerie peut remplacer un collègue d’un régiment de transmissions, mais aucun des deux n’atteint le niveau de compétence de son homologue d’active. Contrairement à Tsahal, où les réservistes peuvent être mobilisés pour opérer des chars Merkava, les réservistes français ne sont pas qualifiés pour utiliser les Leclerc. Ce déficit de spécialisation, combiné à la complexité croissante des équipements, allongerait le délai de mobilisation des unités de réserve en cas de conflit.

La doctrine actuelle exclut l’emploi des réservistes dans des missions de combat face à une armée moderne. Leur rôle se limiterait à des missions sur le territoire national, tandis que l’active serait déployée en opération. Ainsi, en cas de guerre, l’armée conventionnelle française ne pourrait compter que sur ses effectifs permanents.

Face à ces défis, la France mise sur son intégration dans des alliances multinationales, seule solution pour compenser le manque d’effectifs. Dans son modèle actuel et futur, l’armée française doit accepter sa dépendance envers ses alliés pour garantir une capacité d’intervention suffisante en cas de conflit.

Une armée numérisée aux tactiques traditionnelles

L’armée française reste attachée à son modèle « d’armée complète », qui vise à maintenir un éventail complet de capacités militaires. Ce modèle est adapté aux effectifs qui lui sont alloués, mais il permettrait également de transmettre, conserver et développer ses savoir-faire si une augmentation rapide des effectifs devenait nécessaire. En revanche, un manque d’adaptation risquerait de conduire à ce que l’on appelle le syndrome de la « guerre de retard », où une armée nombreuse et expérimentée, mais utilisant des technologies et des méthodes dépassées, se verrait surpassée par une force plus jeune et agile, équipée des dernières avancées technologiques.

Bien que les nouvelles technologies aient modifié certains aspects de la micro-tactique et contribué à dissiper le « brouillard de la guerre » en offrant une meilleure visibilité des situations, elles n’ont pas transformé la nature même du conflit. Le champ de bataille en 2024 reste marqué par la présence de chenilles de chars, de tranchées et de troupes massées aux frontières. Ainsi, malgré l’introduction massive de composants électroniques dans les équipements militaires, les éléments fondamentaux de la guerre demeurent inchangés.

Armées : Emmanuel Macron veut 80 000 réservistes en 2030

Armées : Emmanuel Macron veut 80 000 réservistes en 2030

Lors de ses vœux aux armées, Emmanuel Macron a insisté sur sa volonté de faire monter les effectifs de l’armée de réserve à 80 000 unités d’ici 2030.

par Cédric Bonnefoy – armees.com – Publié le
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Armées : Emmanuel Macron veut 80 000 réservistes en 2030 | Armees.com

Lors de ses traditionnels vœux aux armées, Emmanuel Macron a fait plusieurs propositions pour attirer la jeunesse vers les métiers des armées. Mais aussi pour améliorer la détection de jeunes prêts à rejoindre les unités. Son objectif : arriver à 80 000 réservistes en 2030.

Emmanuel Macron veut booster les effectifs des armées

Dans un discours prononcé à Cesson-Sévigné, lors de ses traditionnels vœux aux forces armées françaises, Emmanuel Macron dévoile une vision ambitieuse pour renforcer les effectifs de l’armée française. Le chef de l’État exprime son intention d’atteindre un objectif de 80 000 réservistes d’ici 2030. Selon lui, il s’agit d’une étape clé pour répondre aux nouvelles menaces pesant sur la sécurité nationale. Ce projet s’inscrit dans une volonté de « mieux détecter » et « mobiliser » les jeunes volontaires afin d’assurer une défense renforcée face à des périls croissants.

Pour le président, l’engagement des jeunes Français constitue une réponse stratégique face à l’ »accumulation des menaces« , notamment la guerre en Ukraine, qui a « accéléré les périls » géopolitiques. Aujourd’hui, le dispositif d’engagement citoyen se limite essentiellement au recensement national et à la Journée Défense et Citoyenneté (JDC). Emmanuel Macron estime que ce cadre est insuffisant. Afin de pallier cette lacune, le président propose une rénovation de la JDC, qui redeviendrait « un moment de temps retrouvé avec les armées« . Parmi les 800 000 jeunes participant annuellement à cette journée, certains pourraient se porter volontaires pour intégrer une réserve opérationnelle.

Cette réserve serait structurée pour permettre aux volontaires d’apprendre aux côtés des militaires actifs, tout en étant formés à intervenir « en renfort des armées en métropole ou ailleurs« . Cette approche offre non seulement une opportunité unique d’acquérir des compétences militaires, mais elle s’inscrit aussi dans une logique d’engagement fort pour la jeunesse. Surtout depuis que le Sénat vient d’acter quasiment la fin du service national universel.

Un cadre rénové pour la mobilisation

En parallèle, Emmanuel Macron sollicite l’état-major des armées et le gouvernement pour élaborer des propositions concrètes d’ici mai 2025. Ces initiatives incluront des stratégies pour mieux repérer les jeunes intéressés par un engagement militaire et les intégrer efficacement dans les forces armées. L’objectif à terme est de renforcer l’interconnexion entre les militaires d’active, dont les effectifs devraient atteindre 210 000, et les réservistes.

Ce projet s’inscrit dans une logique de défense nationale réactive face à des défis multiples. Emmanuel Macron a rappelé que les nouvelles stratégies militaires doivent tenir compte d’un contexte marqué par une intensification des tensions internationales. « Nous devons être capables de mobiliser notre jeunesse le jour venu, pour garantir la sécurité en métropole ou ailleurs« , a martelé le président.