Défense : la cheffe de la diplomatie européenne donne raison à Donald Trump

Défense : la cheffe de la diplomatie européenne donne raison à Donald Trump

L’Union européenne doit renforcer ses dépenses militaires pour contrer les menaces extérieures. Un appel pressant de la cheffe de la diplomatie européenne met en lumière cette priorité cruciale.

par Jean-Baptiste Leroux – armees.com – publié le

Kaja Kallas a alerté sur la nécessité de renforcer le budget de l'Europe en matière de défense. Wikipedia
Kaja Kallas a alerté sur la nécessité de renforcer le budget de l’Europe en matière de défense. Wikipedia | Armees.com

Face aux risques géopolitiques croissants, l’UE se voit confrontée à l’impératif de consacrer davantage de ressources à la défense. La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, insiste sur l’urgence d’une action coordonnée.

Vers une stratégie commune avec les Etats-Unis ?

Alors que les tensions internationales augmentent, l’Union européenne doit faire face à la réalité d’un déficit en matière de défense. Selon Kaja Kallas, il est impératif que les États membres adoptent une approche coordonnée pour renforcer leurs capacités militaires. La cheffe de la diplomatie européenne a préconisé de dépasser les clivages nationaux afin de promouvoir des systèmes d’armes interopérables et d’établir des projets d’intérêt commun, tels que des boucliers aériens et cybernétiques.

Cette coopération pourrait non seulement accroître l’efficacité des armées européennes, mais également réduire la dépendance de l’Europe vis-à-vis des alliés transatlantiques. À terme, cela permettrait de mieux répondre aux menaces potentielles, notamment celles en provenance de la Russie, qui pourraient surgir d’ici quelques années, selon les renseignements collectés.

Investir davantage pour garantir la sécurité de l’Europe

Les déséquilibres actuels entre les dépenses militaires des États membres sont flagrants. Alors que des pays comme la Lituanie prévoient d’élever leurs dépenses de défense jusqu’à 5% du PIB, d’autres nations, telles que l’Espagne ou l’Italie, restent en deçà de l’objectif de 2% fixé par l’OTAN. Pendant ce temps, la Russie consacre près de 9% de son PIB à ses efforts militaires, surclassant largement les efforts combinés de l’UE.

Kaja Kallas a alerté sur la nécessité d’augmenter les investissements, rappelant que l’Europe ne peut pas se permettre de rester en retard. Actuellement, le budget à long terme de l’UE (2021-2027) ne réserve que 1,2% à la défense, bien en deçà des besoins estimés à 500 milliards d’euros sur la prochaine décennie. Pour parvenir à cet objectif, il sera nécessaire d’impliquer à la fois les gouvernements nationaux, le secteur privé et le budget commun européen.

Un avertissement sur les conséquences économiques et sociales

La question des dépenses militaires soulève toutefois des enjeux sensibles. Augmenter les budgets défensifs pourrait signifier des sacrifices dans d’autres domaines, tels que les pensions ou les systèmes de santé. Pourtant, Mme Kallas a insisté sur le fait qu’une Europe vulnérable mettrait également en danger ces acquis fondamentaux. « Si nous ne dépensons pas davantage pour notre défense, nous risquons de perdre tout ce que nous avons construit« , a-t-elle déclaré.

Emmanuel Macron a également appelé à une prise de conscience. Selon lui, l’Europe doit réduire sa dépendance à l’égard des États-Unis pour garantir sa propre sécurité. Cet avertissement résonne avec celui du secrétaire général de l’OTAN, qui a mis en garde contre des menaces émergentes susceptibles de bouleverser l’équilibre actuel.

Variations sur un thème

Variations sur un thème

Blablachars – publié le 22 janvier 2025

https://blablachars.blogspot.com/2025/01/variations-sur-un-theme.html#more


L’International Armoured Vehicles (IAV) Conference qui a débuté hier à Farnoborough a déjà permis de se faire une idée assez précise des tendances en matière de blindés. La principale ligne de force constatée au vu des présentations effectuées hier semble être la constitution de familles de véhicules blindés, issue d’un châssis unique. Ainsi, la présentation de General Dynamics United Kingdom (GDUK) a permis de découvrir la composition de la famille issue de la plateforme Ajax, déjà déclinée en six versions répondant aux noms d’Ajax, Ares, Athena, Argus, Atlas et Apollo. Le futur de l’Ajax pourrait être constitué par le développement de huit autres versions : véhicule de combat d’infanterie (VCI), mortier (sous tourelle), appui feu direct, défense sol-air (DSA), surveillance, ambulance, poseur de pont et  soutien. L’autre déclinaison annoncée est celle du blindé de Rheinmetall pour lequel l’armée italienne envisage pas moins de seize versions ! Selon les informations disponibles, la plateforme du Lynx italien servirait de base pour des versions VCI, Reconnaissance 120mm, Appui feu, commandement, antichar, génie (déminage), transport de munitions, mortier sous tourelle 120mm, lutte anti drone (LAD), ambulance, Reconnaissance (spécifications inconnues), génie (lame dozer), dépannage, mortier de 81mm et entraînement. Le programme A2CS prévoit la fourniture de 1050 véhicules pour un montant global de 16 milliards d’euros, avec l’objectif de disposer d’une première brigade équipée d’ici cinq ans.

Ces deux présentations appellent quelques commentaires. La prise en compte de la nécessité de posséder une véritable composante blindée mécanisée s’impose désormais à la quasi totalité des armées en Europe ou ailleurs. Cette volonté se traduit de plus en plus par le choix d’une plateforme unique, dont la polyvalence autorise le développement de nombreuses versions. Un autre aspect notable de cette tendance est la présence au sein des familles évoquées d’une version char médian doté d’un armement de 120 ou de 105mm, ce dernier pouvant être suffisant pour certains pays confrontés à des menaces mixtes. Cette nouvelle tendance est une véritable aubaine commerciale pour les industriels concernés qui trouvent là une réelle opportunité de développement et rentabilité pour le VCI. Sur le plan technique, la création d’une famille de blindés à partir d’une plateforme unique impose de doter cette dernière de caractéristiques spécifiques telles que : Implantation du groupe moto propulseur à l’avant permettant de dégager l’espace arrière, poids contenu pour se constituer une réserve de masse suffisante ou encore architecture ouverte permettant d’intégrer des modules de mission en mode « plug and play ». Pour le moment, Rheinmetall avec le Lynx, General Dynamics Land Systems avec l’Ajax avec l’Ajax et l’Ascod II et BAE Systems Hagglunds avec le CV90 offrent déjà des possibilités. Il est probable que demain, ces constructeurs seront rejoints par d’autres, désireux de profiter à leur tour de cette tendance. 

 

 

Variations proposées par GDUK pour l’Ajax

 

Les versions du Lynx pour le programme A2CS

 

Enfin, il est dommage (pour ne pas triste) de constater que le pays inventeur du concept de famille blindée reste pour le moment absent de ce marché. Avons-nous le droit d’assister en simple spectateur à l’émergence de cette tendance, quand on peut revendiquer la création des familles d’AMX 13, AMX 30 et dans une moindre mesure AMX 10 ? Il est intéressant de noter que les trois firmes déjà présentes sur le marché ont développé les engins sur leurs fonds propres sans attendre d’hypothétiques commandes étatiques pour leur produit. Devrons nous attendre la mise en route du programme Titan ou celui du MGCS pour voir des engins chenillés peupler nos brigades mécanisées. Outre l’aspect blindé mécanisé d’une telle composante, une initiative française en ce sens contribuerait à redonner une véritable masse de manœuvre à l’armée de terre, facteur essentiel de conflits de haute intensité ! Sébastien Lecornu a récemment demandé aux armées françaises « de prendre des risques » et a rappelé que « la France n’échangera pas sa « sécurité militaire contre des hamburgers et des voitures allemandes » traçant la voie pour les industriels concernés sans attendre les financements nécessaires pour rattraper trente années d’abandon de la composante blindée mécanisée !

Le plan de Trump pour l’OTAN

Le plan de Trump pour l’OTAN

Mandatory Credit: Photo by Taidgh Barron/ZUMA Press Wire/Shutterstock (14582742t)

par Geopolitika – Revue Conflits – publié le 22 janvier 2025

https://www.revueconflits.com/le-plan-de-trump-pour-lotan/


Donald Trump a menacé les Européens de quitter l’OTAN si ceux-ci ne participaient pas davantage à son financement. Une menace qui illustre sa vision de l’Alliance et le plan qu’il envisage. Entretien avec le Dr Glenn Agung Hole.

 par le Dr. Glenn Agung Hole. Maître de conférences en entrepreneuriat, économie et gestion, Université du sud-est de la Norvège & professeur honoraire à l’Université d’État Sarsen Amanzholov de l’est du Kazakhstan.

 

Donald Trump a vu sa politique étrangère critiquée comme chaotique et imprévisible, mais à travers le prisme de l’économie autrichienne – avec l’accent mis par Ludwig von Mises et Friedrich Hayek sur la décentralisation, la concurrence et la coopération volontaire – on peut discerner des schémas reflétant une logique sous-jacente.

En interprétant l’approche de Trump comme une forme « d’entrepreneuriat géopolitique », il devient clair que sa politique étrangère ne se contente pas de remettre en cause les structures établies en Europe, mais qu’elle met également en place les bons incitatifs pour que les pays européens assument davantage la responsabilité de leur propre sécurité. Dans le même temps, elle ouvre de nouvelles opportunités pour l’Europe dans un monde en rapide mutation.

L’entretien de Stephen Wertheim avec Der Spiegel du 4 décembre 2024 est une plateforme solide pour comprendre l’approche de Trump à l’égard de la dynamique du pouvoir mondial. Wertheim soutient que Trump n’a jamais été un isolationniste, mais plutôt un pragmatiste cherchant à redistribuer les charges et les ressources. En utilisant les principes de l’économie autrichienne et de l’entrepreneuriat, nous pouvons approfondir notre compréhension de la politique de Trump et de ses implications.

Trump en tant qu’entrepreneur géopolitique

Dans l’économie autrichienne, l’entrepreneur joue un rôle clé en identifiant les opportunités, en prenant des risques calculés et en redistribuant les ressources afin de créer de la valeur. La politique de Trump peut être comprise comme une approche entrepreneuriale de la politique étrangère, dans laquelle il s’efforce de remettre en cause les structures inefficaces et de créer de nouveaux points d’équilibre.

Stephen Wertheim souligne que l’exigence de Trump selon laquelle les pays de l’OTAN augmentent leurs dépenses de défense représente un changement de paradigme. Cela peut être interprété comme une stratégie visant à redistribuer les ressources au sein de l’alliance et à la rendre plus soutenable pour les États-Unis. Trump considère l’OTAN comme un « investissement » qui doit apporter un rendement. Son pragmatisme reflète l’accent mis par Mises sur le fait que les acteurs devraient assumer la responsabilité de leurs propres besoins plutôt que de se reposer sur l’effort d’autrui.

Un exemple concret est la priorité accordée par Trump aux accords bilatéraux, qu’il juge plus flexibles et plus avantageux que les structures multilatérales comme l’OMC. Cela rappelle la pensée entrepreneuriale, dans laquelle des négociations directes peuvent maximiser la valeur de la coopération. La renégociation de l’ALENA en USMCA (Accord États-Unis–Mexique–Canada) illustre comment Trump utilise les négociations pour obtenir de meilleures conditions pour les États-Unis.

La décentralisation et la liberté comme fondements stratégiques

L’économie autrichienne souligne que la décentralisation est une condition préalable à une utilisation efficace des ressources et à la liberté individuelle. Trump a remis en question l’idée des États-Unis en tant que « policier du monde » et a plutôt encouragé les acteurs régionaux, comme l’Europe, à assumer une plus grande responsabilité pour leur propre sécurité. Cela est en accord avec l’idée de Hayek selon laquelle le contrôle centralisé conduit à la stagnation et à l’inefficacité.

Wertheim note que l’exigence de Trump quant à l’augmentation des dépenses de défense par les membres de l’OTAN n’est pas nécessairement une menace pour l’alliance, mais plutôt un catalyseur pour sa revitalisation. D’un point de vue autrichien, cela apparaît comme une stratégie de décentralisation, dans laquelle la responsabilité est répartie entre plusieurs acteurs afin de stimuler à la fois l’innovation et l’autonomie.

Lire aussi : Quand l’idéologie affaiblit l’autonomie : Matières premières critiques et l’impasse stratégique de la Norvège

Trump remet également en cause l’idée d’interventions globales fondées sur des valeurs. Au lieu de justifier une intervention militaire par des principes idéalistes, il privilégie des considérations pratiques qui profitent directement aux États-Unis. Cela représente une approche réaliste qui fait écho à la vision de Mises, selon laquelle la politique devrait être fondée sur de véritables incitations plutôt que sur des dogmes idéologiques.

La concurrence comme moteur de la géopolitique

Dans l’analyse de Wertheim, la rivalité de Trump avec la Chine est mise en avant comme un point clé de sa politique étrangère. Trump considère les relations internationales comme un marché où les nations rivalisent pour le pouvoir, les ressources et l’influence. Son approche du « diviser pour régner » envers la Chine, la Russie, l’Iran et la Corée du Nord reflète une application des mécanismes de la concurrence de marché à la géopolitique.

L’économie autrichienne voit dans la concurrence une force dynamique qui stimule l’innovation et le progrès. L’utilisation par Trump de sanctions économiques, de droits de douane et de négociations bilatérales est un moyen de s’adapter aux mécanismes du marché. Sa guerre commerciale avec la Chine en est l’illustration : en exerçant une pression sur la Chine par le biais de droits de douane, il cherche à obtenir de meilleures conditions pour les entreprises américaines.

Mais comme Hayek le mettait en garde, la concurrence sans confiance ni coopération peut conduire à l’instabilité. La politique de Trump a engendré de l’incertitude parmi les alliés traditionnels, ce qui peut offrir aux rivaux tels que la Chine l’occasion de tirer parti d’un vide de pouvoir. Cela souligne la nécessité de contrebalancer la concurrence par une coopération stratégique à long terme.

L’opportunité entrepreneuriale de l’Europe

Trump a poussé l’Europe à assumer une plus grande responsabilité en matière de sécurité. Pour l’Europe, cela implique non seulement d’augmenter les budgets de défense, mais aussi de mettre en œuvre des réformes structurelles favorisant l’entrepreneuriat et l’innovation dans l’industrie de la défense.

L’économie autrichienne met en avant le rôle du marché dans la promotion de l’efficacité. Pour l’Europe, cela signifie ouvrir l’industrie de la défense à la concurrence et aux acteurs privés, stimulant ainsi le développement de nouvelles technologies. En utilisant l’entrepreneuriat comme moteur, l’Europe peut bâtir une structure de sécurité économiquement durable et moins dépendante du soutien américain.

Mais comme Mises l’a averti, l’Europe doit éviter la surréglementation et la centralisation, qui peuvent freiner la croissance et l’innovation. En privilégiant une coopération décentralisée entre les nations, l’Europe peut obtenir une plus grande flexibilité et une plus grande dynamique.

Dans le même temps, l’Europe doit éviter les écueils de la centralisation et de la surréglementation. Si l’augmentation des dépenses de défense conduit à une pression fiscale plus forte et à une moindre flexibilité économique, cela peut entraver la croissance et l’innovation. La clé réside ici dans l’équilibre entre la souveraineté nationale et la coopération régionale, afin d’assurer une structure de sécurité durable.

La volonté comme modèle durable

L’un des aspects les plus intéressants de la politique de Trump, selon Wertheim, est sa mise en avant des contributions volontaires plutôt que des obligations imposées. Cela fait écho à l’idée de Hayek selon laquelle la coopération doit reposer sur des intérêts communs, non sur la coercition.

En affirmant que les États-Unis ne signeront plus de chèques en blanc pour soutenir la sécurité de l’Europe et en insinuant que les États-Unis pourraient quitter l’OTAN si ses mises en garde ne sont pas prises au sérieux, Trump crée néanmoins de véritables incitations pour que l’Europe assume une plus grande responsabilité de sa propre sécurité dans un monde de plus en plus incertain.

Cela est comparable à la théorie économique autrichienne, qui souligne l’importance d’un marché libre sans subventions étatiques, ainsi que des incitations visant à accroître la concurrence et à promouvoir l’entrepreneuriat comme clés d’un développement économique robuste. En supprimant la subvention de facto américaine à la sécurité européenne, les incitations adéquates sont réunies pour que l’Europe prenne les mesures nécessaires dans la dimension de la politique de sécurité.

L’exigence de Trump que les pays de l’OTAN paient davantage pour leur propre sécurité, sous peine de voir le soutien des États-Unis diminuer, remet donc en question les équilibres traditionnels de pouvoir. Mais elle offre également à l’Europe l’occasion de redéfinir son architecture sécuritaire sur la base de la volonté et de l’entrepreneuriat. Cela peut renforcer l’alliance en la rendant plus équilibrée et plus durable.

Réflexion récapitulative : le rôle de l’entrepreneuriat dans l’avenir de la géopolitique

À travers le prisme de l’économie autrichienne, la politique étrangère de Trump peut être comprise comme une approche pragmatique et entrepreneuriale face aux défis mondiaux. Son accent sur la décentralisation, la concurrence et la coopération volontaire remet en cause les structures traditionnelles, mais ouvre également la voie à l’innovation et à des solutions plus efficaces.

Pour l’Europe, cela représente à la fois un défi et une opportunité. En adoptant l’entrepreneuriat et des solutions dictées par le marché, l’Europe peut développer une stratégie sécuritaire qui renforce l’autonomie du continent et sa capacité d’innovation. D’un point de vue autrichien, la politique de Trump n’est pas seulement une nécessité, mais une chance de créer un nouvel ordre mondial plus décentralisé.

Référence :

Entretien avec Stephen Wertheim, Der Spiegel, 4 décembre 2024. Lire l’interview ici : What Role Will the U.S. Play in the World?: «Trump Has Never Been an Isolationist» – DER SPIEGEL

Culture géostratégique : Le Groenland fait-il partie de l’Union européenne ?

AASSDN – publié le 22 janvier 2025

https://aassdn.org/amicale/le-groenland-fait-il-partie-de-l-union-europeenne/


Située entre l’Atlantique nord et l’Arctique, la plus grande île du monde fait l’objet de convoitises. Autonome mais constitutive du royaume du Danemark, elle n’est pas à proprement parler un territoire de l’UE. En revanche, les Groenlandais sont bien des citoyens européens.
C’est un territoire grand comme quatre fois celui de la France métropolitaine, mais peuplé de seulement 55 000 âmes et recouvert à 85 % de glace. C’est le territoire le moins densément peuplé de la planète, avec 0,03 habitant par km2.  
A première vue, le Groenland ne semble pas particulièrement attrayant. Pourtant, la plus grande île du monde fait aujourd’hui l’objet de nombreuses convoitises, notamment de la part du futur président des Etats-Unis.

Début janvier 2025, lors d’une conférence de presse, Donald Trump a refusé d’exclure une annexion militaire du territoire. Le milliardaire américain, qui retrouvera la Maison-Blanche le 20 janvier 2025, voit dans “la propriété et le contrôle du Groenland” par les États-Unis une “nécessité absolue”. En 2019 déjà, il avait évoqué l’idée d’acheter ce territoire, suscitant une fin de non-recevoir de la part des autorités danoises, dont le Groenland est un pays constitutif. Quelques-uns de ses prédécesseurs avaient essuyé le même refus, en 1867, en 1910 ou encore en 1947. 

 

Quel est le statut du Groenland ?

Le Groenland a connu de nombreux changements de statut depuis la seconde moitié du XXe siècle. L’ancienne colonie danoise a accédé au statut de communauté autonome constitutive du royaume du Danemark en 1979. Elle a alors acquis des compétences en matière de fiscalité, d’économie ou d’éducation, puis de police ou encore de justice à partir de 2009.

Le territoire reste néanmoins soumis à la Constitution et à la Cour suprême du Danemark, le pays scandinave conservant des prérogatives importantes, notamment dans les domaines des relations internationales, de la défense et de la sécurité. Par ailleurs, Copenhague verse aujourd’hui l’équivalent de 500 millions d’euros d’aides à l’île chaque année.

Comme le Danemark, le Groenland a rejoint la Communauté économique européenne (CEE, désormais Union européenne) en 1973. Mais le territoire autonome a décidé de la quitter douze ans plus tard, à la suite d’un référendum. Il n’est donc plus un territoire européen depuis le 1er février 1985.

Outre son appartenance au Danemark, le territoire conserve toutefois des liens importants avec l’Union européenne. Le Groenland figure ainsi parmi les 13 pays et territoires d’outre-mer (PTOM), un ensemble de dépendances et de territoires ultramarins qui entretiennent des liens constitutionnels avec un Etat membre de l’Union européenne, sans faire partie intégrante de l’UE.

Ces 13 pays et territoires relèvent aujourd’hui de trois États : 6 sont reliés à la France (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna et Saint-Barthélemy), 6 autres aux Pays-Bas (Sint Maarten, Saba, Sint Eustatius, Aruba, Curaçao et Bonaire) et enfin le Groenland qui est un pays constitutif du royaume du Danemark. Le droit européen ne s’applique pas dans ces territoires, qui ne sont pas membres de l’espace Schengen par ailleurs.

Les PTOM sont en revanche associés à certaines politiques de l’UE pour faciliter leur développement économique, social et commercial. L’instrument européen pour le voisinage, le développement et la coopération internationale regroupe les différents programmes de financements à destination de ces zones. Par ailleurs, les produits importés dans l’UE depuis les PTOM ne sont pas soumis aux droits de douane ou aux restrictions quantitatives. Enfin, leurs ressortissants disposent de la citoyenneté européenne et donc d’un passeport de l’UE.

Pour les PTOM, un statut différent de celui des régions ultrapériphériques (RUP)

Le statut des PTOM (pays et territoires d’outre-mer) est à distinguer de celui des régions ultrapériphériques (RUP). Ce dernier concerne 9 régions insulaires et/ou géographiquement éloignées du continent européen. Contrairement aux PTOM, elles font partie intégrante du territoire de l’Union et sont, à ce titre, soumises au droit européen.

La France compte six régions ultrapériphériques (Saint-Martin, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, Mayotte et La Réunion), contre deux pour le Portugal (Madère et les Açores) et une pour l’Espagne (les Canaries).

 

Pourquoi le Groenland est-il convoité ?

Pour justifier ses volontés d’annexion du Groenland, Donald Trump avance des raisons de sécurité nationale. Présents depuis la Seconde Guerre mondiale sur l’île, les Etats-Unis y ont notamment construit une base aérienne au nord-ouest, à Qaanaaq (ou Thulé) en 1953. Le Groenland suscite également les convoitises de la Chine, qui y a développé des activités économiques et scientifiques ces dernières années, ou celles de la Russie, qui espère régner sur l’Arctique dans les années à venir.

Ces multiples intérêts s’expliquent par la situation géographique de l’île, dont les planisphères donnent une mauvaise représentation. En regardant une carte centrée sur le Groenland (voir l’encadré ci-dessous), on constate la position stratégique du territoire. Constitué en grande partie de glace, il se réchauffe deux fois plus vite que le reste du globe, entraînant la fonte des glaces. Celle-ci pourrait ouvrir de nouvelles routes commerciales maritimes jusqu’ici inaccessibles. Une aubaine pour les trois puissances mondiales.

Enfin, le sol du Groenland est particulièrement riche en ressources : 13 % du pétrole et 30 % du gaz naturel non découverts à ce jour se trouveraient en Arctique, dont la majeure partie au Groenland, selon certaines estimations. Il regorgerait enfin de terres rares, comme le nickel ou le cobalt, nécessaires à la fabrication des batteries pour les téléphones portables, par exemple. Là aussi, la fonte des glaces pourrait s’avérer déterminante.

Le Groenland : carte d’identité 

 

Crédits : Toute l’Europe, avec Flourish

Capitale : Nuuk (17 000 habitants)
Population : 55 000 habitants (449 millions pour l’Union européenne)
Superficie : 2,16 millions de km2 (deux fois moins que l’Union européenne, 4,23 millions de km2)
Monnaie : couronne danoise (comme au Danemark)
Chef du gouvernement : Múte B. Egede, membre du parti Inuit Ataqatigiit (social-démocrate)

 

Le Groenland fait-il partie de l’Otan ?

Si elle peut paraître farfelue, l’option militaire n’a pas été écartée par Donald Trump pour s’emparer du Groenland. Compte tenu de la présence américaine sur l’île, une hypothétique invasion s’avérerait relativement simple à mettre en œuvre. Evidemment, une telle intervention créerait un choc sans précédent, notamment parce que les Etats-Unis et le Danemark sont alliés au sein de l’Otan.

S’ils envahissent le Groenland, ils envahissent l’Otan. C’est là que ça s’arrête. L’article 5 de l’Otan [qui implique qu’une attaque contre l’un ou plusieurs de ses membres est considérée comme une attaque dirigée contre tous, NDLR] devrait être déclenché. Et si un pays de l’Otan envahit l’Otan, il n’y a plus d’Otan”, explique par exemple Elisabet Svane, correspondante politique en chef du journal danois Politiken, citée par la BBC.

Enfin, les Etats membres de l’UE, dont le Danemark, pourraient également évoquer l’article 42.7 du Traité sur l’Union européenne, également appelé “clause de défense mutuelle”. “Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir”, précise ce dernier. Une clause dont bénéficie également le Groenland, a confirmé un porte-parole de la Commission européenne.

 

Le Groenland pourrait-il demander son indépendance ?

Depuis 2009, le Groenland peut, s’il le souhaite, déclarer son indépendance du Danemark. Un processus qui passerait notamment par l’organisation d’un référendum et des négociations avec le Danemark sur leurs futures relations. La perspective refait souvent surface dans le débat public. Le Premier ministre groenlandais, Múte Egede, a d’ailleurs exprimé son souhait d’organiser un référendum sur le sujet s’il remporte les prochaines élections, en avril 2025. Et lors de son discours du Nouvel An, il y a de nouveau fait allusion.

Reste que le Groenland est extrêmement dépendant de Copenhague. Les fonds versés par le Danemark représentent actuellement 60 % du budget de l’île et près du quart de son PIB.

Touteleurope.eu
16/01/2025

Source photo-bandeau : Google Maps

PORTRAIT – Qui est John Ratcliffe, choisi par Trump pour diriger la CIA

John Ratcliffe à la CIA
Réalisation Le Lab Le Diplo

PORTRAIT – Qui est John Ratcliffe, choisi par Trump pour diriger la CIA


Par Giuseppe Gagliano, Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie). Membre du comité des conseillers scientifiques internationaux du CF2R.

Trump a annoncé avoir choisi John Ratcliffe, ancien directeur du renseignement national à la fin de son premier mandat, comme directeur de la Central Intelligence Agency (CIA). Voici tout ce qu’il faut savoir sur la carrière de Ratcliffe, tel que rapporté par le site Politico.

John Ratcliffe est une figure de premier plan dans le paysage politique américain, avec une carrière qui l’a vu passer du domaine juridique à des rôles de direction dans le renseignement national. Né le 20 octobre 1965 à Mount Prospect, dans l’Illinois, Ratcliffe a construit une carrière solide en tant qu’avocat et homme politique républicain, devenant l’un des alliés les plus proches de Donald Trump.

Les débuts : une carrière de procureur fédéral

Ratcliffe a obtenu son diplôme en droit à la Southern Methodist University School of Law et a commencé sa carrière juridique en tant qu’avocat dans le secteur privé. Par la suite, il a occupé le poste de procureur fédéral dans le district Est du Texas, où il s’est concentré sur des affaires liées au contre-terrorisme et à la sécurité nationale. Il a affirmé avoir joué un rôle clé dans la prévention de menaces terroristes sur le sol américain, bien que certains critiques aient mis en doute l’ampleur réelle de ses contributions.

L’entrée en politique : membre du Congrès pour le Texas

Ratcliffe a fait le saut vers la politique nationale en 2014, lorsqu’il a battu le député républicain en exercice Ralph Hall lors des primaires texanes pour la Chambre des représentants. Élu comme représentant du 4ᵉ district du Texas, il s’est rapidement forgé une réputation de conservateur intransigeant, prônant des politiques fiscales strictes et s’opposant à l’expansion du gouvernement fédéral.

Pendant son mandat au Congrès, Ratcliffe a siégé au sein de commissions cruciales telles que la commission judiciaire et la commission du renseignement de la Chambre. Ces positions lui ont permis de devenir une figure clé dans la supervision des agences de renseignement américaines. Sa défense fervente de Trump lors des enquêtes sur l’impeachment et le Russiagate a renforcé son statut de fidèle allié du président.

Directeur du renseignement national : une nomination controversée

La confiance de Trump envers Ratcliffe l’a conduit à le nommer directeur du renseignement national (DNI) en mai 2020, un poste qu’il a occupé jusqu’à la fin du mandat de Trump en janvier 2021. En tant que DNI, Ratcliffe était chargé de superviser toutes les agences de renseignement américaines, y compris la CIA, la NSA et le FBI, et de gérer des informations sensibles relatives à la sécurité nationale.

Malgré un manque d’expérience significative dans le domaine du renseignement avant sa nomination, Ratcliffe a adopté une politique de déclassification de nombreux documents, affirmant qu’ils révélaient des abus de l’intelligence sous ses prédécesseurs. Cette décision lui a toutefois valu des accusations de politisation des informations classifiées pour favoriser Trump et le Parti républicain.

Contribution aux enquêtes sur Hunter Biden

Lors de l’annonce de sa nomination, Trump a remercié Ratcliffe pour avoir « exposé une fausse collusion russe » et « dit la vérité » sur l’affaire du laptop de Hunter Biden. Ces commentaires reflètent la perception de Trump que Ratcliffe est aligné avec ses objectifs politiques. Lorsque Ratcliffe était au Congrès, il avait contribué à faire avancer les enquêtes sur Hunter Biden, comme le rappelle The Independent.

Le retour de Ratcliffe à la tête de la CIA : un signal de continuité pour Trump

Avec sa récente nomination à la tête de la CIA, Ratcliffe revient jouer un rôle clé dans l’appareil de sécurité des États-Unis. Le choix de Trump de s’appuyer sur une figure déjà testée au sein de son administration montre une volonté de continuité dans les politiques de sécurité et de renseignement.

Ratcliffe a promis d’adopter une ligne dure face aux menaces extérieures, en particulier celles émanant de puissances rivales comme la Chine et la Russie. Cependant, il reste à voir comment cette nomination influencera les opérations internes de la CIA et ses relations avec d’autres agences de renseignement.

À lire aussi : Les ingérences du renseignement américain dans l

Conclusion

John Ratcliffe est une figure polarisante du paysage politique américain. Sa carrière, qui l’a vu passer de défenseur de la sécurité nationale en tant que procureur à partisan des politiques de Trump en tant que parlementaire et dirigeant du renseignement, reflète son alignement sur les priorités de l’administration Trump.

Sa nomination à la tête de la CIA pourrait introduire des changements significatifs dans la stratégie de renseignement des États-Unis, avec une attention accrue portée aux menaces globales et une priorité donnée à la protection des intérêts américains.

 

 


John Ratcliffe à la CIA

Giuseppe Gagliano a fondé en 2011 le réseau international Cestudec (Centre d’études stratégiques Carlo de Cristoforis), basé à Côme (Italie), dans le but d’étudier, dans une perspective réaliste, les dynamiques conflictuelles des relations internationales. Ce réseau met l’accent sur la dimension de l’intelligence et de la géopolitique, en s’inspirant des réflexions de Christian Harbulot, fondateur et directeur de l’École de Guerre Économique (EGE)

Il collabore avec le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) (Lien),https://cf2r.org/le-cf2r/gouvernance-du-cf2r/

avec l’Université de Calabre dans le cadre du Master en Intelligence, et avec l’Iassp de Milan (Lien).https://www.iassp.org/team_master/giuseppe-gagliano/

Infographie : dissection de la Maison Blanche

Infographie : dissection de la Maison Blanche

par Revue Conflits avec AFP – publié le 20 janvier 2025


La Maison-Blanche, résidence et bureau du président des États-Unis, est un monument emblématique de l’histoire et du pouvoir américain. Mélange de grandeur architecturale et de symbolisme politique, elle incarne l’essence même de la nation américaine.

L’Architecture de la Maison-Blanche : Un symbole de pouvoir et d’histoire

La Maison-Blanche, résidence officielle du président des États-Unis, est bien plus qu’un simple bâtiment : c’est un symbole de l’autorité présidentielle et de l’histoire américaine. Son architecture incarne la grandeur de la nation tout en intégrant des éléments classiques et modernes qui la rendent unique. L’édifice de plus de 5 100 m2, situé au 1600 Pennsylvania Avenue à Washington D.C., est un mélange de style néoclassique, de design pratique et de symbolisme politique.

Les origines architecturales

La conception de la Maison-Blanche débute au XVIIIe siècle, sous la direction de George Washington, premier président des États-Unis. Cependant, c’est l’architecte irlandais James Hoban qui est choisi pour réaliser le projet. Hoban s’inspire des bâtiments palladiens, notamment du Leinster House à Dublin, pour créer une résidence digne du chef de l’État américain. Le style néoclassique, qui reflète les idéaux de la Rome antique, a été choisi pour incarner l’autorité, la rationalité et l’équilibre.

La structure de la Maison-Blanche

La Maison-Blanche est constituée de plusieurs éléments distincts. Le bâtiment principal, avec ses murs en pierre calcaire, présente une façade symétrique, caractéristique du style palladien. Il se compose de trois étages : le rez-de-chaussée, l’étage principal et l’étage supérieur. L’entrée principale, ornée d’un porche à colonnes, est flanquée de chaque côté par des fenêtres en arc de cercle, un autre élément typique du style classique. L’édifice comprend également de nombreux salons et bureaux qui servent aux fonctions politiques et diplomatiques. Le bureau Ovale, situé au premier étage, est l’un des espaces les plus célèbres du bâtiment, un lieu où le président prend ses décisions et accueille des dignitaires étrangers. À proximité, on trouve la salle à manger d’État, la salle de réception diplomatique et les salons de l’Executive Residence.

Les évolutions architecturales

Au fil des siècles, la Maison-Blanche a subi plusieurs modifications et agrandissements. Après l’incendie de 1814, lors de la guerre de 1812, le bâtiment est presque entièrement détruit. La reconstruction permet de conserver le plan initial tout en apportant des améliorations. Les modifications les plus notables au cours du XIXe et du XXe siècle ont été réalisées lors des mandats de Theodore Roosevelt, Franklin D. Roosevelt et Harry S. Truman, ce dernier étant responsable de la rénovation complète de l’intérieur. Les jardins et les terrains environnants ont également évolué. Le plus célèbre d’entre eux est le Jardin de la Rose, situé à l’arrière du bâtiment, qui constitue un espace de détente tout en étant utilisé pour des événements officiels et des cérémonies.

La Maison-Blanche et la symbolique

La Maison-Blanche ne se limite pas à ses fonctions de résidence et de bureau. Elle incarne aussi la représentation du pouvoir exécutif américain. Ses colonnes majestueuses, ses jardins soignés et ses vastes espaces intérieurs sont autant de preuves de la stabilité, de la continuité de la nation américaine. En tant que centre névralgique du pouvoir, la Maison-Blanche est aussi un lieu de visibilité internationale. Chaque modification ou rénovation est scrutée de près et devient un moyen de marquer les changements dans l’histoire politique du pays. La Maison-Blanche est donc bien plus qu’un simple bâtiment : elle est le cœur battant de la politique américaine et un symbole fort de la république.

La plus puissante flotte de guerre du monde passe un cap stratégique avec l’intégration de missiles hypersoniques high-tech sur 2 de ses destroyers

La plus puissante flotte de guerre du monde passe un cap stratégique avec l’intégration de missiles hypersoniques high-tech sur 2 de ses destroyers

La plus puissante flotte du monde passe un cap stratégique avec l'intégration de missiles hypersoniques high-tech sur 2 de ses destroyers
La plus puissante flotte du monde passe un cap stratégique avec l’intégration de missiles hypersoniques high-tech sur 2 de ses destroyers

L’US Navy intègre des armes hypersoniques à sa flotte de missiles guidés.

L’US Navy entre dans une nouvelle ère avec l’intégration du système de missiles hypersoniques Conventional Prompt Strike (CPS) dans sa flotte de destroyers. Cette évolution, marquant un tournant stratégique majeur, promet de redéfinir les capacités offensives de surface de la marine américaine.

Transformation en cours pour le destroyer USS Zumwalt

Le USS Zumwalt, vaisseau de tête de sa classe, a récemment subi des modifications importantes pour accueillir le système CPS. Ces travaux, réalisés dans les installations de HII’s Ingalls Shipbuilding à Pascagoula, Mississippi, ont impliqué le retrait de l’armement traditionnel pour faire place à quatre tubes de lancement capables de déployer jusqu’à trois missiles chacun, soit un total de douze munitions hypersoniques.

Une modernisation d’envergure

La modernisation du Zumwalt inclut l’installation de nouveaux systèmes et ponts autour des tubes de missiles, tout en conservant l’armement à l’arrière du navire. Ce destroyer, conçu initialement pour le soutien rapproché des forces terrestres, voit ainsi sa mission évoluer radicalement vers une capacité de frappe stratégique à longue portée.

Le USS Lyndon B. Johnson suit le pas

Dans une démarche similaire, le USS Lyndon B. Johnson est actuellement en cale sèche pour débuter sa transformation. Ce sera le second navire de classe Zumwalt à intégrer le large système de lancement vertical pour les missiles hypersoniques, marquant une étape supplémentaire dans la modernisation de la flotte.

Des délais étendus pour une intégration complète

Pour permettre ces installations, le calendrier d’activation du système de combat a été prolongé de deux ans, soulignant l’importance d’une intégration approfondie des nouvelles technologies. Cette extension permettra d’assurer que les capacités du système de combat soient pleinement opérationnelles avant leur mise en service.

Un changement de cap stratégique pour l’US Navy

Initialement prévue comme une flotte de près de 30 navires, la classe Zumwalt a été réduite à seulement trois unités en raison de considérations budgétaires. Cependant, ces navires jouent maintenant un rôle crucial dans le redéploiement stratégique de l’US Navy, avec un accent mis sur les capacités de frappe précises et à longue portée offertes par les armes hypersoniques.

Vers une guerre navale de haute technologie

Le programme CPS ne se limite pas aux destroyers Zumwalt. Il est également prévu pour être intégré sur les sous-marins d’attaque nucléaires de classe Virginia et déployé par les Forces de Tâches Multi-Domaines de l’Armée américaine, illustrant la volonté de l’US Navy de renforcer ses options tactiques dans les futurs conflits.

Avec l’intégration des armes hypersoniques, l’US Navy se positionne à la pointe de la technologie militaire. Le déploiement du système CPS sur les destroyers Zumwalt et d’autres plateformes marque le début d’une nouvelle ère dans la guerre navale, où la vitesse et la précision des armements hypersoniques promettent de redéfinir les règles du combat maritime moderne.

Source : https://www.navalnews.com/event-news/sna-2025/2025/01/us-navy-begins-hypersonic-integration-on-uss-lyndon-b-johnson/

Photo : L’USS Zumwalt (DDG 1000)

En Syrie, le pire est peut-être à venir. Entretien avec David Daoud.

En Syrie, le pire est peut-être à venir. Entretien avec David Daoud.

This photo, released by the Syrian official news agency SANA, shows the leader of Hayat Tahrir al-Sham Ahmad al-Sharaa, (Abu Mohammed al-Golani), right, as he meets with United Nations’ special envoy to Syria, Geir Pederson, in Damascus, Monday, Dec. 16, 2024. (SANA via AP)/XHM101/24351399979452/AP PROVIDES ACCESS TO THIS PUBLICLY DISTRIBUTED HANDOUT PHOTO PROVIDED BY SANA; MANDATORY CREDIT./2412161250

par Henrik Werenskiold – Entretien avec David Daoud – Revue Conflits – publié le 15 janvier 2025

https://www.revueconflits.com/en-syrie-le-pire-est-peut-etre-a-venir-entretien-avec-david-daoud/


Al-Jolani, le nouveau maître de la Syrie, présente une allure de modéré. Mais il demeure un homme formé dans la matrice islamiste. Il faut encore du temps pour voir s’il tolérera la liberté dans le pays ou s’il va exercer un régime de répression.

David Daoud est chercheur principal à la Foundation for Defense of Democracies, spécialisé dans le Liban et le Hezbollah. Auparavant, il a travaillé comme chercheur non résident à l’Atlantic Council, directeur de la recherche sur Israël, le Liban et la Syrie à United Against Nuclear Iran (UANI), et analyste de recherche à la FDD. Il a également travaillé en tant que membre du personnel au Capitole, où il a fourni des analyses sur des questions liées au Moyen-Orient, à Israël et à l’Iran.

Propos recueillis par Henrik Werenskiold

Que pensez-vous du djihadiste Abu Mohammed al-Jolani et de sa promesse d’être un islamiste modéré réformé ? Il dit toutes ces bonnes choses : qu’il protégera les minorités, que les femmes ne seront pas obligées de se couvrir. Il a même indiqué qu’il pourrait autoriser l’alcool. Est-il sincère ou n’est-ce qu’une façade ?

Je suppose que le problème n’est pas qu’il soit simplement un islamiste. C’est qu’il s’agit d’un ancien terroriste d’ISIS et d’Al-Qaïda, de sorte que l’histoire d’al-Jolani n’est pas très prometteuse en ce qui concerne son comportement futur. En ce qui concerne ce qu’il a dit au sujet de l’alcool, il n’a pas nécessairement dit que l’alcool serait autorisé. Il a dit qu’il appartiendrait aux assemblées législatives de décider de ce qui se passera, et qu’il se conformerait à leur décision.

Aujourd’hui, bien sûr, il fait tous ces gestes qui semblent prometteurs et positifs. Quelle est la part de sincérité et quelle est la part de pragmatisme tactique ? Difficile à dire. Nous sommes à peine deux semaines après la chute du régime d’Assad, ce qui n’est pas assez pour que nous puissions nous prononcer sur cet homme.

Il est en effet possible qu’il ait véritablement changé d’avis, mais c’est néanmoins peu probable. A-t-il eu sa propre vision sur le chemin de Damas, pour ainsi dire, et a-t-il changé complètement sa vision du monde ? Tout est possible, mais il est encore trop tôt pour l’affirmer avec certitude. Je pense donc que nous devons être prudents et attendre une action cohérente sur une certaine période, avant d’engager al-Jolani d’une manière qui le traite comme quelqu’un qui s’est repenti, qui a fondamentalement changé.

À l’heure actuelle, il prend le contrôle d’une Syrie fracturée, paralysée par des années de sanctions et de guerre civile. Ses besoins immédiats sont l’aide à la reconstruction, la levée des sanctions, le retour des affaires dans le pays. Tout cela nécessite de bonnes relations avec les pays extérieurs.

Si l’on considère deux exemples historiques de groupes islamistes terroristes, le Hezbollah et l’ISIS, le premier a réussi, tandis que le second n’a pas réussi. Lorsque ISIS est arrivée, il a dirigé ce qui était censé être un État, mais il l’a fait d’une manière ouvertement brutale, pour ne pas dire plus. Leur approche consistait à se battre avec le monde entier en même temps, et ils n’ont pas duré longtemps en tant qu’entité politique à cause de cela. Le modèle alternatif est le Hezbollah.

Pourriez-vous préciser ce que vous entendez par là ?

Dans les années 1980, le Hezbollah, en tant que force révolutionnaire, n’acceptait même pas la légitimité de l’État libanais. Techniquement, ce n’est toujours pas le cas. Pendant un certain temps, il a même tenté d’imposer la loi islamique aux chiites dans les régions qu’il contrôlait, mais rien de tout cela n’a fonctionné pour lui. Ainsi, lorsqu’il s’est agi d’élargir leur soutien aux chiites libanais, ou de tenter d’imposer la loi islamique, ils se sont heurtés à un refus.

Les Libanais ne voulaient pas soutenir le groupe sous cette forme, et le Hezbollah a donc renoncé à son idéologie pour des raisons pragmatiques. Aujourd’hui, lorsque l’on se rend dans les zones contrôlées par le Hezbollah au Liban, comme Tyr et ailleurs, on consomme de l’alcool et l’on peut voir des femmes en bikini sur les plages. Mais cela ne signifie pas que le Hezbollah s’est modéré – il s’agit simplement d’un jeu tactique.

Ils ont également cessé de s’appeler la « révolution islamique » au Liban, se rebaptisant la « résistance islamique » du pays. Cela leur a permis d’opérer dans le cadre du consensus libanais, plutôt que comme un groupe marginal, et d’accroître leur force à l’intérieur du système existant. Cela a également permis d’alléger la pression étrangère sur le groupe. Le Hezbollah a cessé d’enlever des fonctionnaires et des ressortissants étrangers au Liban. Au lieu de cela, il a concentré ses attaques terroristes et ses opérations militaires sur les Israéliens. Au cours des années 1990 et au début des années 2000, beaucoup ont dit que le Hezbollah s’était « libanisé », qu’il avait changé : il participait au processus politique et s’exprimait dans la langue de la politique libanaise.

Mais ces changements étaient entièrement tactiques, toujours pour les mêmes raisons. Ils ne voulaient pas unir le monde entier contre eux : les anciennes factions politiques du Liban, la Syrie, qui contrôlait le Liban, et la communauté internationale – à l’exception des États-Unis et d’Israël. Cette stratégie leur a donné la longévité et la marge de manœuvre nécessaire pour survivre. Elle leur a donné la marge de manœuvre nécessaire pour mettre progressivement en œuvre un programme politique islamiste dont la finalité est un modèle théocratique. Ils l’admettent, n’est-ce pas ? Ils veulent un État islamique au Liban basé sur le modèle iranien.

Quelle est la comparaison avec al-Jolani ?

Donc, si je suis al-Jolani, j’étudie ces deux modèles et ce à quoi ils ont conduit. Et si je suis intelligent, j’opte pour le modèle du Hezbollah après la guerre civile libanaise, parce que c’est celui qui a de la longévité. C’est celui qui promet de mettre en œuvre mon programme politique islamiste, même si cela prend plus de temps, mais cela ne signifie pas qu’il est modéré. Je considère toujours qu’il joue un jeu à très long terme.

Y a-t-il une chance qu’il ait réellement changé d’avis ? Peut-être, mais il faudra du temps pour le savoir. Il faut donc au moins attendre le mois de mars, date à laquelle l’actuel gouvernement intérimaire dirigé par le HTS est censé lancer un processus de transition, et voir comment les choses se dérouleront. Al-Jolani et le HTS permettront-ils la tenue d’élections libres et équitables ? Permettront-ils à toutes les forces politiques syriennes de s’affronter sur un pied d’égalité ? Lorsque les élections auront lieu, s’ils perdent, céderont-ils le pouvoir ? Aucune de ces questions ne peut trouver de réponse à court terme, il faudra un processus de contrôle et de vérification sur plusieurs années.

Mais commençons à voir quelques mesures avant de dire : « Il porte un costume, et c’est un si beau costume, et il s’est taillé la barbe. Il a dit qu’il allait permettre aux femmes d’aller à l’école, il a donc dû se modérer ». Ce sont des choses agréables à dire, mais cela ne veut pas dire qu’il a vraiment changé d’avis. Je veux dire, encore une fois, si l’on regarde le modèle iranien, le pourcentage de femmes dans les universités a considérablement augmenté sous la théocratie islamique par rapport à ce qu’il était sous le Shah. Mais cela ne veut pas dire que nous parlons d’un pays modéré, loin de là.

Vous dites donc qu’il ne s’agit peut-être que d’un jeu tactique visant à maximiser la possibilité d’atteindre l’objectif d’établir le célèbre califat mondial à un moment ultérieur ?

Oui, c’est tout à fait possible, mais cela ne signifie pas nécessairement qu’il y parviendra ou qu’il cherchera à instaurer un État islamique dans les cinq années à venir. Encore une fois, nous partons du principe que parce que ces groupes ont une certaine idéologie, ils vont poursuivre cet objectif final de manière irrationnelle. Je pense, encore une fois, qu’il existe des moyens plus intelligents de poursuivre cet objectif, et c’est ce qui me rend sceptique quant à sa nouvelle image de modéré.

Ce n’est pas parce qu’il est un musulman religieux. Ce n’est pas parce qu’il porte la barbe. C’est parce qu’il est issu d’un courant spécifique du salafisme-djihadisme. Il est issu d’un groupe et d’une idéologie spécifiques dont l’objectif final est une théocratie brutale. Et je ne pense pas que ces choses soient abandonnées très facilement, surtout en si peu de temps.

Alors, que pensez-vous de l’argument selon lequel il a un nouveau protecteur en Turquie et, dans une moindre mesure, au Qatar, qui va essentiellement le modérer ? Qu’ils remplaceront ses convictions salafistes et jihadistes par une branche de la politique des Frères musulmans. Pensez-vous qu’ils exerceront une influence modératrice sur lui ?

Je ne sais pas si je considère nécessairement les Frères musulmans comme modérés au sens propre du terme. Par rapport au salafisme-djihadisme à l’extrême, il s’agit d’un autre type d’islam extrême, mais ils poursuivent toujours les mêmes objectifs par des moyens pragmatiques, peut-être plus doux. Ceci étant dit, je ne sais pas à quoi ressemblerait un État purement Frères musulmans.

Nous avons un exemple à Gaza, car le Hamas est une émanation des Frères musulmans, une émanation autoproclamée des Frères musulmans. Ils ont imposé une sorte d’État de type Frères musulmans à Gaza, et ce n’était pas nécessairement une expérience agréable pour les habitants de Gaza eux-mêmes – indépendamment de ce qui se passait entre eux et Israël.

Je considère le modèle du Hezbollah comme un modèle approprié, parce qu’il me ramène à une interview que l’actuel secrétaire général Naim Qassem (alors secrétaire général adjoint) a donnée à Mayadeen en janvier 2016. On lui a demandé : « Quel est votre objectif final ? ». Et il a répondu quelque chose comme ceci :

Eh bien, écoutez, je suis un islamiste. Je suis un croyant. Bien sûr, je veux un État islamique. Et en tant qu’islamiste, je crois que la loi islamique est la meilleure façon d’organiser la société humaine. Et pas seulement pour les musulmans, mais aussi pour les chrétiens et les juifs, pour qu’ils obtiennent leurs droits et ce qu’il y a de mieux pour eux au sein du gouvernement et de la société. Mais je ne cherche pas à leur imposer cela par la force. Je cherche à les convaincre que c’est la meilleure façon pour eux de vivre leur vie.

Ils veulent donc que ce système soit imposé par le bulletin de vote plutôt que par la balle. Et cela les fait passer pour des modérés et des démocrates, n’est-ce pas ? Mais ils en sont loin. Une fois qu’ils sont au pouvoir, leur idéologie les oblige à abandonner la démocratie, même si elle est lente et pas nécessairement sanglante comme l’a fait, par exemple, ISIS. Il s’agit d’une sorte de coup d’État sans effusion de sang, où les gens portent leur oppresseur au pouvoir, parce que ce dernier les a convaincus que leur modèle est le seul qui fonctionne : C’est le seul modèle qui mettra de la nourriture sur votre table, qui fournira de l’électricité, et ainsi de suite.

Ainsi, en ce qui concerne les Qataris et les Turcs, je ne suis pas sûr que ce modèle soit plus modéré dans ses objectifs finaux. Il est plutôt plus pragmatique dans la poursuite de ces objectifs.

La Turquie joue un peu avec le feu. Je vois des liens avec la façon dont le Pakistan a été le protecteur des talibans, et ils ont fini par se retourner contre eux. Pensez-vous qu’Erdogan joue avec le feu ici, que les HTS pourraient venir le mordre plus tard ? Qu’il ne sera pas en mesure de les contrôler autant qu’il le pense ?

C’est un jeu intéressant que de jouer avec les forces politiques islamiques. Je sais qu’avec les Qataris, au moins, leur influence régionale passe par l’exploitation des forces de la religion, qui sont très fortes dans la région. Même si les gens ne prient pas cinq fois par jour ou ne boivent pas d’alcool, il existe toujours un certain traditionalisme et une nostalgie de la tradition. Et le Qatar a su exploiter cela. Cela ne s’est pas encore retourné contre le Qatar.

Avec la Turquie, ils font quelque chose de similaire. Les Turcs essaient de se positionner comme l’Iran des sunnites et de jouer sur la corde sensible des sunnites, pour simplifier un peu les choses. C’est pourquoi, pendant la guerre de Gaza, ils se font les champions de la Palestine et d’autres choses de ce genre.

À cet égard, je considère deux modèles. Le modèle saoudien et le modèle iranien. Les Iraniens choisissent très intelligemment leurs mandataires, car ils ne se basent pas nécessairement sur des incitations financières. Le Hezbollah et les milices chiites irakiennes qui sont fidèles à l’Iran ne le sont pas sur la base d’incitations financières, mais sur la base d’une idéologie. Ils croient sincèrement qu’Ali Khamenei est le Wali al-Faqih, c’est-à-dire le représentant de Dieu sur terre.

Par conséquent, si les sources de financement sont coupées, s’il y a un désaccord ou quoi que ce soit d’autre, il ne s’agit pas d’une relation normale entre deux acteurs qui ont des intérêts finalement divergents. Il s’agit d’une relation de type patron-serviteur où le second est loyal envers le premier, quoi qu’il arrive. En effet, les Iraniens ont bâti leur loyauté sur un système de croyances, et ils ont commodément cette figure religieuse qui est censée être la voix de Dieu. Encore une fois, je simplifie un peu les choses, mais c’est en gros ce à quoi cela se résume. Il existe un véritable système de croyances.

En quoi cela diffère-t-il de la Turquie ?

En ce qui concerne la Turquie, je sais qu’Erdogan veut se présenter comme une sorte de leader sunnite, mais il n’a pas la légitimité qu’Ali Khamenei a créée parmi les chiites. Il n’a pas nécessairement le même contrôle sur al-Jolani qu’Ali Khamenei sur ses pions. Je ne pense donc pas qu’al-Jolani se tourne vers lui comme les Frères musulmans idéalisent la vision du calife : l’ancien chef spirituel et mondain de l’islam sunnite combiné en un seul.

Il est donc toujours possible que les choses se passent comme elles se sont passées avec les Saoudiens. Les Saoudiens ont commencé à financer l’islamisme sunnite et les groupes extrémistes afin de contrer la révolution islamique en Iran et l’islamisme chiite politique. Mais cela leur a échappé, car leurs mandataires ne leur étaient pas subordonnés par l’idéologie, mais uniquement pour des raisons matérielles, contrairement aux Iraniens et à leurs mandataires.

Ces groupes et ces mosquées que les Saoudiens finançaient, cette idéologie dans laquelle ils injectaient de l’argent, ne regardaient pas la monarchie et la famille royale saoudiennes de la même manière que, par exemple, le Hezbollah regarde Ali Khamenei. Ils finançaient donc cette idéologie de plus en plus puriste et, lorsque les porteurs de cette idéologie ont examiné la famille royale saoudienne, ils ont constaté qu’elle n’était pas à la hauteur des idéaux de l’islam. Cette idéologie conclut que la famille royale saoudienne est corrompue, qu’elle est de mèche avec l’Occident infidèle, etc. C’est ainsi que l’on aboutit aux attaques d’ISIS contre l’Arabie saoudite.

Et au fur et à mesure que l’on progresse, c’est la conclusion logique. Je ne dis pas que les Saoudiens ont financé ISIS, mais ils ont financé la genèse d’une idéologie qui, au fil des années et des étapes, s’est métastasée en ISIS – sans doute de manière imprévisible – et cette idéologie s’est finalement retournée contre eux. Et à son apogée, il y a eu des attentats suicides et différentes attaques en Arabie saoudite même.

C’est donc une réelle possibilité pour la Turquie également. Si Erdogan continue à jouer ce jeu et que cette idéologie devient de plus en plus puriste, elle pourra alors se tourner vers la Turquie et dire : « Vous êtes tout aussi décadents et corrompus que tous les autres pays auxquels nous sommes censés nous opposer ». Et peut-être que cela ne se produira pas sous al-Jolani ou dans un avenir immédiat, mais dans une génération ou plus.

Je pense donc qu’il y a un élément de jeu avec le feu parce que la Turquie n’a pas le même contrôle sur une telle entité que, disons, l’Iran sur ses mandataires, quoi qu’il arrive. J’exagère un peu ici, mais si Khamenei décide soudainement de boire de l’alcool, cela serait presque perçu comme la bonne chose à faire par les mandataires, car il est considéré comme l’ombre de Dieu sur terre, pour ainsi dire. Erdogan, quant à lui, n’a pas cette autorité, loin de là.

Mais revenons à al-Jolani. Il compte dans ses rangs des combattants djihadistes très extrémistes, notamment des Ouzbeks, des Tadjiks, des Afghans et des Ouïghours. Comment réagiront-ils s’il devient trop modéré ? Risque-t-il que quelqu’un d’autre cherche à prendre sa place s’il ne répond pas à leur vision d’un État islamique puriste ?

Je pense que cela dépend vraiment de ce qu’il leur a promis et de leurs attentes, mais il y a ce risque. Cela dépend de ce qu’il leur a dit. Peut-être qu’il a eu ces discussions avec eux et qu’il a fixé les attentes comme il se doit, à savoir qu’ils ne chercheront pas à imposer ou à réaliser immédiatement leur objectif final ou leur vision d’un État islamique.

J’imagine qu’il a préparé quelque chose pour répondre à ces questions en interne. Peut-être en disant : « L’Émirat islamique que nous avions l’intention d’imposer ne peut pas l’être immédiatement. Il s’agira d’un processus, et les processus prennent du temps, mais nous poursuivrons ce processus en fonction des conditions de la Syrie plutôt que de rallumer une guerre civile ».

En outre, il est important de savoir comment il est perçu par ceux qui suivent l’autorité religieuse. Sont-ils prêts à faire preuve de pragmatisme dans la poursuite de leurs objectifs ? En ce qui concerne ses partisans djihadistes étrangers, il a déclaré qu’il fallait faire quelque chose pour démontrer la gratitude du peuple syrien à l’égard de ces personnes qui ont combattu et sont mortes pour la Syrie. Cela pourrait inclure la nationalité syrienne.

J’imagine que s’il est arrivé là où il est aujourd’hui, il s’est probablement préparé à cela, tout comme il joue ce long jeu avec l’Occident. Mais je ne pense pas que le Syrien moyen, même les plus traditionalistes, veuillent vivre sous la loi islamique. Donc, si al-Jolani est un dirigeant intelligent, ce que je pense, il comprend cet environnement.

C’est ce qui donne la longévité. C’est ce qui donne la durabilité. Si vous sortez d’une expérience de guerre civile, vous comprenez que même un tyran, même un autocrate qui n’est pas en phase avec la majorité de son peuple, sera déposé. C’est la leçon de Bachar el-Assad. Je veux dire, pour le dire très légèrement, qu’Assad est allé trop loin au-delà de ce que son peuple, le peuple syrien, pouvait tolérer. Cela a pris du temps, mais il a fini par être déposé.

Si al-Jolani a retenu ces leçons de l’histoire, il sait qu’il ne peut pas trop s’écarter de la ligne de démarcation avec les Syriens. Ses combattants en tiendront-ils compte ou le considéreront-ils comme un traître à la cause ? Cela reste à voir. Je pense que cela dépend du respect qu’ils lui portent, de son charisme interne et des attentes qu’il a créées. Il est donc difficile de dire ce qu’il faudra pour qu’ils l’assassinent ou se retournent contre lui.

Du point de vue des djihadistes extrémistes, il semble qu’ils gagnent sur tous les fronts. Ils ont gagné en Afghanistan, maintenant ils ont gagné en Syrie, ils gagnent au Sahel, ils poussent au Pakistan et ailleurs. Il semble que tout aille dans leur sens, et si vous êtes une personne très religieuse, pourriez-vous même avoir ce genre de considération ? Ne serait-ce pas comme une mission divine que d’imposer un État islamique strict, quelles qu’en soient les conséquences ?

Bien sûr, je comprends exactement ce que vous dites. Il est raisonnable de supposer que l’Afghanistan – ou toute autre théocratie islamique prise d’assaut par les djihadistes sunnites – représente un type de modèle qu’ils cherchent à poursuivre en fin de compte. Cependant, je pense que l’erreur que nous commettons est de supposer que leur idéologie conduit nécessairement à une poursuite irrationnelle d’un objectif final qui peut être irrationnel. Cela dit, je reconnais que l’objectif final lui-même est en effet très irrationnel.

Cela mis à part, les djihadistes peuvent être rationnels dans la poursuite de ces objectifs. Si leur but est de réussir, et de réussir vraiment – pas seulement de déposer quelqu’un et d’avoir ensuite un État islamique dans le chaos, mais d’enraciner véritablement un modèle -, alors ils feront preuve de patience. Et pour y parvenir, il existe différents modèles : le modèle du Hezbollah, mais aussi celui des Frères musulmans.

En Égypte, les Frères musulmans ont gagné par la voie des urnes, mais ils ont été déposés assez rapidement pour que nous n’ayons pas vu la plénitude du modèle qu’ils cherchaient à imposer au fil du temps. Mais nous avons des modèles où ils ont gagné par la voie des urnes, et Erdogan, dans une certaine mesure, est un Frère musulman discret. Il a gagné élection après élection, mais il a aussi terni la réputation de son pays. Il a gagné élection après élection, mais il a aussi bricolé le système au point qu’il ne peut plus être destitué. Il a mis en place des règles du jeu très strictes.

Donc, si je suis Jolani et que mon objectif final est un émirat islamique et que je m’assois avec ces types, je comprends. Mon objectif ne sera pas atteint du jour au lendemain. La Syrie est une société qui avait, dans une certaine mesure, la laïcité comme idéologie d’État. On peut dire que le baasisme est antireligieux. C’est une société où les femmes ne se couvrent pas, où l’alcool est autorisé, etc. Le pays est donc habitué à certaines normes qui ne changent pas facilement, même si le sunnite syrien moyen respecte l’islam et les traditions à sa manière. Par conséquent, si les HTS tentent de poursuivre immédiatement leur objectif final d’un État islamique, cela ne fonctionnera pas, car ils sont trop faibles à l’heure actuelle.

Ils pourraient subir un retour de bâton et perdre tout ce qu’ils ont accompli. Je ne pense donc pas que le djihadisme soit synonyme d’irrationalité. Nous supposons que ces personnes poursuivront leurs objectifs de manière irrationnelle plutôt que pragmatique parce qu’il s’agit d’extrémistes djihadistes visant à établir une théocratie brutale, mais ce n’est pas nécessairement le cas.

Qu’en est-il d’une organisation comme l’État islamique ? Était-elle rationnelle lorsqu’elle ravageait la région à l’époque ?

Non, donc je dirais que l’ISIS est le modèle irrationnel – le modèle qui a poursuivi ses objectifs irrationnels avec des moyens tout aussi irrationnels. Donc, si je suis Jolani et que je regarde l’histoire pour trouver un modèle qui maximise mes chances de réussite, je ne veux pas suivre le modèle de l’État islamique dès le départ. C’est peut-être mon objectif final, mais je ne veux pas commencer par-là, car je dois consolider mon emprise sur la société. Je dois habituer les gens à un certain mode de vie auquel ils ne sont pas habitués. Si je viens leur imposer cela, ce sera très probablement un échec.

Je voudrais à nouveau évoquer le modèle du Hezbollah. L’objectif final du Hezbollah est sans aucun doute d’imposer au Liban une théocratie de type islamique basée sur le modèle iranien. C’est leur objectif final, mais ils savent que cela doit se faire progressivement. Donc, pour l’instant, il y a de l’alcool, des femmes en bikini sur les plages, elles vont à l’université, etc.

Mais ils n’imposent pas, ils n’interdisent pas un certain style de vie pour l’instant, parce que leur objectif est de maximiser le lien de la société avec le parti, de maximiser son lien avec l’organisation. Ils créent alors ces « mécanismes de tapis roulant », comme j’aime à les appeler. Il y a les scouts, les écoles, les chaînes de télévision qui propagent leurs idées, les systèmes d’éducation religieuse. En bref, différentes choses qui fournissent aux gens toutes les nécessités d’une vie civile, mais ils endoctrinent lentement mais sûrement leur base de soutien, peut-être sur plusieurs générations, avec leur idéologie religieuse.

Les écoles gérées par le Hezbollah sont excellentes par rapport au système scolaire de la plupart des pays du Liban. Et si vous êtes un chiite pauvre, ils vous aideront à y envoyer votre enfant. Et peut-être que vous êtes un chiite qui est un Libanais typique – peut-être que vous priez parfois, peut-être que vous ne buvez pas d’alcool, mais vous n’êtes pas religieux au sens propre du terme. Vous ne cherchez pas à vivre pleinement le style de vie religieux.

Mais vous envoyez votre fils dans cette école parce qu’ils l’ont subventionnée pour vous, et il en sortira peut-être 5 % plus idéologique et plus engagé religieusement que vous. Super, c’est un succès pour eux. Et le Hezbollah travaillera à nouveau sur son fils pour le rendre encore plus religieux et conforme à ses préférences idéologiques. Je pense que c’est un modèle qui a plus de durabilité et de longévité.

Et encore, l’objectif final pourrait être barbare. Je ne nie pas que l’objectif final puisse être cauchemardesque. Je dis simplement que nous ne devrions pas supposer que parce que ces gens sont des djihadistes et des gens terribles, ils vont poursuivre leur objectif final d’une manière qui n’est pas intelligente. Et c’est en fait plus inquiétant pour moi, parce que cela donne aux Syriens un faux sentiment de sécurité, et à la communauté internationale un faux sentiment de sécurité.

Du point de vue des djihadistes, la prochaine étape logique pourrait être de s’implanter en Jordanie, ou peut-être en Égypte, pour propager leur révolution. Qu’en pensez-vous ?

Qui sait ? Je sais que les Jordaniens sont inquiets. Je ne sais pas si cela se produira dans l’immédiat. Mais la Jordanie est certainement plus vulnérable à une telle évolution. L’Égypte, en revanche, présente une dynamique intéressante. En effet, les Frères musulmans ont gagné sur le plan social et sociétal en Égypte. Mais même si leur mentalité a gagné, ils ont perdu en tant que marque. Je pense que l’Égyptien moyen réagit ‘hui avec dégoût si l’on parle des Frères musulmans.

Mais si l’on parle de loi islamique ou de tradition islamique en matière de droit, ils seront peut-être plus enclins à l’accepter. Et je pense qu’al-Sisi joue un jeu intéressant pour équilibrer tout cela. Il est lui-même un homme très religieux. Nous savons qu’il prie fréquemment. Mais il est également à la tête d’un État policier beaucoup plus cohérent et d’un appareil de sécurité plus puissant qu’en Jordanie.

En Jordanie, la légitimité du roi dépend de certains éléments qui peuvent être facilement ébranlés, et les forces islamistes du pays sont déjà puissantes. Je pense que le Front d’action islamique est aujourd’hui le plus grand parti au Parlement. Le dégoût qu’inspire à la société égyptienne la marque des Frères musulmans n’est donc pas le même en Jordanie.

La Jordanie est également une société beaucoup plus traditionnelle. Il suffit de regarder les crimes d’honneur. Il ne s’agit pas d’un phénomène arabe ou musulman, mais d’un phénomène jordano-palestinien. C’est également le cas dans la société israélo-arabe. C’est donc très spécifique à cette société, à ses traditions et à sa culture.

La société jordanienne est donc très traditionaliste. Et c’est un peu trompeur, presque, parce que la monarchie est si modérée. La monarchie n’a pas non plus une emprise aussi forte sur la société jordanienne que l’armée, al-Sisi et l’appareil d’État en Égypte. Je ne pense pas qu’il soit possible de créer un tel État policier en Jordanie.

La situation est trop compliquée pour que le roi puisse sévir et tenter de transformer la Jordanie en un État policier à part entière, plutôt qu’en un État policier souple. Je pense qu’il pourrait perdre sa légitimité. Il pourrait finir par se fracturer. Il y a donc des éléments en Jordanie qui, à mon avis, la rendent plus vulnérable aux forces politiques islamistes, même si elle est proche de la Syrie.

La société jordienne dispose donc d’un terrain potentiellement plus fertile pour la propagation éventuelle d’une révolution islamiste. La monarchie ne peut pas réprimer ou fermer la société aussi bien que l’État égyptien. Il y a aussi la proximité de la Syrie. Avec le temps, cela pourrait être un problème, mais je ne pense pas que cela devienne un problème dans l’immédiat.

Je pense que Jolani a d’autres chats à fouetter en ce moment. Et s’il commence à bricoler avec la Jordanie, sa capacité à convaincre l’Occident qu’il s’est modéré et qu’il devrait lever les sanctions sera compromise. En outre, les États-Unis et la Grande-Bretagne considèrent actuellement la Jordanie comme un « pilier de stabilité » dans la région. Par conséquent, s’il commence à s’en prendre à la Jordanie, ils ne lèveront pas les sanctions, ils les renforceront.

Tout dépend donc de l’intelligence avec laquelle Jolani veut jouer le jeu. Mais cela ne signifie pas qu’il ne poursuivra pas cet objectif à terme. Il n’y a rien que ces groupes islamistes détestent plus que les monarchies arabes traditionnelles. Au Levant, les Hachémites jordaniens sont le dernier vestige de ce type de monarchie arabe traditionnelle détestée. Alors oui, idéologiquement, c’est ce qu’il viserait. Idéologiquement, il voudrait voir cette règle tomber.

Il s’agit simplement, encore une fois, de poursuivre cet objectif de manière pragmatique ou d’agir de manière irrationnelle. Oubliez même les États-Unis et le Royaume-Uni – les Israéliens ont intérêt à maintenir la monarchie hachémite. Et ce ne serait pas la première fois qu’une menace de la Syrie à l’encontre de la monarchie jordanienne donnerait lieu à des représailles potentielles de la part d’Israël. C’est ce qui s’est passé en septembre 1970, lorsque la Syrie a envoyé des forces de l’autre côté de la frontière pour soutenir la guérilla palestinienne contre la monarchie hachémite, et que les Israéliens étaient prêts à déployer leur armée de l’air pour protéger le roi Hussein.

Nous avons donc déjà constaté que les Israéliens ne prennent aucun risque en ce qui concerne al-Jolani – ils ont détruit ce qui restait de l’armée syrienne en l’espace d’une semaine, afin d’éviter que ces armes ne tombent entre les mains d’al-Jolani. La zone tampon qu’ils ont occupée et le plateau du Golan sont des mesures préventives, car les Israéliens n’ont pas confiance en ce type. S’il s’en prend à la monarchie, la monarchie hachémite, je pense que les Israéliens interviendront tout autant pour s’assurer que la monarchie ne tombe pas.

Encore une fois, s’il n’est pas stupide, il le sait. Et quelque chose me dit qu’il n’est pas stupide. Mais encore une fois, cela ne signifie pas qu’il est modéré. Cela signifie qu’il sait comment poursuivre ses objectifs de manière plus intelligente.

Beaucoup de gens disent qu’il faut du temps pour découvrir les véritables intentions de Jolani. Combien de temps pensez-vous qu’il faille pour voir qui il est et quelles sont ses véritables intentions ?

Je pense que nous devons d’abord poser quelques jalons. Commençons par la transition de mars. Voyons comment ils la gèrent. Autoriseront-ils un discours politique libre et la dissidence dans le pays ? Commenceront-ils réellement à préparer les élections – et autoriseront-ils des élections libres et équitables ? Tout d’abord, voyons comment se déroule la période précédant les élections. Permettront-ils à la société syrienne de s’exprimer librement ? Autoriseront-ils les différents courants politiques ? Cela semble prendre des années, mais nous devons être patients et ne pas sauter sur la moindre miette de modération.

Dans ce contexte, nous parlons d’une société qui n’a pratiquement aucune expérience en matière d’organisation politique. Toute forme d’activisme politique a été brutalement écrasée, non seulement sous Bachar al-Assad, mais aussi depuis son père Hafez al-Assad. Il y a eu une petite ouverture au début des années 2000, puis dès que Bachar a vu que les gens le critiquaient trop, il a refermé la porte

Il s’agit donc d’une société qui a très peu d’expérience en matière d’organisation politique. Par conséquent, si M. Jolani se soucie réellement du peuple syrien, comme il l’a indiqué, le laissera-t-il compenser cette situation ? Permettra-t-il à ses opposants politiques de se développer de manière qu’ils puissent réellement rivaliser ?

En ce qui le concerne, il a au moins 10 ans d’expérience dans l’organisation politique et il est très populaire. Il a donc déjà beaucoup d’atouts en main, et il a indiqué qu’il essayait d’être juste. Voyons donc : procède-t-il de manière équitable d’ici au mois de mars et, après la transition, en s’occupant de la rédaction de la constitution ou des élections ?

En outre, le jour des élections, il est important de voir comment elles se déroulent. Sont-elles libres et équitables et dépourvues de fraude électorale ? Et s’il perd, ce qui est possible, sera-t-il prêt à se retirer ? Sera-t-il prêt à accepter sa perte de pouvoir s’il n’obtient pas le nombre de voix nécessaire ? Il s’agit donc d’un critère important pour disséquer ses véritables intentions, mais ce n’est pas le seul.

Car s’il remporte une victoire équitable, ce qui est possible, et devient président ou tout autre poste pour lequel il sera élu, nous verrons comment il gouverne. Continuons à observer son règne et la manière dont il traitera l’opposition politique au cours des années à venir. Dans ce scénario, il pourrait être judicieux de maintenir les sanctions à l’encontre de HTS.

Notre expérience de cet homme, après au moins dix ans d’expérience, est qu’il est un djihadiste, qui a commencé dans ISIS, puis est passé à Al-Qaïda, avant de se dissocier tactiquement d’Al-Qaïda. Ainsi, tout ce que nous savons de cet homme, c’est qu’il a ses racines dans des groupes terroristes. Alors, ayons au moins la moitié de ce temps – la moitié du temps qu’il a passé à être un terroriste – maintenant qu’il est au pouvoir, maintenant qu’il gouverne.

Je pense que nous avons besoin d’au moins autant de temps pour voir un modèle de comportement cohérent qui lui permette d’agir de manière modérée. Voyons au moins comment il gouverne pendant un mandat avant de nous faire une opinion. Des rumeurs circulent également sur le fait qu’il ne se présentera pas à l’élection présidentielle. Je ne sais pas, mais attendons de voir.

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L’Italie, Musk et l’échec de l’Europe : un nouveau triomphe pour l’hégémonie américaine

L’Italie, Musk et l’échec de l’Europe : un nouveau triomphe pour l’hégémonie américaine

par Giuseppe GAGLIANO* – CF2R – NOTE D’ACTUALITÉ N°171 / janvier 2025

*Président du Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (Côme, Italie). Membre du comité des conseillers scientifiques internationaux du CF2R.

Les négociations annoncées, à hauteur de 1,5 milliard d’euros, entre le gouvernement italien et SpaceX pour des services de communication satellitaire, bien qu’encore non officialisées, mettent en lumière une question stratégique cruciale : l’échec de l’Europe à bâtir une réelle autonomie technologique et défensive. Une fois de plus, la faiblesse des projets européens ouvre la voie à l’hégémonie américaine, incarnée ici par l’influence d’Elon Musk et de sa société SpaceX, qui renforce sa présence dans des secteurs stratégiques de la sécurité globale.

Le vide européen et la victoire de Starlink

La présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni, a tenté de minimiser la portée de cette nouvelle, parlant d’une « enquête en cours » et soulignant qu’il n’existe actuellement aucune alternative publique capable de rivaliser avec la technologie offerte par Starlink. Cependant, cette reconnaissance souligne une vérité amère : le projet européen de communications satellitaires sécurisées, IRIS², ainsi que l’initiative parallèle GovSatCom, peinent à rattraper une concurrence déjà gagnée par les Américains. Divisée dans ses intérêts et ralentie dans son développement, l’Union européenne a laissé un vide que les États-Unis ont rapidement comblé.

Les systèmes Starlink, déjà opérationnels, offrent des services avancés capables de répondre aux besoins de communications cryptées pour les gouvernements, les forces armées et la gestion des crises. L’Europe, avec un GovSatCom prévu pour 2025 et un IRIS² attendu pour 2031, risque d’arriver bien trop tard, laissant ses États membres dépendants d’un acteur privé américain.

L’intérêt de SpaceX n’est pas seulement commercial, mais profondément stratégique. Fournir des communications sécurisées aux gouvernements et aux forces armées signifie un accès direct à des infrastructures critiques et à des informations sensibles, renforçant ainsi l’influence américaine sur des alliés européens comme l’Italie. Elon Musk, à travers Starlink, incarne le visage moderne du pouvoir technologique américain, qui s’impose dans des secteurs vitaux pour la sécurité et l’autonomie stratégique.

La dépendance européenne vis-à-vis de SpaceX ne représente pas seulement une défaite industrielle, mais aussi une déclaration d’échec géopolitique. Tandis que le gouvernement italien considère l’adoption des systèmes Starlink comme une nécessité, cette décision met en évidence l’incapacité de l’Europe à réagir promptement face aux défis de la compétition mondiale.

Pour l’Italie, ce contrat avec SpaceX semble offrir une solution immédiate à un problème réel : l’absence d’infrastructures satellitaires autonomes et opérationnelles. Cependant, cette décision à court terme comporte des risques stratégiques sur le long terme. Confier des communications gouvernementales, militaires et diplomatiques à un acteur privé étranger, c’est céder une part de sa souveraineté technologique et opérationnelle.

Une Europe spectatrice et impuissante

Le contexte européen, fragmenté et dominé par des rivalités nationales, n’offre pas d’alternatives immédiates. Les initiatives communes, comme IRIS², sont ralenties par des complexités bureaucratiques et des tensions entre entreprises des principaux pays membres, notamment la France et l’Allemagne. Pourtant, s’appuyer sur SpaceX ne fait qu’aggraver cette dépendance, affaiblissant davantage les ambitions européennes.

Ce cas n’est pas isolé, mais reflète un paradigme. De la technologie à la défense, en passant par l’énergie, l’Europe continue de jouer un rôle secondaire sur la scène mondiale, laissant aux États-Unis le leadership. La création d’un système de communication satellitaire commun, comme GovSatCom ou IRIS², a été entravée par un manque de vision et de coordination. Chaque retard a permis aux États-Unis de consolider leur domination.

L’influence de Musk, renforcée par sa proximité avec le gouvernement américain, illustre une stratégie où les entreprises privées deviennent des extensions de la politique étrangère des États-Unis. SpaceX, dans ce cadre, agit comme un levier stratégique, pénétrant les marchés européens et s’assurant une présence clé dans des secteurs stratégiques.

Le potentiel accord entre l’Italie et SpaceX sera probablement perçu comme une victoire pour l’hégémonie américaine et une défaite pour l’Europe. Pour le Japon, qui s’appuie sur ses propres technologies, ou pour la Chine, qui développe ses constellations satellitaires, cette dépendance serait impensable. Mais pour l’Europe, incapable d’agir en tant que bloc uni et cohérent, cela devient la norme.

La question qui reste ouverte est de savoir si l’Italie et ses partenaires européens seront capables de tirer des leçons de cette situation et d’accélérer le développement de leurs propres capacités. Dans le cas contraire, l’avenir de l’autonomie stratégique européenne pourrait être déjà compromis, laissant le continent relégué au rôle de spectateur dans un jeu mondial dominé par les États-Unis.

L’ Ukraine et la GRH de guerre par Michel Goya

L’ Ukraine et la GRH de guerre

par Michel Goya – La Voix de l’épée – publié le  15 janvier 2025

https://lavoiedelepee.blogspot.com/


Les nations anticipent rarement avoir à mener des guerres longues et s’obligent donc, le plus souvent, à improviser la manière de gérer les hommes qui la font. La réussite de cette gestion des ressources humaines « de guerre » conditionne ensuite largement celle des forces armées sur le front. Une des infortunes de l’Ukraine est qu’elle n’a pas réussi à dépasser les dysfonctionnements de son État pour instaurer une GRH de guerre aussi efficace qu’elle aurait dû et pu être. Il est désormais bien tard, mais tout n’est pas perdu pour autant, à condition de prendre des mesures fortes.

Maintenir le capital humain dans le chaos

Le but premier de la GRH de guerre est de maintenir le capital humain des grandes unités sur le front. Il ne s’agit pas simplement de remplacer « homme pour homme » toutes les pertes, mais uniquement celles qui sont définitives : tués, prisonniers, disparus et blessés graves. Pour le reste, plus de la moitié des absents des unités sont des blessés légers, qui sont normalement destinés à revenir dans les rangs, en permissions ou en formation si la situation le permet, ou enfin des déserteurs de plus ou moins longue durée. Les unités sur le front, comme les brigades ukrainiennes, sont donc déjà systématiquement en sous-effectif par rapport à leur structure réglementaire, censée représenter l’organisation tactique optimale. On peut imaginer, comme dans certaines armées du passé, faire appel à un pool d’ « intérimaires » pour combler, au moins temporairement, ces trous. Cependant, outre que c’est un exercice très délicat sous le feu, les unités ukrainiennes n’ont pas le luxe de ce surplus.

Une fois que l’on a une idée des besoins humains, il faut ensuite s’efforcer d’envoyer les bons individus au bon endroit, et donc associer des compétences à des postes, avec cette difficulté supplémentaire que les postes peuvent aussi changer au cours d’une guerre longue. De nouvelles spécialités peuvent émerger, comme l’emploi des drones, qui nécessitent de plus en plus de personnel. D’autres peuvent au contraire décliner, car devenues moins utiles ou simplement parce qu’à effectifs constants ou croissants faiblement, on ne peut satisfaire tout le monde. On assiste donc le plus souvent à une bataille des spécialités pour obtenir la meilleure part possible d’une ressource humaine presque toujours insuffisante à toutes les satisfaire en volume et en qualité.

Il s’agit de mettre en place ensuite une structure de recrutement et de formation à l’arrière capable de satisfaire ces besoins humains changeants et cette structure elle-même a besoin de ressources matérielles, des camps et des équipements d’instruction, et surtout humaines, des cadres en particulier. Cette structure arrière entre donc elle-même dans l’équation complexe de l’allocation des ressources humaines en compétition avec toutes les autres. Elle s’efforce ensuite de « produire » des soldats au cours de formations plus ou moins longues, avec cette contradiction permanente entre l’urgence et la qualité, et dans le cas ukrainien avec la menace permanente de frappes aériennes dès qu’une concentration d’hommes peut être repérée par l’ennemi. Par principe ces formations arrière se trouvent presque toujours en décalage avec les évolutions très rapides sur le front et nécessitent des formations complémentaires assurées par les grandes unités réceptrices. On s’efforce alors de transformer des bleus en individus capables d’assurer un nouveau métier dans les dangers du front. L’affaire est donc extrêmement complexe et d’autant plus délicate que l’on traite là non seulement de métiers et de compétences mais aussi de la vie et de la mort. Elle nécessite donc un réseau particulier permettant d’ajuster le moins mal possible la demande du front et l’offre de l’arrière. La forme idéale que doit prendre ce réseau est bien connue depuis la Première Guerre mondiale et disons-le tout de suite, l’armée ukrainienne en est très éloignée.

La meilleure manière de gérer ce désordre obligatoire est de disposer d’état-major intermédiaires entre les unités engagées directement sur le front et l’état-major général ou le ministère à l’arrière, et qui servent de relais et de transformateurs. Ces états-majors, de division ou de corps d’armée dans le cas ukrainien, doivent gérer simultanément les opérations des brigades qu’elles commandent et en même temps s’efforcer d’assurer leurs besoins dans tous les domaines. Ces états-majors permanents connaissent les unités qu’ils commandent, d’autant plus que les officiers qui les arment en sont issus ou y sont affectés. Ils connaissent donc leurs besoins et sont capables de les traduire à l’arrière, dans leur province d’affectation, en recrutements et formations les plus adaptés possibles, car c’est aussi leur intérêt à l’avant d’avoir des brigades efficaces. Rien de tel en Ukraine, où la plupart des brigades sont commandées par des états-majors ad hoc, dont les officiers, tournants pour quelques mois, ne connaissent rien des unités qu’ils commandent et sont surtout là pour éviter les problèmes. Le soutien, et notamment la GRH, leur échappe complètement, étant géré par l’administration centrale et les provinces. Circonstance très aggravante : dans ce système encore très soviétique, où l’aveu d’une erreur, d’une faiblesse ou d’un échec est synonyme de sanction, l’information remontant la hiérarchie est très souvent fausse, ce qui est source à la fois de nombreux problèmes opérationnels et d’un accroissement du désordre dans la gestion. La confiance n’excluant pas le contrôle, l’armée française de la Première Guerre mondiale doublait le processus normal de comptes rendus du bas en haut par un service de contrôle du haut en bas assuré par des inspecteurs généraux ou de spécialités et des officiers de liaison du Grand Quartier Général. Ce n’est pas le cas en Ukraine.

Au bout du compte, on demande aux provinces ukrainiennes de remplir des quotas de recrutement mais elles ne sont pas directement concernées par le résultat final de leur recrutement. Le problème premier consiste donc à réaliser ces chiffres avec des volontaires et des conscrits. Les premiers sont évidemment beaucoup plus rares qu’en 2022 et, au-delà d’un patriotisme toujours évident, sont largement motivés par la possibilité de choisir leur affectation, qui se trouve rarement en première ligne dans l’infanterie. Le choix des seconds ressemble beaucoup à la conscription par tirage au sort du XIXe siècle, où on ne retient finalement que les « mauvais numéros », ceux qui ne peuvent pas payer. On envoie ensuite ces mauvais numéros dans les centres de formation de base plus ou moins actifs cette population de pauvres et de « vieux », puisqu’il s’agit aussi des conscrits en moyenne les plus âgés de l’histoire. Les plus qualifiés sont plutôt envoyés dans les armes les plus techniques, tandis que les moins qualifiés apprennent qu’ils vont rejoindre l’infanterie, là où l’on meurt ou où l’on se fait mutiler en masse. Comme la surveillance et la coercition sont assez faibles en Ukraine, on comprend qu’il puisse y avoir une certaine évaporation avant d’arriver dans les bataillons d’infanterie, qui restent ainsi toujours aussi désespérément usées et en sous-effectif et c’est bien le problème majeur.

La crise de l’infanterie ukrainienne

Le triple problème de l’infanterie ukrainienne, comme beaucoup d’autres infanteries dans l’histoire, est qu’elle est à la fois indispensable, négligée et mortelle. Indispensable, car ce sont les fantassins qui assurent la principale charge de la conquête, du contrôle et de la tenue du terrain. Négligée, car les fantassins sont souvent considérés comme les ouvriers non qualifiés du combat — grave erreur — et sont les derniers servis dans les programmes d’équipement ou les affectations de recrues. Mortelle enfin, car l’infanterie subit environ 70 % des pertes en Ukraine (comme dans pratiquement toutes les guerres modernes), ce qui rend l’apprentissage sur le terrain difficile et l’ensemble de la tâche peu attractif. Les unités d’infanterie ont ainsi beaucoup plus de mal à monter en gamme que les autres, car pour capitaliser sur l’expérience, il est préférable de survivre.

En résumé, l’armée sur le front demande surtout des fantassins il en manque peut-être 80 000 en Ukraine – alors que l’arrière a beaucoup de mal à lui en envoyer. Les besoins sont tels que les brigades d’infanterie – c’est-à-dire majoritairement composées de fantassins – doivent de plus en plus faire appel à des artilleurs, logisticiens ou autres non-fantassins pour combler les trous dans les compagnies d’infanterie. C’est une triple catastrophe. Cela affaiblit d’autant les indispensables unités d’appui et de soutien autour des bataillons d’infanterie, cela réduit la confiance des volontaires dans le système puisqu’ils peuvent être finalement affectés à des unités où ils ne veulent pas aller. Surtout, cela produit plus de pertes et de désertions que de bons fantassins.

Engagés sans compétences – et le combat d’infanterie en exige beaucoup – et sans confiance réciproque avec des camarades de combat qu’ils ne connaissent pas, les bleus envoyés directement sur le front meurent ou s’effondrent en moyenne quatre fois plus que les anciens placés dans les mêmes conditions. On avait compris cela dès le début de la Première Guerre mondiale, où les divisions d’infanterie françaises avaient mis en place des bataillons de dépôt à l’arrière pour apprendre progressivement le front aux nouveaux. Les Ukrainiens ont mis du temps à retrouver ces principes, ce qui témoigne encore du problème du retour d’expérience et de la circulation de l’information. Ils n’en ont pas encore forcément tiré toutes les conclusions. De leur propre initiative, plusieurs brigades ukrainiennes ont créé leur propre bataillon de formation, mais il faudrait que cela puisse se passer un peu plus en arrière, au niveau des divisions ou des corps d’armée permanents, qui comme on l’a vu n’existe pas à quelques exceptions près comme celui des marines.

L’Ukraine a par ailleurs fait le choix de former 14 brigades d’infanterie nouvelles plutôt que de renforcer les anciennes. Cela peut s’expliquer par la nécessité de disposer d’une réserve stratégique permettant de faire face aux problèmes urgents, de saisir éventuellement des opportunités offensives ou simplement de permettre aux brigades de se reposer et se reconstituer à l’arrière. Il s’agit aussi de constituer des produits d’appel à l’aide matérielle occidentale. C’est probablement une erreur. Le combat est avant tout une affaire de qualité humaine. Même si, sur le papier, les choses peuvent apparaître semblables, une brigade d’infanterie expérimentée l’emportera toujours sur une brigade constituée à partir de rien, avec, comme pour la brigade de Kiev, seulement 150 hommes sur les 2 400 déployés en France avec plus d’un an d’expérience militaire (et encore, pas d’expérience du combat). Quitte à créer de nouvelles brigades, autant les former à partir d’anciennes qui seront doublées et dont on tirera les cadres parmi les anciens.

Une bureaucratie qui doit se transformer en méritocratie

Sans grande surprise, on s’aperçoit historiquement qu’une armée encadrée par des gens qui ont fait leurs preuves au feu est plus efficace qu’une armée encadrée uniquement par des gens qui ont réussi un concours à vingt ans et ont ensuite monté mécaniquement la hiérarchie. Trois des plus belles armées de la France, sous le 1er Empire, en 1918 ou à la Libération, sont des armées qui ont fait exploser le carcan administratif pour faire place à des hommes souvent jeunes et toujours courageux, énergiques et excellents tacticiens. Cela ne s’est pas fait sans douleur, mais cela s’est avéré indispensable et très efficace.

L’armée ukrainienne comme l’armée russe ont commencé la guerre avec des cadres supérieurs issus du monde post-soviétique, avec son mélange de rigidité à l’ancienne et de clientélisme nouveau, la pire combinaison possible. Il a manqué ensuite à l’Ukraine un Joffre remplaçant 40 % des généraux en exercice en 1914 par des officiers ayant réussi l’épreuve initiale du feu. Il est vrai que Joffre, contrairement à Zaloujny ou Syrsky, avait une vue à peu près claire de ce qui se passait sur le front. Aussi l’Ukraine compte-t-elle toujours dans ses rangs des commandants de brigades ou de bataillons incompétents mais qui parviennent à le cacher. Il faut là encore imaginer les ravages opérationnels et psychologiques d’une telle situation à l’intérieur même des brigades mal commandées ou dans celles d’à côté, qui découvrent par exemple que leur voisine a soudainement décroché de sa position sur le front, parfois parce que les hommes en ont marre de leur chef imbécile et se sont repliés d’eux-mêmes. Une bonne partie des quelques succès russes d’importance est le résultat de tels problèmes de mensonges et de mauvaise coordination par des états-majors qui ont une connaissance très imparfaite de ce qui se passe réellement.

En résumé, il est probable que le principal gisement de ressources pour les Ukrainiens ne soit pas forcément l’aide occidentale, mais bien la gestion de leurs hommes et de leurs femmes sous l’uniforme. Quand on voit le courage de l’immense majorité des soldats ukrainiens et l’ingéniosité de certaines unités, on se plaît à imaginer ce que donnerait la même armée avec une structure de commandement bien organisée et transparente, mais aussi des décideurs politiques courageux capables de prendre des mesures impopulaires dans l’opinion et douloureuses dans l’administration. Le chantier est déjà engagé, mais l’inertie et les résistances sont telles que les progrès sont très lents alors que les hommes tombent et que les Russes pressent sur le front.

Ajoutons pour conclure qu’il serait bon aussi que les forces armées françaises et la nation dans son ensemble se posent quelques questions sur ce qui se passerait si nous étions placés devant la même situation.