Quel rapport à l’histoire, et notamment à Lénine, entretient Vladimir Poutine ? 100 ans après la mort du dictateur communiste, que reste-t-il de sa légende dans la Russie d’aujourd’hui ?
Vladimir Ilitch Oulianov, mieux connu sous le pseudonyme Lénine, pris vers 1900-1901, est décédé le 21 janvier 1924, à l’âge de 54 ans. Cent ans après sa disparition, son nom continue de susciter la controverse : père du totalitarisme soviétique et impitoyable dictateur pour les uns, il demeure pour les autres un penseur de premier plan et l’architecte d’un État, l’Union soviétique, qui a incarné durant la majeure partie du XXe siècle un contre-modèle face à l’Occident capitaliste. La polémique n’épargne pas la Russie, où le rapport au fondateur de l’URSS demeure pour le moins contrasté aussi bien dans la population qu’au sommet de l’État, Vladimir Poutine reprochant notamment à son lointain prédécesseur d’avoir « créé l’Ukraine ». Dans une riche biographie qui vient de paraître aux éditions Flammarion, l’historien Alexandre Sumpf (Université de Strasbourg) revient sur la vie tumultueuse de l’un des hommes les plus controversés de l’histoire récente. Nous vous en présentons ici quelques passages.
Beaucoup a été écrit par Lénine, sur Lénine, contre Lénine – et nombre de biographes se sont évertués à percer le mystère du personnage, à dévoiler les ressorts de sa psychologie, à se risquer dans le domaine de l’intime pour donner chair à cet homme qui, de l’avis même de ses adversaires, ne vivait que pour la révolution.
En France, le dernier opus en date, mijoté de longues années durant par l’un des plus virulents auteurs antisoviétiques (Stéphane Courtois), insiste sur la violence et le comportement pathologique du leader bolchevik. Il n’y a peut-être que Richard Pipes qui soit allé plus loin dans la haine de Lénine, faisant feu de tout bois pour affirmer qu’il était, en un sens, pire que Staline qui au moins n’était pas un intellectuel et surtout n’avait rien d’un révolutionnaire.
À l’opposé, si on ne trouve plus aujourd’hui d’idolâtres aveugles du Guide de la Révolution, il bénéficie toujours à gauche d’une fascinante mansuétude, due autant à sa stature de héros révolutionnaire vainqueur, et à la campagne de propagande permanente dont il a fait l’objet.
Chercher un juste milieu serait vain et il vaut mieux tenir compte dans l’analyse de l’amplitude des passions que Lénine a déchaînées de son vivant et depuis son décès.
Cet élargissement de la focale temporelle s’enrichira d’une attention plus fine à la société qui a vu naître ce phénomène mondial : écrire la vie de Lénine, c’est aussi raconter la Russie de la fin du tsarisme et des débuts de la période communiste, comprendre ce qu’est la province russe, la Sibérie, le Paris ou le Londres des exilés politiques, les prisons russes ou polonaises.
Enfin, il y a un avant et un après novembre 1917 : pas tant sur le plan de la conquête et de l’exercice du pouvoir – Lénine a toujours été un chef, en tout cas depuis l’exécution de son frère aîné en 1887 – que sur celui de son mode de vie. Après le transfert de la capitale à Moscou en mars 1918, pour la première fois depuis 1893, il ne déménage plus sans cesse, ne passe plus d’une ville et d’une cache à une autre, n’est plus poursuivi si ce n’est par les solliciteurs. Il n’est plus séparé de ses principaux collaborateurs et de sa famille. Il vit, enfin, une vie presque normale.
Y aurait-il encore des sources qui ont échappé à la traque menée par les historiens russes et occidentaux ? Sans doute pas, mais on peut et même on doit interroger la très ample documentation à la lumière d’approches renouvelées ces vingt dernières années : l’histoire sociale du politique, l’histoire de la propagande, l’histoire des émotions, l’histoire connectée, l’étude des sorties de guerre.
Mieux comprendre qui était Lénine et ce qu’il a continué à être quand il dirigeait la Russie rouge implique d’accorder une attention particulière aux interactions sociales et intellectuelles entre Lénine et ses lieutenants, à son errance et sa marginalité au sein du mouvement ouvrier européen qui sont à l’origine de sa violence politique, et à son engagement corporel dans l’acte d’écriture.
Il convient aussi de réévaluer le rôle attribué au cinéma dans le système de propagande soviétique, qui diffusait moins un propos abscons qu’une image-preuve, et de comparer les cultes de Lénine et Staline à l’écran – notamment en questionnant le cliché de l’ascétisme et de la simplicité léniniens. Il importe enfin de relire la fin de vie de Lénine (1922-1923) au prisme des émotions d’un homme souvent seul, isolé, qui a fini invalide […].
Ce livre offre le récit des 365 jours où l’exilé marginal Oulianov s’est transformé en Lénine, dictateur inébranlable ; il narre l’histoire d’un éternel révolté russe qui a fini par ébranler l’Europe et le monde ; et il décrypte la légende vivante d’Ilitch, le Guide d’une révolution mythifiée avant d’être momifiée.
[…]
Depuis qu’il a été appelé au pouvoir par le clan Eltsine, Vladimir Poutine a toujours pris soin de distinguer les (mauvais) bolcheviks, révolutionnaires démolisseurs, des (bons) communistes, continuateurs de la puissance grand-russe et bâtisseurs d’un État fort.
Le Russe Lénine, trop internationaliste pour être honnête, peut-être même agent allemand, a comploté sa dilution en inventant la confédération soviétique – alors que le Géorgien Staline, héritier des grands tsars et authentique patriote, a tout fait pour que le « grand frère » russe réaffirme sa domination. […]
C’est l’impensé de la reconstruction poutinienne de l’histoire nationale. Le pouvoir russe refuse d’accepter que les mouvements d’indépendance aient pu correspondre à un désir profond sinon de toute la population, du moins d’une avant-garde suffisamment active pour entraîner les peuples vers l’autodétermination.
Or, comme dirait l’autoproclamé historien, « c’est un fait historique » : l’État ukrainien est né le 10/23 juin 1917 lorsque la Rada centrale a publié son premier universal en langue ukrainienne, puis que cette assemblée élue a déclaré l’indépendance de la nation le 7/20 novembre 1917, a envoyé des émissaires à Brest-Litovsk en février 1918 avec leur propre agenda, puis a obtenu une délégation lors de la Conférence de la Paix de Paris en avril 1919 – contrairement à la Russie.
Lénine avait compris qu’on ne pouvait bloquer le processus d’indépendance et, conscient de l’erreur commise avec la Finlande en décembre 1917, il a décidé de le piloter en Ukraine au profit de la Russie soviétique. Loin d’avoir créé ex nihilo une Ukraine non russe, il a enterré pour des décennies l’État ukrainien défait par les armes. Poutine aurait dû le remercier et se référer à la politique d’unification par les armes d’un nouvel empire après la chute de celui des Romanov.
Alors, pourquoi tant de haine ? Lénine prône certes des valeurs internationalistes, mais le pire pour Poutine est l’interprétation des rapports sociaux en termes de classes – et non de peuples – antagonistes. Lénine permet de voir clair dans le jeu de Poutine. L’actuel maître du Kremlin masque son véritable intérêt – l’enrichissement et le pouvoir d’un clan – derrière un discours patriotique qu’on jugeait vide de contenu jusqu’à sa mise en application le 24 février 2022.
Alexeï Navalny, qui n’a rien d’un léniniste, ne dit pas autre chose. Plus encore que l’opposant emprisonné que Poutine refuse de nommer, Vladimir Ilitch Oulianov suscite une aversion totale : c’est un homme qui pense et fait la révolution, qui donne des leçons de tactique et de stratégie politique à quiconque projette de renverser un pouvoir en place. Jusqu’en cette fin d’hiver 2022, le pouvoir russe pratiquait une forme de guerre hybride contre Lénine, plus insidieuse et efficace qu’un bannissement retentissant. Ainsi, le choix du 22 avril 2020, 150e anniversaire de sa naissance, pour le vote de confirmation des modifications de la Constitution ne peut relever du hasard. Le jour où certains auraient pu célébrer l’ancien dirigeant et où il aurait à nouveau brillé sous le feu des projecteurs médiatiques, il fallait trouver un puissant contre-feu : quoi de mieux que le changement de jalons revenant pour certains aspects (place de la religion, définition de la famille) à l’époque impériale ?
De longue date, l’ensemble des médias à la botte du Kremlin caricature Lénine et la révolution, réduite au rang de conspiration de personnes ayant vécu une bonne partie de leur vie à l’étranger, pratiquant l’adultère et la concussion. Non, chers concitoyens, Lénine n’avait rien d’un génie, d’un philosophe du politique, d’un tacticien hors pair. C’était tout bonnement un traître russophobe, un bourreau athée et un syphilitique adultère. Homme du passé honni des nouveaux « temps des troubles » entre 1917 et 1921, il est aussi l’homme du passif coupable de la haine vouée à la Russie.
Comme l’a écrit Boris Souvarine dans le Figaro littéraire du 21 janvier 1939, à propos d’une restauration antérieure : « Les milliers de décrets que Lénine a signés, autant en emporte le vent. Les millions de volumes que Lénine n’aurait pas publiés, nul ne les prend au sérieux. Lénine est mort et embaumé, le léninisme est mort et enterré, les léninistes sont morts entr’assassinés et déshonorés. Un nouveau tsarisme s’installe à demeure, infiniment pire que l’ancien, lequel n’était pas totalitaire. Si Lénine, de son mausolée asiatique, pouvait contempler ce tableau qu’il n’a pas prévu, à coup sûr il ne serait pas fier. »
Nous sommes le 15 septembre 1918. Alors que des combats gigantesques font rage sur le front de France, un coup de tonnerre survient en Macédoine. Après des mois de préparation et en profitant du départ de la plupart des forces allemandes du secteur, le général Franchet d’Espèrey commandant les Armées alliées en Orient lance soldats serbes et français à l’assaut du plateau de Kravitza, du mont Dobropolje et du système fortifié du Sokol. L’opération, qui était très contestée à Paris comme détournant des ressources précieuses du front principal français, est un grand succès immédiatement et brillamment exploité. Il constitue même une des très rares percées de toute la guerre. L’armée bulgare s’effondre et Sofia demande à arrêter les combats le 29 septembre. L’offensive ne s’arrête plus et en liaison avec d’autres opérations menace dangereusement les empires ottoman et austro-hongrois.
De l’intérêt ou non des opérations périphériques
Lorsqu’au cours d’un conflit le front principal se trouve bloqué, les regards des états-majors se portent toujours vers d’autres possibilités de faire mal à l’ennemi. Le front principal en Ukraine se trouve depuis un peu plus de deux ans maintenant le long d’une ligne longeant les limites des deux provinces de Louhansk et Donetsk puis coupant en deux celle de Zaporijjia jusqu’au fleuve Dniepr. C’est là qu’au moins 70 % des forces des deux adversaires sont concentrées afin de procéder à des opérations de conquête ou de défense de territoire. Depuis mi-novembre 2022, les évolutions sur ce front principal sont minimes de part et d’autre, se chiffrant à quelques km2 gagnés ou perdus chaque jour pour s’emparer de villages ou au mieux de petites villes comme Bakhmut. C’est bien là que se décidera sans doute le sort de la guerre, mais les choses s’y passent lentement. Les choses s’y passent également plutôt en faveur des Russes qui grignotent inexorablement le terrain et s’approchent dangereusement d’objectifs importants, comme Pokrovsk dans le Donbass.
Dans ces conditions il n’y a guère d’autres solutions pour les Ukrainiens que de défendre le front principal en essayant de faire payer le plus cher possible chaque km2 perdu et de prendre l’initiative partout où c’est possible afin de faire mal à l’ennemi. À force d’user ainsi les forces de l’adversaire tout en renforçant les siennes avec l’aide des pays alliés, il sera alors possible de reprendre plus tard l’ascendant sur l’ennemi sur le front principal.
N’importe quel officier d’état-major exposant à Moscou les possibilités ukrainiennes dans ce sens a dû forcément expliquer à ses chefs que les Ukrainiens pouvaient mener de nombreuses opérations périphériques au front principal : frappes de drones ou de missiles sur le territoire russe, raids et frappes le long des côtes de la mer Noire, raids de franchissement au-delà du Dniepr, attaque de la Transnistrie en accord avec le gouvernement moldave ou encore attaques dans les provinces limitrophes de Belgorod, Koursk et Briansk. Notons que le même officier aura présenté également les possibilités russes en la matière, depuis les frappes de missiles et drones dans la profondeur, jusqu’à des attaques depuis la Biélorussie ou depuis les provinces limitrophes de l’Ukraine, comme par exemple l’attaque limitée dans la province de Kharkiv en mai dernier.
Aussi lorsqu’une de ces attaques ukrainiennes est survenue le 6 août 2024 dans la province de Koursk, cela n’aurait dû surprendre personne. Et pourtant elle a provoqué de profondes secousses en Russie, où on imaginait sans doute cela impossible non pas militairement, mais politiquement. Attaquer le sol de la Russie d’Europe pour la première fois depuis la Grande Guerre patriotique ne pouvait semble-t-il qu’engendrer une escalade importante, c’est-à-dire une déclaration de guerre, la loi martiale, l’envoi des conscrits à la bataille et la mobilisation générale sans même parler de l’emploi éventuel de l’arme nucléaire. C’est la raison pour laquelle les alliés occidentaux avec les États-Unis en tête interdisaient aux Ukrainiens de tenter quoi que ce soit qui puisse provoquer cela. Ils interdisaient même d’employer les armes fournies pour frapper le sol russe. On se souvient que lors des raids minuscules menés en au printemps 2023 dans la province de Belgorod par des miliciens russes combattant aux côtés des Ukrainiens, certains s’étaient émus que ces hommes utilisent des fusils d’origine belge ou des véhicules légers américains. N’allait-on pas être considérés de « cobelligérants » et cela n’allait-il pas provoquer une colère terrible de Vladimir Poutine ?
Cette fois les Ukrainiens ont placé tout le monde devant le fait accompli en lançant un groupement mobile opérationnel dans la province russe de Koursk, avec de l’équipement occidental et en faisant fi de toutes les frileuses restrictions d’emploi des armes, dont on ne voit pas bien par ailleurs comment elles pourraient encore tenir désormais. Les Alliés pris de court ont été obligés de suivre, surtout lorsqu’ils se sont aperçus qu’au contraire de l’escalade attendue, Vladimir Poutine minimisait l’évènement et la traitait comme une grande affaire de police. Poutine a clairement plus peur de la mobilisation guerrière de son pays que les Occidentaux, essentiellement pour des raisons de politique intérieure.
Assaut, percée et exploitation
L’audace ukrainienne et l’habileté technique à masquer les préparatifs d’une offensive importante ont totalement surpris les Russes qui n’avaient guère préparé la défense de leur propre territoire…ou ont parfois décidé d’utiliser l’argent prévu à cet effet à des fins plus personnelles. Il semble qu’outre le classique camouflage-dispersion des forces, les Ukrainiens soient parvenus à aveugler tout ou partie les capteurs russes, par drones, guerre électronique et infiltration d’équipes de rangers dont c’est peut-être le premier emploi opérationnel. Le retour de l’infanterie légère et furtive, logique dans un champ de bataille jugée transparent, est à souligner une nouvelle fois.
Le 6 août, le groupe mobile opérationnel (GMO) ukrainien perce la frontière en six endroits avec semble-t-il autant de bataillons interarmes. Les faibles défenses des gardes-frontières sont rapidement débordées, près de 300 hommes, des conscrits pour l’essentiel, sont capturés. Pendant ce temps, les équipes de rangers et de forces spéciales s’infiltrent plusieurs dizaines de kilomètres en avant des forces mécanisées afin de renseigner sur le terrain et l’ennemi, de semer la confusion et de tendre des embuscades, directement ou en liaison avec l’artillerie à longue portée. Les bataillons mécanisés eux-mêmes engagent des sections interarmes de reconnaissance en avant. L’ensemble est survolé par les drones, qui font office d’aviation légère de reconnaissance et d’appui, et suivi de quelques batteries de mortiers (point faible ukrainien) pour l’appui au plus près et évolue sous bulle de protection antiaérienne et d’appui d’artillerie des bataillons de brigade et de brigades autonomes restées en Ukraine. Il n’est pas exclu qu’une patrouille d’avions F-16 soit également engagée en défense du ciel depuis la région de Soumy. Des frappes d’interdiction en profondeur sont planifiées pour encager autant que possible la zone d’opérations, comme celle, très destructrice, réalisée sur la base aérienne de Lipetsk le 9 août. Cette phase initiale témoigne déjà de la bonne maitrise ukrainienne des opérations mobiles complexes. Les Ukrainiens restent visiblement supérieurs aux Russes dans le combat de manœuvre, et ont donc tout intérêt à le privilégier.
Opérationnellement, la Russie réagit logiquement en ordonnant aux quelques forces encore sur place de tenir fermement toutes les localités et en envoyant sur place les forces aériennes et toutes les troupes en armes disponibles afin de freiner les forces ukrainiennes. Les forces aériennes russes, toujours très dépendantes des ordres d’un commandement au sol alors dans la confusion, ne savent pas très bien où frapper. On parle d’au moins un hélicoptère perdu par la percussion d’un drone, sans doute une première très intéressante. On signale l’emploi de missiles Iskander sur les forces de reconnaissance ukrainiennes, ce qui revient à chasser des moustiques au marteau et témoigne un peu de la fébrilité qui règne alors au sein du commandement russe.
Les bataillons interarmes ukrainiens progressent au rythme rapide de 3 à 4 kilomètres par jour, freinées principalement par la résistance dans les localités en proportion du volume de celles-ci. A l’ouest de la poche, c’est la petite ville de Soudja qui nécessite plusieurs jours de combat pour être prise ; à l’est, les russes utilisent Korvenovo comme point d’ancrage. Les Ukrainiens sont visiblement en offensive divagante, sans objectif précis mais en progressant partout où c’est possible d’où la forme de main que prend la carte de la zone d’action ukrainienne, qui n’est pas encore une zone contrôlée au regard de la densité des forces engagées. A J+6, on compte une trentaine de compagnies de manœuvre mécanisées ou de reconnaissance pour plus de 900 km2, soit une trentaine de km2 par unité, ce qui est considérable. Bien sûr, ces unités élémentaires regroupées par trois, quatre ou cinq dans des bataillons interarmes, ne sont pas réparties sur tout le secteur mais concentrées sur les trois faces de la poche avec un effort particulier à l’Est face à la province de Belgorod sans doute pour faire face au plus gros des forces russes, le 277e régiment d’infanterie déjà sur place et la 810e brigade d’infanterie navale envoyée en urgence. De ce côté, la ville de Soudja est finalement prise, et un bataillon de la 22e brigade peut progresser sur la route R200 en direction très lointaine de Koursk et un bataillon de la 92e longe la frontière à l’Est en direction encore plus lointaine de Belgorod. A l’ouest de la poche, les Russes s’accrochent à Korenovo où ils engagent leurs renforts face à la 82e brigade ukrainienne. La situation est plus fluide au nord de la poche avec la 80e brigade ukrainienne en pointe en direction, également lointaine, de Lgov, qui est fortifiée. La 80e brigade fait de plus en plus face aux unités de la 98e division aéroportée russe.
Au bout d’une semaine de combat, la défense russe se densifie progressivement, avec déjà 7 brigades ou régiments signalés, alors que les brigades ukrainiennes s’éloignent de plus en plus de leurs appuis et soutiens. Il leur sera possible de progresser quelques jours, sans imaginer pouvoir atteindre des objectifs stratégiques comme la ville de Koursk, son aérodrome et sa centrale nucléaire. La ligne de contact est destinée mécaniquement à se cristalliser en ligne de front. On ne sait pas encore qu’elle est la décision prévue par les Ukrainiens à ce moment-là entre repli derrière la frontière, et l’opération Triangle blanc aura été un grand raid de cosaques, résistance mobile sur tous les points de contact avec le risque d’être finalement refoulé par la force et avec pertes ou enfin installation sur la ligne la plus défendable possible en territoire russe afin de conserver malgré tout un gage de territoire et de créer un nouveau front fixant un grande nombre d’unités russes dans une région qui en était dépourvue. On verra alors seulement si cette opération, pour l’instant un succès opérationnel très clair pour les Ukrainiens, produira des effets stratégiques importants. En clair, on verra si cette opération périphérique valait le coup alors que les choses deviennent critiques sur le front principal.
En janvier 2023, le ministère israélien de la Défense confirma son intention de se procurer 25 chasseurs-bombardiers F-35I supplémentaires ainsi que 25 avions de combat F-15EX « Eagle II » [désignés F-15IA Ra’am II dans la nomenclature israélienne]. Il était aussi question de porter 25 anciens F-15I à ce nouveau standard.
Seulement, après l’attaque terroriste lancée par le Hamas dans le sud d’Israël, le 7 octobre, des tensions sont apparues entre l’administration du président Joe Biden et le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahou, la première estimant que la riposte contre les groupes armés palestiniens de la bande de Gaza allait trop loin.
Ainsi, en mars, au Conseil de sécurité des Nations unies, les États-Unis permirent l’adoption d’une résolution exigeant un « cessez-le feu immédiat » à Gaza durant le mois de ramadan. Puis, quelques semaines plus tard, alors que Tsahal s’apprêtait à lancer une opération à Rafah, le président Biden exprima son désaccord en annonçant que la livraison de certaines munitions à Israël allait être suspendue.
Pour autant, il n’était pas question pour Washington de remettre en question les livraisons potentielles d’avions de combat à Israël. En avril, CNN et l’agence Reuters rapportèrent que le gouvernement américain était sur le point d’autoriser la vente de 50 F-15EX [ou F-15IA] et la modernisation de 25 F-15I pour un montant estimé à plus de 18 milliards de dollars. Mais avant de publier un avis pour obtenir l’aval du Congrès, l’administration Biden a d’abord voulu prendre la température auprès des élus les plus influents.
Quant à la demande israélienne concernant les 25 F-35I supplémentaires, elle n’avait pas besoin de faire l’objet d’une notification au Congrès. Aussi, un accord a été trouvé en juin dernier. D’une valeur d’environ 3 milliards de dollars, il doit être financé par le programme américain de financement militaire étranger [FMF] dédié à Israël, doté de 38 milliards pour la période 2019-28.
Finalement, le dossier des F-15EX/IA s’est débloqué le 13 août, avec la publication par la Defense Security Cooperation Agency [DSCA], chargée des exportations d’équipements militaires américains], d’un avis recommandant au Congrès d’accepter la vente de 50 appareils ainsi que celle de kits de modernisation à mi-vie pour 25 F-15I [désignés F-15I+].
« Les États-Unis sont attachés à la sécurité d’Israël et il est essentiel pour les intérêts nationaux américains de l’aider à développer et à maintenir une capacité d’autodéfense forte et opérationnelle. La vente proposée est conforme à ces objectifs », a justifié la DSCA dans son avis. « L’intégration des F-15IA au sein de l’aviation de combat israélienne améliorera son interopérabilité avec les systèmes américains et renforcera ses capacités pour faire face aux menaces ennemies actuelles et futures », a-t-elle ajouté.
Pour rappel, développé par Boeing, le F-15EX est doté de deux nouveaux moteurs F110-GE-129, de commandes de vol électriques, d’un radar à antenne active [AESA] APG-82(V)1, d’un capteur IRST, d’une suite de guerre électronique EPAWSS [Eagle Passive/Active Warning Survivability], d’un ordinateur de mission ADCP-II [Advanced Display Core Processor-II], d’un cockpit numérique, et d’une liaison de données lui permettant de communiquer avec le F-35.
Par ailleurs, la DSCA a également approuvé cinq autres ventes potentielles concernant Israël, à savoir 30 missiles air-air AIM-120C-8 AMRAAM [Advanced Medium-Range Air-to-Air Missile] pour 102,5 millions de dollars, près de 33’000 obus de 120 mm pour 774,1 millions de dollars, 50’000 obus de mortier M933A1 de 120 mm pour 61,1 millions de dollars et un nombre non précisé de véhicules tactiques de type M1148A1P2 pour 583,1 millions de dollars.
Le rôle joué par Alexeï Dioumine, ancien garde du corps du président russe, personnage clé de l’annexion de la Crimée en 2014, passionne les influents blogueurs militaires russes.
La rumeur a commencé de se répandre parmi les principaux blogueurs militaires russes dès lundi. Le colonel-général Alexeï Dioumine, originaire de Koursk et proche de Vladimir Poutine, dont il a été l’un des chefs de la sécurité, aurait été nommé «coordinateur de l’opération anti-terroriste» dans la région de Koursk, où l’armée ukrainienne a lancé une offensive il y a une semaine, contrôlant à ce jour plusieurs centaines de kilomètres carrés, dont la petite ville de Soudja. Nikolaï Ivanov, député de cet oblast à la Douma d’État, a confirmé cette nomination à la chaîne de télévision russe RTVI, attribuant au colonel-général la «tâche principale de vaincre les troupes d’invasion des forces armées ukrainiennes» dans cette région.
Le quotidien russe anglophone Moscow Times évoque une «confirmation apparente», alors qu’il n’y a pas eu d’annonce officielle du Kremlin et que les grands médias et agences russes ne mentionnent pas cette hypothèse. Tout a commencé lundi lors de la réunion organisée par Vladimir Poutine dans sa résidence de Novo-Ogariovo, près de Moscou, et retransmise à la télévision : le général Dioumine y est apparu en bonne place parmi les participants, assis à la gauche de Sergueï Choïgou, l’ancien ministre de la Défense nommé en mai secrétaire du Conseil de sécurité. Un temps pressenti par les médias russes pour prendre la place de Choïgou lors du remaniement de printemps, Alexeï Dioumine, qui était jusqu’alors gouverneur de l’oblast de Toula, a finalement été nommé secrétaire du Conseil d’État – organe consultatif directement rattaché au président russe – et assistant de Vladimir Poutine au sein de la puissante administration présidentielle.
«Tous les pouvoirs»
Dans la foulée de la réunion de lundi, les blogueurs militaires russes, particulièrement influents depuis le début de la guerre en Ukraine, ont commencé d’affirmer que Dioumine allait «coordonner» le front de Koursk. «Selon des sources internes, le président russe a déjà donné à son assistant “plusieurs instructions importantes” (…) Son rôle est de coordonner tous les départements qui opèrent désormais conjointement dans la région de Koursk et qui font tout pour en chasser l’ennemi», a annoncé en premier la chaîne Telegram anonyme «PolitSatirKa» qui fait partie du giron de ces puissants médias informels. Régulièrement citée par la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, elle, fait partie des réseaux pro-gouvernementaux sur Telegram, d’après le site d’investigation indépendant Agentstvo cité par le Moscow Times.
Ça a ensuite été au tour du journal en ligne progouvernemental Readovka, créé en 2011, de reprendre la nouvelle. «Dyumin s’est déjà rendu dans la zone frontalière», a même précisé le site. Rybar, le plus célèbre de ces «milbloggers», a poursuivi en affirmant que Dioumine était «doté de tous les pouvoirs pour résoudre la crise opérationnelle dans la région de Koursk». «C’est le signe que les forces de sécurité, seules, n’ont pas été en mesure de résoudre les problèmes de coordination (…) Sa nomination signifie que l’équipe de Poutine prend le contrôle total de la situation (…) Je me souviens que Dioumine était destiné au poste de ministre de la Défense. Eh bien, en fait, il a des pouvoirs beaucoup plus étendus», a-t-il commenté avec ce ton critique qu’il adopte souvent à l’égard de l’armée. «WarGonzo», un autre compte Telegram très suivi, a également évoqué cette nomination, tout en reconnaissant qu’il n’y avait pas de «données officielles».
Les messages de «Sladkov», un autre de ces «milbloggers», sèment en revanche le doute. Il a commencé par suivre le mouvement en écrivant pour sa part qu’Alexeï Dioumine avait été nommé «commandant de la direction nord de l’opération militaire spéciale» – dans le jargon militaire russe, zone correspondant de facto à la zone de combat de Koursk. Mais il a ensuite rectifié le tir en publiant mardi matin, toujours sur Telegram, une «explication» pour le moins énigmatique : «C’est intéressant, j’ai lu dans une agence gouvernementale respectée [cette] nomination d’Alexeï Dioumine. Maintenant, le message officiel a disparu et ils font référence à moi». Sauf que, comme le note le site d’investigation Agentstvo, aucune trace d’une dépêche – même supprimée – des agences TASS ou RIA n’a pu être retrouvée à ce stade.
Beaucoup de brouillard entoure donc la possible mais encore hypothétique nomination d’Alexeï Dioumine comme coordinateur des opérations à Koursk. Cette incertitude est d’ailleurs à l’image des combats qui se déroulent dans la région : l’étendue exacte des territoires contrôlés par Kiev est inconnue et les informations sur les combats en cours, parcellaires. «La situation apparaît toujours confuse», confie au Figaro une source militaire française, alors qu’il est encore difficile de tracer une ligne de front précise. «Si l’arrivée du général Dioumine se confirme, nous aurions un état-major interministériel en charge des opérations dans la région de Koursk, plutôt que relevant du seul ministère de la Défense. Ce serait un camouflet pour ce dernier», décrypte l’officier supérieur.
L’homme qui a sauvé Poutine d’un ours
Le nom de Dioumine n’est pas inconnu des Russes, loin de là. Le général de 51 ans est même régulièrement cité dans la longue et fluctuante liste des successeurs putatifs de Vladimir Poutine. Cet ancien officier du FSB a surtout fait partie du service de protection présidentielle et, à ce titre, aurait été l’un des plus proches gardes du corps du président russe, depuis son accession au pouvoir en 1999. «L’ancien garde du corps qui a sauvé Poutine d’un ours – et qui pourrait lui succéder», a même titré en mai dernier le Times en référence à une anecdote sans doute un brin romancée selon laquelle Dioumine aurait un jour protégé le président russe alors qu’un ours s’était approché de sa résidence…
Plus sérieusement, le colonel-général collectionne les postes stratégiques : en 2014, il était chef-adjoint du service de renseignement militaire russe, le GRU, et, à ce titre, aurait joué un rôle clé dans l’annexion de la Crimée. En 2015, il a été nommé vice-ministre de la Défense. Avant de se lancer en politique en étant largement élu gouverneur de Toula [région à 200 km au sud de Moscou, NDLR] en 2016. Avec le remaniement de mai 2024, il est retourné au plus près de Vladimir Poutine, au cœur de la puissante machine du Kremlin. À moins qu’il ne retrouve aujourd’hui et pour un temps la région de son enfance, Koursk ? La rumeur est persistante, mais s’écrit encore au conditionnel. «Cela me rappelle le mois d’août 1999, lorsque Poutine lui-même, inconnu du pays, avait été nommé premier ministre par Eltsine et chargé de repousser l’incursion tchétchène au Daghestan, construisant ainsi sa réputation de “garant de l’ordre et de la loi” sur la voie de la succession présidentielle», glisse sur X le chercheur Alex Yusupov, directeur du programme Russie au centre Friedrich-Ebert-Stiftung.
Guerre en Ukraine : à Koursk, des anciens véhicules blindés de l’armée française au combat
Les troupes ukrainiennes engagées dans la région russe de Koursk depuis le 6 août utilisent du matériel occidental. Parmi les éléments employés : des véhicules de l’avant blindés français (VAB), un modèle que Paris a massivement fourni à Kiev ces derniers mois.
Du matériel militaire français est engagé sur le sol russe. À première vue, la phrase paraît anachronique, voire surréaliste. Mais, en ce mois d’août 2024, elle a bel et bien pris corps. Les troupes ukrainiennes qui, depuis le 6 août, se battent dans la région de Koursk manœuvrent en effet du matériel occidental et notamment des antiques véhicules de l’avant blindés (VAB) français.
Des VAB au triangle
La présence en Russie de ces blindés historiques de l’armée de terre tricolore est attestée par des photos publiées par des experts du renseignement en sources ouvertes. Sur l’une d’elles, publiée le 12 août par le compte X OSINTtechnical, qui s’est spécialisé dans le matériel militaire, on voit nettement un de ces VAB arborer le triangle que portent tous les véhicules engagés dans l’opération ukrainienne vers Koursk.
Le même jour, le compte French Aid to Ukraine diffusait lui une photo d’un VAB-sanitaire marqué de ce fameux triangle. Il avait auparavant relayé une vidéo dans laquelle l’un de ces véhicules, endommagé par les combats, était remorqué à l’arrière de la ligne de contact.
Plusieurs centaines de VAB français en Ukraine
De premiers exemplaires de ces véhicule blindés, qui semblent particulièrement appréciés par les Ukrainiens, ont été fournis par la France dès les premiers mois du conflit. Des véhicules de ce type avaient ainsi été repérés en juin 2022 en Slovaquie, alors qu’ils étaient acheminés vers l’Ukraine.
Plusieurs autres vagues de livraison avaient ensuite eu lieu, si bien qu’en mars 2024, le ministère des Armées indiquait que 250 VAB avaient déjà été fournis à l’Ukraine. Plusieurs autres centaines de ces véhicules devraient être livrés à l’Ukraine d’ici la fin de l’année 2025.
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Des véhicules remplacés dans l’armée de terre française
Si ces livraisons de VAB sont si massives, c’est que l’armée française n’en a plus besoin. Après plusieurs décennies de bons et loyaux services, au cours desquels ils auront notamment servi en Afghanistan, en Bosnie ou au Mali, ces véhicules sont en effet en train d’être remplacés par un modèle plus moderne, le Griffon.
Le déploiement de ces véhicules, qui servent également de transports de troupes et de véhicules de reconnaissance armée, a débuté en 2020. Leurs premiers déploiements en opération datent de 2021. À terme, ils remplaceront les quelque 2 500 VAB dont l’armée française disposait encore à cette date.
L’annonce faite par Narendra Modi concernant l’acquisition de 26 Rafale M et B pour l’Indian Navy, avait été l’un des moments forts de la visite du premier ministre indien en France, à l’occasion des célébrations du 14 juillet 2023.
Depuis, toutefois, les autorités indiennes et françaises ont été très discrètes quant aux progrès réalisés dans les négociations, qui portent également sur l’achat de trois sous-marins Scorpene de la classe Kalvari supplémentaires.
Il semble, désormais, que cette dynamique soit proche de sa conclusion. En effet, selon la presse indienne, citant des déclarations d’officiels de la Marine indienne, les négociations ce sujet auraient progressé ces dernières semaines, et le contrat pourrait être signé, d’ici à la fin de l’année 2024.
Sommaire
Les négociations pour l’acquisition des Rafale M et B par la Marine indienne retardées de plusieurs mois par les élections législatives indiennes
Les négociations entre Paris et New Delhi, au sujet des deux contrats majeurs annoncés lors de la visite de Modi en France autour du 14 juillet 2023, ont été, selon les sources, ralenties, voire suspendues, par la campagne électorale pour les élections législatives indiennes, qui se sont tenus les 19 avril et 1ᵉʳ juin 2024.
Si la coalition de l’Alliance Démocratique Nationale (NDA) a conservé, à l’issue des élections, une majorité à la chambre basse indienne, avec 293 des 543 sièges de députés, sa principale force politique, le Bharatiya Janata Party de Narendra Modi, sa principale composante, n’a obtenu que 240 sièges, contre 300 lors de la précédente magistrature, perdant de fait la majorité absolue parlementaire.
Quoi qu’il en soit, Narendra Modi a conservé, pour cinq ans, son poste de premier ministre à la tête du pays, permettant aux négociations de reprendre avec Paris, que ce soit au sujet des Rafale, et des trois sous-marins Kalvari, pour la Marine indienne.
À ce sujet, selon la presse indienne, des progrès significatifs ont été réalisés ces dernières semaines, permettant de fixer, notamment, la configuration des 22 Rafale M et des 4 Rafale B indiens, comme l’ensemble des services, munitions et pièces détachées, qui accompagneront les chasseurs indiens au sein de l’Indian Navy.
Un contrat de 4 Md€ et un appareil proche du standard des Rafale B/C des forces aériennes indiennes
Selon les sources citées, le contrat définitif, d’un montant proche de 4 Md€, pourrait être finalisé dans les mois à venir, pour une signature avant la fin de l’année 2024.
Il faut, bien évidemment, prendre ces affirmations avec une certaine réserve. En effet, la presse indienne a souvent relayé des affirmations excessivement optimistes, ne s’étant pas vérifiées dans les faits. En outre, la situation politique tendue en France, peut, à son tour, ralentir les négociations avec New Delhi.
Pour autant, l’Inde étant un partenaire stratégique pour Paris, ne faisant pas l’objet de dissensions politiques au sein des forces en présence lors des élections législatives à venir, on peut supposer que si délais, il y a, ceux-ci seront limités, personne n’ayant intérêt à faire dérailler une telle commande de la part de New Delhi.
Parmi les informations diffusées par la presse indienne, figure notamment les évolutions des Rafale M indiens, vis-à-vis des appareils en service au sein de la Marine nationale. En effet, les chasseurs embarqués indiens emporteront des équipements supplémentaires, pour l’essentiel identiques à ceux qui équipent les Rafale B/C de l’Indian Air Force.
Il s’agit, notamment, du viseur à casque, certainement le Targo II de l’israélien Elbit System, des systèmes de brouillages et de guerre électronique spécifique, ou encore une évolution des logiciels pour permettre la mise en œuvre à bord des porte-avions indiens.
En termes d’armement, il est aussi probable que la panoplie qui évoluera sous les ailes des Rafale Marine indiens, sera proche de celle de l’IAF, avec des missiles air-air METEOR et MICA (NG ?), des bombes A2SM Hammer, des missiles de croisière SCALP et, version navale oblige, des missiles antinavires AM39 Exocet, observé sous l’aile du Rafale M envoyé en Inde pour les essais d’utilisation du Ski Jump.
Le Rafale M indien opèrera à partir de tous les porte-avions de la Marine indienne
Si l’article de theprint-in, n’est pas très détaillé au sujet de cette configuration, n’abordant pas, par exemple, le standard de livraison de Rafale M indien (certainement F4.x, permettant une évolution vers F5), il donne toutefois une information intéressante, et même surprenante.
En effet, jusqu’ici, les Rafale de la Marine Indienne, étaient censés être mis en œuvre à bord de l’INS Vikrant, le porte-avions de conception et fabrication indienne, livré à l’Indian Navy en septembre 2022.
Or, dans l’article, il est précisé que les modifications logicielles demandées, permettront aux chasseurs embarqués de Dassault Aviation, d’embarquer à bord de tous les porte-avions indiens.
Cette déclaration suppose donc que les appareils pourront aussi être déployés à bord de l’INS Vikramaditya, un porte-aéronefs de conception soviétique appartenant à la classe Kiev, et profondément modifié pour mettre en œuvre des chasseurs embarqués à l’aide d’un tremplin Ski Jump et de brins d’arrêt.
Ceci laisse supposer que les Rafale M indiens pourraient, à termes, remplacer les MIG 29K qui forment le groupe aérien embarqué de ce porte-aéronefs de 45000 tonnes et de 284 mètres, construit dans les années 80, mais entré en service au sein de l’Indian navy en 2014, après dix années de transformation.
Une maintenance et une formation probablement mutualisée en partie avec les forces aériennes indiennes
Autre sujet d’intérêt détaillé dans l’article, la visite d’une délégation de la Marine indienne sur la base aérienne de Ambala, proche de la frontière Pakistanaise, qui abrite l’un des deux escadrons de Rafale de l’IAF.
L’objectif de cette visite était d’étudier les synergies possibles entre la Marine indienne et les forces aériennes indiennes, concernant la maintenance et la formation des équipages et personnels de maintenance des deux forces.
La proximité de configuration des versions terrestres et marines du Rafale indien, constituera, sans le moindre doute, un précieux atout dans ce domaine, y compris pour la gestion des stocks de pièces détachées et de munitions, ainsi que la régénération des appareils et des moteurs, avec, à la clé, d’importantes économies concernant les couts de possession des chasseurs.
Des négociations de bon augure pour le programme MMRCA 2
Ces similitudes entre les versions terrestres et navales, permettant des économies significatives en matière de couts de configuration des appareils désirés par les armées indiennes, ainsi que les synergies en matières de maintenance et de formation des appareils, y compris par l’industrie aéronautique indienne, déjà impliquée dans le processus, constituent de très sérieux points forts concernant les chances du Rafale de s’imposer dans la compétition MMRCA 2, pour le remplacement des Jaguar indiens.
Rappelons que cette compétition, lancée en 2018, concerne l’acquisition de 110 chasseurs bombardiers polyvalents moyens à destination de l’IAF, destinés à remplacer les Mirage 2000 et Jaguar, à partir de 2030. Elle fait suite à la compétition MMRCA, lancée en 2001, remportée en 2012 par le Rafale, mais annulé en 2015, après que Dassault Aviation et HAL, l’avionneur d’état indien, au sujet des procédures de fabrication et de garanties.
Le contrat a été remplacé par l’achat de 36 Rafale B et C, fabriqués en France, destinés à remplacer partiellement le retrait des MIG-27 et MIG-21 indiens, ainsi qu’à porter la composante aérienne de la dissuasion indienne.
Ce contrat de 8 Md€, prévoyait, notamment, l’évolution du Rafale en y intégrant certaines technologies exigées par l’IAF, comme le viseur à casque Tagos II israélien, ou le leurre tracté X-Guard. En outre, une base de maintenance, permettant d’assurer le soutien d’une flotte de 150 chasseurs, a également été construite.
Ces investissements ont certainement joué un rôle dans le choix indien de se tourner vers le Rafale M plutôt que vers le F/A-18 E/F Super Hornet proposé par Boeing, avec des couts sensiblement inférieurs concernant l’achat et la maintenance des appareils.
De la même manière, les infrastructures déployées autour de la première commande Rafale pour l’Indian Air Force, et l’effet de masse généré par la décision de l’Indian Navy de se tourner vers le Rafale M, auront une influence sensible considérant les couts d’acquisitions et de maintenance des 110 chasseurs du programme MMRCA 2.
En effet, en tenant compte de l’inflation, les économies potentielles attendues, concernant les investissements déjà réalisés, sur le programme MMRCA, représentent aujourd’hui 4 à 5 Md€. Rapporté à 110 cellules, ce montant représente un écart de prix de 36 à 45 m€ par appareil, mettant le Rafale B/C à un prix d’acquisition presque moitié moins élevé que le Typhoon et le F-15EX, 40 % de moins que le KF-21 Boramae, 30 % plus économique que le JAS 39 Gripen E/F et que le Su-35s, ce dernier ayant, toutefois, peu de chances d’être choisi, pour ne pas provoquer l’ire de Washington et le déclenchement de sanctions au travers de la législation CAATSA.
Sachant qu’autour de ce contrat, s’articulent également des négociations avec le français Safran, pour le développement d’un turboréacteur de nouvelle génération pour propulser les nouveaux chasseurs indiens, le Rafale fait, aujourd’hui, office de favori dans cette compétition, dont le statut et le calendrier demeurent cependant incertains.
Article du 27 juin en version intégrale jusqu’au 17 aout 2024
Comme dit l’adage, “mieux vaut prévenir que guérir”. Le Royaume-Uni a donc décidé de prendre les devants face à la possible arrivée d’une guerre qui prendrait racine dans l’espace.
La guerre de demain se passera vraisemblablement dans l’espace. Ou du moins elle pourrait en être originaire. C’est en tout cas ce que croit le Royaume-Uni qui a récemment décidé de faire construire, au Pays de Galles, un champ de 27 antennes radar dirigées vers l’espace lointain. Avec pour but de repérer les potentielles menaces qui pourraient s’abattre sur le pays ou sur des installations spatiales anglaises.
Des antennes capables de traquer de tous petits objets dans l’espace
La guerre est l’occasion pour les pays de démontrer leur savoir faire quant à la mise en place de certaines technologies militaires. Ainsi, il n’est plus forcément question d’afficher des équipements gigantesques, criants et donc repérables à des kilomètres. Non, la tendance serait en revanche à la miniaturisation, comme on peut le voir avec les drones par exemple.
Eh bien face à des petits objets pouvant provenir de l’espace lointain, le Deep Space Advanced Radar Capability (Darc), le réseau de 27 antennes, serait en mesure de repérer et de traquer des objets de la taille d’un ballon de football.
Et ce, à des distances très éloignées. En effet, le quotidien britannique The Guardian fait état de la possibilité de surveiller de tels petits objets, mais aussi des biens plus gros depuis l’orbite géostationnaire de la Terre soit à 36 000 kilomètres.
Ce réseau d’antennes prend place dans le cadre du partenariat international AUKUS entre l’Australie (A), le Royaume-Uni (UK) et les États-Unis (US) qui était décrit en décembre 2023 comme un moyen de protection contre la “guerre spatiale” d’après John Healey, secrétaire de la Défense (Ministre de la Défense en France)
“ Nous avons besoin de plus d’yeux rivés sur le ciel”
Bien que le projet d’installation de 27 antennes radar dans le Pembrokeshire au Sud-Ouest du Pays de Galles fasse des mécontents parmi la population locale, il est soutenu par le gouvernement et par des universitaires.
Pour défendre son projet, John Healey parle du rôle important que tient l’espace dans le quotidien des anglais, mais aussi de l’importance de l’intégrer dans un programme de défense spatiale.
“L’espace est utilisé partout, de nos téléphones portables aux services bancaires. Il est aussi utilisé par la défense britannique pour effectuer des tâches vitales telles que le soutien des opérations militaires, la navigation des forces et la collecte de renseignements.” peut-on lire dans The Guardian.
De son côté, le docteur Mark Hilborne du King’s College London et appartenant au Department of Defence Studies (Département des études de défense), prône le fait qu’une menace spatiale pèse sur le monde et qu’il faut que le Royaume-Uni soit prêt à y répondre.
“L’augmentation de l’activité militaire et de la belligérance dans l’espace suscite des inquiétudes. Nous avons besoin de plus d’yeux rivés vers le ciel.” rapporte The Guardian.
60 000 satellites en orbite en 2030
L’une des raisons qui pousse également le Royaume-Uni à se doter rapidement d’un système de repérage dans l’espace lointain, c’est le nombre croissant de satellites en orbite terrestre.
En effet, en se basant sur un rapport du gouvernement publié le 16 mai 2024, on apprend que le nombre de satellites actifs dans l’espace va vivre une explosion. Si en 2020, il y avait 3256 satellites en orbite, en avril 2024, on en comptait plus de 9000. D’après les estimations, à l’horizon 2030, le nombre de satellites actifs pour être multiplié par plus de 6 et atteindre les 60 000.
Et savez-vous à qui appartiennent plus de 6000 satellites sur tous ceux présents actuellement en orbite ? Elon Musk, enfin à son entreprise Starlink plus précisément, d’après Ouest France. Le milliardaire tient à honorer sa promesse de délivrer un internet mondial haut débit partout dans le monde. Cela demande donc beaucoup d’appareils en orbite terrestre.
L’Amérique du Sud a longtemps été considérée comme la « chasse gardée » des États-Unis, tant sur le plan politique qu’économique et culturel. Qu’en est-il désormais ?
Cette influence, consolidée au cours du XIXe siècle avec la doctrine Monroe et accentuée par la politique du « Big Stick » au début du XXe siècle, a continué de se manifester de diverses manières pendant la Guerre froide et même après. Cependant, ces dernières décennies, plusieurs signes indiquent un possible recul de cette domination américaine en Amérique du Sud. La montée en puissance de nouvelles puissances économiques, l’émergence de gouvernements locaux cherchant à s’affranchir de l’influence étasunienne et la diversification des influences culturelles sont autant de facteurs qui suscitent une réflexion sur cette dynamique.
Historique de la présence étatsunienne en Amérique du Sud
Depuis le XIXe siècle, les États-Unis ont toujours été très attentifs à l’Amérique Latine, et cela débute en 1823 avec l’instauration de la « Doctrine Monroe ». Grâce à cette dernière, les États-Unis se déclarent responsables de la protection de l’ensemble du continent américain, ce qui renforce leur force militaire. Au XXe siècle, cette volonté de préserver le continent persiste, mais la menace n’est plus d’Europe, mais émerge de l’Union Soviétique. D’où la réinterprétation de la doctrine Monroe en 1947 pour laisser place à la doctrine Truman. Cependant, dès les années 1950 la protection des Etats-Unis, est remise en question, voire contestée dans certains pays d’Amérique Latine.
En fait, les pays d’Amérique latine ne demandent aucune protection et certains y voient une tentative tout à fait voilée des États-Unis d’étendre leur contrôle sur l’ensemble du Nouveau Monde. A vrai dire, les États-Unis sont intervenus dans la politique des pays d’Amérique latine. En réaction, cela a conduit certains pays, comme Cuba, à se tourner vers l’URSS : en 1961, les États-Unis ont planifié l’invasion de la Baie des Cochons pour renverser le régime de Fidel Castro. Un an plus tard, en 1962, la crise des fusées de Cuba éclate.
Avec la fin de la guerre froide et la consolidation de la démocratie en Amérique latine, les relations avec les États-Unis se sont stabilisées et se trouvent aujourd’hui à un carrefour important. Toutefois, l’influence des États-Unis est contestée à différents niveaux. Les pays d’Amérique latine se développent et de nouvelles puissances telles que le Brésil, l’Argentine et le Mexique émergent. Par conséquent, certains pays remettent en question la prétention des États-Unis au leadership régional.
En outre, un anti-américanisme féroce s’est développé, mené en particulier par Hugo Chávez lorsqu’il était au pouvoir. Chef militaire du Venezuela de 1998 à sa mort en 2013, Chavez a fait une série de déclarations enflammées contre Washington et s’est finalement allié au régime de Castro à Cuba. Cela a conduit à la création de l’ALBA (Ariansa Bolivariana Palos Pueblos de Nuestra America) en 2004 dont l’objectif était d’unir les pays signataires d’Amérique latine dans une alliance anti-américaine. Cependant, seuls 10 pays, dont le Venezuela, le Nicaragua et Cuba, ont choisi de rejoindre l’ALBA. La plupart de autres pays souhaitent assouplir leurs relations avec les Etats-Unis et établir un partenariat avec Washington, notamment sur le plan commercial. C’est pourquoi le Mexique a décidé en 1994 de s’allier aux États-Unis par le biais de l’ALENA et de l’accord Canada-États-Unis-Mexique.
Donald Trump et l’offensive sud-américaine
L’Amérique latine a fait face aux vents de Washington à plusieurs reprises dans son histoire contemporaine : l’agressivité ou simplement l’indifférence et le mépris de la diplomatie nord-américaine, symbolisés par la politique de négligence modérée de Kissinger/Nixon entre 1969 et 1974, ont soudé les peuples latino-américains. Le « latino-américanisme » a, un temps, reflété la volonté d’émancipation politique symbolisée par l’accord de Viña del Mar de 1969.
Dès le lendemain de sa prise de fonction le 20 janvier 2017, Donald Trump passe à l’offensive en lançant directement la construction du mur sur la frontière mexicaine. Il promet que le Mexique en assumera le coût estimé à quinze milliards de dollars. La réaction du président mexicain Peña Nieto est prompte : il annule sa visite à Washington initialement programmée pour le 31 janvier. Soucieux de tenir ses promesses de campagne, Trump fait de la relation avec le Mexique une priorité de son agenda politique.
Le Mexique présente en effet deux caractéristiques qui convergent dans l’esprit des électeurs de Trump : ce pays a largement bénéficié́ des délocalisations industrielles causées par l’ALENA et continue à exercer sur les Etats-Unis une pression migratoire insupportable. Cette double mobilité́, des entreprises vers le sud et des migrants vers le nord, est censée accentuer les pressions à la baisse sur les salaires aux Etats-Unis. La renégociation de l’ALENA et la construction d’un mur doivent permettre aux Etats-Unis de retrouver leur dynamisme économique perdu depuis des décennies, et de compenser les pertes de pouvoir d’achat de la classe ouvrière. De même concernant Cuba, les engagements pris par Trump durant sa campagne n’ont pas non plus été suivis d’effets tangibles en 2017. Le 16 juin, dans un discours prononcé à Miami devant les opposants historiques au régime castriste, Trump a remis en cause l’ensemble de la politique de son prédécesseur. Dans la foulée, il a limité les possibilités de voyager dans l’ile et interdit aux entreprises américaines de faire des affaires avec des partenaires liés à l’armée (très présente dans le secteur du tourisme). Même si ces décisions risquent de freiner sérieusement le boom du tourisme en provenance des Etats-Unis qu’avait enregistré Cuba en 2016, Trump ne revient pas sur le rétablissement des relations diplomatiques ni sur la politique migratoire, et ne retourne pas non plus à l’époque des sanctions économiques sévères. La coopération dans le domaine de la lutte contre le narcotrafic est quant à elle préservée. Face à cette situation, le président Trump a tergiversé et multiplié les maladresses et ces prises de position ont été critiquées dans toute l’Amérique latine. Ses errements ont contrasté avec la détermination de l’Organisation des États Américains (OEA), mais des limites à son action sont vite apparues. Rien que durant la crise politique et les soulèvements au Venezuela, les Etats-Unis sont restés discrets sur la situation mais ont souvent accusé par le gouvernement vénézuélien de s’ingérer dans ses affaires intérieures. Washington est resté silencieux à l’exception de la déclaration en 2017 qui suggérait de nombreuses options pour le Venezuela, y compris « des options militaires si nécessaire ».
Alors que la volonté des États sud-américains était de développer le libre-échange, Trump s’est tourné vers le
protectionnisme. Quand l’ancien président argentin Mauricio Macri s’était rendu en visite officielle au Brésil, le Mercosur a alors été rétabli. Même le Mexique a été invité à se rapprocher du Mercosur en vue d’annuler l’ALENA. De plus, le secrétaire général de l’Association latino-américaine d’intégration (ARADI) avait proposé un accord économique et commercial global intégrant tous les accords existants, y compris le Système d’intégration centraméricain (SICA). Les déclarations des dirigeants qui s’ensuivirent avaient une portée antiprotectionniste, visant à positionner l’Amérique du Sud contre le président Trump. Cette intense activité diplomatique est le produit de l’isolement des États-Unis sous la présidence Trump et de l’absence de leadership du Brésil, libérant les puissances moyennes (notamment le Mexique et l’Argentine). Elle reflète également le changement politique en Amérique du Sud, qui envisage à nouveau le développement du libre-échange dans la région.
La volonté multilatéraliste de Joe Biden mis à mal par des difficultés d’intégration régionales et des changements socio-économiques fluctuants
Lorsque Joe Biden est arrivé au pouvoir en janvier 2021, de par son expérience en tant qu’ancien président de la commission des affaires étrangères du Sénat (1997-2008) et envoyé permanent du vice-président Barack Obama en Amérique latine (2008-2016), il était jugé comme un fin connaisseur de l’Amérique latine. La « pression maximale » sur Cuba et le Venezuela (et accessoirement le Nicaragua) dans le but d’un changement de régime dans ces pays « socialistes » dont ils font partie, après quatre années de mandat de Donald Trump caractérisées par une indifférence stratégique à l’égard des pays latino-américains, une pression commerciale et une émigration ponctuelle ou constante (Argentine, Brésil, Mexique et les pays du ” Triangle du Nord “) et, selon les termes de l’ancien secrétaire d’État, John Bolton, une « troïka de despotes ».
Le Mexique, l’Amérique centrale et les Caraïbes constituent le cœur de la feuille de route latino-américaine élaborée par Joe Biden et son administration. Cette région du sous-continent est le bénéficiaire le plus direct de l’influence économique et géopolitique traditionnelle des États-Unis. Pour Joe Biden, cette approche est un plan et un moyen de restaurer l’hégémonie américaine. Dans ce contexte, Joe Biden envisage une nouvelle relation avec l’Amérique centrale et les Caraïbes basée sur la résolution conjointe de problèmes directement liés aux priorités locales. Les questions migratoires sont donc un axe central de son projet pour la sous-région.
Conformément à la promesse de Joe Biden de remporter près des deux tiers du vote latino lors des élections du 3 novembre 2020, le nouveau président américain a soumis au Congrès, dès le premier jour de son mandat, un nouveau projet de loi, l’American Citizenship Act of 2021, visant à « moderniser le système d’immigration américain ». En rupture radicale et spectaculaire avec les politiques de son prédécesseur, et notamment celles prônées par le camp républicain et de nombreux sympathisants des puissants mouvements Alt-Right et suprémacistes blancs, cette loi prévoit une nouvelle « voie d’accès à la citoyenneté » ou, à terme, au droit de vote pour les quelque 11 millions d’immigrés clandestins (principalement des Centraméricains comme le Salvador, le Guatemala et le Honduras, des Mexicains et des Caribéens comme Haïti) qui vivent et travaillent aux États-Unis (notamment dans les secteurs de l’agriculture, des travaux publics, des services et de la restauration).
Ces derniers mois encore, l’administration Biden s’est appuyée sur des accords avec le Mexique pour augmenter le nombre de demandes d’asile et de nouvelles restrictions sur le passage des frontières, alors que le président Trump avait cherché à bloquer toute entrée.
Mais la question reste complexe et doit faire face à la propagande médiatique qui s’empare du sujet à chaque élection. Tous les chercheurs, les organisations professionnelles et quatre administrations successives ont appelé le Congrès à adopter une loi. Cependant, le Congrès n’a pas réussi à agir sur cette question en raison de la polarisation politique et de la transformation du Parti républicain par le président Trump.
De plus, cette administration avait confirmé le lancement du « Plan Biden pour construire la sécurité et la prospérité en partenariat avec les peuples d’Amérique centrale ». Ce « Plan Biden » était l’une des pierres angulaires de la stratégie latino-américaine du nouveau président lors de la campagne électorale. Dans la tradition de la diplomatie de Washington, le plan affirme que « l’hémisphère occidental, ou en d’autres termes l’ensemble du continent américain, de la pointe nord du Canada à la pointe sud du Chili, a le potentiel d’être sûr, démocratique et prospère ».
Poursuivant la logique de l’Alliance pour le progrès de 2014, abolie par Donald Trump, le plan prévoit l’allocation de 4 milliards de dollars américains8 sur quatre ans à trois pays du « Triangle du Nord », où a lieu la majeure partie de la migration de la région vers les États-Unis. Conçu pour réduire les migrations en provenance du Salvador, du Guatemala et du Honduras de manière « efficace et durable », le « plan Biden » prétend s’attaquer aux problèmes « sous-jacents » de ces phénomènes : la pauvreté, la violence, le crime organisé, la corruption, le dysfonctionnement des institutions publiques et le changement climatique. Son objectif est de proposer une « stratégie globale » qui permettra à terme à ces pays de se transformer en sociétés de « classe moyenne ». Dans cette optique, le « Plan Biden » organise la mobilisation des fonds américains, l’implication des différentes administrations et agences gouvernementales impliquées sur le terrain, ainsi que la participation du secteur privé américain et des bailleurs de fonds internationaux. En contrepartie, les pays bénéficiaires doivent s’engager à mettre en œuvre, promouvoir et cofinancer les réformes identifiées et exigées par Washington et ses partenaires pour lutter contre la corruption, la pauvreté, le crime organisé et la violence en développant leurs propres ressources (réforme fiscale) ; également en termes de gouvernance d’entreprise et d’attractivité économique pour faciliter l’afflux d’investissements étrangers. Sur ce dernier point, le Président a inclus cet objectif dans la promotion de la « transition vers une énergie propre, l’adaptation au changement climatique et la résilience ».
La politique latino-américaine de Joe Biden rencontre des difficultés en Amérique latine, en particulier dans le cône sud, en raison du recul des processus d’intégration régionale et de l’absence de leadership politique régional. Les dynamiques de coopération ont eu du mal à voir le jour à cause des divisions géopolitiques du fait des choix économiques, commerciaux, sanitaires, sécuritaires et climatiques faits. C’est dans ce contexte général que Joe Biden a pris position sur deux dossiers sensibles : Cuba et le Venezuela. Ces deux pays ont exprimé le souhait de réfléchir à l’ère Trump et d’avoir un dialogue ouvert.
En ce qui concerne le Venezuela, le nouveau gouvernement, par l’intermédiaire de son nouveau secrétaire d’État Antony Blinken, a clairement indiqué qu’il considérait Nicolás Maduro comme un « dictateur brutal » et que, contrairement à l’Union européenne, il continuerait à reconnaître Juan Guaido comme président intérimaire du Venezuela jusqu’à la tenue d’élections « libres et équitables ». Tant que cet objectif n’est pas atteint, le nouveau gouvernement pourrait modifier sensiblement son approche du Venezuela. Il mettra l’accent non plus sur l’intervention politique directe (comme il l’a fait sous Donald Trump) mais sur l’action humanitaire et permettra aux Vénézuéliens qui se trouvent aux États-Unis en tant qu’immigrés clandestins de bénéficier des nouvelles dispositions du gouvernement en matière d’asile. Les dirigeants vénézuéliens ne sont pas des activistes économiques.
Quant à Cuba, l’ancien secrétaire d’État, Mike Pompeo, a réintégré à la dernière minute le 11 janvier 2021 sur la liste des « États soutenant le terrorisme » (retiré de la liste par le président Barack Obama en 2015), après quatre années de renforcement constant des mesures restrictives unilatérales, y compris extraterritoriales. L’administration Biden, quant à elle, est prête à avancer avec prudence car Joe Biden est revenu à la doctrine Obama de normalisation des relations avec Cuba et a annoncé son intention de lever certaines restrictions imposées par son prédécesseur Donald Trump sur les voyages à Cuba des Américains et sur les envois de fonds à la famille restée au pays par les Cubains vivant aux États-Unis. Toutefois, des partisans d’un changement de régime à Cuba se trouvent aussi bien dans le camp démocrate que dans le camp républicain du président.
Une moindre présence en Amérique latine : de l’interventionnisme intense à l’influence
Les États-Unis continuent de jouer un rôle-clé en Amérique latine à travers la diplomatie et la sécurité : la visite du Secrétaire d’État américain Antony Blinken, en décembre 2023, en Colombie et au Chili illustre cet engagement. En Colombie, Blinken a rencontré le nouveau président de gauche, Gustavo Petro, pour établir un cadre de collaboration sur la sécurité, notamment en ce qui concerne la « paix totale » et la lutte contre le narcotrafic. Cette rencontre vise à harmoniser les objectifs américains avec les priorités locales sous la nouvelle administration. Sur le plan économique, les États-Unis cherchent à renforcer leur influence par le biais de l’Alliance pour la prospérité économique des Amériques, lancée par Joe Biden dès 2022. Cette initiative vise à contrer l’influence croissante de la Chine dans la région et à réduire l’émigration vers les États-Unis en favorisant l’intégration économique régionale. Une stratégie de « nearshoring » est également promue, encourageant la relocalisation de centres de production en Amérique latine, notamment au Mexique, pour diminuer la dépendance envers l’Asie. Les États-Unis maintiennent aussi des relations commerciales solides avec des pays comme la Colombie et le Chili : la Colombie, par exemple, exporte une part importante de ses produits vers les États-Unis, qui restent un partenaire commercial majeur.
Les relations entre Washington et le Chili sont importantes surtout avec la montée en puissance du géant asiatique dans le pays andin, et notamment après le retour de Chine du président chilien Gabriel Boric en octobre 2023. L’administration américaine a également rédigé un rapport stratégique indiquant qu’elle souhaite étendre son influence et renforcer ses relations avec le Chili. Mais la complicité des États-Unis dans l’établissement de la dictature de Pinochet dans les années 1970 suscite encore le cynisme chez certains Chiliens et leur méfiance à l’égard de l’agenda américain dans le pays. La crise sociale de 2019 a également donné naissance à une génération d’hommes politiques désireux de changer le modèle hyper-néolibéral du Chili, calqué sur celui des États-Unis, qui crée d’énormes inégalités sociales. Il est vrai que, depuis plusieurs années, le Chili a renforcé son partenariat avec la Chine, notamment au niveau économique. Le géant asiatique est aujourd’hui le premier partenaire commercial du Chili, notamment pour l’exportation de cuivre, la principale ressource du pays. Cependant, les États-Unis conservent toujours une influence non négligeable puisqu’en 20 ans, les exportations du Chili vers les États-Unis ont triplé, notamment grâce à l’accord de libre-échange. Les relations en termes de niveaux académiques, culturels et touristiques sont également très élevées. Pour sa part, le Chili souhaite que ses relations, que ce soit avec les États-Unis ou la Chine, en récoltent le plus grand bénéfice. Le pays a vraiment besoin d’investissements majeurs, notamment dans le secteur énergétique, car il ambitionne de devenir le premier producteur mondial de lithium et mise tout sur l’hydrogène vert. Ce sont ces investissements que Gabriel Boric recherchait en Chine en octobre dernier et désormais aux Etats-Unis avec Joe Biden.
Malgré ces efforts, le leadership américain en Amérique latine montre des signes de déclin. Un exemple marquant est le boycott du Sommet des Amériques par le président mexicain, suite à l’exclusion de Cuba, du Venezuela et du Nicaragua. À l’origine, les Etats-Unis ont rayé de ce sommet rassemblant tous les pays du continent pour des raisons de violation des principes démocratiques et des droits humains au sein de ces pays. Ce boycott coûte cher aux efforts entrepris par Joe Biden qui souhaitait affirmer, depuis son élection, son leadership régional. Alors que Joe Biden a souhaité concentrer sa politique étrangère dernièrement sur l’Europe avec la guerre en Ukraine et l’Asie, la Chine gagne du terrain et investit massivement en Amérique du Sud. Michael Shifter, chercheur à l’organisme Inter-American Dialogue, souligne notamment que « les Etats-Unis ont encore beaucoup de soft-power, mais leur influence politique et diplomatique décline chaque jour ». Justement, le Président américain avait décidé d’être en rupture avec son prédécesseur Donal Trump et de finalement levé certaines sanctions à l’encontre de Cuba et d’être plus ouvert. Et justement, le Sommet des Amériques venait avancer une nouvelle ambition de Biden pour l’Amérique latine mais certains opposants critiquent que cela « n’est pas la bonne voie ».
En ce sens, la politique américaine de promotion de la démocratie est de plus en plus critiquée. Les États-Unis sont accusés de traiter de manière sélective certains pays, excluant Cuba et le Venezuela tout en maintenant des relations avec des nations comme l’Arabie Saoudite. Cela affaiblit la crédibilité des États-Unis en tant que promoteurs de la démocratie en Amérique latine.
L’influence croissante de nouveaux acteurs dans la région posent problèmes à Washington : la Chine, mais également la Turquie, sans oublier la Russie, notamment au Nicaragua. Les relations avec l’Europe se sont densifiées, mais sont distancées sur le plan économique par le nouveau poids de Beijing. Un nouvel engagement sur des bases contractuelles entre les États-Unis et ses voisins latino-américains semble indispensable pour une relation partagée et plus apaisée, alors même que la pandémie bouscule l’ordre établi. Enfin, les crises sociales récentes, comme celle au Chili en 2019, ont favorisé l’émergence de nouveaux leaders politiques qui remettent en question le modèle néolibéral soutenu par les États-Unis. Cette dynamique sociopolitique entraîne une méfiance accrue à l’égard de l’influence américaine.
Pour aller plus loin ;
BERG, Eugène. « Livre – LA politique des Etats-Unis en Amérique latine : interventionnisme ou influence ? », Revue Conflits, 01/08/2020.
« Biden poursuit son opération séduction auprès de l’Amérique latine », l’Orient-le Jour, AFP, 03/11/2023.
DABÈNE, Olivier. L’effet Trump en Amérique latine: une nouvelle donne régionale?. Les Études du CERI, 2018, 233-234, pp.4 – 8.
DROUHAUD, Pascal. « L’Amérique latine : enjeux et perspectives internationales », Revue Défense Nationale, n°855, 10/2022, pp. 103 à 110.
FONTAINE, Marion. « Au Sommet des Amériques, l’effritement de l’influence des Etats-Unis sur le continent », Géo, 07/06/2022.
KANDEL, Maya. « Le virage sud-américain de Joe Biden met en furie les républicains », Mediapart, 02/05/2023.
OVARLEZ, Lola. « Biden-Trump, même combat en Amérique latine », L’Opinion, 23/02/2024.
STEELS, Emmanuelle. BENRABAA, Najet. DERROISNÉ, Naïla. « Sommet des Amériques : Joe Biden soigne les relations avec ses voisins », France Info, 03/11/2023.
VAGNOUX, Isabelle. « Les Etats-Unis et l’Amérique du Sud : des voisins distants », Politique Etrangère, Institut Français des Relations Internationales, 2013/4, pp. 65 à 76.
VENTURA, Christophe. « Etats-Unis-Amérique latine : quelles perspectives après l’élection de Joe Biden ? », Note d’analyse réalisée par l’IRIS pour le compte de l’Agence française de Développement,02/2021.
(*) Athénaïs Jalabert-Douryest actuellement étudiante en relations internationales à l’ILERI et stagiaire au sein de la revue Espritsurcouf. Elle se passionne notamment sur les sujets de sécurité internationale, plus particulièrement dans les zones géographiques des Amériques et de l’Europe.
L’incursion ukrainienne en cours au nord de Sumy, dans la région russe de Koursk (sud-ouest de la Russie), suscite bien des questions dont les réponses tardent tant la discrétion (voire la confusion) règne dans les deux camps.
Les autorités de Kiev observent, pour leur part, un mutisme inhabituel : personne ne reconnait officiellement l’existence de cette opération et les hauts responsables se refusent à tout commentaire, même sous couvert de l’anonymat.
Du côté russe, d’où sont venus les premiers rapports faisant état d’une incursion ennemie, les informations précises sont rares. Selon Moscou, des forces armées venant d’Ukraine ont lancé mardi matin, une attaque dans la région de Koursk dans le sud-ouest de la Russie; l’Ukraine aurait engagé un millier d’hommes et quelques dizaines de chars et autres véhicules blindés, soutenus par des avions de combat et de l’artillerie.
Cette attaque est jugée sérieuse puisque les autorités russes ont déclaré l’état d’urgence et que la Garde nationale russe a déclaré avoir renforcé la sécurité autour de la centrale nucléaire de Koursk, située à environ 60 km au nord-est de Soudja, une ville de 5 500 habitants à huit kilomètres de la frontière ukrainienne. Soudja abrite le dernier point de transbordement opérationnel du gaz naturel russe vers l’Europe via l’Ukraine.
Un air de remake
Le scénario rappelle de précédentes incursions en territoire russe. Effectivement, des combattants en provenance d’Ukraine ont déjà effectué plusieurs brèves incursions en Russie, revendiquées par des unités prétendant être composées de Russes combattant du côté ukrainien, à savoir le « Corps des volontaires russes » et la « Légion pour la liberté de la Russie ». Ainsi, à la mi-mars, pendant les élections russes, des groupes d’assaut ukrainiens ont tenté à plusieurs reprises de s’emparer de territoires dans la région voisine de Belgorod,
Une ampleur inédite
Toutefois, l’attaque en cours paraît inhabituelle en raison de son ampleur supposée et parce qu’elle semble impliquer des troupes régulières ukrainiennes.
Analyste militaire basé à Kiev, Serguiï Zgourets a déclaré à l’AFP que « les photos montrant la destruction d’équipements russes et ukrainiens, des hélicoptères, le recours à l’aviation, l’utilisation d’artillerie des deux côtés » étaient les signes d’une opération militaire d’ampleur.
Selon l’Institute for the Study of War (ISW), les troupes ukrainiennes ont avancé jusqu’à dix kilomètres à l’intérieur du territoire russe. Cette poussée s’est concentrée sur le hub logistique de Soudja.
Quels motifs, quelles motivations?
Les objectifs de cette opération ne sont pas encore clairs. L’intérêt d’une telle manœuvre est même parfois mis en doute par des commentateurs
Une telle incursion pourrait avoir un effet psychologique et remonter le moral des Ukrainiens qui voient leur armée à la peine dans le Donbass.
Certains observateurs affirment que si l’Ukraine parvenait à conserver ces pas du territoire ruse, elle pourrait en faire une carte à jouer face à Moscou dans le cadre d’hypothétiques négociations de paix.
Pour d’autres experts (et ce sont les plus nombreux), l’incursion pourrait servir à attirer des réserves russes et éloigner celles-ci de la région ukrainienne de Kharkiv (nord-est), où la Russie a lancé une offensive en mai. « A en juger par l’échelle et l’intensité de l’opération ukrainienne, tôt ou tard, l’ennemi sera forcé de retirer des troupes d’autres théâtres d’opérations », note ainsi Kostiantyn Machovets cité par l’AFP.
L’annonce ce début août 2024 du lancement de la constellation Qianfan par la Chine marque un tournant majeur dans la guerre des étoiles moderne. Avec ce projet, Pékin entend non seulement concurrencer les initiatives occidentales comme Starlink de SpaceX, mais aussi renforcer ses capacités militaires et stratégiques dans l’espace.
Une constellation de satellites qui pourra avoir un usage militaire
Le déploiement de la constellation Qianfan, orchestré par l’entreprise publique Shanghai Spacecom Satellite Technology (SSST), illustre parfaitement la stratégie militaire de la Chine. Le 6 août 2024, les 18 premiers satellites ont été placés en orbite basse (LEO – Low Earth Orbit), amorçant ainsi une série de lancements qui devraient aboutir à la mise en orbite de plus de 15 000 satellites d’ici 2030.
Les satellites en orbite basse offrent des avantages bien connus pour les opérations militaires : leur proximité relative de la Terre permet une transmission de données plus rapide et une réduction des temps de latence, des facteurs déterminants pour les communications et les systèmes de défense.
La constellation Qianfan repose sur des technologies de pointe développées par SSST. Les satellites déployés sont équipés de systèmes de communication sécurisés et de dispositifs de surveillance sophistiqués, capables de détecter et d’analyser des signaux électroniques en provenance de diverses sources.
Surveillance et contrôle de l’espace
L’une des principales motivations derrière le développement de la constellation Qianfan est potentiellement la surveillance avancée. En déployant un nombre aussi important de satellites, la Chine pourra surveiller en temps réel les mouvements militaires et les activités stratégiques dans différentes régions du globe.
En effet, l’Armée populaire de libération (APL) a souligné à plusieurs reprises les risques posés par les constellations de satellites occidentales, notamment dans le contexte de la guerre en Ukraine durant laquelle la constellation Starlink d’Elon Musk a été déployée pour aider les troupes ukrainiennes. La possibilité de perturber ou de neutraliser ces satellites en cas de conflit est désormais une priorité pour Pékin, qui cherche à assurer une supériorité dans le domaine spatial.
Implications globales et risques de conflit
Le déploiement de Qianfan a des répercussions considérables pour l’équilibre des forces mondiales. En renforçant ses capacités de communication et de surveillance, la Chine se positionne comme un acteur incontournable de la guerre électronique et du renseignement spatial. En parallèle, la Chine a investi massivement dans des lanceurs réutilisables, similaires à ceux utilisés par SpaceX, afin de réduire les coûts et d’augmenter la fréquence des lancements.
Cependant, cette montée en puissance n’est pas sans risques. L’extension des capacités spatiales chinoises pourrait intensifier la militarisation de l’espace, poussant d’autres nations à développer des technologies similaires pour maintenir un équilibre stratégique. Les tensions géopolitiques pourraient s’aggraver, notamment avec les États-Unis et leurs alliés, qui voient dans ce déploiement une menace potentielle à leur propre suprématie spatiale.
Paolo Garoscio
Journaliste chez EconomieMatin. Ex-Chef de Projet chez TEMA (Groupe ATC), Ex-Clubic. Diplômé de Philosophie logique et de sciences du langage (Master LoPhiSC de l’Université Paris IV Sorbonne) et de LLCE Italien.