De 2300 à 600: le rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire français en Afrique présenté à Macron

De 2300 à 600: le rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire français en Afrique présenté à Macron

A Gao, au Mali en novembre 2021. Photo P. CHAPLEAU

 

Personne n’a oublié qu’en février 2023, le président français Emmanuel Macron a annoncé une prochaine « diminution visible » des effectifs militaires français en Afrique. Un an plus tard, on apprenait que Jean-Marie Bockel, éphémère ministre de la Coopération de l’ancien président Nicolas Sarkozy en 2007, était chargé d’une mission sur la reconfiguration du dispositif militaire français en Afrique.

Il était alors prévu qu’un rapport serait remis au Président à la mi-juillet 2024.

Lundi, Jean-Marie Bockel a remis au président français son rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire français en Afrique, a annoncé l’Elysée. Ce rapport prône un partenariat « renouvelé » et « coconstruit ».

« Les recommandations s’inscrivent dans la volonté de mise en œuvre d’un partenariat de défense renouvelé, répondant aux besoins exprimés par nos partenaires, et coconstruit avec eux, dans le plein respect de leur souveraineté », a ajouté la présidence sans commenter les constats et les recommandations. L’AFP précise d’ailleurs en ce 26 novembre que le plan de réduction « ne devrait pas faire l’objet d’annonces formelles ».

La mission de l’ancien secrétaire d’Etat à la Coopération sous l’ancien président Nicolas Sarkozy concernait les quatre pays où sont implantées des bases militaires françaises sur le continent, hors celle de Djibouti. Ces quatre pays sont le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Tchad et le Gabon. Au début de l’été dernier, deux sources proches de l’exécutif et une source militaire avaient confié à l’AFP que le projet visait à conserver une centaine de militaires au Gabon (contre 350 alors), autant au Sénégal (contre 350) et en Côte d’Ivoire (600 auparavant) ainsi que quelque 300 au Tchad (contre 1000). Soit un passage de 2300 militaires des forces prépositionnées à 600, volume qui constituera peut-être le « dispositif socle » dont parlait Jean-Marie Bockel, il y a quelques jours sur France24.

A noter qu’en avril 2024, la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale a tenu à prendre part à la réflexion sur l’avenir de la politique française de défense en Afrique en organisant, à partir du mois de novembre 2023, un large cycle d’auditions sur les mutations stratégiques du continent. Son Rapport d’information n°2461 est à lire ici.

Photographies et dessins : Afghanistan. No Woman’s Land

Photographies et dessins : Afghanistan. No Woman’s Land

Par Mélissa Cornet, Pierre Verluise – Diploweb – publié le 24 novembre 2024

https://www.diploweb.com/Photographies-et-dessins-Afghanistan-No-Woman-s-Land.html  


Mélissa Cornet effectue des travaux de recherche en Afghanistan depuis janvier 2018 pour des think tanks locaux ou internationaux. Entre janvier et juin 2024, elle réalise un reportage sur les droits des femmes afghanes avec la photographe irano-canadienne Kiana Hayeri. Ce reportage, « No Woman’s Land », est exposé jusqu’au 18 décembre 2024 à Paris, sur le Port de Solférino, face au Musée d’Orsay. Exposition extérieure, accès libre, ouverte au public 24 h / 24 h, 7 jours sur 7. En partenariat avec la Ville de Paris.
Propos recueillis par Pierre Verluise, docteur en Géopolitique, fondateur du Diploweb.com.

En 2024, l’Afghanistan se trouve plongé dans une combinaison de crises interconnectées. La crise humanitaire est sans précédent, avec un effondrement économique qui entraîne des niveaux de pauvreté et de malnutrition catastrophiques. Les droits humains sont également dans une situation critique, avec des groupes vulnérables, notamment les femmes et les minorités, qui font face à des restrictions sévères et à une exclusion croissante. L’exposition présentée documente la condition actuelle des femmes et des filles afghanes sous le régime taliban. A ne pas manquer, actuellement à Paris, bientôt aux Pays-Bas, à La Haye

Pierre Verluise (P. V. ) : Vous présentez à Paris, Port de Solférino, une exposition «  No Woman’s Land  », consacrée à la situation des droits des femmes en Afghanistan réalisée en 2024 avec Kiana Hayeri dans le cadre de la 14e édition du Prix Carmignac. Nous en présentons ci-dessous trois photos, mais pouvez-vous nous en dire plus sur cette exposition, son accueil et ses suites possibles ?

Mélissa Cornet (M. C. ) : L’exposition « No Woman’s Land » est le fruit d’un travail de terrain mené sur six mois en collaboration avec Kiana Hayeri, qui se consacre à illustrer la condition actuelle des femmes et des filles afghanes sous le régime taliban. L’objectif central de l’exposition est de montrer le contraste poignant entre la résilience des femmes afghanes et la répression systématique à laquelle elles sont confrontées dans leur quotidien. À travers des portraits intimes et des récits personnels, nous avons cherché à révéler les aspects souvent invisibles de leur lutte pour l’autonomie, la dignité et la liberté de choix.

 
Afghanistan. 2024. No Woman’s Land
Une affiche déchirée montre comment les femmes sont censées se couvrir le visage : avec une burqa, ou chadari, qui couvre tout le visage, ou avec un niqab, qui ne laisse que les yeux découverts. © Kiana Hayeri pour la Fondation Carmignac
Kiana Hayeri / Fondation Carmignac

L’accueil de l’exposition a été profondément significatif : les visiteurs ont réagi non seulement par une profonde empathie envers ces femmes, mais aussi avec un sentiment d’injustice qui dépasse les frontières. Ce que nous espérons désormais, c’est que « No Woman’s Land » continue de voyager pour sensibiliser un public international, avec une deuxième étape confirmée aux Pays-Bas, à La Haye, en décembre 2024 et un site interactif en construction. Nous envisageons également des publications qui approfondiraient ces récits et des débats autour des mécanismes de soutien aux droits humains. Par ailleurs, cette exposition est un appel à l’action pour la communauté internationale, en soulignant le besoin urgent d’interventions concrètes pour protéger les droits fondamentaux des femmes afghanes.

P. V. : Au vu de vos expériences de terrain en Afghanistan de 2018 à 2024, comment ont évolué les droits des femmes, en particulier après le retour des taliban [1] au pouvoir le 31 août 2021 ?

M. C. : Avant 2021, les femmes en Afghanistan bénéficiaient d’une fragile, mais réelle, expansion de leurs droits, dans les domaines de l’éducation, de la participation politique, et de l’accès à l’emploi. Si ces acquis demeuraient limités et souvent précaires, ils représentaient néanmoins une avancée significative. Depuis le retour au pouvoir des taliban en 2021, c’est la trajectoire inverse, et les femmes ont vu leurs libertés réduites à un point critique : interdiction d’accéder à l’éducation secondaire et universitaire, restrictions draconiennes de leurs déplacements sans accompagnement masculin, et exclusion systématique des espaces publics, économiques et sociaux.

 
Gardi, district de Ghos, Nangarhar, Afghanistan, 13 février 2024.
© Kiana Hayeri pour la Fondation Carmignac.
Kiana Hayeri / Fondation Carmignac

Légende de la photo ci-dessus : Gardi, district de Ghos, Nangarhar, Afghanistan, 13 février 2024. En l’absence de bâtiments scolaires dans le district de Gardi Ghos, des classes sont installées pour les élèves, entre deux routes principales, sous le soleil et sur un sol en terre battue. Alors que les garçons peuvent suivre leur scolarité jusqu’à la douzième année, les filles n’ont accès à l’école que jusqu’à la sixième année. Aujourd’hui, les filles ne sont autorisées à étudier que jusqu’à la sixième année et sont exclues des écoles secondaires et des universités. Dans certains districts, sur décision locale des autorités, les filles n’ont pas le droit d’aller à l’école au-delà de la 3e année. Cependant, des écoles clandestines installées dans des maisons, des mosquées ou des espaces alternatifs continuent d’éduquer les filles, au prix d’un risque élevé. © Kiana Hayeri pour la Fondation Carmignac.

Le régime actuel cherche non seulement à restreindre leurs droits, mais aussi à effacer leur présence visible de la sphère publique. Cette régression est structurelle, visant à établir une société où les femmes sont entièrement marginalisées et invisibilisées. Les effets psychologiques et sociaux de cette situation sont dévastateurs, non seulement pour les femmes elles-mêmes mais pour la société afghane dans son ensemble, qui se trouve ainsi privée de la contribution active de la moitié de sa population.

P. V. : Quelles sont les différentes crises qui affectent fin 2024 l’Afghanistan ? En admettant qu’elle existe, la « communauté internationale » a-t-elle directement ou indirectement des parts de responsabilité dans ces crises ?

M. C. : En 2024, l’Afghanistan se trouve plongé dans une combinaison de crises interconnectées. La crise humanitaire est sans précédent, avec un effondrement économique qui entraîne des niveaux de pauvreté et de malnutrition catastrophiques. Les droits humains sont également dans une situation critique, avec des groupes vulnérables, notamment les femmes et les minorités, qui font face à des restrictions sévères et à une exclusion croissante. Par ailleurs, l’isolement politique et économique du pays exacerbe cette crise multidimensionnelle, les sanctions et le gel des avoirs ayant contribué à l’effondrement des systèmes de services publics essentiels.

En ce qui concerne la responsabilité de la communauté internationale, elle est complexe et ambivalente. Le retrait militaire chaotique de 2021 a laissé un vide que les taliban ont rapidement rempli, sans pour autant que des solutions durables soient mises en place pour stabiliser le pays. Par ailleurs, l’approche punitive adoptée par certains pays en matière d’aide humanitaire et au développement a accentué l’isolement du régime mais a surtout privé le peuple afghan de ressources vitales. Il y a donc une part de responsabilité dans l’échec de l’établissement de conditions propices à une stabilité durable, qui aurait pu permettre une meilleure transition pour les afghans.

P. V. : Les récents décrets des Taliban ont encore restreint les libertés des femmes, y compris l’interdiction de chanter et de lire en public. Comment ces mesures affectent-elles la manière dont les États occidentaux peuvent répondre à la situation en Afghanistan ?

M. C. : Les restrictions imposées aux femmes par le régime taliban placent les pays occidentaux dans une position diplomatique extrêmement délicate. D’une part, collaborer avec les taliban pour garantir un accès humanitaire et une stabilité minimale n’est pas populaire avec les opinions publiques occidentales. D’autre part, refuser tout dialogue empêche tout levier d’influence directe et, par conséquent, toute possibilité d’exercer une pression pour des changements même minimes.

 
Afghanistan, Jalalabad, province de Nangarhar, 12 février 2024
Muska, 14 ans, est récemment rentrée du Pakistan et rêve de poursuivre ses études, permises là-bas et limitées en Afghanistan. « Je préférerais vivre au Pakistan, où je pourrais au moins m’éduquer ». Récemment, ses parents ont accepter de la marier au fils de leur propriétaire, en échange d’un puit et de panneaux solaires. © Kiana Hayeri pour la Fondation Carmignac
Kiana Hayeri / Fondation Carmignac

Ces décisions génèrent un effet boomerang aux niveaux social et politique. En tolérant l’oppression en Afghanistan, certains États risquent de banaliser la répression de genre dans le discours international, voire de légitimer indirectement d’autres régimes autoritaires. Cela pourrait également alimenter une dynamique de repli dans les politiques migratoires et de sécurité en Occident, alors que des milliers d’Afghans, et surtout des Afghanes, cherchent à quitter leur pays.

P. V. : Quelles actions vous semblent les plus efficaces pour soutenir les droits des femmes Afghanes ?

M. C. : Les actions les plus efficaces pour soutenir les droits des femmes afghanes passent par un engagement de terrain et une coopération internationale qui privilégie la sécurité et l’autonomisation des femmes afghanes. Le soutien aux ONG locales, l’établissement de fonds sécurisés pour les femmes afghanes, et un plaidoyer constant dans les instances internationales sont des leviers cruciaux. Il est aussi essentiel que les voix des femmes afghanes soient mises au premier plan dans les forums et débats, afin que leurs revendications soient intégrées dans les processus de prise de décision.

Quant au rôle des féministes occidentales, leur solidarité est indispensable et doit s’incarner par des actions concrètes, au-delà des simples déclarations , par exemple en collaborant directement avec les associations afghanes et en amplifiant les récits des femmes sur le terrain, ou en soutenant les voies de migration légales pour les femmes afghanes, et en les accueillant à bras ouverts en Europe et lors de leur processus d’intégration.

P. V. : Tournons-nous vers l’avenir. Quels sont vos espoirs pour l’évolution des droits des femmes afghanes et comment envisagez-vous de continuer à plaider pour leur autonomisation ?
M. C. : Nos espoirs pour les femmes afghanes sont indissociables d’une vision de long terme qui mise sur l’éducation, le soutien psychologique et l’autonomisation économique comme leviers de transformation.

Dans un avenir idéal, nous espérons une évolution vers un meilleur respect des droits humains, notamment ceux des femmes, de manière pacifique. Après des décennies de conflit, personne ne veut aujourd’hui d’une transition violente. Pour notre part, nous poursuivrons nos efforts par des expositions, des publications, et des partenariats tel que celui que nous avons actuellement avec Amnesty International.

L’exposition « No Woman’s Land » est actuellement exposée à Paris, port de Solférino, en contrebas du Quai Anatole France, jusqu’au 18 décembre 2024. Ce reportage a été réalisé grâce au soutien du Prix de Photojournalisme de la Fondation Carmignac.

Copyright Novembre 2024-Cornet-Verluise/Diploweb.com


[1] NDLR : Taliban : cette appellation est le pluriel de « taleb » (instruit, dans le sens coranique) et ne prend donc jamais de « s ».

La dimension aéroterrestre, un enjeu stratégique pour l’armée de Terre

La dimension aéroterrestre, un enjeu stratégique pour l’armée de Terre

IHEDN – publié le 25/11/2024

https://ihedn.fr/lundis-de-lihedn/la-dimension-aeroterrestre-un-enjeu-strategique-pour-larmee-de-terre/


Mis en valeur lors de la présentation de l’armée de Terre la semaine dernière à l’École militaire, l’espace aéroterrestre est de plus en plus essentiel pour la mobilité tactique et stratégique. Décryptage.

Pour son édition 2024, la présentation de l’armée de Terre (PAT) mettait en avant les « Enjeux et finalités du milieu aéroterrestre » à l’École militaire. Un profane pourrait s’étonner : quel lien entre le milieu aérien et une armée terrestre ? La réponse est que ces liens sont très nombreux, et prennent une importance croissante dans l’évolution contemporaine des conflits.

Sur des théâtres de plus en plus complexes, la dimension aéroterrestre vise à accroître l’efficacité opérationnelle. Selon les opérations, il y a bien évidemment une coordination stratégique entre l’armée de Terre et l’armée de l’Air et de l’Espace. Mais en son sein même, l’armée de Terre recèle aussi des capacités aériennes, qui composent la dimension aéroterrestre avec les forces au sol.

Les principaux usages aéroterrestres sont les suivants : renseignement et surveillance par drones et capteurs aériens, appui feu aérien pour les forces terrestres, transport tactique et logistique, opérations aéromobiles et parachutistes, et enfin défense sol-air contre les menaces aériennes.

La plus connue des capacités aéroterrestres est sans doute l’Aviation légère de l’armée de Terre (ALAT). Disposant d’environ 300 aéronefs (surtout des hélicoptères), elle sert au repérage des cibles, au combat antichars ou au transport de soldats, apportant à l’armée une mobilité rapide et un appui feu crucial pour les unités déployées.

L’ALAT inclut des hélicoptères de combat (comme le Tigre), d’assaut (NH90 Caïman), et un modèle multitâches, le Guépard (Airbus H160M).

Aboutissement d’un programme lancé en 2017, le Guépard brille par sa polyvalence, puisqu’il remplace 5 modèles précédemment utilisés au sein de l’ALAT : les Fennec, Gazelle, Panther, Alouette III et Dauphin.

Le Guépard (Airbus H160M)
Le Guépard (Airbus H160M).

L’autre composante majeure de la dimension aéroterrestre est la large flotte de drones de l’armée de Terre. Il peut s’agir de drones tactiques, de renseignement, de contact… Plusieurs étaient la semaine dernière à la PAT.

Drone à voilure fixe, le SQ20 est utilisé comme cible aérienne pour l’entraînement au tir antiaérien à l’arme légère d’infanterie, à la mitrailleuse ou au canon mitrailleur. Le RQ-11 Raven, lui, est un drone de combat léger de conception américaine.

Le drone SQ20.
Le drone SQ20.
Le drone RQ-11B-RAVEN.
Le drone RQ-11B-RAVEN.

Les sapeurs-sauveteurs (militaires de la sécurité civile) utilisent aussi des drones, par exemple pour avoir un soutien visuel en intervention, notamment sur des sites inaccessibles ou dangereux. C’est les cas des différentes variantes des drones DJI Matrice ou Mavic.

Les drone DJI matrice 300 / drone DJI matrice 30T / drone DJI Mavic 3T.
Les drone DJI matrice 300 / drone DJI matrice 30T / drone DJI Mavic 3T.

Autre appareil présent à l’École militaire, le mini-drone AVATAR, développé par DGA Techniques terrestres et l’Agence innovation défense, sera un drone de combat embarquant des capteurs et un fusil d’assaut HK-416 à tir laser.

Le projet AVATAR.
Le projet AVATAR.

Dernière fonction cruciale de la dimension aéroterrestre, la préparation d’artillerie, avec la gestion de l’espace aérien pour des tirs longue portée (avec des canons Caesar ou des lance-roquettes unitaires par exemple).

Le programme Scorpion de modernisation des capacités de combat, qui fête cette année ses 10 ans, est crucial pour la dimension aéroterrestre, puisque son système d’information du combat unique facilite les communications sol-air entre tous types d’appareils : par exemple, les véhicules blindés nouvelle génération comme le Griffon, le Serval ou le Jaguar sont équipés de capteurs et de systèmes d’information avancés qui leur permettent de recevoir et partager en temps réel des données tactiques, en lien notamment avec les moyens aériens d’observation.

La miniaturisation et les nouvelles technologies permettent ainsi une intégration de plus en plus poussée des capteurs, des systèmes d’armes et des centres de décision. Combinant puissance aérienne et expertise terrestre, la dimension aéroterrestre constitue une réponse efficace aux menaces modernes. Grâce à ses moyens avancés et à une coordination étroite entre les forces, elle offre une capacité unique d’intervention, de protection et de projection de puissance, essentielle pour les conflits d’aujourd’hui et de demain.

Afrique : le rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire français présenté à Macron

Afrique : le rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire français présenté à Macron

https://www.lefigaro.fr/international/afrique-le-rapport-sur-la-reconfiguration-du-dispositif-militaire-francais-presente-a-macron-20241125


Des soldats français au Tchad, en 2022.

Des soldats français au Tchad, en 2022. AURELIE BAZZARA-KIBANGULA / AFP

 

Les nouvelles modalités de la présence militaire française en Afrique prévoient une réduction significative pour ne conserver qu’un détachement de liaison permanent.

L’envoyé personnel d’Emmanuel Macron en Afrique, Jean-Marie Bockel, a remis lundi au président français son rapport sur la reconfiguration du dispositif militaire français en Afrique, qui prône un partenariat «renouvelé» et «coconstruit», a annoncé l’Élysée. «Les recommandations s’inscrivent dans la volonté de mise en œuvre d’un partenariat de défense renouvelé, répondant aux besoins exprimés par nos partenaires, et coconstruit avec eux, dans le plein respect de leur souveraineté», ajoute la présidence.

La mission de l’ancien secrétaire d’État à la Coopération sous l’ancien président Nicolas Sarkozy concernait les quatre pays où sont implantées des bases militaires françaises sur le continent, hors celle de Djibouti: Sénégal, Côte d’Ivoire, Tchad et Gabon.

Abaisser les forces prépositionnées

Contrairement aux autres pays où il s’est entretenu tant avec les autorités qu’avec des représentants de la société civile, Jean-Marie Bockel n’a pas pu se rendre à Dakar et émettre des recommandations concernant le Sénégal, en raison des élections présidentielles et législatives qui s’y sont déroulées ces derniers mois. Selon le plan envisagé par l’exécutif et qui ne devrait pas faire l’objet d’annonces formelles, la France prévoit d’abaisser les forces prépositionnées dont elle dispose sur ses emprises militaires.

Le 6 novembre, Jean-Marie Bockel avait confirmé, lors d’une audition devant les députés de la commission de la Défense, la réduction de voilure sans dévoiler de chiffres, arguant alors que les données étaient classifiées. Au début de l’été, deux sources proches de l’exécutif et une source militaire avaient confié à l’AFP que le projet visait à conserver une centaine de militaires au Gabon (contre 350 alors), autant au Sénégal (contre 350) et en Côte d’Ivoire (600 auparavant) ainsi que quelque 300 au Tchad (contre 1000).

Les nouvelles modalités de la présence militaire française en Afrique prévoient une réduction significative pour ne conserver qu’un détachement de liaison permanent et dans le même temps d’adapter l’offre de coopération militaire aux besoins exprimés par ces pays, explique-t-on à Paris.

L’Allemagne intervient à Bruxelles, via ses ONG, pour imposer sa politique énergétique. La France et la filière nucléaire en font les frais.

par Louis du BREIL – AASSDN – publié le 14 novembre 2024

https://aassdn.org/amicale/l-allemagne_intervient-a-bruxelles-via-ses-ong-pour-imposer-sa-politique-energetique-la-france-et-la-filiere-nucleaire-en-font-les-frais/


L’économie, c’est de l’énergie transformée. Ce ne sont pas aux industriels allemands qu’il faut le rappeler. L’explosion des prix de l’électricité depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine les a remis face au désastre de la destruction de leurs capacités nucléaires depuis la mise en place de l’Energiewende dans les années 1990. Dans ce processus suicidaire, Berlin s’en est pris à l’avantage comparatif français dans le secteur énergétique afin de promouvoir sa propre industrie des énergies renouvelables (ENR)[1] et maintenir sa domination économique en Europe. L’Allemagne mène ainsi une guerre de l’information antinucléaire contre la France en s’appuyant sur ses réseaux influents dans les couloirs de Bruxelles et sur un attirail de fondations politiques au service de ses intérêts.

Commentaire AASSDN : Cet article retrace parfaitement le déroulement des actions menées par l’Allemagne contre les intérêts supérieurs français pendant plus de 25 ans.
De nombreux responsables politiques français ont collaboré souvent pour des raisons politiciennes avec des organismes allemands dont l’objectif était d’affaiblir les capacités énergétiques et donc économiques de notre pays.
La guerre notamment économique est un état permanent. Nos alliés, qui ne sont pas nos amis, chercheront toujours quand ils le pourront à nous affaiblir pour nous dominer. Il est donc urgent que nos dirigeants, mais aussi tous les Français prennent conscience de cette réalité aux conséquences graves et combattent vigoureusement ces actions souterraines menées contre nos intérêts fondamentaux non seulement par les grandes puissances (Etats-Unis et Chine) mais également au sein de l’UE.

Origines et développement de l’Energiewende 

Dans la société allemande d’après-guerre traumatisée par les bombardements américains à Nagasaki et Hiroshima, puis par la peur d’une guerre nucléaire généralisée entre les deux blocs lors de la crise des euromissiles en 1977, l’énergie nucléaire a rapidement suscité une aversion naturelle au sein de la population. C’est d’abord ce terreau réceptif qui a fait le succès des militants antinucléaires en Allemagne. Dès 1980, émerge l’idée d’une « transition énergétique » (Energiewende[2]) qui fixe pour horizon l’abandon progressif des énergies fossile et nucléaire au profit des ENR. Ce rêve trouve immédiatement un écho favorable dans le public allemand et des relais politiques dans le jeune parti écologiste Die Grünen, qui accède au pouvoir dans le cadre de la coalition noir-vert avec la CDU au début des années 1990. C’est alors que la promotion des ENR est devenue le fer de lance d’un discours idéologique puissant reposant sur la « bonne conscience » environnementale et l’ostracisation des défenseurs de l’énergie nucléaire[3].

Le tournant énergétique se situe en 1998 lors de la première coalition rouge-verte[4] dirigée par G. Schröder. Il propose deux lois faisant de l’Energiewende un agenda politique pour l’Allemagne. La première[5] renforce le soutien au développement de la filière des ENR (en garantissant des prix de vente supérieurs au prix du marché au détriment du consommateur) et la deuxième[6] programme un abandon du nucléaire échelonné dans le temps. Concrètement, les centrales nucléaires existantes étaient condamnées à la fermeture tandis que la construction de nouvelles centrales était interdite. Cette transition est à nouveau accélérée en 2011 dans la foulée de la catastrophe de Fukushima, lorsque Angela Merkel annonce la fermeture anticipée de la totalité des centrales allemandes à horizon 2022[7]. En avril 2023, les trois derniers réacteurs nucléaires du pays sont finalement fermés[8]. Le rêve vert des écologistes est devenu réalité.

L’Union européenne mise au pas

L’abandon précipité du nucléaire a exposé l’économie allemande aux aléas climatiques et aux incertitudes de l’intermittence des ENR. Pour réguler l’instabilité de sa production énergétique, l’Allemagne dépend de la coopération des pays voisins pour liquider sa surproduction en exportant ou pour compenser son déficit de production en important. Sa survie énergétique étant désormais en jeu, elle n’a pas hésité à mobiliser son influent réseau de lobbyistes à Bruxelles pour défendre ses intérêts et imposer son modèle énergétique[9].

Cette influence s’est traduite de trois manières[10]. En 1996, la directive 96/92/CE vise à développer les débouchés allemands en favorisant les interconnexions des réseaux électriques européens dans le cadre du marché européen de l’électricité. En 2007, l’UE s’engage dans la libéralisation du marché européen de l’énergie et la directive 2009/28/EC, pour ne citer qu’elle, est reformulée sous la pression du lobbying allemand pour maintenir des tarifs de rachat avantageux aux producteurs d’ENR[11]. Enfin, l’Allemagne a vampirisé les subventions de la Banque européenne d’investissement en excluant le nucléaire du label vert de la taxonomie (exclusion levée en 2022). En revanche, le gaz fossile – notamment russe –, essentiel à l’économie allemande pour remplacer le nucléaire, est quant à lui considéré comme une énergie de transition. En d’autres termes, n’est durable ou décarboné que ce qui assure la pérennité et l’hégémonie du modèle énergétique allemand.

Une bête à abattre : le nucléaire français

Il est clair que le lobbying allemand sur la taxinomie avait un bouc émissaire : la France et son fleuron EDF[12]. La sortie du nucléaire ayant mécaniquement augmenté les prix de l’électricité outre-Rhin, le risque pour l’Allemagne était une perte intolérable de compétitivité pour son industrie alors qu’à sa frontière se vendait de l’électricité 2,5 fois moins chère. Henri Proglio, ancien PDG d’EDF, déclarait ainsi à l’Assemblée nationale : « Comment voulez-vous que ce pays qui a fondé sa richesse, son efficacité, sa crédibilité sur son industrie accepte que la France dispose d’un outil compétitif aussi puissant qu’EDF à sa porte ? Depuis trente ans, l’obsession allemande est la désintégration d’EDF ; ils ont réussi[13] ! »

Dans un premier temps, EDF avait pourtant bien reçu la nouvelle de la libéralisation du marché européen. Il était théoriquement gagnant puisqu’il proposait les meilleurs tarifs du marché. Mais l’Allemagne, sous couvert de la commission bruxelloise, a eu tôt fait de pointer du doigt la position monopolistique d’EDF sur le marché français et d’exercer une pression constante pour qu’il se plie à ses exigences[14]. La docilité d’une naïveté impensable des gouvernements français pour s’y conformer s’est traduite par l’adoption de la loi NOME en 2010 et du dispositif ARENH qui en découle. Cette loi contraignait EDF à vendre chaque année un quart de sa production nucléaire à prix coûtant (42€/MWh) à ses « concurrents » qui n’existaient pas, c’est-à-dire des intermédiaires de la filière qui ne produisaient aucune énergie. EDF était riche, il fallait qu’elle donne sa rente nucléaire. C’était absurde, et la France l’a fait par dévotion à l’idée qu’elle se fait de l’Europe. En dix ans, le cours de l’action EDF a baissé de 80 % et l’entreprise a été ruinée[15]. L’Allemagne avait obtenu gain de cause.

L’arsenal de fondations allemandes dans la guerre de l’information 

Dans cette entreprise de sabotage du nucléaire français, l’Allemagne s’appuie sur plusieurs fondations politiques au premier rang desquelles se trouvent Heinrich Böll et Rosa Luxembourg, financées par Berlin à hauteur de 500 millions d’euros par an[16].

C’est le cas de la fondation Heinrich Böll qui coordonne depuis 2016 des opérations d’influence contre le nucléaire français en finançant un large panel d’ONG-relais comme le Réseau Action Climat (qui regroupe 27 associations nationales telles Greenpeace France, WWF ou Sortir du nucléaire). En 2022, la fondation recevait 67 % de ses financements du gouvernement allemand et de l’UE et concentrait plus de 50 % de ses activités à l’étranger. En lien étroit avec le parti vert allemand, elle s’occupe essentiellement de produire et de financer du contenu et des rapports à diffuser dans la presse et les sphères politiques, octroyer des bourses pour la recherche universitaire écologique ou encore rencontrer les élites françaises et soutenir la création de partis politiques comme EELV. Or, les contenus qu’elle propose vouent systématiquement aux gémonies les déchets nucléaires, les risques nucléaires ou l’obstination de l’État français et d’EDF dans le nucléaire ; et n’hésitent pas à aller jusqu’à la désinformation en stipulant que l’énergie nucléaire est polluante et manque de fiabilité[17]. Et ne manquent jamais de vanter les mérites de l’Energiewende allemande ou de l’avenir des ENR.

La fondation Rosa Luxembourg, si elle n’a pas d’antenne en France, s’attaque aux intérêts énergétiques français à l’étranger à commencer par l’extraction d’uranium. Elle participe par exemple à la publication d’un Atlas de l’uranium[18]en 2022, financé par le ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement allemand, et qui dénonce le néocolonialisme de la France au Niger et les dangers sanitaires de l’exploitation du minerai par Orano (ex-Areva). Comment ne pas y voir la main de Berlin qui cherche à miner la filière nucléaire française, imposer cette idée fausse dans les esprits de l’Hexagone que le nucléaire est néfaste pour l’environnement et soutenir sa propre industrie dans les ENR ?

Conclusion

Devant les ingérences allemandes contre l’indépendance énergétique française, un constat s’impose : les conflits d’intérêts et les antagonismes entre pays n’ont pas miraculeusement disparu en Europe après 1945. N’en déplaise à un certain pacifisme idéaliste, la géopolitique reste le terrain des rapports de force entre les États, même dans l’Union européenne. « Les États n’ont pas d’amis », disait le général de Gaulle. Pourtant, l’Élysée ne cesse de brandir la bannière de « l’amitié franco-allemande » tandis que la page Wikipédia de cette expression n’existe pas en allemand, mais seulement en français, en esperanto et en suédois…

Louis du BREIL

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[1] Énergies renouvelables.

[2] Du rapport de 1980 publié par l’Okö Institut, un institut de recherche sur l’environnement, qui s’intitule « Energie-Wende : Growth and Prosperity Without Oil and Uranium ».

[3] C’est dans ce contexte que le chancelier Helmut Kohl impose la loi de tarif de rachat de 1991 qui impose aux entreprises de distribution d’acheter de l’électricité issue des énergies renouvelables à un tarif supérieur aux prix de marché.

[4] Coalition entre les socio-démocrates du SPD et les verts de Die Grünen.

[5] Loi Erneuerbare Energien Gesetz (EEG), promulguée en avril 2000.

[6] Loi sur l’énergie atomique, entrée en vigueur en 2002.

[7] Frédéric Lemaître, « La conversion d’Angela Merkel en faveur d’une sortie du nucléaire », Le Monde, 1er avril 2011.

[8] Jens Thurau, « Germany shuts down its last nuclear power stations », Deutsche Welle, 14 avril 2023.

[9] Inga Margrete Ydersbond, « Multi-level lobbying in the EU: The case of the Renewables Directive and the German energy industry», Fridtjof Nansen Institute, octobre 2012.

[10] Rapport de l’EGE de mai 2021, « J’attaque ! Comment l’Allemagne tente d’affaiblir durablement la France sur la question de l’énergie ? »

[11] Margot de Kerpoisson, « Blitzkrieg énergétique : l’Allemagne en campagne contre le nucléaire français », Conflits, 1er mai 2022.

[12] Voir le rapport de l’EGE daté de juin 2023, « Ingérence des fondations politiques allemandes & Sabotage de la filière nucléaire française ».

[13] Commission d’enquête du 13 décembre 2022.

[14] Tribune collective, Énergie : « Pour retrouver une électricité bon marché, il faut se défaire des exigences de Bruxelles », Le Figaro, 5 juin 2023.

[15] Charles Gave, « AREVA, ALSTOM, EDF, nous avons la meilleure fonction publique au monde », Institut des libertés, 30 janvier 2022.

[16] Rapport de l’EGE, « Rapport d’alerte – Ingérence des fondations politiques allemandes et sabotage de la filière nucléaire française », 22 juin 2023.

[17] https://www.greenpeace.fr/nucleaire-la-fable-de-la-fiabilite/

[18] https://rosaluxna.org/wp-content/uploads/2022/01/Uranatlas2022_franzosisch.pdf

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Ukraine : les services secrets présentent les fragments d’un missile russe vu pour «la première fois» depuis le début de la guerre

Ukraine : les services secrets présentent les fragments d’un missile russe vu pour «la première fois» depuis le début de la guerre

L’armée russe a tiré ce missile expérimental jeudi à Dnipro en «réponse», selon le Kremlin, aux récentes attaques ukrainiennes menées contre la Russie avec des missiles américains et britanniques.

Les services secrets ukrainiens (SBU) ont montré dimanche à un petit groupe de journalistes, dont l’AFP, les fragments d’un nouveau missile balistique russe, identifiés jeudi par le président russe Vladimir Poutine comme étant «Orechnik», une arme inconnue jusque-là qui a frappé selon lui une usine d’armements à Dnipro.

Quelques heures après ce tir présenté par le Kremlin comme un «signal» aux Occidentaux et à Kiev, Vladimir Poutine s’était vanté de la réussite de la frappe russe avec un nouveau missile hypersonique, qu’il avait baptisé «Orechnik». L’armée russe a tiré ce missile expérimental en «réponse», selon le Kremlin, aux récentes attaques ukrainiennes menées contre la Russie avec des missiles américains et britanniques.

Lieu tenu secret

La rencontre entre le SBU ukrainien et les journalistes s’est déroulée dans un lieu tenu secret pour des raisons de sécurité. Le SBU a ainsi montré des débris métalliques, plus ou moins grands, alignés sur un faux gazon, issus d’un missile russe tiré jeudi, affirme-t-il, contre la ville de Dnipro, là où «Orechnik» a frappé selon Moscou l’usine du groupe ukrainien PivdenMach qui produit notamment des composants pour missiles.

Des parties d’un missile balistique, que la Russie a utilisé dans une frappe vers la ville de Dnipro cette semaine. Valentyn Ogirenko / REUTERS
SBU
Les services secrets ukrainiens ont assuré que c’était «la première fois» que les forces ukrainiennes voyaient un tel projectile depuis le début de l’invasion russe en février 2022. Valentyn Ogirenko / REUTERS

À cette occasion, les services secrets ukrainiens n’ont pas souhaité confirmer publiquement qu’il s’agissait de débris d’«Orechnik» mais ont assuré que c’était «la première fois» que les forces ukrainiennes voyaient un tel projectile depuis le début de l’invasion russe en février 2022. «Cet objet n’avait jamais été documenté par les enquêteurs de sécurité auparavant», a indiqué un enquêteur du SBU prénommé Oleg, expliquant qu’il s’agissait «d’un missile balistique», ce qui correspond à «Orechnik». L’enquêteur a assuré que Kiev donnerait «des réponses» ultérieures sur les caractéristiques précises du missile présenté.

Selon Vladimir Poutine, qui a esquissé jeudi soir quelques caractéristiques d’«Orechnik», ce missile hypersonique «à portée intermédiaire» peut aller à la vitesse de Mach 10, soit «soit 2,5 à 3 kilomètres par seconde».

Vendredi, lors d’une réunion télévisée avec des responsables militaires, le maître du Kremlin a assuré que Moscou avait une réserve de ces missiles «prêts à l’emploi». Il a également ordonné sa production en série et son utilisation ultérieure lors d’essais, notamment «en situation de combat», après avoir lancé jeudi que la Russie était «prête» à «tous» les scénarios dans son conflit contre l’Ukraine et l’Occident.

Pour le chef d’état-major de l’armée de Terre, la cohérence est plus importante que la « masse »

Pour le chef d’état-major de l’armée de Terre, la cohérence est plus importante que la « masse »

https://www.opex360.com/2024/11/24/pour-le-chef-detat-major-de-larmee-de-terre-la-coherence-est-plus-importante-que-la-masse/


« Venez vous y frotter : », a lancé le général Pierre Schill, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], dans un récent entretien accordé au quotidien Var Matin pour répondre à ceux qui décrivent l’armée française comme étant « échantillonnaire ».

Cette dernière est « complète et souveraine. Son format fait partie de l’idée stratégique fondamentale de la France : nous voulons avoir notre destin en main et donc nous voulons avoir un socle cohérent et complet. Cela passe par la dissuasion nucléaire qui nous protège. Cela implique aussi qu’on fasse un certain nombre de choix, notamment en termes de taille. Mais notre armée est faite pour se battre, pas pour défiler. Et je peux vous affirmer que l’armée française fait le job », a ensuite développé le général Schill.

A priori, ce propos a suscité beaucoup de réactions, à tel point que le CEMAT a dû préciser sa pensée via le réseau social LinkedIn.

Ainsi, l’expression « armée échantillonnaire » renvoie au débat sur l’équilibre à trouver entre la « masse », la technologie et la cohérence. L’idéal serait évidemment de concilier les deux… Mais encore faut-il en avoir les moyens, et pas seulement au niveau financier.

Ce débat – certes ancien – a repris de la vigueur depuis le début de la guerre en Ukraine, voire avant. La question de la « masse » est plus compliquée qu’il n’y paraît étant donné qu’elle concerne non seulement les effectifs mais aussi les équipements, les munitions et la logistique, qui reste le nerf de la guerre.

En 2020, la British Army avait expliqué qu’elle misait sur la robotisation pour pallier son manque d’effectifs.

« Nous pourrions avoir une armée de 120 000 soldats, dont 30 000 pourraient être des robots », avait expliqué son chef d’état-major, à l’époque. Mais cela ne règle qu’une partie du problème : la raison d’être des robots terrestres est d’amplifier les effets sur le terrain et non de se substituer aux fantassins. En outre, il s’avère qu’ils ont besoin de « davantage de soldats » que prévu pour pouvoir fonctionner. Du moins, c’est la conclusion à laquelle est arrivée l’US Army, à l’issue d’une expérimentation récente.

Quoi qu’il en soit, pour le général Schill, la « masse » est évidemment un facteur de supériorité. « Je la recherche », écrit-il. Mais « la cohérence prime », a-t-il ajouté.

La masse « se décline à trois niveaux : interne en garantissant les équilibres entre les armes et fonctions opérationnelles [masse cohérente], interarmées car rien ne se fait seul [masse souveraine] et interalliés pour peser avec un rapport de force suffisant [masse critique, au sein d’une coalition] », a ensuite détaillé le CEMAT.

L’objectif de l’armée de Terre est donc d’avoir une « masse cohérente » afin de « garantir [sa] crédibilité dans les phases successives du conflit ». Ce qui suppose, le cas échéant, qu’elle soit capable de « marquer la détermination » de la France. « Quand je dis ‘venez-vous y frotter’, je crois à notre capacité à intimider, à décourager nos adversaires », a expliqué le général Schill.

En attendant, la « masse » de l’armée de Terre, selon lui, est conforme au « format d’armée souverain qui s’inscrit dans notre doctrine de dissuasion. Et elle est suffisante pour lui permettre d’être une « nation cadre au sein d’une alliance » et de « protéger dès aujourd’hui les Français, notre territoire comme nos intérêts face aux menaces du bas du spectre jusqu’aux plus sophistiquées ».

« La transformation en cours de l’armée de Terre a pour objectif de consolider la cohérence en ajustant mêlée, appuis et soutiens pour combattre jusqu’à la haute intensité. L’armée de Terre assure ainsi son contrat moral, celui d’être prête dès ce soir en ‘faisant le job’ tout en innovant pour être au rendez-vous des défis de demain », a conclu le CEMAT.

Mélodie en sol-sol par Michel Goya

Mélodie en sol-sol

par Michel Goya – La Voie de l’épée – publié le 24 novembre 2024

Réunion au Kremlin.

Bon, il faut répondre absolument à cette autorisation d’emploi des armes à longue portée occidentales sur notre sol.

Mais, c’est déjà le cas depuis longtemps en Crimée et dans nos nouvelles provinces d’Ukraine…

Je parlais de notre vrai sol, crétin !

Dans ce cas, on n’a pas beaucoup d’autre solution que d’agiter la peur nucléaire.

Oui, mais on l’a déjà fait 20 fois. Il faut augmenter la dose, mais sans aller trop loin. Un dernier avertissement avant l’avertissement terminal qui précédera l’ultime avertissement où on emploiera peut-être un peu de nucléaire pas méchant. Une simple déclaration menaçante ne suffira pas.

Un exercice de déploiement ?

Déjà fait !

Une demi-mise en alerte ?

Déjà fait !

Des essais en Nouvelle-Zemble ?

C’est prévu, mais c’est déjà employer un peu de nucléaire et il faut surtout quelque chose tout de suite. Ce sera peut-être l’étape suivante.

Il y a toujours l’idée de modifier la doctrine nucléaire que l’on a lancée il y a quelques mois. On peut la publier demain.

Bonne idée, je prends. Autre chose ?

J’ai une idée, chef. On utilise depuis longtemps des missiles contre l’Ukraine des missiles conventionnels capables de porter éventuellement des charges nucléaires et si on faisait l’inverse en frappant conventionnellement une ville ukrainienne avec un missile stratégique nucléaire ? Pour le coup, cela foutra la trouille à tout le monde.

Pas mal, mais c’est peut-être un poil trop.

On peut refroidir un peu en n’utilisant pas un de nos précieux missiles intercontinentaux, mais un missile intermédiaire toujours en cours de développement depuis 13 ans.

C’est le truc que l’on avait camouflé en missile intercontinental parce qu’on n’avait pas le droit de construire des missiles intermédiaires à l’époque ?

Oui, c’est ça, chef, le RS-26.

Bonne idée. Il faut avertir les Américains au moment du tir, pour qu’il n’y ait pas de mauvaise interprétation, on va l’utiliser dans une zone symbolique – par exemple là où les Ukrainiens fabriquaient les missiles intercontinentaux – et je dirai que c’est juste un essai pour un engin nouveau. Comme cet essai sera forcément une réussite, je louerai ensuite les avancées prodigieuses de la science et de l’industrie russe. Sur un malentendu, cela peut passer. Mais au fait à quoi ça sert d’avoir un missile à portée intermédiaire ?

A refaire le coup des SS-20, chef. Avec ça on ne menace vraiment que les poules mouillées européennes, mais pas les États-Unis. On peut menacer, comme à l’époque des SS-20, de détruire toutes les bases européennes où sont stockés les bombes B-61 et donc le parapluie nucléaire américain en Europe. Le président des États-Unis serait alors placé devant un dilemme : soit il utilise contre nous des armes stratégiques américaines avec une riposte sur les États-Unis, soit il lâche les Européens qui deviennent alors très vulnérables.

Je retiens l’idée. J’annoncerai qu’on va les produire en série, même si je ne suis pas sûr qu’on ait les moyens de le faire. Avec ces armes intermédiaires, et notre armée plus puissante que jamais, on pourra se permettre beaucoup de choses une fois que la guerre en Ukraine sera terminée, surtout si les Américains se désengagent de ce continent.

Vous êtes génial chef !

Je sais. Résumons la manœuvre de peur : je fais une ou plusieurs déclarations à la fois méchantes et maîtrisées, on publie la nouvelle doctrine avec l’idée qu’une attaque aérienne conjointe massive sur notre sol pourra justifier de l’emploi de l’arme nucléaire et on lance un missile intermédiaire quelque part. Bien entendu, tous les relais : chefs d’État sympathisants, chefs de partis d’extrême-gauche et d’extrême-droite, influenceurs, faux médias, idiots utiles chanteront en cœur le couplet du « C’est la faute à Joe Biden et à ses vassaux européens qui veulent nous entraîner dans la troisième guerre mondiale ». Cela freinera au moins toutes les initiatives en faveur de l’Ukraine. En avant !

La Cour des compte se penche sur les ventes du patrimoine immobilier du ministère des Armées

La Cour des compte se penche sur les ventes du patrimoine immobilier du ministère des Armées

Même si, comme le regrette la Cour des comptes, « les services de l’État ont adopté un positionnement discutable, accordant des dérogations contraires aux dispositions légales et aux engagements contractuels, et faisant preuve d’une inertie générant des retards », la Cour vient de publier un bilan des cessions immobilières réalisées depuis 2008 par le ministère des Armées.

Le patrimoine immobilier du ministère des Armées est l’un des plus importants de l’État avec près de 25 millions de m² de surface utile brute, soit 26 % de celui de l’État et 3,1 millions de m² de bureaux, soit 18 % de la surface de bureaux de l’Etat. Constitué pour répondre à des besoins très divers, ce patrimoine se caractérise par une grande hétérogénéité : espaces d’entraînement, casernes, bases aériennes, infrastructures portuaires, industrielles ou logistiques, logements, immeubles de bureaux, de formation ou d’enseignement, lieux de mémoire. En 2020, sa valeur nette comptable s’élevait à 17 Mds€, soit un quart de celle du parc immobilier contrôlé par l’État.

Avec la dissolution de nombreuses unités à partir de 2008, la réorganisation des fonctions de soutien et la rationalisation des implantations, les restructurations alors engagées ont conduit à libérer beaucoup d’emprises. Entre 2006 et 2022, le montant total des cessions du ministère des Armées s’est élevé à 2 Md€ (dont 1 Md€ pour 16 biens situés à Paris), soit 25 % des ventes de l’État, avec deux années très importantes (2009 et 2019), représentant plus de 65 % du montant total pour l’État. Douze biens du ministère des armées (dix d’entre eux sont situés en Île-de-France), vendus pour au moins 20 M€ chacun, représentent un produit de 1,2 Md€, soit 60 % du montant total des cessions depuis 2006.

Les montants des ventes sont marqués par une très forte dispersion du prix des biens cédés. Entre 2006 et 2022, un quart des ventes du ministère des armées est inférieur à 1 400 € (entre 20 € et 13 154 €, selon les années), la moitié à 50 000 € (entre 17 902 € et 130 300 € selon les années) et les trois quarts à moins de 367 000 € (entre 140 275 € et 628 500 €, selon les années).

Par ailleurs, le montant moyen annuel varie fortement selon les régions, comme en témoigne le tableau ci-dessous (chiffres de la période 2006-2022).

Le prix moyen de vente au m², peu élevé au niveau national (22 €), est donc très variable selon les régions. Il est le plus élevé en Île-de-France (171,7€ du m²), tandis que plusieurs régions se distinguent par un prix moyen très bas (Hauts-de-France, 4,8 € ; Grand-Est, 5,7 € ; Centre-Val-de-Loire, 7,5 € ; Bourgogne-France-Comté, 8,2€ ; Occitanie, 10,7 € et Auvergne-Rhône-Alpes, 11,7 €). L’écart entre le prix au m² de l’évaluation et celui de la vente est très important pour certaines régions (Hauts-de-France – 41 % ; Grand-Est – 43 % ; Normandie – 78 % ; Centre-Val-de-Loire – 46 % ; DOM-COM-TOM – 91 %).

Des problèmes d’organisation

Au-delà de ces chiffres, l’avis de la Cour porte:
– sur les études passées auprès de prestataires extérieurs dont un grand nombre n’ont pas été suivies d’effets, tandis que d’autres se sont avérées inutiles ,
– sur les modalités de vente des biens immobilier du ministère des Armées
– et sur l’organisation du ministère en matière immobilière, organisation « confuse et inefficace », qui n’est plus adaptée.

En 2023, une réforme a permis d’améliorer la lisibilité de l’organisation et de ses actions. Cette nouvelle organisation, plus cohérente, ne constitue toutefois qu’une étape dans un processus plus global, puisque la direction des territoires, de l’immobilier et de l’environnement (DTIE) du ministère des Armées a lancé en novembre 2023 un chantier de modernisation de la fonction immobilière, s’inscrivant dans les orientations gouvernementales et celles qui sont portées par la nouvelle loi de programmation militaire 2024-2030.

Des recommandations 

Recommandation n° 1. (SGA) Recenser régulièrement les biens inutiles et les remettre au service des domaines pour en assurer la cession.
Recommandation n° 2. (SGA et DIE) Mettre en place les outils permettant d’identifier a posteriori l’ensemble des coûts grevant une cession et de disposer à terme d’une évaluation a priori pour chaque projet de valorisation immobilière.
Recommandation n° 3. (DGFiP) Recouvrer les compléments de prix exigés et exigibles au titre des cessions à l’euro symbolique de la caserne Ferrié à Laval et de la citadelle d’Arras.
Recommandation n° 4. (DGFiP, DDT) Tirer les conséquences du non-respect par les acquéreurs de la caserne Beaumont-Chauveau à Tours de leurs engagements au titre du dispositif de décote « Duflot ».
Recommandation n° 5. (DGFiP, DTIE, DIE) Mettre en place un suivi particulier et formalisé pour le contrôle de l’application des clauses sauvegardant les intérêts de l’État.
Recommandation n° 6. (SGA, EMA) Définir une stratégie pour la valorisation des actifs immobiliers du ministère (biens potentiellement frappés d’inutilité, déclarés inutiles, remis au domaine …) et définir à l’échelon ministériel un programme de valorisation pour les 5 ou 10 prochaines années.

Le rapport de la Cour est à consulter ici.

Selon le Sénat, les non-renouvellements de contrats à l’initiative des militaires ont augmenté de 70 % depuis 2018

Selon le Sénat, les non-renouvellements de contrats à l’initiative des militaires ont augmenté de 70 % depuis 2018

https://www.opex360.com/2024/11/22/selon-le-senat-les-non-renouvellements-de-contrats-a-linitiative-des-militaires-ont-augmente-de-70-depuis-2018/


La loi de finances initiales pour 2023 avait fixé, pour le ministère des Armées, le niveau du plafond d’emplois militaire à 210 428 « équivalents temps plein travaillé » [ETPT], ce qui supposait la création nette de 1547 postes. Seulement, cet objectif n’a pas pu être tenu étant donné que les effectifs militaires s’élevaient, en fin d’exercice, à seulement 202 122 ETPT, soit un écart de 4 % par rapport aux prévisions.

Or, ce n’est pas la première fois que le ministère des Armées ne parvient pas à respecter son schéma d’emploi, malgré une dynamique des recrutements assez soutenue.

« En rupture avec la dynamique déflationniste qui prévalait depuis la fin de la guerre froide, la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-2025 prévoyait une augmentation nette de 6 000 ETP sur la période couverte, ce qui a conduit à la mise en œuvre d’une ambitieuse politique de recrutement. Ses résultats n’ont hélas pas été atteints », ont en effet déploré les sénatrices Marie-Arlette Carlotti et Vivette Lopez, dans un rapport intitulé « Pour rendre l’armée plus attractive : retenir, attirer, réunir », récemment publié par la commission des Affaires étrangères et de la Défense.

Et d’ajouter : « La non-réalisation des schémas d’emplois annuels successifs a touché tant le personnel militaire que le personnel civil, notamment en 2022, où l’écart d’avec la cible ministérielle a été de 2 228 ETP, alors qu’il s’agissait de l’année du plus important volume de recrutement réalisé depuis 2017 avec 27 707 ETP ».

Aussi, les objectifs fixés par la LPM 2024-30, qui prévoit la création nette de 6 300 postes d’ici 2030, semblent d’ores et déjà compromis. À moins que, d’ici là, les plans de fidélisation mis en place par le ministère des Armées ne produisent des résultats.

En effet, la tendance observée par Mmes Carlotti et Lopez s’explique par un flux de départs beaucoup trop important. Ce qui n’est d’ailleurs pas propre à la France, d’autres pays, comme le Royaume-Uni et les États-Unis, étant confrontés au même problème.

Ainsi, selon le rapport, en 2023, les « volumes de départs » ont atteint le « niveau le plus haut depuis 2017, avec 25 496 ETP de sorties définitives, contre 24 952 ETP en 2022 ». Cette augmentation est due en grande partie aux départs volontaires [ou « spontanés »].

« Les départs spontanés représentant la plus grande part des départs définitifs, leur évolution épouse la même trajectoire. Depuis 2009, ceux des officiers sont globalement stables entre 2 % et 3 % des effectifs d’officiers des trois armées. Pour les sous-officiers, la tendance de hausse régulière observable depuis 2013, interrompue en 2020, a repris depuis 2022 avec 7 600 départs, soit 4,6 % des effectifs. Pour les militaires du rang, la hausse, ralentie entre 2014 et 2018, a repris depuis 2020 pour atteindre, en 2022, 6 546 militaires du rang, soit 8,5 % des effectifs », détaillent les deux sénatrices.

Aussi, « l’ancienneté moyenne des militaires au moment de leur départ de l’institution n’a cessé de baisser depuis dix ans pour atteindre, en 2023, 25,3 ans pour les officiers, 18,4 ans pour les sous-officiers, et 4,3 ans pour les militaires du rang », soulignent-elles.

L’attrition, c’est-à-dire la dénonciation du contrat par une recrue lors de sa période probatoire, constitue une part relativement importante des départs. Ainsi, en 2023, le taux d’attrition des militaires du rang, « orienté à la hausse depuis 2020 », s’est élevé à 35,5 % pour l’armée de Terre, à 20,3 % pour la Marine nationale et à 16 % pour l’armée de l’Air & de l’Espace.

Mais c’est surtout la « forte augmentation des non-renouvellements de contrat » qui interroge. Leur nombre est passé de 1 680 en 2019 à 2 920 en 2023. « Soit une hausse de 70 % depuis 2018 », notent les deux parlementaires. « Cela illustre une inversion du rapport contractuel entre l’autorité militaire et le militaire et donc une bascule du ‘rapport de force’ entre employeur et employé », ont-elles conclu.